Garçonne - histoire érotique

jpj, 9/2012

A Bordeaux il y avait 2 sortes d'autobus. Les rouges, de ville, étaient classe, bien fréquentés et on y avait toujours une place assise. Les verts, de banlieue étaient populaires et aux heures de pointe on restait debout entassés dans l'allée centrale.
Un midi, en sortant du lycée, je me suis retrouvé avec Mireille, la voisine. On discutait. Serrés. Mon bras était resté haut et ma main posée sur la poitrine, par quelque hasard.
Le dos de ma main s'enfonçait dans son pull et j'ai senti vivre ses seins.

Mireille avait cessé de parler mais ses seins ronds, doux, mous, faisaient conversation. Ses yeux étaient baissés et je n'étais pas bien sûr de la réalité de ce qui m'arrivait.

Longtemps j'ai rêvé à ces instants magiques. La nuit, je refaisait ses seins en modelant le polochon pour les caresser et revivre cette impression fugitive.

Bien entendu le miracle ne s'est jamais reproduit, la voisine est restée inaccessible, comme murée dans une autre vie, parallèle, dans un autre lycée, à l'autre bout de la ville.
Sauf qu'un jour, bien plus tard, après le bac, nous nous sommes retrouvés sur le Bassin d'Arcachon dans la même bande. Elle, elle sortait avec un grand gars, quasiment le chef, en tous cas elle n'était pas pour moi.
Mais elle m'a présenté une copine qui, disait-elle avait flashé sur moi.

J'ai toujours suspecté Mireille d'avoir raconté à ses copines notre émoi dans l'autobus et d'en avoir fait fantasmé certaines. C'était d'autant plus flagrant que cette copine-là n'avait rien, mais alors rien du tout. C'était un vrai garçon avec les cheveux courts et les hanches étroites. En plus, petite, brune, vive et très sportive. Son papa était l'entraineur de l'équipe de Bègles qui tenait à l'époque le haut du pavé.
Alors la copine genre limande sole, c'était un cadeau myosotis, vergissmeinnicht, clin d’œil au passé... que me faisait Mireille ; une façon d'humour pour ne pas oublier.


Moi, je cherchais un équipier pour faire les régates en 420 ; cette petite sportive qui me tombait du ciel était bienvenue. D'autant que mon père m'avait offert un spi pour la mention au bac et que c'était coton à envoyer, fallait de l'entrainement et de la force. Light is right, cette fille androgyne menue et musclée était pain béni sur mon dériveur.

Je l'ai baptisée le mousse. Et une semaine après, vu qu'elle était nouvelle, tout le monde, tous les copains l'appelaient le mousse. Elle n'était pas grande. Pour naviguer elle était en short, sweet et pull sous son ciré qui descendait aux genoux. Le harnais du trapèze gardait le ciré ouvert et les deux sangles basses lui barraient le haut des cuisses. Elle était costaud et, à chaque vague poussait fort pour sortir en rappel, les pieds calés sur le bois vernis, l'un appuyé au hauban, les tennis trempés, les deux jambes tendues, aspergée par l'embrun. Dans le creux qui suivait elle rentrait, se collait à moi avec son ciré tout mouillé et on se serrait pour faire moins de prise au vent et garder le bateau à plat.

Pour moi c'était un copain de voile avec qui je m'entendais si bien que nous avons cette année-là gagné toutes les régates du Cap-Ferret jusqu'au Pila en passant par Ares, Andernos, le Mauret et Taussat.
Bien sûr j'étais parfois troublé, bêtement, de son short tout plat à l’entre jambes, trempé d'eau de mer et tendu des sangles du harnais. Mais très vite le vent rabattait le ciré et coupait court à mes fantasmes.
Le mousse était mon copain de sport, de compète, de castagne et rien d'autre.

Un soir nous revenions du Piquey vers Andernos au descendant sur les varechs. Il fallait tirer droit sans passer par les chenaux car il était tard. Le noroit poussait tout droit et nous avions le foc au tangon et le spi en ballon. Il faisait chaud au vent arrière et nous étions tous deux torse nu, elle en short, moi en maillot de bain, assis au fond du bateau, de part et d'autre de la barre, pour ne pas enfourner et favoriser le planning.
Ce n'était pas la première fois que je voyais son buste ; nous étions déjà des intimes de vestiaires comme le sont les équipiers. Mais, là, dans la douceur du soir, bras dessus bras dessous par dessus la barre, adossés au tableau arrière, je me suis rendu compte que je n'aurais pas eu cette attitude, cette posture avec un garçon.

Alors le mousse a tourné sa tête vers moi et moi j'ai posé mes lèvres sur les siennes.

Quelques jours après nous sommes allés à Arcachon pour la remise des coupes, le dîner et la soirée.
Nous étions fiers, le mousse et moi.
Mais les gens nous regardaient bizarrement. Le mousse avait toujours sa tête de garçonnet, son teeshirt et ses tennis. C'est la jupette blanche qui faisait désordre. Et aussi mon bras autour de sa taille et ses yeux tendres et amoureux.

Le temps a passé, le mousse est entré à la fac, elle a mis des soutien-gorges molletonnés et l’ambiguïté s'est dissoute dans le politiquement correct bêtement ordinaire...