0315 Pour faire un homme… (partie 2).

- Par l'auteur HDS Fab75du31 -
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Récit libertin : 0315 Pour faire un homme… (partie 2). Histoire érotique Publiée sur HDS le 21-05-2022 dans la catégorie Entre-nous, les hommes
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0315 Pour faire un homme… (partie 2).
La porte d’entrée vient tout juste de se refermer derrière le boblond et Jérém s’allume une clope sans même prendre la peine de s’approcher de la fenêtre. Il fume en silence. Il a l’air épuisé. Mais surtout, contrarié. J’ai l’impression que c’est le refus d’Ulysse de rester passer la nuit à l’appart qui l’a mis dans cet état. Est-ce qu’il avait envie que son coéquipier partage notre nuit, notre lit, notre plaisir, comme d’autres gars l’ont fait par le passé ? Est-ce qu’il est déçu de ne pas avoir été plus clair, de ne pas avoir osé ?

« Ça va, P’tit Loup ? j’essaie d’établir un contact.
— Je suis naze.
— Il est vraiment sympa Ulysse.
— Ouais…— T’es contrarié parce qu’il n’est pas resté dormir ? j’y vais franco.
— Non, pas du tout.
— Ou parce qu’il n’a pas compris que tu avais envie qu’il passe la nuit avec nous ?
— Quoi ? il semble s’étonner.
— T’avais pas envie qu’il passe la nuit avec nous ?
— Et toi ? »Voilà, une question en réponse à ma question. C’est tout Jérém, ça. Et pourtant, derrière sa question, se cache bel et bien une réponse. La confirmation du fait que je ne m’étais pas trompé.
« Moi, je n’en sais rien. Tu crois qu’il aurait été partant ?
— Je n’en sais rien…— Je pense que ça aurait été dangereux de lui proposer, je considère. Si jamais il avait dit non, ça aurait été gênant. Et si jamais il était partant, ça risquait d’être compliqué à gérer après… vous vous voyez tous les jours, et en plus il a une copine, et… »Ça, ce sont les raisons « politiquement correctes ». Mais les véritables raisons sont autres. La véritable raison, c’est ma peur.
« Et tu es jaloux… » il me coupe net.
Evidemment que je suis jaloux ! Je suis jaloux parce que j’ai peur. J’ai peur qu’il goûte à la virilité d’Ulysse et qu’il ne puisse plus s’en passer. Et que ce dernier ne puisse plus s’en passer non plus. Je suis loin, et Ulysse est près, très près, trop près de lui. J’ai peur que le bonheur des corps éveille des sentiments. J’ai peur qu’il m’oublie. Oui, je suis jaloux. Mais ça, je ne peux pas l’admettre devant lui.
« Pourquoi tu dis ça ? je fais semblant de m’étonner à mon tour.
— Parce que je le sens, parce que ça se voit.
— Pourquoi veux-tu que je sois jaloux ?
— Parce que tu es comme ça !
— Dis-moi, alors, est-ce que j’ai des raisons pour être jaloux ? j’insiste.
— Mais qu’est-ce que tu vas chercher ?
— J’apprends qu’Ulysse a passé pas mal de temps dans cet appart avec toi pour s’entraîner aux courses, et aussi que ça lui est déjà arrivé de passer la nuit ici. Tu ne m’as jamais parlé de tout ça, alors je me pose des questions…— Il n’y a pas de questions à se poser. Uly est un pote, et c’est comme ça qu’on fait avec les potes.
— "Uly" est un pote, mais tu ne le regarde pas vraiment comme un pote.
— Et je le regarde comment ?
— Ça se voit que tu le kiffes ! Surtout quand tu as un peu bu !
— Mais ta gueule ! il se braque soudainement.
— "Uly" est un pote, mais t’as peut-être envie de coucher avec lui…— Tu me saoules !
— La dernière fois que j’étais là, quand tu as voulu que je te prenne…— Quoi ?
— C’est pas à lui que tu pensais quand tu m’appelais "mec" pendant que je te…— Ferme-la, va ! il me balance, en se jetant sur moi et en m’embrassant avec une fougue animale.
— Il t’excite ce mec, hein ? »Pour toute réponse, Jérém soulève mon t-shirt et s’attaque à agacer mes tétons. Sa bouche et sa langue sont animées par une ardeur très excitante.
« Et ce soir tu t’es dit qu’avec moi entre vous deux ça pourrait marcher… » je m’entends glisser, l’excitation m’apportant un niveau de désinhibition qui échappe à mon contrôle.
Mais le bobrun est déjà à genoux devant moi, il défait ma braguette et commence à me pomper avec un plaisir non dissimulé, tout en se branlant.
« Avoue que t’avais envie de me baiser pendant que je le suçais… »Jérém ne répond toujours pas. Il continue de me sucer, en redoublant même de vigueur.
Mon excitation grimpe encore, encore, encore. Sous l’effet du plaisir montant, je sens tous mes freins lâcher, mes limites se pulvériser. Et j’ose tout.
« Ou peut-être tu avais envie d’autre chose… avec ton pote "Uly"… »Jérém me pompe de plus en plus frénétiquement. Je sens que mes mots l’excitent au plus haut point. Il me pompe avec un entrain animal, comme s’il laissait s’exprimer une envie, un désir longtemps refoulé. Comme la dernière fois, mais plus encore que la dernière fois, j’ai l’impression qu’il me pompe comme s’il pompait Ulysse. Sa langue et ses lèvres s’emploient à produire des miracles de bonheur sensuel autour de mon gland. Mes inquiétudes sont anesthésiées par le plaisir qui fait vibrer mon corps tout entier.
« Montre-moi ce que t’avais envie de lui faire, à ton pote… »Des mots, je le sais pertinemment, que je vais regretter plus tard, mais que sur l’instant je ne peux pas retenir.
« Ça fait dix minutes que je te le montre… je l’entends me glisser, la voix chargée d’excitation.
— Je suis sûr que tu ne m’as pas tout montré… » je le chauffe encore.
Un instant plus tard, Jérém éteint la lumière. L’appart est alors plongé dans une pénombre tout juste modérée par quelques rayons de lumière venant de l’illumination publique filtrant à travers les stores. Une ambiance qui me rappelle celle de certaines nuits dans l’appart de la rue de la Colombette.
Le bobrun revient sur le lit. Il s’allonge sur le ventre, ses cuisses de rugbyman bien écartées. Je m’allonge sur lui, doucement, je laisse ma queue effleurer sa raie. Je suis dans un état d’excitation tel que j’ai l’impression de pouvoir jouir rien qu’en effleurant sa rondelle.
Je me glisse lentement en lui, tout en essayant de me retenir. Le bonheur de sentir ma queue enserrée dans le cul musclé de mon beau mâle brun est toujours une sensation des plus incroyables.
Je regarde ses cheveux bruns, ses épaules solides, ses biceps, ses tatouages, cette chaînette, tout ce qui fait sa virilité, cette virilité qui m’a longtemps été inaccessible, puis accessible uniquement pour satisfaire son plaisir de jeune mâle. Et l’idée qu’il ait évolué au point d’apprécier de laisser ma virilité lui offrir du plaisir me donne le tournis.
Soudain, je pense à ces milliers, ces millions de gens qui ont vu Jérém à la télé, à tous les passionnés de rugby qui ont apprécié le grand ailier Tommasi. Je pense à toutes ces nanas (et à tous ces mecs, d’ailleurs) qui ont eu envie de lui, qui ont rêvé de se faire sauter par lui. Et je me dis que la plupart d’entre eux et d’entre elles n'imagineraient jamais que le bel ailier qui les a fait fantasmer puisse se donner à un garçon, comme Jérém est en train de le faire avec moi à cet instant précis. Et cette pensée me donne le vertige.
Jérém frémit, je sens qu’il a vraiment envie de ça, ce soir. De se faire posséder, de se faire pilonner. Je veux lui faire plaisir, alors je commence à le tringler sans plus attendre.
Sa langue m’a mis dans un tel état, sa rondelle me serre tellement, que l’envie de jouir fait vibrer chacune des fibres de mon corps. Je ne suis pas certain de pouvoir tenir bien longtemps. Je vais essayer de me retenir, mais je sens que ça ne va pas être une mince affaire.
Sous l’entrain de mes assauts, Jérém souffle d’excitation. Mais très vite, il manifeste l’envie de quelque chose de plus musclé.
« Vas-y, défonce-moi, mec ! »Et bien, voilà, « mec » est de retour. Ulysse est bien là avec nous, dans ma tête, dans la sienne.

[Pendant que Nico coulisse en toi, tu ne te prives pas de penser à ton coéquipier. Tu le revois à la fin des entraînements, quand il se fout à poil pour partir aux douches, tu revois son corps superbement musclé, et cette queue au repos que tu imagines bien fringante dans le feu de l’action.
Tu repenses à quand tu squattais chez lui, à quand tu sentais tanguer la cloison qui séparait le séjour où tu dormais et sa chambre, le clic clac où tu te caressais seul et le lit où il faisait l’amour avec sa copine. Tu le revois traverser le séjour après l’amour pour venir se chercher quelque chose à boire dans le frigo, tout juste habillé d’un boxer. Putain, qu’est-ce que tu avais envie de lui ! Combien de fois tu t’es branlé en l’écoutant faire l’amour avec sa copine, combien de fois tu as joui en entendant ses râles étouffés, en l’écoutant jouir, lui.
Depuis pas mal de temps déjà, à chaque fois que tu te branles, l’image d’Ulysse partant aux douches te hante. Tu as envie de voir sa queue tendue, tu as envie de lui faire plaisir.
Pendant un temps, tu as eu du mal à l’admettre. Mais désormais c’est clair dans ta tête : tu as envie de lui comme Nico a envie de toi quand tu le baises. Tu as envie de sentir ce que ça fait d’être possédé par un gars aussi viril].

« Allez, putain, montre-moi qui est le mec ! il revient à la charge.
— Je vais bien te niquer, mec ! » je le suis dans son délire.
Je tente de satisfaire son envie, tout en essayant de me retenir. Je prends appui sur ses fesses musclées, je trouve une position et un angle de pénétration qui m’est très agréable, tout en me permettant de garder mon excitation sous contrôle. Une position et un mouvement que mon bobrun semble également bien apprécier.
« Oh, putain, ça c’est bon, mec ! Vas-y plus fort, défonce-moi ! »J’augmente la cadence de mes va-et-vient, mais pas trop non plus, car je sens que mon orgasme me guette.
« C’est tout ce que tu sais faire, mec ? » il insiste.
Je redouble alors la cadence de mes coups de reins et très vite je sens mon orgasme embraser mon bas ventre.
« Je vais jouir, mec ! »La puissance de mon orgasme est décuplée par la succession de contractions de sa rondelle autour de ma queue. Jérém jouit en même temps que moi en se branlant.
Je suis HS, et je m’abandonne sur le corps de mon bobrun. J’ai envie de le prendre dans mes bras, de le câliner. J’ai envie de lui montrer toute la tendresse que j’ai à lui donner après cette baise torride et animale.
Mais je n’en ai pas vraiment l’occasion. Le bobrun commence à gigoter pour se dégager et je suis obligé de suivre le mouvement. Un instant plus tard, Jérém passe un t-shirt blanc et approche de la fenêtre pour fumer une clope.
J’ai envie de lui poser mille questions. J’ai envie de savoir s’il a apprécié ce petit jeu, j’ai envie de savoir ce qui se passe dans sa tête par rapport à Ulysse. Mais son silence intercalé par le bruit étouffé des taffes de cigarette me dissuade de le faire.

Au lit, nous échangeons un bisou si léger et si rapide que j’ai l’impression qu’il évite mes lèvres. Pas de câlin venant de sa part. Je le prends dans mes bras, mais il dit qu’il a chaud et je me décolle de lui la mort dans le cœur.
Jérém s’endort vite, mais pas moi. Plein d’idées me tracassent. J’aimerais me dire qu’avec ce petit jeu, en lui offrant une « nuit avec Ulysse » par procuration, je suis parvenu à désamorcer ce désir frustré. Un désir qui, malgré ses négations, le hante, je le sens. Mais une voix au fond de moi me dit que j’ai peut-être ouvert une boîte de Pandore. Et un profond malaise m’envahit.

Je finis par m’assoupir. Mais pas longtemps. Je suis réveillé par ce qui se passe à côté de moi. Au beau milieu de la nuit, Jérém est en train de se branler. Il pense à quoi, il pense à qui ?
« J’ai envie de toi, Jérém » je lui glisse.
Le bobrun semble hésiter, puis il bondit entre mes cuisses. Il saisit mes fesses offertes avec ses mains puissantes, il crache dans ma rondelle et envoie son gland gonflé à bloc étaler sa salive. Un instant plus tard, il vient en moi.
Nous faisons l’amour. Ou plutôt, nous baisons. Jérém me pilonne en silence. C’est animal. Non, c’est simplement mécanique. Ses attitudes ne sont pas celles que je lui connais. Même ses ahanements ne s’expriment pas comme d’habitude. Non, il ne me fait pas l’amour. Il me baise comme il le faisait à l’appart de la rue de la Colombette.
Certes, nous sommes en pleine nuit, et peut-être qu’il n’est qu’à moitié réveillé. De plus, il doit être encore bien imbibé d’alcool. Mais pendant cette baise je ne reconnais pas le Jérém que j’ai connu depuis le premier séjour à Campan. Et ce Jérém-là me manque, il me manque à en pleurer.
Pendant qu’il me pilonne, j’ai comme l’impression qu’il n’est pas vraiment avec moi. Est-ce qu’il pense toujours à Ulysse ? Est-ce qu’il s’imagine en train de baiser son coéquipier ?
Jérém jouit vite et me fait jouir en me branlant. Puis, très vite, il se déboîte de moi. Il s’allonge et se tourne sur le côté. Je ressens une distance de plus en plus grande entre nous et ça me fait peur, ça me fait mal, ça me donne le vertige.
« Bonne nuit, p’tit Loup… je tente de retrouver un peu de complicité.
— Bonne nuit » il lâche sèchement.

Jérém se rendort. Mais moi, je n’y arrive pas. Je tourne, je retourne dans les draps, j’essaie toutes les positions. Mais il n’y a rien à faire, le sommeil ne veut pas revenir. Les yeux grands ouverts dans le noir, je passe en revue le film de cette soirée. Je revois la complicité entre les deux potes. Et j’essaie de m’imaginer les nombreuses soirées qu’ils ont dû passer ensemble à jouer à ce jeu de Formule 1. J’essaie aussi de m’imaginer les nuits où Ulysse a dormi chez Jérém, et les matins où il lui a emprunté des affaires qu’il ne lui a jamais rendues. Jérém et Ulysse passent vraiment beaucoup de temps ensemble, même la copine du boblond l’a relevé. Que font-ils de tout ce temps ? Le fait que Jérém ait pu envisager un plan à trois avec Ulysse me laisse imaginer qu’il ne s’est jamais rien passé entre eux. Mais comment savoir ?
Ce qui est certain, c’est que Jérém est très attiré par Ulysse. Je l’ai vu à ses regards, je l’ai vu à son l’attitude.
Mais est-ce que dans le regard de Jérém il n’y a que de l’attirance ? Est-ce que la profonde admiration qu’il ressent pour son coéquipier ne cacherait-elle des sentiments plus ambigus ?

Au final, je passe pratiquement une nuit blanche. Ce qui fait qu’au réveil, je suis mort de fatigue. Ce qui fait que je n’ai même pas l’énergie pour essayer de cacher mon malaise et mon inquiétude.
Vu de l’extérieur, je dois sacrement faire la gueule. Jérém aussi semble faire la gueule. Il ne dit pas un mot et le silence devient vite insupportable pour moi.
« Tu as bien dormi ? j’essaie de le questionner pendant qu’il fume sa première cigarette de la journée.
— Ouais… il lâche froidement.
— Moi j’ai pas trop bien dormi.
— Le lit n’est pas très confortable.
— Parle-moi, Jérém ! je me surprends à lui lancer, comme un appel désespéré, comme un appel à l’aide, alors qu’il vient d’écraser son mégot et qu’il passe déjà son blouson, alors qu’il s’apprête à quitter l’appart.
— Tu veux que je te parle de quoi ?
— De ce qui s’est passé hier soir, et l’autre fois aussi.
— Et qu’est-ce qui s’est passé ?
— Tu étais ailleurs…— Mais qu’est-ce que tu vas chercher ?
— Tu as envie de lui ?
— Arrête, j’avais trop bu !
— Il a bon dos l’alcool !
— Ne me casse pas les couilles de bon matin !
— Tu le kiffes ce gars, hein ?
— Mais ta gueule !
— Tu le kiffes, oui ou non ? j’insiste, en montant le ton.
— Oui, je le kiffe ! T’es content maintenant ? Il me fait de l’effet et je ne peux rien y faire. Je le vois chaque jour dans le vestiaire à poil, c’est dur de ne pas y penser.
— Tu as envie de coucher avec lui ? »Jérém se rallume une cigarette et il se cache derrière les volutes de fumées pour éviter de répondre.
« Allez, dis-moi, putain ! j’insiste.
— Il n’y a rien à dire !
— Mais si, au contraire ! Ça t’a bien plu d’imaginer que c’était ton pote qui te baisait hier soir !
— C’est toi qui as voulu jouer à ce jeu, parce que ça t’excitait !
— Et toi, non, ça t’excitait pas, non ! C’est pas toi qui a commencé à m’appeler "mec" la dernière fois…— Et donc ?
— Tu m’as appelé "mec" , de la même façon que tu l’appelles "mec" .
— Tu veux que je te dise quoi, au juste ?
— La vérité !!!
— Tu veux savoir la vérité ? Alors je vais te la dire, la vérité. La vérité c’est que j’ai envie de me faire baiser par ce mec, ok ? J’ai grave envie de me faire baiser par lui, parce qu’il est bandant. Ça te va comme vérité ? »Je l’ai bien cherché, mais ses mots crus me blessent comme un coup de poignard.
« Tu aurais préféré que ce soit lui qui te baise, cette nuit ?
— Et comment ! »Et là, je sens une colère noire m’envahir.
« T’es qu’un connard !
— Et toi t’es qu’un casse-couilles !
— Tandis qu’Ulysse, lui, c’est un Dieu !
— Non, Ulysse n’est pas un Dieu. Ulysse c’est un Homme, lui ! »
Bam ! En pleine figure. Le pire, c’est que par cette simple expression, « un Homme », Jérém a précisément mis le doigt sur quelque chose que j’ai moi aussi ressenti en côtoyant Ulysse.
Jérém a raison. Ulysse fait « Homme », avec tout ce que ce mot implique en termes de fascination. Dans ma tête, et j’imagine dans la sienne aussi, un Homme est un insaisissable mélange de d’assurance et d’humilité, de droiture et de générosité. Son regard sait te grandir, sa présence sait te rassurer et te faire te sentir bien. Un Homme est viril, mais pas dans le sens d’être sanguin ou bagarreur. La virilité dont je parle ici n’a rien de sexuel non plus. Elle réside plutôt dans une attitude faite de calme, de réflexion, de grandeur d’esprit et de bienveillance.
Du haut de ses 27 ans, Ulysse, coche toutes les cases. Depuis le temps qu’il côtoie le beau nordiste au regard félin, Jérém a eu l’occasion de saisir toutes les nuances de cette « virilité », et d’en tomber sous le charme.
Un Homme. Un simple mot, et pourtant si chargé de significations. Et si chargé de préoccupations pour moi.

« C’est donc un homme qu’il te faut à toi…— Arrête, Nico !
— C’est vrai, Ulysse en est un. Et pas moi… j’insiste.
— Ce n’est pas ce que je voulais dire…— Et pourtant, tu l’as dit ! Et tu as raison. Je ne suis pas un homme, je suis trop jeune pour ça. Ou peut-être bien que je n’ai pas la carrure pour être un homme comme Ulysse. Non, en fait, je ne serais jamais un homme comme Ulysse. Mais ce que je ressens pour toi est réel, je suis prêt à tout pour toi. Je t’aime comme un fou. Mais à l’évidence, je ne te suffis pas…— Il y a des choses que je n’arrive pas à contrôler…— Comme l’attirance pour Ulysse ?
— Je sais qu’il ne se passera jamais rien avec lui. Il aime trop les nanas, et puis ce serait trop dangereux pour l’équipe. Hier soir j’ai failli faire une belle connerie, heureusement que je me suis retenu…— Qu’est-ce que tu ressens pour ce gars, au juste ?
— Et toi, tu ressentais quoi pour le type de Bordeaux ? »Ah, le sujet Ruben revient sur le tapis.
« Je n’ai jamais été amoureux de lui…— Et pourtant vous faisiez plus que baiser…— Je n’ai jamais eu de vrais sentiments pour lui, même si on faisait du vélo ensemble !
— Mais tu avais quand même certains sentiments…— Il me faisait du bien parce que je croyais que tu m’avais laissé tomber ! Mais je l’ai quitté ! Et je ne le regrette pas du tout. Mais tu n’as pas répondu à ma question. Tu ressens quoi pour Ulysse ?
— Ce gars me fait du bien.
— Du bien comment ? j’insiste.
— Uly ne me pose pas de questions, avec lui tout est si simple…— Et avec moi c’est compliqué ?
— Toi, tu as tout le temps besoin d’être rassuré. Et je ne peux pas te rassurer tout le temps, parce que moi aussi j’ai parfois besoin d’être rassuré.
— Mais je suis là pour toi !
— C’est pas avec tes angoisses, tes soupçons et tes questions que tu vas me rassurer ! Tu me fiches la pression pour qu’on se voie, pour passer du temps ensemble, et je n’ai surtout pas besoin de plus de pression ! »Jérém écrase son mégot, referme la fenêtre.
« En fait, ce n’est même pas toi qui me mets la pression, il se ravise. C’est cette situation, cette distance. La pression, c’est l’équipe qui me la met. Il faut gagner, tout le temps. Et quand c’est pas le cas, on nous fait sentir minables. Enfin, c’est moi qui le vis comme ça. Je vois qu’il y en a qui tiennent très bien le coup. Mais moi j’ai du mal, beaucoup de mal. Je déteste décevoir, je déteste qu’on me regarde de travers.
La pression elle est là, elle est partout. Et Ulysse fait en sorte qu’elle soit moins pénible à supporter. Ulysse est un véritable pote, et je lui dois tout. Je n’aurais jamais signé au Stade sans lui. Je suis beaucoup attaché à lui, c’est vrai. Et je le vois à poil tous les jours dans les vestiaires, ça non plus je ne peux rien y faire. Si je te disais qu’il ne m’attire pas, je te mentirais. Il m’attire à tous les niveaux, physiquement, mentalement. Je ne peux rien y faire, à part prendre sur moi. Mais c’est dur, de plus en plus dur. »D’une certaine façon, ce que Jérém vient de me dire me touche beaucoup. Même si ça me fait du mal de savoir qu’il kiffe son coéquipier, je comprends tout à fait qu’il puisse être sous le charme d’un gars comme Ulysse. Je comprends également la difficulté de sa situation, le fait d’être exposé en permanence à la tentation. Et je comprends sa frustration.
Je le regarde attraper son sac de sport, et se diriger vers la porte. Je réalise qu’il s’apprête à la passer sans même me donner un bisou, sans même me souhaiter la bonne journée.
« Jérém ! » je l’appelle pour le retenir.
Le bobrun s’arrête net. Pendant une seconde, je pense qu’il a compris qu’il a oublié quelque chose, qu’il va venir me faire un bisou, qu’il va venir me rassurer (il a raison, j’ai tout le temps besoin d’être rassuré, c’est plus fort que moi), me dire que je n’ai pas à me faire du souci car, malgré ce qu’il peut ressentir pour Ulysse, il tient à moi et que nous nous reverrons bientôt.
Mais je me mets le doigt dans l’œil.
« Au fait, tu pars quand ? il lâche froidement, sans presque se retourner vers moi.
— J’ai prévu de rester jusqu’à demain.
— Ce serait bien que tu rentres aujourd’hui.
— Tu es encore en train de me jeter ?
— Rentre chez toi, Nico.
— Et on se revoit quand ?
— Je ne sais pas, quand on pourra.
— J’ai envie de rester.
— Et moi je n’ai pas envie qu’on se prenne encore la tête, j’ai besoin de me concentrer sur mon match de dimanche prochain.
— Tu fais chier Jérém ! Il n’y a que tes matches qui comptent ! Et moi, je fais quoi en attendant ?
— T’as qu’à aller retrouver ton Ruben.
— Mais t’es sérieux, toi ?
— Peut-être qu’il t’attend toujours, il me balance, le regard ailleurs.
— Mais c’est toi que je veux, c’est de toi dont j’ai besoin ! Je l’ai quitté pour toi !
— Moi je ne peux pas le quitter, et je le vois chaque jour.
— Pourquoi tu veux qu’on arrête de se voir ?
— Je t’aime beaucoup, Nico, mais tu vois bien qu’on n’y arrive pas. Notre histoire est trop compliquée. Pour moi, et pour toi aussi. Tu mérites mieux que moi.
— Tu es en train de me quitter, là ?
— J’ai besoin d’être seul. Tu es jaloux, et je le comprends. Mais moi je n’ai pas l’énergie de gérer ça.
— Mais Jérém… » je tente d’objecter une fois de plus.
Mais le bobrun coupe net mon élan désespéré en venant me prendre dans ses bras, et me serrant très fort contre lui.
« Prends soin de toi, Nico, il me glisse doucement.
— Je t’aime, p’tit Loup ! »Un long soupir, et un baiser léger sur mon front. Ce sont les derniers gestes de Jérém avant de passer la porte d’entrée et de la refermer derrière lui.

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