Contes érotiques : Le Fiancé de Diane
Récit érotique écrit par Jpj [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 12-03-2013 dans la catégorie Pour la première fois
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Contes érotiques : Le Fiancé de Diane
Pendant des années nous avions correspondu. Une lettre, chacun, chaque semaine. En ce
temps là le téléphone était un outil rare, d'urgence. Le média normal pour se parler
c'était le courrier, l'écriture.
Elle avait une grande écriture bleue, très ronde qui remplissait des pages et des
pages de papier à lettre.
Plutôt devrais-je dire, c'était une belle adolescente, blonde et solide, que j'avais
connue aux vacances de Noël au ski. Et l'on s'était écrit comme ça sans se revoir
pendant longtemps. Je savais tout d'elle car quand on s'écrit on se raconte. Mais je
ne savais plus rien de vrai d'elle, de son sourire, de ses cheveux, de sa bouche, de
son odeur, du doux cristal de sa voix.
Chaque semaine, jeudi, ou mercredi les bons jours, l'enveloppe était là dans ma boite.
Je mettais mon nez dedans à peine le rabat décollé, pour capter un peu d'odeur. Et
parfois j'y arrivais. C'est l'odeur le plus important. L'odeur ne ment pas, ne triche
pas. On comprend tout avec l'odeur.
Les mots ensuite, eux aussi, sont d'une totale limpidité. Les siens les miens emmêlés,
en ricochets les uns des autres, en abyme d'une lettre sur l'autre. Les mots les idées
les ressentis chacun de nos vies, confiés l'un à l'autre sans pudeur sans retenue.
Un jour est venu, un jour d'hiver. A Bordeaux, une affichette sur le tableau du resto
U, cherche covoiturage pour Montpellier, participation aux frais. La fille était de
la campagne, des Charentes. Elle était discrète et je n'ai pas su pourquoi elle
voulait aller à Montpellier. On a préparé notre affaire. J'ai acheté une carte pour
voir le chemin et calculé qu'il nous faudrait la journée. Partir tôt avec des
provisions, rouler sans discontinuer dans ma deux pattes hors d'âge qui « passait pas
le quatre-vingt »
Je n'ai rien écrit à Diane. Je n'étais pas bien sûr de mon affaire. Pas vraiment
surprendre, mais je ne savais pas comment faire coller le réel au virtuel qui avait
été notre seule vie commune depuis tant d'années. Alors je suis venu comme ça, à sec,
presque imprévoyant. Sans même me demander si elle serait là, si elle serait encore
blonde, jolie, fraiche. Sans me demander si elle me reconnaitrait. Je m'étais refusé à
y penser. Un peu comme on plonge du haut du 10m à la piscine sans trop savoir ce qu'il
y aura après les 10m d'air traversés, de l'eau fluide ou du béton.
Le voyage fut très sympa, la Charentaise avait mille histoires rurales à raconter et
moi le rural je ne connais pas et ça m'a bien intéressé de l'écouter en conduisant.
Son histoire était dramatique. Son amie de cœur, de son village, allait se marier avec
un homme de vingt ans son ainé. Un homme établi à Montpellier avec pignon sur rue, une
situation. Un homme qui l'avait choisie pour fonder une famille. C'est un mariage de
raison qu'elle répétait et on sentait bien qu'elle était prête à fondre en larmes.
Elle allait visiter sa copine pour l'aider à choisir la robe et préparer la cérémonie.
Elle avait emporté un cadeau, un énorme cadeau qui occupait tout le coffre de la
deuche : une couverture qu'elle avait fabriquée, à deux cotés, à droite épaisse
molletonnée, chaude, de l'autre toute fine. Elle m'expliquait que sa copine souffrait
au lit avec cet homme solide, épais, rougeaud qui avait le sang chaud et ne supportait
pas les couvrantes alors qu'elle était frêle, légère, sylphide et aspirait aux
couettes douillettes, lourdes et chaleureuses.
Je n'avais jamais vu plus parfait symbole de la mésentente, du malentendu, de l'erreur
capitale...
Mon histoire à moi, à coté de ça, était d'une frivolité absolue.
Comme toujours j'ai eu la chance. Après avoir déposé ma compagne de route chez son
amie, je me suis retrouvé à Plan Cabanes en ce dimanche soir d'hiver, au pied de
l'immeuble Ravaillac, une boulangerie-pâtisserie locale dans lequel Diane avait sa
piaule.
J'ai eu la chance car elle était là. Elle venait d'arriver de Nîmes où habitaient ses
parents et où elle avait passé le dimanche avec sa sœur. Je parle ici de sa sœur car
celle-ci a de l'importance dans notre histoire. Je vous raconterai après.
C'est pas peu dire qu'elle a été surprise et qu'elle a été contente !!!
Moi qui avais tant rêvé de la prendre dans mes bras, de la biser partout, de peloter
ses seins, de suivre les contours de ses hanches, de toucher son entrejambe, de la
coucher dans un lit et de l'aimer...
Moi j'ai été bien déçu car elle m'a dit, puisque que t'as ton auto, on va aller chez
mes copines, je vais te présenter. Moi je m'en foutais de ses copines, moi ce que je
voulais c'était la prendre dans mes bras et la tripoter, c'est ça que je voulais.
Bon, on a fait le tour des cités U et des copines ce dimanche soir d'hiver dans la
froidure. Dans l'auto, chaque fois j'essayais de lui prendre la main, de la toucher.
Elle avait des réticences.
En revanche, ses copines étaient toutes chaleureuses. Chacune me disait, en
confidence, je sais tout de toi, j'ai lu toutes tes lettres, presque je suis amoureuse
de toi autant que Diane.
L'une nous a gardés à dîner, tard, des fougasses et du Picpoul. Les fougasses c'est
une sorte de gâteau assez dur à la dent, farci de bouts de grattons et de lardons
grillés. C'est super bon. Elle a dit, tu lui a parlé de Machin ? Diane ne m'avait pas
parlé de Machin .
Machin c'était un militaire, un aviateur, en caserne à Garons à coté de Nîmes qui
faisait partie d'une escadrille anti-sous-marins. Diane m'a dit, on est fiancés. J'en
étais sur le cul ! Une chouette fille comme elle avec un militaire ! Elle me dit je
l'ai connu au mariage de ma soeur. Sa sœur, qui a épousé un gars de cette escadrille
d'aviateurs.
On était tous bouleversés, sa copine, moi et elle aussi... avec nos fougasses. On a
sifflé la bouteille de Picpoul. C'est un vin d'entre Montpellier et Béziers, dans le
creux de la plaine derrière le Cap-d'Agde. Un coin qui se fait inonder à chaque alerte
orange. Le vin est acide, vert, goûteux, pas cher.
Elle a dit on rentre. Sa copine a proposé de me garder vu qu'elle avait de la place
mais Diane n'a rien voulu savoir.
La piaule était minuscule, la douche commune à l'usage des 5 ou 6 chambres
d'étudiants. Le boulanger faisait plus de blé sur l'immobilier que dans son pétrin.
Diane a dit, on va aller à la douche ensemble car si quelqu'un te voit tout seul il va
cafter au taulier. Elle s'est dessappée en me tournant le dos et s'est drapée dans une
serviette. Elle m'a dit en voilà une pour toi. Elle s'est tournée et on est allés
ensemble, le savon à la main, au bout du couloir.
Drôle de situation ! J'étais quand même un peu gêné de penser qu'elle était fiancée et
qu'elle était là à poil à prendre sa douche avec moi . J'en bandais même pas ! On a
pris notre douche ensemble serrés, emmêlés, dans ce minuscule bac comme frère et
sœur. Le chauffe-eau au gaz ronflait et chauffait à fond la petite pièce. On ne voyait
plus rien dans la vapeur. On s'est mis à chahuter et à rigoler.
Le lit était minuscule. On s'est serrés sous la couverture pour se tenir chaud. On a
parlé. On a parlé de tout sauf du fiancé.
Les chairs de Diane étaient fermes. Ses bras, ses cuisses, son ventre, ses seins
étaient durs sous mes mains. Je n'avais jamais connu une fille comme ça.
Bien entendu on a rien dormi de la nuit. On n'a pas fait l'amour non plus. On n'y a
pas vraiment pensé. C'est drôle, non ? Mais c'est vrai.
L'histoire de Machin est quand même venue, au matin, sur le tapis. Elle m'a dit tu vas
le voir ce soir. Le lundi soir il a perm et vient à Montpellier. J'ai pensé, et où je
vais dormir moi. Elle m'a dit je ne couche pas avec lui. J'ai trouvé ça strange, ce
gars qu'était cocu avant même d'être marié.
Le plus rigolo c'est qu'elle m'a trainé à la fac de droit pour suivre les cours avec
elle. Le cours du matin c'était « la rupture du contrat de fiançailles » J'ai suivi
avec attention, vous pensez...
Elle avait plein de copains et de copines. A midi on est tous allés au « Pou qui
pleure » un resto U dans la vieille ville. Le soir, elle m'a dit va avec eux aux
Arceaux, moi je dois diner avec mon fiancé, je vous retrouverai après au Tipicos,
avenue du Père-Soulas.
Sans mentir, j'ai passé un super moment car tout le monde avait à cœur de me faire
oublier que Diane était avec Machin. Les tickets de resto U de Bordeaux étaient les
mêmes que ceux de Montpellier. Les gars et les filles de Montpellier étaient les mêmes
que ceux de Bordeaux. J'étais chez moi. J'étais bien et je ne pensais pas du tout à
Machin.
La copine chez qui nous avions diné dimanche soir me passait à la question. Et où as-
tu dormi ? Et t'as pu te doucher ? Et le lit est minuscule, salaud de taulier-
boulanger. Et elle s'intéressait à moi, à mon école d'ingénieurs à Bordeaux, elle
connaissait un gad'z à Aix, très sympa.
On est tous allés au Tipicos. C'était un boui-boui infâme genre le tord-boyaux de
Pierre Perret. La patronne était une grosse Andalouse style gitane. L'éclairage se
limitait à 2 néons rouge sang et un autre bleu violacé au dessus du comptoir. Un juke-
box faisait l'ambiance. La bouffe, c'était frites et merguez. Heureusement qu'on avait
déjà dîné. Diane était là sur un banc avec son fiancé à crouter sur la table de bois
dans des bacs en plastique transparents de gras. Moi, je me fondais dans le groupe,
l'air de rien, juste un petit salut à Machin.
J'étais là à regarder ce fiancé avec l'œil mauvais du grand frère. Je me disais,
heureusement qu'il ne couche pas avec elle parce que sinon je lui foutrais sur la
gueule, moi... Je me sentais jaloux mais pas jaloux normalement, jaloux comme un père,
comme un frère. Ce Machin, là, n'était pas mon concurrent, non. C'était bien pire,
c'était cet infâme individu qui allait m'enlever ma sœur, ma Diane. C'était un ennemi,
mon ennemi.
Quand tu as un concurrent, c'est facile : tu fais en sorte de séduire la fille et le
reste vient tout seul. Le concurrent vaincu est écarté et il fait sa vie ailleurs dans
d'autres bras. Tu peux même rester copain avec lui.
Mais là, je ne pouvais rien faire de plus ! C'était déjà moi qui couchais dans le lit
de Diane et la serrais dans mes bras toute la nuit durant en parlant avec elle du
monde qu'on allait conquérir tous les deux ensemble.
Mais là, avec ce gars là c'était bien plus dur ! Cet ennemi, déjà vaincu, il me
fallait en plus le réduire, l'anéantir, le faire totalement disparaître. Que plus
personne ne se souvienne qu'il a eu existé, qu'il a peut être existé mais qu'on a
oublié.
Ces idées tournaient dans ma tête et je cherchais comment m'y prendre. J'étais
drôlement remonté, vous pensez.
Alors je l'ai entrepris. Direct. Je me suis assis à coté de Diane, face à lui et je
lui ai parlé. Ces histoires de sous-marins ça m'intéressait. Alors il m'a expliqué que
son avion tirait une sorte de torpille au bout d'un câble qui filait dans l'eau à
toute allure. Cette torpille était bourrée de microphones et autres capteurs pour
repérer les sous-marins. Et que à Gibraltar, il y avait plein de sous-marins qui
passaient d'Atlantique en Méditerranée. En fait ce gars là, pendant que nous on
rigolait, en étudiants, il faisait quasiment la guerre dans son avion de chasse bi-
réacteur.
Finalement, le gars était plutôt intéressant ou du moins ce qu'il faisait l'était.
Souvent il suffit de parler pour que les inimitiés tombent. Les copains de Christine
dansaient devant le jukebox et riaient de voir les deux prétendants fraterniser au
lieu de s'étriper.
Diane a récupéré son fiancé et ils sont partis dans la voiture de celui-ci. Bien
entendu la meilleure amie a encore voulu m'héberger mais j'ai résisté : je n'allais
pas troquer un peu de confort contre une nuit entière serré contre ma Diane. Surtout
que j'avais vraiment le sentiment qu'elle aurait besoin de réconfort après cet
intermède "fiancé"
Le gars est rentré à sa caserne et j'ai retrouvé la douche et le lit et cette nuit là
encore nous n'avons rien dormi.
Elle m'a dit que ce fiancé n'était qu'un fiancé et qu'il se réservait pour la nuit de
noce. Son frère était curé et, à part ce frère, tous dans la famille étaient
militaires.
Au lendemain matin, Diane et moi on avait rattrapé le temps perdu à pas se voir. Pas
un coin de son corps ne m'était plus inconnu et c'était réciproque. On a parlé de
faire l'amour. A cette époque, on parlait longuement avant d'agir. Elle ne l'avait
jamais fait et moi je n'avais guère d'expérience.
Diane m'a dit, tu sais c'est bien que tu sois venu car j'avais décidé qu'il fallait
que ce soit avec toi que je découvre ça.
Moi je me disais, tout de même, elle a une drôle de façon d'envisager la vie
conjugale…
En réalité on ne parlait pas du tout du fiancé sauf qu'elle m'a dit, je me marie à
l'été, tu seras invité.
Moi j'étais un peu gêné. Surtout que nous avions déjà, en ces deux nuits, fait bien
plus que l'amour avec nos bras, nos mains, nos bouches. On avait tant de tendresse
accumulée dans tant de lettres pendant tant de temps...
Diane voulait que j'achète des préservatifs à la pharmacie, rue de la Loge. Moi je ne
l'ai pas fait. J'avais eu à Bordeaux des expériences sexuelles et ce truc là cassait
le sentiment. J'ai dit, on fera l'amour dans nos têtes, comme la nuit dernière. De
toutes façons, c'est pas bien de tromper ton fiancé. Diane m'a dit, il n'a aucun
droit, c'est toi qui étais le premier, d'ailleurs je lui ai déjà dit depuis longtemps.
Alors elle m'a raconté qu'elle avait dit à ce fiancé qu'elle avait eu un premier amour
et qu'elle s'était donnée.
Moi j'étais bien content d'apprendre ça. Un peu surpris mais bien content quand
même...
Heureusement que le gars l'autre soir n'avait pas compris que j'étais ce mec là… car
en bon militaire il aurait sûrement essayé de me casser la gueule !
Finalement la troisième et dernière nuit, on a encore couché ensemble dans le lit
minuscule du boulanger mais on n'a pas fait l'amour vu que nos calculs avaient montré
que c'était pile le jour du bébé et surtout parce qu'on s'aimait tant qu'on s'est tout
de suite endormis, sereins et heureux.
Les retrouvailles avec la Charentaise ont marqué le retour vers Bordeaux.
L'été suivant Diane a épousé son fiancé. Le frère curé a dit la messe et a fait un
long prêche sur la virginité des époux devant le Christ.
Honnêtement, j'étais gêné…
jpj, Montpellier, 10/2012
temps là le téléphone était un outil rare, d'urgence. Le média normal pour se parler
c'était le courrier, l'écriture.
Elle avait une grande écriture bleue, très ronde qui remplissait des pages et des
pages de papier à lettre.
Plutôt devrais-je dire, c'était une belle adolescente, blonde et solide, que j'avais
connue aux vacances de Noël au ski. Et l'on s'était écrit comme ça sans se revoir
pendant longtemps. Je savais tout d'elle car quand on s'écrit on se raconte. Mais je
ne savais plus rien de vrai d'elle, de son sourire, de ses cheveux, de sa bouche, de
son odeur, du doux cristal de sa voix.
Chaque semaine, jeudi, ou mercredi les bons jours, l'enveloppe était là dans ma boite.
Je mettais mon nez dedans à peine le rabat décollé, pour capter un peu d'odeur. Et
parfois j'y arrivais. C'est l'odeur le plus important. L'odeur ne ment pas, ne triche
pas. On comprend tout avec l'odeur.
Les mots ensuite, eux aussi, sont d'une totale limpidité. Les siens les miens emmêlés,
en ricochets les uns des autres, en abyme d'une lettre sur l'autre. Les mots les idées
les ressentis chacun de nos vies, confiés l'un à l'autre sans pudeur sans retenue.
Un jour est venu, un jour d'hiver. A Bordeaux, une affichette sur le tableau du resto
U, cherche covoiturage pour Montpellier, participation aux frais. La fille était de
la campagne, des Charentes. Elle était discrète et je n'ai pas su pourquoi elle
voulait aller à Montpellier. On a préparé notre affaire. J'ai acheté une carte pour
voir le chemin et calculé qu'il nous faudrait la journée. Partir tôt avec des
provisions, rouler sans discontinuer dans ma deux pattes hors d'âge qui « passait pas
le quatre-vingt »
Je n'ai rien écrit à Diane. Je n'étais pas bien sûr de mon affaire. Pas vraiment
surprendre, mais je ne savais pas comment faire coller le réel au virtuel qui avait
été notre seule vie commune depuis tant d'années. Alors je suis venu comme ça, à sec,
presque imprévoyant. Sans même me demander si elle serait là, si elle serait encore
blonde, jolie, fraiche. Sans me demander si elle me reconnaitrait. Je m'étais refusé à
y penser. Un peu comme on plonge du haut du 10m à la piscine sans trop savoir ce qu'il
y aura après les 10m d'air traversés, de l'eau fluide ou du béton.
Le voyage fut très sympa, la Charentaise avait mille histoires rurales à raconter et
moi le rural je ne connais pas et ça m'a bien intéressé de l'écouter en conduisant.
Son histoire était dramatique. Son amie de cœur, de son village, allait se marier avec
un homme de vingt ans son ainé. Un homme établi à Montpellier avec pignon sur rue, une
situation. Un homme qui l'avait choisie pour fonder une famille. C'est un mariage de
raison qu'elle répétait et on sentait bien qu'elle était prête à fondre en larmes.
Elle allait visiter sa copine pour l'aider à choisir la robe et préparer la cérémonie.
Elle avait emporté un cadeau, un énorme cadeau qui occupait tout le coffre de la
deuche : une couverture qu'elle avait fabriquée, à deux cotés, à droite épaisse
molletonnée, chaude, de l'autre toute fine. Elle m'expliquait que sa copine souffrait
au lit avec cet homme solide, épais, rougeaud qui avait le sang chaud et ne supportait
pas les couvrantes alors qu'elle était frêle, légère, sylphide et aspirait aux
couettes douillettes, lourdes et chaleureuses.
Je n'avais jamais vu plus parfait symbole de la mésentente, du malentendu, de l'erreur
capitale...
Mon histoire à moi, à coté de ça, était d'une frivolité absolue.
Comme toujours j'ai eu la chance. Après avoir déposé ma compagne de route chez son
amie, je me suis retrouvé à Plan Cabanes en ce dimanche soir d'hiver, au pied de
l'immeuble Ravaillac, une boulangerie-pâtisserie locale dans lequel Diane avait sa
piaule.
J'ai eu la chance car elle était là. Elle venait d'arriver de Nîmes où habitaient ses
parents et où elle avait passé le dimanche avec sa sœur. Je parle ici de sa sœur car
celle-ci a de l'importance dans notre histoire. Je vous raconterai après.
C'est pas peu dire qu'elle a été surprise et qu'elle a été contente !!!
Moi qui avais tant rêvé de la prendre dans mes bras, de la biser partout, de peloter
ses seins, de suivre les contours de ses hanches, de toucher son entrejambe, de la
coucher dans un lit et de l'aimer...
Moi j'ai été bien déçu car elle m'a dit, puisque que t'as ton auto, on va aller chez
mes copines, je vais te présenter. Moi je m'en foutais de ses copines, moi ce que je
voulais c'était la prendre dans mes bras et la tripoter, c'est ça que je voulais.
Bon, on a fait le tour des cités U et des copines ce dimanche soir d'hiver dans la
froidure. Dans l'auto, chaque fois j'essayais de lui prendre la main, de la toucher.
Elle avait des réticences.
En revanche, ses copines étaient toutes chaleureuses. Chacune me disait, en
confidence, je sais tout de toi, j'ai lu toutes tes lettres, presque je suis amoureuse
de toi autant que Diane.
L'une nous a gardés à dîner, tard, des fougasses et du Picpoul. Les fougasses c'est
une sorte de gâteau assez dur à la dent, farci de bouts de grattons et de lardons
grillés. C'est super bon. Elle a dit, tu lui a parlé de Machin ? Diane ne m'avait pas
parlé de Machin .
Machin c'était un militaire, un aviateur, en caserne à Garons à coté de Nîmes qui
faisait partie d'une escadrille anti-sous-marins. Diane m'a dit, on est fiancés. J'en
étais sur le cul ! Une chouette fille comme elle avec un militaire ! Elle me dit je
l'ai connu au mariage de ma soeur. Sa sœur, qui a épousé un gars de cette escadrille
d'aviateurs.
On était tous bouleversés, sa copine, moi et elle aussi... avec nos fougasses. On a
sifflé la bouteille de Picpoul. C'est un vin d'entre Montpellier et Béziers, dans le
creux de la plaine derrière le Cap-d'Agde. Un coin qui se fait inonder à chaque alerte
orange. Le vin est acide, vert, goûteux, pas cher.
Elle a dit on rentre. Sa copine a proposé de me garder vu qu'elle avait de la place
mais Diane n'a rien voulu savoir.
La piaule était minuscule, la douche commune à l'usage des 5 ou 6 chambres
d'étudiants. Le boulanger faisait plus de blé sur l'immobilier que dans son pétrin.
Diane a dit, on va aller à la douche ensemble car si quelqu'un te voit tout seul il va
cafter au taulier. Elle s'est dessappée en me tournant le dos et s'est drapée dans une
serviette. Elle m'a dit en voilà une pour toi. Elle s'est tournée et on est allés
ensemble, le savon à la main, au bout du couloir.
Drôle de situation ! J'étais quand même un peu gêné de penser qu'elle était fiancée et
qu'elle était là à poil à prendre sa douche avec moi . J'en bandais même pas ! On a
pris notre douche ensemble serrés, emmêlés, dans ce minuscule bac comme frère et
sœur. Le chauffe-eau au gaz ronflait et chauffait à fond la petite pièce. On ne voyait
plus rien dans la vapeur. On s'est mis à chahuter et à rigoler.
Le lit était minuscule. On s'est serrés sous la couverture pour se tenir chaud. On a
parlé. On a parlé de tout sauf du fiancé.
Les chairs de Diane étaient fermes. Ses bras, ses cuisses, son ventre, ses seins
étaient durs sous mes mains. Je n'avais jamais connu une fille comme ça.
Bien entendu on a rien dormi de la nuit. On n'a pas fait l'amour non plus. On n'y a
pas vraiment pensé. C'est drôle, non ? Mais c'est vrai.
L'histoire de Machin est quand même venue, au matin, sur le tapis. Elle m'a dit tu vas
le voir ce soir. Le lundi soir il a perm et vient à Montpellier. J'ai pensé, et où je
vais dormir moi. Elle m'a dit je ne couche pas avec lui. J'ai trouvé ça strange, ce
gars qu'était cocu avant même d'être marié.
Le plus rigolo c'est qu'elle m'a trainé à la fac de droit pour suivre les cours avec
elle. Le cours du matin c'était « la rupture du contrat de fiançailles » J'ai suivi
avec attention, vous pensez...
Elle avait plein de copains et de copines. A midi on est tous allés au « Pou qui
pleure » un resto U dans la vieille ville. Le soir, elle m'a dit va avec eux aux
Arceaux, moi je dois diner avec mon fiancé, je vous retrouverai après au Tipicos,
avenue du Père-Soulas.
Sans mentir, j'ai passé un super moment car tout le monde avait à cœur de me faire
oublier que Diane était avec Machin. Les tickets de resto U de Bordeaux étaient les
mêmes que ceux de Montpellier. Les gars et les filles de Montpellier étaient les mêmes
que ceux de Bordeaux. J'étais chez moi. J'étais bien et je ne pensais pas du tout à
Machin.
La copine chez qui nous avions diné dimanche soir me passait à la question. Et où as-
tu dormi ? Et t'as pu te doucher ? Et le lit est minuscule, salaud de taulier-
boulanger. Et elle s'intéressait à moi, à mon école d'ingénieurs à Bordeaux, elle
connaissait un gad'z à Aix, très sympa.
On est tous allés au Tipicos. C'était un boui-boui infâme genre le tord-boyaux de
Pierre Perret. La patronne était une grosse Andalouse style gitane. L'éclairage se
limitait à 2 néons rouge sang et un autre bleu violacé au dessus du comptoir. Un juke-
box faisait l'ambiance. La bouffe, c'était frites et merguez. Heureusement qu'on avait
déjà dîné. Diane était là sur un banc avec son fiancé à crouter sur la table de bois
dans des bacs en plastique transparents de gras. Moi, je me fondais dans le groupe,
l'air de rien, juste un petit salut à Machin.
J'étais là à regarder ce fiancé avec l'œil mauvais du grand frère. Je me disais,
heureusement qu'il ne couche pas avec elle parce que sinon je lui foutrais sur la
gueule, moi... Je me sentais jaloux mais pas jaloux normalement, jaloux comme un père,
comme un frère. Ce Machin, là, n'était pas mon concurrent, non. C'était bien pire,
c'était cet infâme individu qui allait m'enlever ma sœur, ma Diane. C'était un ennemi,
mon ennemi.
Quand tu as un concurrent, c'est facile : tu fais en sorte de séduire la fille et le
reste vient tout seul. Le concurrent vaincu est écarté et il fait sa vie ailleurs dans
d'autres bras. Tu peux même rester copain avec lui.
Mais là, je ne pouvais rien faire de plus ! C'était déjà moi qui couchais dans le lit
de Diane et la serrais dans mes bras toute la nuit durant en parlant avec elle du
monde qu'on allait conquérir tous les deux ensemble.
Mais là, avec ce gars là c'était bien plus dur ! Cet ennemi, déjà vaincu, il me
fallait en plus le réduire, l'anéantir, le faire totalement disparaître. Que plus
personne ne se souvienne qu'il a eu existé, qu'il a peut être existé mais qu'on a
oublié.
Ces idées tournaient dans ma tête et je cherchais comment m'y prendre. J'étais
drôlement remonté, vous pensez.
Alors je l'ai entrepris. Direct. Je me suis assis à coté de Diane, face à lui et je
lui ai parlé. Ces histoires de sous-marins ça m'intéressait. Alors il m'a expliqué que
son avion tirait une sorte de torpille au bout d'un câble qui filait dans l'eau à
toute allure. Cette torpille était bourrée de microphones et autres capteurs pour
repérer les sous-marins. Et que à Gibraltar, il y avait plein de sous-marins qui
passaient d'Atlantique en Méditerranée. En fait ce gars là, pendant que nous on
rigolait, en étudiants, il faisait quasiment la guerre dans son avion de chasse bi-
réacteur.
Finalement, le gars était plutôt intéressant ou du moins ce qu'il faisait l'était.
Souvent il suffit de parler pour que les inimitiés tombent. Les copains de Christine
dansaient devant le jukebox et riaient de voir les deux prétendants fraterniser au
lieu de s'étriper.
Diane a récupéré son fiancé et ils sont partis dans la voiture de celui-ci. Bien
entendu la meilleure amie a encore voulu m'héberger mais j'ai résisté : je n'allais
pas troquer un peu de confort contre une nuit entière serré contre ma Diane. Surtout
que j'avais vraiment le sentiment qu'elle aurait besoin de réconfort après cet
intermède "fiancé"
Le gars est rentré à sa caserne et j'ai retrouvé la douche et le lit et cette nuit là
encore nous n'avons rien dormi.
Elle m'a dit que ce fiancé n'était qu'un fiancé et qu'il se réservait pour la nuit de
noce. Son frère était curé et, à part ce frère, tous dans la famille étaient
militaires.
Au lendemain matin, Diane et moi on avait rattrapé le temps perdu à pas se voir. Pas
un coin de son corps ne m'était plus inconnu et c'était réciproque. On a parlé de
faire l'amour. A cette époque, on parlait longuement avant d'agir. Elle ne l'avait
jamais fait et moi je n'avais guère d'expérience.
Diane m'a dit, tu sais c'est bien que tu sois venu car j'avais décidé qu'il fallait
que ce soit avec toi que je découvre ça.
Moi je me disais, tout de même, elle a une drôle de façon d'envisager la vie
conjugale…
En réalité on ne parlait pas du tout du fiancé sauf qu'elle m'a dit, je me marie à
l'été, tu seras invité.
Moi j'étais un peu gêné. Surtout que nous avions déjà, en ces deux nuits, fait bien
plus que l'amour avec nos bras, nos mains, nos bouches. On avait tant de tendresse
accumulée dans tant de lettres pendant tant de temps...
Diane voulait que j'achète des préservatifs à la pharmacie, rue de la Loge. Moi je ne
l'ai pas fait. J'avais eu à Bordeaux des expériences sexuelles et ce truc là cassait
le sentiment. J'ai dit, on fera l'amour dans nos têtes, comme la nuit dernière. De
toutes façons, c'est pas bien de tromper ton fiancé. Diane m'a dit, il n'a aucun
droit, c'est toi qui étais le premier, d'ailleurs je lui ai déjà dit depuis longtemps.
Alors elle m'a raconté qu'elle avait dit à ce fiancé qu'elle avait eu un premier amour
et qu'elle s'était donnée.
Moi j'étais bien content d'apprendre ça. Un peu surpris mais bien content quand
même...
Heureusement que le gars l'autre soir n'avait pas compris que j'étais ce mec là… car
en bon militaire il aurait sûrement essayé de me casser la gueule !
Finalement la troisième et dernière nuit, on a encore couché ensemble dans le lit
minuscule du boulanger mais on n'a pas fait l'amour vu que nos calculs avaient montré
que c'était pile le jour du bébé et surtout parce qu'on s'aimait tant qu'on s'est tout
de suite endormis, sereins et heureux.
Les retrouvailles avec la Charentaise ont marqué le retour vers Bordeaux.
L'été suivant Diane a épousé son fiancé. Le frère curé a dit la messe et a fait un
long prêche sur la virginité des époux devant le Christ.
Honnêtement, j'étais gêné…
jpj, Montpellier, 10/2012
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