L'appel des catacombes - p1
Récit érotique écrit par Tartelette [→ Accès à sa fiche auteur]
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L'appel des catacombes - p1
L'appel des catacombes
À la suite d'une rencontre surnaturelle, une étudiante de magie se découvre un goût nouveau pour l'aventure.
Partie 1 : L'intrusion
Le début de l'été approchait, et c'était la période des examens. Je me sentais de plus en plus éprouvée par ces jours de révisions interminables et par l'angoisse de ne pas réussir. Ayant toujours été une élève très sérieuse, j'avais travaillé d'arrache pied afin de passer mon certificat de magie. On avait déjà passé deux épreuves, et pour l'instant, je m'en étais plutôt bien sortie. Mais ce matin, le sort avait tourné. Je devais avoir eu le sommeil lourd à cause de la fatigue accumulée, toujours est-il que lorsque j'ouvris les yeux, l'esprit encore embrumé par le sommeil, je constatai avec horreur que l'heure de début d'examen était déjà passée. Je n'avais pas entendu mon réveil sonner ! Je sautai hors de mon lit dans un mouvement de panique, et utilisai un sortilège de lévitation pour enfiler ma petite robe noire le plus vite possible. J'avais 20 minutes de retard, et je priais pour qu'ils me laissent entrer malgré tout.
Bien que ce soit le matin, le soleil de juin réchauffait déjà l'atmosphère, et j'étais à bout de souffle lorsque j'arrivai, au terme d'une course effrénée, à l'entrée du bâtiment universitaire. À ma grande surprise, des étudiants provenant de l'intérieur de la cour se dirigaient vers la sortie. Pourquoi ? J'identifiai Marguerite dans la foule, et la rejoignit aussitôt. Je tentai de reprendre mon souffle, mais elle répondit avant que je puisse la questionner :
_ Annulées. Une bande de gargouilles est venue tout saccager cette nuit, les épreuves sont reportées à demain. Tu es chanceuse, ils t'auraient jamais laissé entrer avec autant de retard.
_ Quoi ?
Je levai les yeux vers le premier étage : les vitres étaient brisées. Ma gorge se serra. Marguerite poursuivit, sans prêter attention à mon état de choc:
_ Il paraît qu'il y en a de plus en plus en ce moment. Elles ont volé des tas de trucs, avec ou sans valeur. Fais gaffe à pas laisser tes affaires traîner n'importe où.
_ Mais... Je croyais que c'était très rare ! On ne voit les gargouilles que sous terre, d'habitude. Ou perchées sur les tombes ou les monuments. Mais pas si proches...
_ Faut croire que quelque chose les a motivées à sortir. Moi non plus, je les ai jamais vues de près. Mais j'ai déjà entendu dire qu'elles avaient fouillé des maisons.
_ Je pensais que ce n'était que des histoires.
Mon cœur s'emballait de plus en plus. Je n'avais vraiment pas besoin d'une inquiétude de plus en cette période tendue.
_ Tu crois qu'elles vont revenir ?
Marguerite semblait amusée.
_ Quoi, t'as peur ? Tu sais, c'est pas pire qu'un ogre. Et ça, on en a déjà eu un dans l'établissement.
_ Et alors ? Les gargouilles sont quand même plus massives que nous, et elles ont des crocs aiguisés. Je n'aimerais pas qu'elles m'attrapent et m'emmènent de force.
Elle sourit en regardant mon corps.
_ C'est vrai que tu es toute frêle, tu devrais peut être te mettre à la muscu.
Je soupirais d'exaspération, ne pouvant pas me retenir de sourire avec elle. Elle n'avait pas vraiment tort, j'avais toujours été très menue. Jambes et bras fins, petites fesses, petits seins. Marguerite était opposée à moi, plutôt ronde et musclée. Elle portait un short et un crop top dévoilant son piercing au nombril. Je reprenais mes esprits pour répliquer :
_ Sois un peu sérieuse. Tu sais bien que l'humain le plus musclé de la terre ne ferait pas le poids face à une gargouille. Pas plus que face à une bête sauvage, sans parler du fait qu'elles se déplacent souvent en meute.
Marguerite me tapota gentiment l'épaule.
_ Allez, Sophie, arrête de te faire du souci. Premièrement, on a la magie pour nous défendre, c'est pour ça qu'on est là. Deuxièmement, il y a des tas de surveillants doués en sortilèges de combat prêts à nous aider si jamais il se passe quelque chose.
_ Et troisièmement ?
_ Eh bien, on n'a jamais entendu parler d'histoire de gargouilles qui auraient tué des humains. Elles s'intéressent surtout à nos possessions, et comme tu le sais, elles ne mangent que du charbon. Et je parie qu'elles sont froussardes, c'est pas pour rien qu'elles sortent que la nuit et qu'elles s'approchent jamais des humains.
Je ne pouvais m'empêcher d'être sceptique.
_ C'est vrai. N'empêche, si elles ont réussi à tout saccager, c'est que personne n'a pu les arrêter, et que la barrière magique n'était pas plus puissante que les portes verrouillées. Elles sont plus fortes que tu ne le crois. Et imagine si l'une d'entre elles avait la rage ? Ou s'il y en avait une particulièrement agressive ? Tu crois que la magie suffirait ?
Marguerite soupira, semblant trouver mon inquiétude excessive. Elle n'eût pas l'occasion de répondre, un étudiant nous avait rejoint. Ça faisait un moment qu'on le voyait papillonner aux alentours et interroger différentes personnes.
_ Salut, je m'appelle Louis. Mes amis et moi, on aimerait savoir si vous seriez intéressées pour une expédition un peu inhabituelle. Mais vous devez pas le dire aux surveillants.
Marguerite lui répondit avec une dose de suspicion dans la voix :
_ Ça dépend si c'est légal ou pas. Ou disons plutôt... Moral.
_ Oui oui, t'inquiètes. C'est juste que c'est... Spécial.
_ Okay, on le dira pas. C'est quoi votre idée ?
_ Cette nuit, on entrera discrètement dans les catacombes pour approcher les gargouilles. Y'a une entrée pas loin de l'école.
Marguerite et moi haussâmes les sourcils en même temps. Elle qui était si sûre d'elle quelques minutes auparavant, semblait maintenant troublée.
_ Ah oui, quand-même.
Je les questionnai.
_ Mais pour quoi faire ?
_ Pour les observer de plus près... Peu de personnes les ont déjà vues en face à face. On ne sait quasiment rien d'elles.
_ Parce qu'on les évite autant qu'elles nous évitent. Et c'est très bien ainsi. Pourquoi vouloir s'approcher de ces bestioles vicieuses ? Elles sont sauvages et passent leur temps à tout détruire.
Louis fronça les sourcils face à mon pessimisme.
_ Nous, on trouve ça fascinant, d'observer des créatures si peu connues. Et puis, elles ne sont pas si sauvages que ça. Je te rappelle qu'elles ont leur propre langue et que, selon les chercheurs biologistes, leurs sociétés semblent fonctionner selon une hiérarchie précise.
_ Oui. Tout comme les meutes de hyènes ou les rats d'égout...
Marguerite m'interompit.
_ T'es de mauvaise foi. Il a raison, c'est intéressant. De là à mettre les pieds directement dans leur repère...
_ Ça ferait une aventure. Vous avez pas envie de lever un peu le nez des bouquins de magie ? D'enfin vivre quelque chose sur le terrain ?
Marguerite acquiesça :
_ Ouais, c'est vrai. Toutes ces choses qu'on nous enseigne, ce serait bien de les voir par nous-mêmes. Mais le système universitaire est plutôt... Déconnecté de la réalité.
_ Et on pourrait en profiter pour tenter de retrouver les objets de valeur qu'elles ont volé ! Imaginez que l'on soit récompensés par l'école.
Je tentai de les ramener à la réalité.
_ Et vous pensez qu'on n'a pas mieux à faire, en pleine période d'examens ? Chercher les ennuis ? Elles nous en cause déjà à la surface, ce n'est pas assez pour vous contenter ? Jamais je ne mettrai un pied dans ce trou à vermines.
Marguerite finit de mettre un terme à la conversation de façon plus avenante.
_ Elle a raison. Votre idée est peut-être intéressante, mais on doit se concentrer sur nos révisions. On va pas sacrifier tout le travail d'une année entière juste pour aller s'amuser dans les grottes. Mais c'est gentil d'avoir proposé.
_ Okay, okay. C'est tout à votre honneur d'être raisonnables. Vous pouvez toujours revenir me voir si vous changez d'avis.
_ Quand tu seras de retour, tu pourras nous raconter ? J'aimerais bien savoir comment votre affaire va tourner.
_ Oui, si vous voulez. À bientôt, dans ce cas.
Il partit interroger d'autres personnes. J'empoignai mon sac à dos. Le soleil tapait de plus belle, j'avais déjà envie de m'asperger d'eau pour me rafraîchir.
_ Bon, je n'ai pas de temps à perdre. Je vais profiter de ce nouveau temps libre pour revoir mes sortilèges de soin.
Marguerite me sourit.
_ Tu sais, tu devrais te relaxer un peu. Tu te surmène trop, c'est pour ça que t'étais en retard.
_ Oui... J'essaierai.
_ À plus tard.
Je filai vers mon appartement. J'habitais seulement à 1 km de l'université. En rentrant, je pris soin de sécuriser les deux verrous. "On ne sait jamais, si une gargouille essayait d'entrer...", pensais-je. Cette histoire ne me rassurait pas du tout. À part quelques objets dérobés la nuit, elles nous laissaient en paix, jusqu'à présent. Les autres espèces de créatures vivaient principalement dans la forêt, mais il avait fallu que ces monstres infestent nos villes. Non, il ne fallait pas que je me laisse distraire par ces nouvelles préoccupations. Pas maintenant, mon futur métier en dépendait. Je vidai mon sac sur mon bureau, et ignorai complètement la recommandation de Marguerite. À 23h, j'étais encore plongée dans mon manuel de potions de guérison. C'est à 7h du matin que je me reveillai, le front collé sur les pages du livre. Je m'étais endormie sur place.
_ Pas grave. Cette fois-ci, je suis en avance.
Je pris une grande inspiration, et commençai à me préparer. Je me lavais en répétant à voix basse les ingrédients de la potion contre le venin de sanguerie. J'étais certaine de ne pas pouvoir rater cette épreuve, et pourtant, le stress prenait de plus en plus de place dans mon ventre.
Une fois prête, je me rendis d'un pas soutenu vers l'université. J'y retrouvai Marguerite, qui m'accueillit avec le sourire en constatant que j'étais à l'heure. Au premier étage, certaines salles étaient condamnées. Les murs étaient couverts d'immenses traces de griffes, et certaines portes étaient sorties de leurs gonds. Certaines d'entre elles étaient même brisées en deux. Je frissonnai. La force de ces créatures était largement supérieure à la nôtre. Comment Marguerite parvenait-elle à ne pas trouver cela alarmant ? Des tables avaient été installées dans le hall de façon provisoire. Marguerite et moi eûment la chance d'avoir une salle intacte à notre disposition. J'étais assise près d'une fenêtre, et les rayons de soleil me brûlaient la peau. Une minute après que le chronomètre de l'épreuve fut lancé, j'étais déjà en train de rédiger. A cause des incidents de la veille, ils avaient annulé les épreuves pratiques, il ne restait donc plus que l'épreuve écrite. Peut-être que le matériel avait été endommagé ? Après quelques pages rédigées, je levais les yeux vers le chronomètre. On était à mi-temps, je pouvais ralentir le rythme. Malheureusement, c'est au moment où je commençais à me relaxer que mes battements de cœur reprirent de plus belle. Le silence et la concentration des candidats furent brisés à l'unisson par un bruit assourdissant, faisant sursauter la classe entière. Il fut suivi par des voix rauques et des grognements. Interloqués, on s'interroga tous du regard pendant quelques secondes, l'esprit émergeant de nos écrits. Le surveillant se leva rapidement, verrouilla la porte, plaça une table contre elle, et lança un sort bouclier. L'inquiétude avait envahi la pièce. Il nous fit signe de rester silencieux, tout en chuchotant :
_ Pas de panique. Il y a très peu de chances que l'on soit en danger, mais je vous conseille de garder vos objets de valeur sur vous.
Certains étudiants soufflaient d'agacement, tandis que d'autres écarquillaient les yeux, saisis par la peur. Marguerite semblait plutôt calme, mais ses sourcils étaient froncés. Elle avait mis sa main derrière mon dos, sans doute pour me rassurer. Le vacarme derrière la porte nous tendait. C'était un mélange de coups, de cris et de pas de course. Puis ce fut un coup sur notre porte. On n'eut pas le temps de nous préparer, car le deuxième coup la brisa. Le troisième coup acheva de dégager le passage, et plusieurs bêtes ailées à la peau sombre s'engouffrèrent dans la pièce. Comme on s'y attendait, c'était des gargouilles. Même dans leurs postures courbées, elles étaient un peu plus hautes que nous. Leur taille n'était pas démesurée, en rien comparable à celle d'un troll ou d'un ogre qui, eux, n'auraient même pas pu se faufiler dans le hall d'entrée, mais elles devaient se baisser pour passer les portes. Je n'eus pas vraiment le temps de les distinguer, car tout le monde se mit à paniquer en même temps. Je me retrouvai bousculée de toutes parts, tandis que le surveillant lançait un sort d'attaque sur les bêtes. Trois d'entre elles s'enfuirent en maugréant ce qui semblait être des jurons dans leur langue, tandis que deux autres fonçaient vers le fond de la salle. Instinctivement, je suivis le mouvement de groupe et m'enfuit à toutes jambes. Ce fut le chaos absolu tandis que la foule se ruait dans les escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée. Les gargouilles s'enfuyaient sur notre passage, terrifiant d'autres étudiants aux alentours sans le vouloir. Tout le monde criait, je n'avais plus aucun repère. Je manquai de trébucher dans les escaliers, mais Marguerite me rattrapa par le bras. On avait atteint la cour extérieure, quand quelque chose frappa mon esprit.
_ Merde, mon sac !
Je l'avais oublié dans la salle d'examen. Marguerite ouvrit les yeux en grand, sidérée.
_ Tu vas quand-même pas retourner là-bas ?!
Elle n'eût pas l'occasion de recevoir de réponse. Je fonçai déjà vers l'étage, en essayant d'éviter la marée d'étudiants en panique, ainsi que les monstres eux-mêmes qui s'enfuyaient avec des tas d'objets dans leurs griffes et leurs gueules. Je pouvais distinguer leurs ailes gris-sombres, leurs cornes de diable et leur longue queue pendant ma course, ainsi que les éclairs rapides de leurs regards agités. Peut-être que je prenais ça trop au sérieux, mais sur le moment, il me semblait inconcevable de laisser mon sac derrière moi. Il contenait tout mon travail de l'année dans certaines matières. Je franchis le seuil de la salle, pour découvrir avec horreur qu'une gargouille y était encore. Tout était en vrac, les copies d'examen éparpillées partout dans la pièce, les tables retournées, les armoires vidées. L'énorme bête monstrueuse me fixait du fond de la salle, le regard indéchiffrable. Elle avait, comme toutes les gargouilles, un air malicieux, malveillant, et une gueule au sourire béant dévoilant ses longues dents aiguisés. Tout dans son apparence, dans l'énergie de sa présence et dans son regard évoquait un parfait mélange entre un animal sauvage et une créature démoniaque. J'étais complètement figée. Comment réagir ? Devais-je entrer, fuir, attendre ? Lui lancer un sort, appeler à l'aide ? Étais-je même en danger ? Comme déconnecté de ma raison, mon corps ne parvenait pas à esquisser le moindre mouvement, hypnotisé par le regard inhumain qui me scrutait. Sans trop savoir l'expliquer, je ressentais sa présence bestiale qui envahissat toute la pièce, puissante et sauvage. Elle écrasait la mienne, faible, discrète et incertaine. Je devais sembler ridicule face à elle, humaine fragile au corps menu et pâle, petite proie tremblante et dérisoire face à cette créature qui, malgré son allure squelettique, possédait un corps démesuré, des membres puissants et des griffes acérées. Son souffle était slifflant, agité par le stress de l'action. Je n'arrivais pas à lire ses intentions. Son regard était trop étranger pour que je puisse le comprendre. Étrangement, elle semblait tout aussi fascinée par moi que je l'étais par elle. Elle grogna quelques mots dans sa langue à l'articulation bizarre et guturale. Il semblait qu'elle n'osait pas approcher. Je remarquai alors qu'elle tenait mon sac entre ses griffes. Les mots s'échappèrent de ma gorge, déformés par la peur.
_ Rends-le moi.
Elle aurait pu me saisir de force ou me tuer à tout moment, mais une force mystérieuse, provenant du fond de mes entrailles, me poussa à avancer de quelques pas. La bête contourna les tables afin de rester à distance de moi. À aucun moment on ne se quitta des yeux. Ce fut comme une parenthèse étrange et silencieuse, moi petite humaine dans sa robe noire d'été, le regard plongé dans celui d'un monstre sauvage, créature chimérique sortie des entrailles froides de la terre pour sacager notre monde. Ce fut à son tour de faire un petit bond vers moi en sifflant quelques mots. La peur me propulsa en arrière, je me collai contre le mur. Le contact visuel se rompit lorsque la gargouille s'enfuit brutalement de la pièce en renversant quelques tables et chaises, emportant mon sac pour de bon. Je restai pétrifiée pendant quelques instants, les muscles contractés et le souffle coupé, me demandant quelle folie m'avait amenée à faire face à cet être, puis je courut vers le rez de chaussée. Des surveillants lançaient des sorts pour faire fuir les quelques gargouilles restantes.
_ Mais qu'est-ce-que vous faites encore là ?! Rejoignez les autres étudiants dehors ! Il ne faudrait pas que vous vous preniez un de nos sorts par accident.
J'obéis et passai les grilles de la cour d'entrée, essoufflée. L'image distincte des yeux sauvages de la gargouille flottait dans mon esprit. Des surveillants et professeurs essayaient de rassembler et d'organiser la foule d'étudiants encore sous le choc. Il n'y avait pas de blessés, seulement des affaires perdues. Après un moment de recherche, je retrouvai Marguerite, qui m'accueillit avec des réprimandes.
_ T'es dingue ! Pourquoi t'y es retournée ?! Ma parole, tu tiens à tes manuels de magie comme si ta vie en dépendait !
_ Désolée.
J'étais encore trop chamboulée pour formuler une réponse plus complète. La foule se tut quand un professeur prit la parole avec force.
_ Nous nous excusons sincèrement pour cet incident. Bien que ces intrusions ne mettent pas nos vies en danger, elles nuisent de plus en plus à la vie de notre école. Nous allons probablement devoir modifier le lieu des examens. Notre décision vous sera communiquée dans les plus brefs délais. En attendant la reprise des épreuves, nous vous accordons 3 jours de temps libre. Je vous prie également d'informer le professeur principal de votre section à propos de tout équipement égaré durant l'incident.
La foule se dispersa. Je vins trouver mon professeur principal pour lui parler de mon sac perdu et de ce qu'il contenait, puis rejoignit Marguerite qui me tapa l'épaule amicalement.
_ Trois jours ! On va pouvoir profiter du soleil !
_ Oui...
_ Quoi, tu vas pas me dire que tu vas encore rester enfermée à réviser !?
_ Je verrai.
Elle soupira.
_ Et si on prenait des nouvelles de l'aventurier ? Il est là-bas.
Elle désigna l'étudiant qui nous avait proposé une exploration sous-terraine la veille. On le rejoignit.
_ Alors, comment ça s'est passé hier soir ?
Il sourit d'un air un peu gêné.
_ Disons que les catacombes sont... Un peu plus grandes qu'on ne le pensait. Il faudrait faire une expédition bien plus longue. Disons... Deux jours, par exemple ? On prendra des vivres et de quoi camper sur place. Ce soir, on se rejoindra à l'arrière de la cathédrale. Vous êtes toujours pas partantes ?
Marguerite secoua la tête.
_ On comptait plutôt profiter du soleil. On a eu assez de problèmes comme ça. Place à la détente !
Il haussa les épaules.
_ Comme vous voulez. De toute façon, on est déjà presque une dizaine.
_ Merci quand-même.
Marguerite s'étira.
_ J'irais bien à la plage, qu'est-ce que tu en dis ?
J'étais fatiguée par les émotions de la journée et le manque de sommeil, mais j'acceptai. On prit le bus pour descendre à une dizaine de kilomètres de la grande ville. Une plage de sable nous attendait. On avait amené nos bikinis et nos sandwichs. Je profitai de ce moment tranquille en compagnie de mon amie, allongées sur nos serviettes de plage. On s'était baignées et amusées pendant un moment dans l'eau fraîche de la mer calme, et on séchait maintenant paisiblement au soleil.
_ Tu as raison. Le repos ne passe pas que par le sommeil. Mon cerveau avait bien besoin d'un moment de détente durant lequel faire autre chose que réviser.
Elle sourit. Je poursuivit:
_ Au fait, je songeais à quelque chose...
_ Quoi donc ?
Voyant que j'étais hésitante, elle m'incita à continuer.
_ Allez, n'aies pas peur.
_ Eh bien, je me disais... Tu ne crois pas qu'on devrait les rejoindre ? L'expédition de ce soir ?
Elle fronça les sourcils, interloquée.
_ Attends... Vraiment ? Toi qui me bombardais encore hier de milliers d'inquiétudes à l'idée de croiser ces créatures... maintenant, tu veux y aller ?!
_ Ben, j'aimerais beaucoup retrouver mon sac. Et peut-être comprendre un peu mieux la situation.
Elle n'en croyait toujours pas ses oreilles.
_ Tu es sûre ? Tu veux vraiment passer deux jours à déambuler dans les catacombes ?
Je prenais une inspiration.
_ Oui.
_ Bon... Pourquoi pas. Après tout, aucune d'entre elles ne nous a attaqués. Mais je me demande si ce sera différent, étant donné que cette fois, c'est nous qui nous introduiront dans leur repère.
_ Ça devrait aller.
Cet élan aventureux me surprenait moi-même. Moi qui avais pour habitude d'éviter les ennuis à tout prix, je me mettais dans une drôle de situation. Je fermai les yeux, profitant des rayons de soleil sur ma peau, et sombrai dans le sommeil pendant une heure ou deux. Je rêvai, par bribes, des évènements de la journée : les copies d'examens éparpillées, la foule qui me bouscule, les cris et grognements agités, le regard de la créature sur moi. Marguerite me réveilla doucement.
_ Hé, Sophie. Faudrait qu'on aille préparer nos affaires pour ce soir.
Je me levai avec une étrange sensation au creux du ventre.
À la suite d'une rencontre surnaturelle, une étudiante de magie se découvre un goût nouveau pour l'aventure.
Partie 1 : L'intrusion
Le début de l'été approchait, et c'était la période des examens. Je me sentais de plus en plus éprouvée par ces jours de révisions interminables et par l'angoisse de ne pas réussir. Ayant toujours été une élève très sérieuse, j'avais travaillé d'arrache pied afin de passer mon certificat de magie. On avait déjà passé deux épreuves, et pour l'instant, je m'en étais plutôt bien sortie. Mais ce matin, le sort avait tourné. Je devais avoir eu le sommeil lourd à cause de la fatigue accumulée, toujours est-il que lorsque j'ouvris les yeux, l'esprit encore embrumé par le sommeil, je constatai avec horreur que l'heure de début d'examen était déjà passée. Je n'avais pas entendu mon réveil sonner ! Je sautai hors de mon lit dans un mouvement de panique, et utilisai un sortilège de lévitation pour enfiler ma petite robe noire le plus vite possible. J'avais 20 minutes de retard, et je priais pour qu'ils me laissent entrer malgré tout.
Bien que ce soit le matin, le soleil de juin réchauffait déjà l'atmosphère, et j'étais à bout de souffle lorsque j'arrivai, au terme d'une course effrénée, à l'entrée du bâtiment universitaire. À ma grande surprise, des étudiants provenant de l'intérieur de la cour se dirigaient vers la sortie. Pourquoi ? J'identifiai Marguerite dans la foule, et la rejoignit aussitôt. Je tentai de reprendre mon souffle, mais elle répondit avant que je puisse la questionner :
_ Annulées. Une bande de gargouilles est venue tout saccager cette nuit, les épreuves sont reportées à demain. Tu es chanceuse, ils t'auraient jamais laissé entrer avec autant de retard.
_ Quoi ?
Je levai les yeux vers le premier étage : les vitres étaient brisées. Ma gorge se serra. Marguerite poursuivit, sans prêter attention à mon état de choc:
_ Il paraît qu'il y en a de plus en plus en ce moment. Elles ont volé des tas de trucs, avec ou sans valeur. Fais gaffe à pas laisser tes affaires traîner n'importe où.
_ Mais... Je croyais que c'était très rare ! On ne voit les gargouilles que sous terre, d'habitude. Ou perchées sur les tombes ou les monuments. Mais pas si proches...
_ Faut croire que quelque chose les a motivées à sortir. Moi non plus, je les ai jamais vues de près. Mais j'ai déjà entendu dire qu'elles avaient fouillé des maisons.
_ Je pensais que ce n'était que des histoires.
Mon cœur s'emballait de plus en plus. Je n'avais vraiment pas besoin d'une inquiétude de plus en cette période tendue.
_ Tu crois qu'elles vont revenir ?
Marguerite semblait amusée.
_ Quoi, t'as peur ? Tu sais, c'est pas pire qu'un ogre. Et ça, on en a déjà eu un dans l'établissement.
_ Et alors ? Les gargouilles sont quand même plus massives que nous, et elles ont des crocs aiguisés. Je n'aimerais pas qu'elles m'attrapent et m'emmènent de force.
Elle sourit en regardant mon corps.
_ C'est vrai que tu es toute frêle, tu devrais peut être te mettre à la muscu.
Je soupirais d'exaspération, ne pouvant pas me retenir de sourire avec elle. Elle n'avait pas vraiment tort, j'avais toujours été très menue. Jambes et bras fins, petites fesses, petits seins. Marguerite était opposée à moi, plutôt ronde et musclée. Elle portait un short et un crop top dévoilant son piercing au nombril. Je reprenais mes esprits pour répliquer :
_ Sois un peu sérieuse. Tu sais bien que l'humain le plus musclé de la terre ne ferait pas le poids face à une gargouille. Pas plus que face à une bête sauvage, sans parler du fait qu'elles se déplacent souvent en meute.
Marguerite me tapota gentiment l'épaule.
_ Allez, Sophie, arrête de te faire du souci. Premièrement, on a la magie pour nous défendre, c'est pour ça qu'on est là. Deuxièmement, il y a des tas de surveillants doués en sortilèges de combat prêts à nous aider si jamais il se passe quelque chose.
_ Et troisièmement ?
_ Eh bien, on n'a jamais entendu parler d'histoire de gargouilles qui auraient tué des humains. Elles s'intéressent surtout à nos possessions, et comme tu le sais, elles ne mangent que du charbon. Et je parie qu'elles sont froussardes, c'est pas pour rien qu'elles sortent que la nuit et qu'elles s'approchent jamais des humains.
Je ne pouvais m'empêcher d'être sceptique.
_ C'est vrai. N'empêche, si elles ont réussi à tout saccager, c'est que personne n'a pu les arrêter, et que la barrière magique n'était pas plus puissante que les portes verrouillées. Elles sont plus fortes que tu ne le crois. Et imagine si l'une d'entre elles avait la rage ? Ou s'il y en avait une particulièrement agressive ? Tu crois que la magie suffirait ?
Marguerite soupira, semblant trouver mon inquiétude excessive. Elle n'eût pas l'occasion de répondre, un étudiant nous avait rejoint. Ça faisait un moment qu'on le voyait papillonner aux alentours et interroger différentes personnes.
_ Salut, je m'appelle Louis. Mes amis et moi, on aimerait savoir si vous seriez intéressées pour une expédition un peu inhabituelle. Mais vous devez pas le dire aux surveillants.
Marguerite lui répondit avec une dose de suspicion dans la voix :
_ Ça dépend si c'est légal ou pas. Ou disons plutôt... Moral.
_ Oui oui, t'inquiètes. C'est juste que c'est... Spécial.
_ Okay, on le dira pas. C'est quoi votre idée ?
_ Cette nuit, on entrera discrètement dans les catacombes pour approcher les gargouilles. Y'a une entrée pas loin de l'école.
Marguerite et moi haussâmes les sourcils en même temps. Elle qui était si sûre d'elle quelques minutes auparavant, semblait maintenant troublée.
_ Ah oui, quand-même.
Je les questionnai.
_ Mais pour quoi faire ?
_ Pour les observer de plus près... Peu de personnes les ont déjà vues en face à face. On ne sait quasiment rien d'elles.
_ Parce qu'on les évite autant qu'elles nous évitent. Et c'est très bien ainsi. Pourquoi vouloir s'approcher de ces bestioles vicieuses ? Elles sont sauvages et passent leur temps à tout détruire.
Louis fronça les sourcils face à mon pessimisme.
_ Nous, on trouve ça fascinant, d'observer des créatures si peu connues. Et puis, elles ne sont pas si sauvages que ça. Je te rappelle qu'elles ont leur propre langue et que, selon les chercheurs biologistes, leurs sociétés semblent fonctionner selon une hiérarchie précise.
_ Oui. Tout comme les meutes de hyènes ou les rats d'égout...
Marguerite m'interompit.
_ T'es de mauvaise foi. Il a raison, c'est intéressant. De là à mettre les pieds directement dans leur repère...
_ Ça ferait une aventure. Vous avez pas envie de lever un peu le nez des bouquins de magie ? D'enfin vivre quelque chose sur le terrain ?
Marguerite acquiesça :
_ Ouais, c'est vrai. Toutes ces choses qu'on nous enseigne, ce serait bien de les voir par nous-mêmes. Mais le système universitaire est plutôt... Déconnecté de la réalité.
_ Et on pourrait en profiter pour tenter de retrouver les objets de valeur qu'elles ont volé ! Imaginez que l'on soit récompensés par l'école.
Je tentai de les ramener à la réalité.
_ Et vous pensez qu'on n'a pas mieux à faire, en pleine période d'examens ? Chercher les ennuis ? Elles nous en cause déjà à la surface, ce n'est pas assez pour vous contenter ? Jamais je ne mettrai un pied dans ce trou à vermines.
Marguerite finit de mettre un terme à la conversation de façon plus avenante.
_ Elle a raison. Votre idée est peut-être intéressante, mais on doit se concentrer sur nos révisions. On va pas sacrifier tout le travail d'une année entière juste pour aller s'amuser dans les grottes. Mais c'est gentil d'avoir proposé.
_ Okay, okay. C'est tout à votre honneur d'être raisonnables. Vous pouvez toujours revenir me voir si vous changez d'avis.
_ Quand tu seras de retour, tu pourras nous raconter ? J'aimerais bien savoir comment votre affaire va tourner.
_ Oui, si vous voulez. À bientôt, dans ce cas.
Il partit interroger d'autres personnes. J'empoignai mon sac à dos. Le soleil tapait de plus belle, j'avais déjà envie de m'asperger d'eau pour me rafraîchir.
_ Bon, je n'ai pas de temps à perdre. Je vais profiter de ce nouveau temps libre pour revoir mes sortilèges de soin.
Marguerite me sourit.
_ Tu sais, tu devrais te relaxer un peu. Tu te surmène trop, c'est pour ça que t'étais en retard.
_ Oui... J'essaierai.
_ À plus tard.
Je filai vers mon appartement. J'habitais seulement à 1 km de l'université. En rentrant, je pris soin de sécuriser les deux verrous. "On ne sait jamais, si une gargouille essayait d'entrer...", pensais-je. Cette histoire ne me rassurait pas du tout. À part quelques objets dérobés la nuit, elles nous laissaient en paix, jusqu'à présent. Les autres espèces de créatures vivaient principalement dans la forêt, mais il avait fallu que ces monstres infestent nos villes. Non, il ne fallait pas que je me laisse distraire par ces nouvelles préoccupations. Pas maintenant, mon futur métier en dépendait. Je vidai mon sac sur mon bureau, et ignorai complètement la recommandation de Marguerite. À 23h, j'étais encore plongée dans mon manuel de potions de guérison. C'est à 7h du matin que je me reveillai, le front collé sur les pages du livre. Je m'étais endormie sur place.
_ Pas grave. Cette fois-ci, je suis en avance.
Je pris une grande inspiration, et commençai à me préparer. Je me lavais en répétant à voix basse les ingrédients de la potion contre le venin de sanguerie. J'étais certaine de ne pas pouvoir rater cette épreuve, et pourtant, le stress prenait de plus en plus de place dans mon ventre.
Une fois prête, je me rendis d'un pas soutenu vers l'université. J'y retrouvai Marguerite, qui m'accueillit avec le sourire en constatant que j'étais à l'heure. Au premier étage, certaines salles étaient condamnées. Les murs étaient couverts d'immenses traces de griffes, et certaines portes étaient sorties de leurs gonds. Certaines d'entre elles étaient même brisées en deux. Je frissonnai. La force de ces créatures était largement supérieure à la nôtre. Comment Marguerite parvenait-elle à ne pas trouver cela alarmant ? Des tables avaient été installées dans le hall de façon provisoire. Marguerite et moi eûment la chance d'avoir une salle intacte à notre disposition. J'étais assise près d'une fenêtre, et les rayons de soleil me brûlaient la peau. Une minute après que le chronomètre de l'épreuve fut lancé, j'étais déjà en train de rédiger. A cause des incidents de la veille, ils avaient annulé les épreuves pratiques, il ne restait donc plus que l'épreuve écrite. Peut-être que le matériel avait été endommagé ? Après quelques pages rédigées, je levais les yeux vers le chronomètre. On était à mi-temps, je pouvais ralentir le rythme. Malheureusement, c'est au moment où je commençais à me relaxer que mes battements de cœur reprirent de plus belle. Le silence et la concentration des candidats furent brisés à l'unisson par un bruit assourdissant, faisant sursauter la classe entière. Il fut suivi par des voix rauques et des grognements. Interloqués, on s'interroga tous du regard pendant quelques secondes, l'esprit émergeant de nos écrits. Le surveillant se leva rapidement, verrouilla la porte, plaça une table contre elle, et lança un sort bouclier. L'inquiétude avait envahi la pièce. Il nous fit signe de rester silencieux, tout en chuchotant :
_ Pas de panique. Il y a très peu de chances que l'on soit en danger, mais je vous conseille de garder vos objets de valeur sur vous.
Certains étudiants soufflaient d'agacement, tandis que d'autres écarquillaient les yeux, saisis par la peur. Marguerite semblait plutôt calme, mais ses sourcils étaient froncés. Elle avait mis sa main derrière mon dos, sans doute pour me rassurer. Le vacarme derrière la porte nous tendait. C'était un mélange de coups, de cris et de pas de course. Puis ce fut un coup sur notre porte. On n'eut pas le temps de nous préparer, car le deuxième coup la brisa. Le troisième coup acheva de dégager le passage, et plusieurs bêtes ailées à la peau sombre s'engouffrèrent dans la pièce. Comme on s'y attendait, c'était des gargouilles. Même dans leurs postures courbées, elles étaient un peu plus hautes que nous. Leur taille n'était pas démesurée, en rien comparable à celle d'un troll ou d'un ogre qui, eux, n'auraient même pas pu se faufiler dans le hall d'entrée, mais elles devaient se baisser pour passer les portes. Je n'eus pas vraiment le temps de les distinguer, car tout le monde se mit à paniquer en même temps. Je me retrouvai bousculée de toutes parts, tandis que le surveillant lançait un sort d'attaque sur les bêtes. Trois d'entre elles s'enfuirent en maugréant ce qui semblait être des jurons dans leur langue, tandis que deux autres fonçaient vers le fond de la salle. Instinctivement, je suivis le mouvement de groupe et m'enfuit à toutes jambes. Ce fut le chaos absolu tandis que la foule se ruait dans les escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée. Les gargouilles s'enfuyaient sur notre passage, terrifiant d'autres étudiants aux alentours sans le vouloir. Tout le monde criait, je n'avais plus aucun repère. Je manquai de trébucher dans les escaliers, mais Marguerite me rattrapa par le bras. On avait atteint la cour extérieure, quand quelque chose frappa mon esprit.
_ Merde, mon sac !
Je l'avais oublié dans la salle d'examen. Marguerite ouvrit les yeux en grand, sidérée.
_ Tu vas quand-même pas retourner là-bas ?!
Elle n'eût pas l'occasion de recevoir de réponse. Je fonçai déjà vers l'étage, en essayant d'éviter la marée d'étudiants en panique, ainsi que les monstres eux-mêmes qui s'enfuyaient avec des tas d'objets dans leurs griffes et leurs gueules. Je pouvais distinguer leurs ailes gris-sombres, leurs cornes de diable et leur longue queue pendant ma course, ainsi que les éclairs rapides de leurs regards agités. Peut-être que je prenais ça trop au sérieux, mais sur le moment, il me semblait inconcevable de laisser mon sac derrière moi. Il contenait tout mon travail de l'année dans certaines matières. Je franchis le seuil de la salle, pour découvrir avec horreur qu'une gargouille y était encore. Tout était en vrac, les copies d'examen éparpillées partout dans la pièce, les tables retournées, les armoires vidées. L'énorme bête monstrueuse me fixait du fond de la salle, le regard indéchiffrable. Elle avait, comme toutes les gargouilles, un air malicieux, malveillant, et une gueule au sourire béant dévoilant ses longues dents aiguisés. Tout dans son apparence, dans l'énergie de sa présence et dans son regard évoquait un parfait mélange entre un animal sauvage et une créature démoniaque. J'étais complètement figée. Comment réagir ? Devais-je entrer, fuir, attendre ? Lui lancer un sort, appeler à l'aide ? Étais-je même en danger ? Comme déconnecté de ma raison, mon corps ne parvenait pas à esquisser le moindre mouvement, hypnotisé par le regard inhumain qui me scrutait. Sans trop savoir l'expliquer, je ressentais sa présence bestiale qui envahissat toute la pièce, puissante et sauvage. Elle écrasait la mienne, faible, discrète et incertaine. Je devais sembler ridicule face à elle, humaine fragile au corps menu et pâle, petite proie tremblante et dérisoire face à cette créature qui, malgré son allure squelettique, possédait un corps démesuré, des membres puissants et des griffes acérées. Son souffle était slifflant, agité par le stress de l'action. Je n'arrivais pas à lire ses intentions. Son regard était trop étranger pour que je puisse le comprendre. Étrangement, elle semblait tout aussi fascinée par moi que je l'étais par elle. Elle grogna quelques mots dans sa langue à l'articulation bizarre et guturale. Il semblait qu'elle n'osait pas approcher. Je remarquai alors qu'elle tenait mon sac entre ses griffes. Les mots s'échappèrent de ma gorge, déformés par la peur.
_ Rends-le moi.
Elle aurait pu me saisir de force ou me tuer à tout moment, mais une force mystérieuse, provenant du fond de mes entrailles, me poussa à avancer de quelques pas. La bête contourna les tables afin de rester à distance de moi. À aucun moment on ne se quitta des yeux. Ce fut comme une parenthèse étrange et silencieuse, moi petite humaine dans sa robe noire d'été, le regard plongé dans celui d'un monstre sauvage, créature chimérique sortie des entrailles froides de la terre pour sacager notre monde. Ce fut à son tour de faire un petit bond vers moi en sifflant quelques mots. La peur me propulsa en arrière, je me collai contre le mur. Le contact visuel se rompit lorsque la gargouille s'enfuit brutalement de la pièce en renversant quelques tables et chaises, emportant mon sac pour de bon. Je restai pétrifiée pendant quelques instants, les muscles contractés et le souffle coupé, me demandant quelle folie m'avait amenée à faire face à cet être, puis je courut vers le rez de chaussée. Des surveillants lançaient des sorts pour faire fuir les quelques gargouilles restantes.
_ Mais qu'est-ce-que vous faites encore là ?! Rejoignez les autres étudiants dehors ! Il ne faudrait pas que vous vous preniez un de nos sorts par accident.
J'obéis et passai les grilles de la cour d'entrée, essoufflée. L'image distincte des yeux sauvages de la gargouille flottait dans mon esprit. Des surveillants et professeurs essayaient de rassembler et d'organiser la foule d'étudiants encore sous le choc. Il n'y avait pas de blessés, seulement des affaires perdues. Après un moment de recherche, je retrouvai Marguerite, qui m'accueillit avec des réprimandes.
_ T'es dingue ! Pourquoi t'y es retournée ?! Ma parole, tu tiens à tes manuels de magie comme si ta vie en dépendait !
_ Désolée.
J'étais encore trop chamboulée pour formuler une réponse plus complète. La foule se tut quand un professeur prit la parole avec force.
_ Nous nous excusons sincèrement pour cet incident. Bien que ces intrusions ne mettent pas nos vies en danger, elles nuisent de plus en plus à la vie de notre école. Nous allons probablement devoir modifier le lieu des examens. Notre décision vous sera communiquée dans les plus brefs délais. En attendant la reprise des épreuves, nous vous accordons 3 jours de temps libre. Je vous prie également d'informer le professeur principal de votre section à propos de tout équipement égaré durant l'incident.
La foule se dispersa. Je vins trouver mon professeur principal pour lui parler de mon sac perdu et de ce qu'il contenait, puis rejoignit Marguerite qui me tapa l'épaule amicalement.
_ Trois jours ! On va pouvoir profiter du soleil !
_ Oui...
_ Quoi, tu vas pas me dire que tu vas encore rester enfermée à réviser !?
_ Je verrai.
Elle soupira.
_ Et si on prenait des nouvelles de l'aventurier ? Il est là-bas.
Elle désigna l'étudiant qui nous avait proposé une exploration sous-terraine la veille. On le rejoignit.
_ Alors, comment ça s'est passé hier soir ?
Il sourit d'un air un peu gêné.
_ Disons que les catacombes sont... Un peu plus grandes qu'on ne le pensait. Il faudrait faire une expédition bien plus longue. Disons... Deux jours, par exemple ? On prendra des vivres et de quoi camper sur place. Ce soir, on se rejoindra à l'arrière de la cathédrale. Vous êtes toujours pas partantes ?
Marguerite secoua la tête.
_ On comptait plutôt profiter du soleil. On a eu assez de problèmes comme ça. Place à la détente !
Il haussa les épaules.
_ Comme vous voulez. De toute façon, on est déjà presque une dizaine.
_ Merci quand-même.
Marguerite s'étira.
_ J'irais bien à la plage, qu'est-ce que tu en dis ?
J'étais fatiguée par les émotions de la journée et le manque de sommeil, mais j'acceptai. On prit le bus pour descendre à une dizaine de kilomètres de la grande ville. Une plage de sable nous attendait. On avait amené nos bikinis et nos sandwichs. Je profitai de ce moment tranquille en compagnie de mon amie, allongées sur nos serviettes de plage. On s'était baignées et amusées pendant un moment dans l'eau fraîche de la mer calme, et on séchait maintenant paisiblement au soleil.
_ Tu as raison. Le repos ne passe pas que par le sommeil. Mon cerveau avait bien besoin d'un moment de détente durant lequel faire autre chose que réviser.
Elle sourit. Je poursuivit:
_ Au fait, je songeais à quelque chose...
_ Quoi donc ?
Voyant que j'étais hésitante, elle m'incita à continuer.
_ Allez, n'aies pas peur.
_ Eh bien, je me disais... Tu ne crois pas qu'on devrait les rejoindre ? L'expédition de ce soir ?
Elle fronça les sourcils, interloquée.
_ Attends... Vraiment ? Toi qui me bombardais encore hier de milliers d'inquiétudes à l'idée de croiser ces créatures... maintenant, tu veux y aller ?!
_ Ben, j'aimerais beaucoup retrouver mon sac. Et peut-être comprendre un peu mieux la situation.
Elle n'en croyait toujours pas ses oreilles.
_ Tu es sûre ? Tu veux vraiment passer deux jours à déambuler dans les catacombes ?
Je prenais une inspiration.
_ Oui.
_ Bon... Pourquoi pas. Après tout, aucune d'entre elles ne nous a attaqués. Mais je me demande si ce sera différent, étant donné que cette fois, c'est nous qui nous introduiront dans leur repère.
_ Ça devrait aller.
Cet élan aventureux me surprenait moi-même. Moi qui avais pour habitude d'éviter les ennuis à tout prix, je me mettais dans une drôle de situation. Je fermai les yeux, profitant des rayons de soleil sur ma peau, et sombrai dans le sommeil pendant une heure ou deux. Je rêvai, par bribes, des évènements de la journée : les copies d'examens éparpillées, la foule qui me bouscule, les cris et grognements agités, le regard de la créature sur moi. Marguerite me réveilla doucement.
_ Hé, Sophie. Faudrait qu'on aille préparer nos affaires pour ce soir.
Je me levai avec une étrange sensation au creux du ventre.
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