Sarah, une nouvelle mission
Récit érotique écrit par PP06 [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 08-09-2021 dans la catégorie Entre-nous, hommes et femmes
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Sarah, une nouvelle mission
Après cette pause estivale durant laquelle j’ai été particulièrement occupé, voyages et garde des petits-enfants, je me suis remis dernière mon ordinateur des idées plein la tête.
J’ai ainsi imaginé une suite aux deux premiers récits des aventures de Sarah Castaing, « Branle-bas de combat » et « Sarah, le retour ». Commissaire de police, elle vient d’être nommée adjointe à l’OCAANE (Office Central pour les Affaires Anciennes Non Elucidées) récemment créé pour lutter contre la criminalité et en particulier les Cold case.
L’action débute à la fin de la seconde partie.
Avant de commencer, je n’oublie pas de remercier Lætitia qui, sans le savoir, a été source d’inspiration, et même plus… enfin je vous laisse le découvrir. Vous connaissez certainement tous ses récits, sinon allez vite lire « Road trip » …
Un soir, Sarah a trompé Nicolas, une bêtise qu’elle regrette amèrement. Ils étaient fiancés et devaient se marier quelques mois plus tard. Nicolas ne l’a pas supporté, il est parti. Sarah pense toujours à lui. Elle espère qu’il lui pardonnera.
---oOo---
Maintenant, Sarah est seule. Elle aimerait revoir Nicolas, lui parler, lui dire qu’elle regrette, lui dire qu’elle n’aime que lui… mais voudra-t-il l’écouter ? Voudra-t-il lui pardonner ?
Comment reprendre contact ? Lui téléphoner ? Non trop protocolaire. Un mail ? C’est nul.
Comme toujours, Sarah décide de foncer, quand il y a un obstacle elle préfère l’aborder de face, bien décidée à se battre.
Grâce à Jérôme, son collègue, elle a son adresse. Un dimanche, en fin d’après-midi, Nicolas doit être chez lui, elle ne peut pas le rater.
Dans la voiture qui la mène vers son amour perdu, elle rêve. Elle se voit devant la porte, un peu stressée, elle sonne. Nicolas lui ouvre. Ils se regardent quelques secondes. Elle n’ose pas bouger, n’ose rien dire. Nicolas réagit le premier, une fois la surprise passée, timidement il lui sourit, il s’efface, l’invite à entrer et referme la porte.
« Mon Nicolas, je te retrouve ».
Sarah est tirée de sa rêverie par son GPS qui annonce « vous arrivez à destination », mais son rêve continue. Nicolas la prend dans ses bras, Ils s’embrassent… elle est arrivée, la réalité sera-t-elle aussi belle que son imagination ?
Son cœur bat trop fort dans sa poitrine, marcher un peu diminuera son stress, elle gare son véhicule un peu plus loin. Elle est décidée, rien ne la fera reculer. Elle va enfin revoir Nicolas, son Nicolas.
D’un doigt tremblant, elle sonne à sa porte. Une fois, deux fois, la porte s’ouvre sur une jeune femme tout sourire :
- Bonjour, c’est pour quoi ?
Sous le choc, Sarah se trouble, elle regrette déjà d’être venue. Nicolas ne vit pas seul.
Elle bafouille :
- Je… je venais voir Nicolas.
- C’est de la part de qui ?
- Sarah, une amie. Et vous ? Ose-t-telle demander, redoutant la réponse.
- Stéphanie, enchantée lui dit-elle en lui tendant la main. Je suis aussi une amie de Nicolas. Il m’a prêté son appartement pendant son absence.
- Il n’est pas là ?
- Non, il est parti pour une mission à Montréal depuis quelques jours.
La déception et la tristesse se lisent sur le visage de Sarah. Stéphanie le remarque, elle répond à la question que Sarah ne lui pose pas :
- Il sera sûrement absent plusieurs mois. Je lui dirais que vous êtes venue le voir, il doit m’appeler pour me donner sa nouvelle adresse.
- Non… Non, ce n’est pas nécessaire, je passais juste. Au revoir.
Sarah se sauve, pour que Stéphanie ne voit pas les larmes qu’elle a du mal à retenir.
---oOo---
Sarah est désespérée, elle aurait tant voulu au moins expliquer à Nicolas, qu’il comprenne qu’elle l’aime toujours, qu’elle regrette d’avoir été si faible, qu’elle ne veut pas le perdre.
Mais il est loin maintenant, mieux vaut l’oublier, si c’est possible.
Sarah se réfugie dans son travail, les affaires confiées à l’Office Central ne manquent pas. Comme tout service nouvellement créé, l’Office récupère les affaires laissées en suspens depuis plusieurs années. Ces enquêtes sont les plus complexes, elle espère qu’avec les nouvelles techniques, comme l’ADN ou la reconnaissance faciale, elle va faire des miracles.
Les fichiers de délinquants se sont multipliés, reprenant des informations parfois vieilles de plusieurs années. Comme toujours, Jérôme fait merveille, il jongle d’un fichier à l’autre, cherchant la faille, l’élément qui permettra à Sarah et à son équipe de résoudre l’impossible.
Sarah s’entend bien avec son patron, le Colonel Serge Strogoff, il lui fait entière confiance. C’est un gendarme, la guerre des polices n’est pas pour eux. Le Colonel n’aime pas ses initiales, aussi depuis le lycée on l’appelle Michel, va savoir pourquoi ? Sarah en a vite pris l’habitude, et fait comme tout le monde.
Rapidement les missions confiées à l’Office central se sont étoffées. La mission principale, est l’aide aux enquêteurs partout en France pour coordonner les actions des différents services, et faire le lien avec les services de police à l’étranger dans le cadre de la coopération internationale contre la criminalité mise en place lors du dernier sommet européen des chefs de gouvernement.
Sarah se souvient de sa première enquête, elle est fière d’avoir pu résoudre en quelques semaines une affaire de pédophilie dans un club sportif. Trois entraîneurs abusaient d’enfants depuis plusieurs années sans que les dirigeants, obligatoirement au courant, ne l’aient jamais signalé. Une omerta qui fera tomber plusieurs têtes, y compris des élus locaux.
Quand on met les moyens, les résultats ne se font pas attendre. Les succès se suivent, permettant d’avoir encore plus de moyens, pour être encore plus efficace.
Il n’y a pas que des meurtres ou des viols, deux dossiers ont donné du fil à retordre, occasionnés des nuits et des nuits de planque. Sarah en avait fait une affaire personnelle, Michel lui a donné carte blanche. L’obstination a payé, une équipe de pilleurs de châteaux de la banlieue parisienne a été démantelée, elle revendait les œuvres d’art sur les marchés d’antiquité et les brocantes de Province, et l’arrestation d’un gang de roumains qui volaient le cuivre des réseaux SNCF le long des voies, un trafic qui durait depuis plusieurs années.
Après chaque succès, Sarah ne peut s’empêcher de repenser à Nicolas, il aurait été fier d’elle. Elle rêve de se blottir dans ses bras. Que fait-il en ce moment ? Où est-il ?
---oOo---
Partout dans le monde, que ce soit à Londres, à Berlin, à Singapour ou à Paris, tous les jours, des centaines de clients vont voir des prostituées, un mal nécessaire comme disent certains. Le commerce est florissant, il brasse des millions, pour ne pas dire des milliards de dollars, mais il comporte aussi des risques.
Un client intéresse plus particulièrement Sarah. En ce moment, il entre dans un salon de massage asiatique en banlieue parisienne. Mais ça, Sarah ne le sait pas encore. Ni qu’il va ressortir dans quelques minutes. Suzie Young la jeune masseuse chinoise arrivée de Pékin il y a moins d’un mois, qui ne parle qu’un français très approximatif, sera découverte le soir même dans son salon, allongée nue sur son lit, la gorge broyée, les seins affreusement mutilés.
Qui est cet homme ? Ce pervers que Sarah recherche. Trois prostituées assassinées en moins de deux mois ça fait réfléchir.
Elle a aussi été alertée par ses collègues allemands et italiens, et après vérification deux meurtres ont également été commis en Belgique. Le mode opératoire parait toujours le même, une véritable signature. C’est un sadique, les pauvres filles, toujours des prostituées, sont retrouvées nues, allongées sur leur lit, étranglées par un foulard blanc, le bout des seins coupés post mortem.
Aucune trace permettant de l’identifier, il doit porter des gants. Cet individu se joue des polices, il a été baptisé « le tueur de prostituées » par les médias.
Un mois après, Sarah reçoit un message de Bruxelles, cette fois la jeune Kalyna une ukrainienne originaire de l’est, vient d’échapper à la mort, des traces de strangulation sur le cou. Elle a été étonnée par ce client qui portait des gants, il n’a pas voulu se déshabiller. Elle était sur ses gardes, une bombe de gaz lacrymogène à portée de main, il y a tellement de clients bizarres. Allongée nue comme il le lui a demandé, il lui a sauté dessus un foulard blanc à la main, elle a crié, s’est défendue alors qu’elle avait du mal à respirer. C’était son jour de chance, l’homme a pris peur, il s’est enfui.
Enfin une piste. Kalyna fait une description précise de son agresseur, brun, la cinquantaine, pas très grand, trapu. La police peut enfin établir un portrait-robot. Celui-ci est affiché dans tous les commissariats et tous les aéroports en Europe.
Son signalement est envoyé à Interpol. Une véritable chasse à l’homme commence, avant qu’il ne fasse une nouvelle victime. Mais dans quelle direction chercher ?
Les polices européennes décident d’unir leurs forces. Sarah se rend en Italie à la rencontre de ses homologues européens.
A l’aéroport de Florence, elle est accueillie par son collègue Giuseppe Fizzi capitaine des Carabinieri. Ils échangent depuis quelques mois par interne, mais c’est la première fois qu’ils se rencontrent.
Bel homme, l’Italien type, il fait la bise à Sarah sans rien demander, et il parle sans s’arrêter, il parle avec les mains comme tous les italiens. Vu la circulation, cramponnée à son siège, Sarah a envie de lui crier « les mains sur le volant ». Enfin ils atteignent le commissariat sans encombre.
Giuseppe fait la présentation de son équipe, de son adjointe, une jeune femme aussi discrète que son patron est volubile. Les deux femmes se serrent la main. Son regard trouble Sarah.
Les collègues allemands et belges sont déjà là. Journée de travail bien rempli, juste un sandwich à midi sur le bord du bureau.
Échange de dossiers, chaque agression est décrite par les enquêteurs de chaque pays, il n’y a aucun doute, c’est bien le même homme. Autre particularité, aucune trace d’agression sexuelle, même si à l’autopsie il est difficile de savoir avec exactitude pour une prostituée. Huit affaires portent sa signature, Kalyna aurait été la neuvième.
Lors de chaque meurtre, la police scientifique a passé la chambre au peigne fin, aucun indice ne permet de l’identifier avec certitude. Pourtant une centaine d’empreintes digitales et génétiques sont relevées, dans une chambre de passe rien de bien étonnant.
Il est décidé de stocker toutes ces traces dans une base de données commune, sous l’égide d’Europol. Cela fait au moins 2000 empreintes.
La recherche dans les fichiers français le FAED (Fichier automatisé des Empreintes Digitales) et avec le FNAEG (Fichier Nationale automatisé des empreintes génétiques) n’avaient jusque-là rien donné, on peut espérer un meilleur résultat en comparant les traces entre elles.
Sarah est confiante, elle sait que Jérôme saura faire tous les rapprochements possibles. Avec un peu de chance …
---oOo---
La réunion est terminée. Sarah se repose un café à la main :
Ouf ! Je suis crevée, ce matin je me suis levée tôt, je dormirais dans l’avion. Une voiture emmène rapidement nos collègues allemands et belges à l’aéroport, ils ne veulent pas rater le dernier vol.
J’ai plus de chance, mon avion pour Paris est dans deux heures, j’ai un peu de temps devant moi.
Charmeur, Giuseppe ne m’a pas quitté de la journée, toujours un compliment à la bouche. Est-ce une illusion ? Ces mains étaient baladeuses, pourtant rien dans son regard, ni ses paroles ne traduisent la moindre ambiguïté. Je ne m’en suis pas offusqué, il est pareil avec toutes les femmes, sauf avec son adjointe qui je crois l’impressionne.
Avant de me raccompagner à l’aéroport, Giuseppe me propose un tour de ville :
- Impossible de quitter Florence sans en voir les joyaux, me dit-il en faisant de grands gestes.
Je découvre ainsi le Duomo, le fameux David de Michel Ange sur la piazza della Signoria, le Ponte Vecchio sur l’Arno, pour terminer par les incontournables jardins Giardino Bardini typique de la Renaissance, afin de profiter du coucher de soleil sur Florence :
- Le jardin des amoureux, murmure Giuseppe avec un large sourire.
En descendant de voiture, galant, il m’ouvre la porte et me tend la main, un frisson me parcourt.
En cette période de l’année et à cette heure, le jardin est presque désert. Nous sommes à priori les seuls à nous aventurer en haut de l’escalier central, afin de profiter de la vue panoramique sur la ville. Le ciel rosi à l’horizon.
Sous une tonnelle fleurie, dans le parfum enivrant des premières roses de l’année, Giuseppe me montre sa ville, son bras négligemment posé sur mon épaule. Mon guide me désigne les différents bâtiments, les églises, les places, il susurre plus qu’il ne parle. Je sens son souffle dans le cou, troublée de cette promiscuité que je n’ai pas vu venir. Il y a si longtemps que je n’ai pas…
Je pense à Nicolas, j’aimerais être dans ses bras, me serrer contre lui, sentir ses lèvres sur mon cou, blottie contre lui regardant dans la même direction, vers notre avenir, … Mais Giuseppe parle, parle, détaillant chaque recoin de Florence.
Je ferme les yeux. Nicolas où es-tu ? Où es-tu mon amour, reviens-moi, c’est avec toi que j’aimerais visiter cette ville magique.
A ce moment, une voix forte s’élève nous faisant sursauter :
- Che … scandalo !
Deux mamas italiennes crient à pleins poumons. Je ne saisis que quelques bribes de mots :
- …luto !
- Perverso !
- Esibizionista !
- … la guardia !
Je ne comprends pas tout, mais le son de leurs voix ne trompe pas. Giuseppe s’arrête de parler, il me traduit en deux mots les cris que nous entendons. Nous éclatons de rire en voyant un jeune couple partir en courant en se réajustant tant bien que mal, ne laissant aucun doute sur l’activité qui a déclenché le courroux de ces matrones.
En tendant l’oreille, nous entendons encore le rire de la jeune femme dans le lointain.
« Ah ces italiens !»
Hilare, Giuseppe me prend par le bras. L’heure tourne, direction l’aéroport, direction Paris.
---oOo---
Dans l’avion qui la ramène en France, Sarah oublie un temps son enquête. Elle pense avec tristesse à Nicolas. Un voyage en Italie, leur rêve, Venise, Vérone, Florence, elle s’imagine avec lui à la place de ce couple qu’elle a vu s’enfuir dans les jardins à l’approche des mégères.
Sarah ferme les yeux, elle a posé une couverture sur ses genoux. Sa main glisse sous sa robe. Sa main ou celle de Nicolas ? Son esprit s’évade :
« Blottie dans les bras de Nicolas, elle flâne dans ce jardin rempli de fleurs pour profiter du coucher de soleil sur Florence. Ils sont assis sur un banc en pierre sous une tonnelle couverte de glycine et de rosiers. Le jardin est désert. Quelques rares promeneurs visibles au loin. Ils sont seuls au monde pour profiter de la vue exceptionnelle sur la ville.
Un bras autour de son épaule, Nicolas la serre contre lui, pose ses lèvres sur les siennes. Elle a envie de faire l’amour, maintenant, dans ce jardin, face à la ville témoin de leur amour.
Nicolas passe sa main sous la robe de Sarah, elle écarte légèrement les jambes pour faciliter la caresse qu’elle attend, qu’elle espère. Leurs bouches se rencontrent, leurs langues se mêlent. Sarah déboutonne le pantalon de Nicolas, et extrait sa queue qui se dresse fièrement devant ses yeux. Elle en a envie depuis tout ce temps. Elle se penche, le prend entre ses lèvres. Elle retrouve les sensations qu’elle croyait perdues. C’est elle qui mène la cadence, tantôt rapide, tantôt lentement, sa main en dessous lui caresse les bourses, tendrement. Elle le sent gonfler dans sa bouche, elle joue avec lui s’arrêtant un instant chaque fois que Nicolas est prêt à jouir. Mais elle veut plus, sentant un grand vide entre ses cuisses.
Quelques coups de langue sur le gland qu’elle est fière de voir pointer vers elle, elle se lève, soulève sa robe, ôte sa culotte et se place à califourchon sur les genoux de Nicolas. Les bras autour de son cou, elle s’empale lentement sur le sexe bien dressé. Elle s’agite sur lui, elle le veut tout entier en elle. Nicolas a du mal à se retenir, le moment est magique. Il lui pétrit les seins qu’il a fait jaillir de sa robe en défaisant quelques boutons, prend ses tétons entre ses lèvres gourmandes. Elle frisonne, une onde de plaisir irradie tout son corps.
Sarah sent l’orgasme monter en elle, elle devine que Nicolas est prêt. Elle veut jouir avec lui, en même temps que lui. Elle accélère le mouvement. Elle ouvre la bouche comme si elle manquait d’air quand Nicolas se répand en elle, elle sait que les jets puissants de son chéri vont déclencher sa jouissance dans ce jardin, au milieu des fleurs, face à cette ville magique, leur ville. Lorsqu’une voix retentit … »
Le commandant de bord vient d’annoncer la descente sur Paris tirant Sarah de sa rêverie.
Les mains entre ses cuisses, cachées par la couverture, Sarah ouvre les yeux. Ouf ! Son voisin ne s’est aperçu de rien.
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L’analyse du fichier européen n’a rien donné. Pourtant Jérôme, comme ses collègues, ont mis tous les moyens pour faire parler les empreintes recueillies sur les scènes de crimes.
Le travail ne manque pas, les affaires s’enchaînent, pas le temps de souffler. Le tueur n’a pas recommencé, l’expérience de Bruxelles a dû lui faire peur.
Sarah rentre de mission, son avion en provenance de Séoul en Corée a atterri ce matin. Juste le temps de passer chez elle pour se changer. Elle arrive à temps pour la réunion du briefing quotidien avec ses coéquipiers.
Elle a préparé un compte-rendu complet de sa mission. En Corée, elle avait rendez-vous avec la police locale, pour une enquête concernant des ressortissants français ayant séjourné dans le pays quelques années auparavant. Le couple venait d’être arrêté en France. Cette affaire avait fait grand bruit dans la presse, tous les médias en avaient parlé sous le nom de l’affaire des bébés congelés. En effet, suite à un signalement de leurs voisins, découverte macabre, le corps gelé d’un bébé dans le congélateur de leur garage.
Le déplacement de Sarah n’a pas été inutile. La police coréenne a ressorti une affaire close depuis quelques années, n’ayant jamais trouvé l’auteur d’un double homicide, celui de deux nouveau-nés, retrouvés congelés dans une maison dont les occupants étaient rentrés en France. Pas trop zélés, les policiers avaient rapidement classé l’affaire. Ils s’étaient réveillés suite à la médiatisation de l’arrestation du couple, intéressant tout particulièrement les journaux people et la presse à scandales.
Pas question de répondre à la demande d’extradition demandée par la Corée, le couple sera jugé en France. Sarah espère que ces amants diaboliques passeront le reste de leur vie en prison, à moins qu’un psychiatre conciliant ne les déclare irresponsables, leur évitant d’être jugés. Internés dans un hôpital psychiatrique, ils pourraient ressortir au bout de quelques années, étant déclarés guéris… à moins que ce ne soit par manque de place… mais Sarah a encore bon espoir de les voir passer devant une cour d’assises.
La journée se termine. Un peu fatiguée par son voyage, et le décalage horaire, Sarah prévoit une soirée tranquille, et vite au lit.
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Au même moment, à environ 7231 km, sur l’aéroport international d’Orlando en Floride, atterrissait le vol TS 604 d’Air Transat en provenance de Montréal. Parmi les familles québécoises venues visiter les parcs d’attractions, Disneyland, Epcot, Animal Kingdom ou Universal, José-Maria Vargas, citoyen américain d’origine hispanique, rentre chez lui.
Les procédures d’entrée aux États-Unis sont longues, il faut prendre son mal en patience, attendre derrière la ligne jaune. José-Maria le sait, il n’est pas pressé. Au milieu des familles dont certaines portent déjà des oreilles de Mickey, souvenir d’un précédent séjour, chacun attend son tour dans la longue file qui s’allonge devant le poste de police.
José-Maria a l’habitude, il voyage souvent. Après le contrôle du passeport, la prise d’une photo et des empreintes digitales, il sait ce que les autres passagers ignorent certainement, les policiers interrogent les fichiers de police pour vérifier si par hasard ils n’ont pas affaire à un délinquant ou à un criminel connu de leur service. José-Maria est tranquille, il n’a rien à se reprocher, même pas anxieux quand arrive son tour.
Enfin c’est à lui, plus d’une heure après l’atterrissage il est déclaré apte à fouler le territoire américain. Il va rejoindre son véhicule dans le parking Nord de l’aéroport, là où il l’a laissé il y a trois jours. Et direction sa maison dans les Keys, à Key Largo exactement, une belle villa face à la mer.
Dernière formalité, les étrangers doivent donner à l’agent de service le formulaire rempli dans l’avion, celui où on leur demande s’ils sont allés dans une ferme il y a moins de 15 jours, s’ils sont anciens nazis ou s’ils envisagent de tuer le Président des États-Unis. Gare à celui qui répond « oui » à une seule question, même si c’est pour s’amuser.
Citoyen américain, José-Maria est dispensé de ce document. Il emprunte la sortie « US Citizen » et passe devant le Sergent Jack Spillane chargé de la collecte.
Après 40 ans de bons et loyaux services, Jack est à quelques mois de la retraite, ce job ne correspond pas à ses années de service, plutôt une voie de garage. Originaire de Pennsylvanie, il a fait toute sa carrière dans la police en Floride. Il a été affecté à l’aéroport d’Orlando, il y a quelques d’années pour des travaux subalternes. Pourtant ses états de service sont élogieux, mais il n’a pas su évoluer. Tous ces ordinateurs, ces codes, ces fichiers, ne lui ont jamais servi quand il était à la criminelle à Miami. Il s’est toujours fié à son flair et à sa mémoire dont il a plus confiance qu’en celle de toutes les machines.
Il en avait résolu des affaires en 40 ans, mais il est de la vieille école, sans ordinateur, sans tous ces fichiers qui évitent de penser. Il finissait donc sa carrière en collectant un bout de papier à l’arrivée des vols internationaux.
Comme tous les jours, il fait son travail machinalement sans faire attention à qui passe devant lui. De temps à autre il réclame un passeport, c’est aussi dans ses attributions, « contrôle inopiné ». Le passager choisi doit attendre que Jack feuillette le document présenté, tout en ramassant les formulaires des autres passagers de l’autre main afin de ne pas les retarder. Enfin libéré sur un « vous pouvez passer », le passager se demande encore le pourquoi de ce contrôle, pourquoi lui. Seul Jack le sait, mais il ne saurait pas expliquer pourquoi celui-là plutôt qu’un autre, son instinct est seul juge.
Au passage de José-Maria Vargas, sans lever la tête, Jack lance « contrôle passeport please ! ». José-Maria lui tend son passeport, un peu énervé de ce nouveau contretemps.
Nonchalamment, Jack regarde José-Maria pour comparer la photo, feuillette les pages sans vraiment les regarder.
Appelant un de ses collègues pour le remplacer, Jack fait signe à José-Maria de le suivre sans plus d’explication. En bougonnant, mais ne voulant pas faire d’histoires à cet employé zélé, José-Maria le suit sous le regard intrigué des autres passagers.
Après quelques questions d’usage, Jack suit la procédure, il envoie un message à son service central, qui fera parvenir l’information à Interpol.
Il sait que les ordinateurs vont se mettre à mouliner dans tous les sens avant de recevoir une réponse. Il devra attendre une heure avant d’avoir la confirmation qu’il vient d’appréhender celui que tout le monde recherche, son ordinateur interne ne se trompe jamais. Il est sûr de lui.
---oOo---
Sarah est fatiguée, la journée se termine, un dernier coup d’œil à sa messagerie avant de fermer son ordinateur. Un message arrive en provenance du Canada, de Jacques, un gendarme de la Police Montée, la Gendarmerie Royale d’Ottawa, avec qui elle a déjà échangé à plusieurs reprises. Le message signale le meurtre d’une prostituée dans le quartier chaud de Montréal. Sarah sursaute, le mode opératoire l’interpelle. La jeune femme a été retrouvée nue allongé sur son lit, une écharpe blanche nouée autour du cou, les seins mutilés, aucune trace de violences sexuelles n’a été détectée. Pas un crime ordinaire.
Au même moment, à Rome, Berlin et Bruxelles, les collègues de Sarah reçoivent la même information. Jérôme n’est pas le seul à consulter la base de données européenne. Il consulte, compare, envoie des messages. Les échanges fusent, pas de doute, le « tueur de prostituées » a fait une nouvelle victime.
Sarah est songeuse. Tiens, il refait parler de lui, il se tenait tranquille depuis plus de deux mois, le voilà maintenant au Canada. Elle pense à Jacques son collègue québécois, « bienvenu au club » se dit-elle en souriant.
L’heure tourne, pour l’instant il n’y a plus rien à faire. Mais Sarah ne peut s’empêcher, avant de partir, de lire les messages de ses collègues européens, encore des déplacements à prévoir. Avec un peu de chance, Jacques l’invitera à Montréal, songe-t-elle avec l’espoir de revoir Nicolas.
Un nouveau message arrive, envoyé cette fois par Interpol, sûrement pour confirmer le meurtre commis à Montréal, « je verrais ça demain » se dit-elle. Mais la curiosité est plus forte, l’office international basé à Lyon relai un message en provenance de Floride, de la police de l’aéroport d’Orlando, « C’est quoi encore ce truc ? ».
La dépêche est brève :
« Un individu a été appréhendé à sa descente d’avion par un agent de sécurité. Celui-ci a cru reconnaître le portrait-robot affiché dans tous les aéroports européens, celui du tueur de prostituées qui fait l’objet d’une fiche coin jaune. Attendons confirmation ». Suit un autre message contenant une photo de l’individu, ses empreintes digitales et génétiques.
Sans attendre, Sarah compare la photo avec le portrait-robot, possible mais pas flagrant. Encore un message qui va faire perdre du temps. Enfin, la procédure est la procédure, il faut vérifier et répondre, ensuite elle pourra rentrer se coucher. Elle transmet le message à Jérôme, il saura quoi faire.
Une demi-heure plus tard, un message de Giuseppe Fizzi confirme les soupçons canadiens. Une empreinte relevée sur la scène de crime à Rome prouve que cet individu a rencontré une prostituée en Italie il y a moins d’un an. Sarah ne croit pas aux coïncidences, pour elle, aucun doute possible. Elle est persuadée que son tueur est bien l’homme arrêté à l’aéroport d’Orlando. Mais il faut être certain avant de crier victoire.
Sa soirée est foutue, ce n’est pas ce soir qu’elle pourra se coucher tôt.
Au journal de 20 heures, suite à une indiscrétion, toutes les télés annoncent déjà l’arrestation du tueur en Floride.
La police ne peut rester muette. C’est Michel, enfin Serge Strogoff qui improvise un petit communiqué qu’il lit Place Beauvau, sur les marches du Ministère de l’Intérieur, face aux caméras de toutes les télés. Sarah est à côté de lui, mais ne dit rien.
Avec toutes les précautions d’usage et au conditionnel, Michel indique qu’il y a de fortes présomptions pour que le tueur de prostituées soit un individu appréhendé dans l’après-midi à l’aéroport d’Orlando en provenance de Montréal, où justement un nouveau crime venait d’être perpétré. Il insiste tout particulièrement sur la coopération internationale des polices et remercie son équipe, même si cette fois, tout le mérite revient à ce sergent anonyme à quelques jours de la retraite.
C’est court, demain Michel pourra certainement en dire un peu plus.
Il est tard, en quittant enfin son bureau, Sarah repense à Nicolas. Il l’a peut-être vue à la télévision. Elle aimerait le revoir, lui parler, lui expliquer, lui dire combien elle regrette, combien elle l’aime. Lui aussi doit encore l’aimer, mais il ne doit pas oser faire le premier pas. Sarah tente de s’en persuader.
Si Nicolas est encore à Paris, une chance à ne pas manquer. Elle se dirige vers sa maison, le cœur plein d’espoir.
Dans la voiture, elle rêve, comme toujours. Elle imagine lui tomber dans les bras, qu’il va l’embrasser, qu’ils passeront la nuit ensemble, tout sera oublié… mais au fil de la route, le doute s’installe à nouveau, « et s’il me repoussait », « non je ne pourrais pas le supporter ».
Devant la maison, elle voit de la lumière par la fenêtre. Nicolas est là. Son cœur cogne fort dans sa poitrine, elle rougit en imaginant ce qu’elle aimerait faire avec son amour pendant toute la nuit.
Mais elle ne bouge pas, elle attend. Elle attend quoi ? Elle ne sait pas, elle attend un signe « Nicolas mon amour appelle moi, je suis là, fait un geste, je t’attends, je t’aime » … mais rien.
Sarah hésite, le doute, la peur d’être rejetée. En tremblant, elle redémarre, « demain, juré demain je reviendrais ».
Ce soir encore elle dormira seule, elle avait tant espéré, elle n’a pas eu le courage nécessaire, cette peur que Nicolas la repousse la paralyse.
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Paris Match envoie un journaliste à Orlando à la rencontre du sergent Jack Spillane qui fera la couverture du magazine mercredi prochain.
L’article détaille la carrière du policier qui a fait arrêter le criminel qui défit toutes les polices depuis tant d’années. Suis, sur une double page, un rappel des différents crimes, avec la photo de Suzie Young sa dernière victime parisienne, à moins que ce ne soit la photo d’une jeune asiatique inconnue, personne n’ira vérifier, le journal n’est pas à ce détail prêt, il suffit que le lecteur y croit.
Dans l’interview exclusive accordée au journal, Jack explique avoir passé ces dernières vacances en France. A l’aéroport Charles de Gaulle, au moment de s’envoler pour rentrer chez lui, il a été attiré par une affiche exposant une douzaine d’enfants disparus d’une association qui aide les parents à les rechercher. Un réflexe, il regarde ces portraits qui se gravent dans sa mémoire. A côté le portrait-robot d’un criminel recherché, machinalement il le détaille, il n’oubliera jamais ce visage.
A l’aéroport d’Orlando, en ramassant machinalement les formulaires des passagers étrangers, on dirait qu’il dort, mais ses yeux aux aguets scrutent chaque visage, chaque attitude. Combien a-t-il fait arrêter de passeurs de drogue juste pour un regard, une hésitation, ou un simple geste. En voyant José-Maria, en une fraction de seconde, il a revu le portrait-robot affiché en France. Il était sûr que c’était lui.
Pour le cueillir en douceur, il ne fallait pas l’effrayer. Contrôle de routine. Le nombre de visas de pays européens confirmait son intuition. L’individu une fois enfermé dans son bureau, Jack était certain qu’il n’en sortirait que pour connaître les geôles fédérales.
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Plus aucun doute, Sarah en a la confirmation, les fichiers ont parlé, José-Maria est bien l’homme recherché. Il n’est pas bavard, mais les policiers américains ont bon espoir d’obtenir des aveux complets.
Comme tous les pays européens et comme le Canada, la France demande l’extradition de José-Maria Vargas pour être jugé pour les crimes commis à Paris et à Lyon. La procédure sera longue, les américains n’ayant pas l’habitude d’extrader ses ressortissants, même ayant commis les crimes les plus atroces.
Sarah n’y peut rien, il faut laisser la justice faire son travail. Mais elle sait que ce sadique ne recommencera plus, il n’est pas prêt de sortir des prisons américaines. Il risque une peine de plus de 100 ou 200 ans d’incarcération, les peines étant cumulatives outre-Atlantique.
Le soir même, bien décidée cette fois, Sarah retourne en banlieue pour voir Nicolas. Elle osera frapper à sa porte, elle osera lui parler, lui dire tout ce qu’elle veut lui dire depuis qu’il est parti. Il comprendra, il l’embrassera, Sarah s’en persuade. Elle veut surtout savoir s’il pense toujours à elle, il ne peut pas l’avoir oubliée.
Aucune lumière, le cœur battant, elle frappe, une fois, deux fois, pas de réponse. Un voisin entrouvre sa porte :
- Il est parti ce matin ma petite dame, vous n’avez pas de chance.
- Il est reparti au Canada ?
- Non, son contrat est terminé. Il est venu se reposer quelques jours avant d’aller au Maroc cette fois, à Casablanca je crois. C’est un grand voyageur.
Déçue, Sarah décide de passer quelques jours de vacances chez sa sœur Rachel à Avignon. C’est sa seule confidente, même si elle a encore honte de sa conduite quand elle était fiancée.
Sarah se traîne à longueur de journée, elle n’a de goût pour rien, elle pense à son amour perdu. L’inaction lui pèse. Elle, une femme d’action ne peut attendre sans rien faire.
Un coup de tête. Un soir elle annonce à sa sœur « Demain matin, je pars au Maroc, j’ai acheté un billet cet après-midi…. Demain à cette heure, je serais dans les bras de mon chéri. ».
- Allô Jérôme, tu pourrais retrouver l’adresse d’un expat au Maroc ?
- …
- Oui j’attends.
Rachel croise les doigts. Elle sourit, pleine d’espoir pour sa sœur.
J’ai ainsi imaginé une suite aux deux premiers récits des aventures de Sarah Castaing, « Branle-bas de combat » et « Sarah, le retour ». Commissaire de police, elle vient d’être nommée adjointe à l’OCAANE (Office Central pour les Affaires Anciennes Non Elucidées) récemment créé pour lutter contre la criminalité et en particulier les Cold case.
L’action débute à la fin de la seconde partie.
Avant de commencer, je n’oublie pas de remercier Lætitia qui, sans le savoir, a été source d’inspiration, et même plus… enfin je vous laisse le découvrir. Vous connaissez certainement tous ses récits, sinon allez vite lire « Road trip » …
Un soir, Sarah a trompé Nicolas, une bêtise qu’elle regrette amèrement. Ils étaient fiancés et devaient se marier quelques mois plus tard. Nicolas ne l’a pas supporté, il est parti. Sarah pense toujours à lui. Elle espère qu’il lui pardonnera.
---oOo---
Maintenant, Sarah est seule. Elle aimerait revoir Nicolas, lui parler, lui dire qu’elle regrette, lui dire qu’elle n’aime que lui… mais voudra-t-il l’écouter ? Voudra-t-il lui pardonner ?
Comment reprendre contact ? Lui téléphoner ? Non trop protocolaire. Un mail ? C’est nul.
Comme toujours, Sarah décide de foncer, quand il y a un obstacle elle préfère l’aborder de face, bien décidée à se battre.
Grâce à Jérôme, son collègue, elle a son adresse. Un dimanche, en fin d’après-midi, Nicolas doit être chez lui, elle ne peut pas le rater.
Dans la voiture qui la mène vers son amour perdu, elle rêve. Elle se voit devant la porte, un peu stressée, elle sonne. Nicolas lui ouvre. Ils se regardent quelques secondes. Elle n’ose pas bouger, n’ose rien dire. Nicolas réagit le premier, une fois la surprise passée, timidement il lui sourit, il s’efface, l’invite à entrer et referme la porte.
« Mon Nicolas, je te retrouve ».
Sarah est tirée de sa rêverie par son GPS qui annonce « vous arrivez à destination », mais son rêve continue. Nicolas la prend dans ses bras, Ils s’embrassent… elle est arrivée, la réalité sera-t-elle aussi belle que son imagination ?
Son cœur bat trop fort dans sa poitrine, marcher un peu diminuera son stress, elle gare son véhicule un peu plus loin. Elle est décidée, rien ne la fera reculer. Elle va enfin revoir Nicolas, son Nicolas.
D’un doigt tremblant, elle sonne à sa porte. Une fois, deux fois, la porte s’ouvre sur une jeune femme tout sourire :
- Bonjour, c’est pour quoi ?
Sous le choc, Sarah se trouble, elle regrette déjà d’être venue. Nicolas ne vit pas seul.
Elle bafouille :
- Je… je venais voir Nicolas.
- C’est de la part de qui ?
- Sarah, une amie. Et vous ? Ose-t-telle demander, redoutant la réponse.
- Stéphanie, enchantée lui dit-elle en lui tendant la main. Je suis aussi une amie de Nicolas. Il m’a prêté son appartement pendant son absence.
- Il n’est pas là ?
- Non, il est parti pour une mission à Montréal depuis quelques jours.
La déception et la tristesse se lisent sur le visage de Sarah. Stéphanie le remarque, elle répond à la question que Sarah ne lui pose pas :
- Il sera sûrement absent plusieurs mois. Je lui dirais que vous êtes venue le voir, il doit m’appeler pour me donner sa nouvelle adresse.
- Non… Non, ce n’est pas nécessaire, je passais juste. Au revoir.
Sarah se sauve, pour que Stéphanie ne voit pas les larmes qu’elle a du mal à retenir.
---oOo---
Sarah est désespérée, elle aurait tant voulu au moins expliquer à Nicolas, qu’il comprenne qu’elle l’aime toujours, qu’elle regrette d’avoir été si faible, qu’elle ne veut pas le perdre.
Mais il est loin maintenant, mieux vaut l’oublier, si c’est possible.
Sarah se réfugie dans son travail, les affaires confiées à l’Office Central ne manquent pas. Comme tout service nouvellement créé, l’Office récupère les affaires laissées en suspens depuis plusieurs années. Ces enquêtes sont les plus complexes, elle espère qu’avec les nouvelles techniques, comme l’ADN ou la reconnaissance faciale, elle va faire des miracles.
Les fichiers de délinquants se sont multipliés, reprenant des informations parfois vieilles de plusieurs années. Comme toujours, Jérôme fait merveille, il jongle d’un fichier à l’autre, cherchant la faille, l’élément qui permettra à Sarah et à son équipe de résoudre l’impossible.
Sarah s’entend bien avec son patron, le Colonel Serge Strogoff, il lui fait entière confiance. C’est un gendarme, la guerre des polices n’est pas pour eux. Le Colonel n’aime pas ses initiales, aussi depuis le lycée on l’appelle Michel, va savoir pourquoi ? Sarah en a vite pris l’habitude, et fait comme tout le monde.
Rapidement les missions confiées à l’Office central se sont étoffées. La mission principale, est l’aide aux enquêteurs partout en France pour coordonner les actions des différents services, et faire le lien avec les services de police à l’étranger dans le cadre de la coopération internationale contre la criminalité mise en place lors du dernier sommet européen des chefs de gouvernement.
Sarah se souvient de sa première enquête, elle est fière d’avoir pu résoudre en quelques semaines une affaire de pédophilie dans un club sportif. Trois entraîneurs abusaient d’enfants depuis plusieurs années sans que les dirigeants, obligatoirement au courant, ne l’aient jamais signalé. Une omerta qui fera tomber plusieurs têtes, y compris des élus locaux.
Quand on met les moyens, les résultats ne se font pas attendre. Les succès se suivent, permettant d’avoir encore plus de moyens, pour être encore plus efficace.
Il n’y a pas que des meurtres ou des viols, deux dossiers ont donné du fil à retordre, occasionnés des nuits et des nuits de planque. Sarah en avait fait une affaire personnelle, Michel lui a donné carte blanche. L’obstination a payé, une équipe de pilleurs de châteaux de la banlieue parisienne a été démantelée, elle revendait les œuvres d’art sur les marchés d’antiquité et les brocantes de Province, et l’arrestation d’un gang de roumains qui volaient le cuivre des réseaux SNCF le long des voies, un trafic qui durait depuis plusieurs années.
Après chaque succès, Sarah ne peut s’empêcher de repenser à Nicolas, il aurait été fier d’elle. Elle rêve de se blottir dans ses bras. Que fait-il en ce moment ? Où est-il ?
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Partout dans le monde, que ce soit à Londres, à Berlin, à Singapour ou à Paris, tous les jours, des centaines de clients vont voir des prostituées, un mal nécessaire comme disent certains. Le commerce est florissant, il brasse des millions, pour ne pas dire des milliards de dollars, mais il comporte aussi des risques.
Un client intéresse plus particulièrement Sarah. En ce moment, il entre dans un salon de massage asiatique en banlieue parisienne. Mais ça, Sarah ne le sait pas encore. Ni qu’il va ressortir dans quelques minutes. Suzie Young la jeune masseuse chinoise arrivée de Pékin il y a moins d’un mois, qui ne parle qu’un français très approximatif, sera découverte le soir même dans son salon, allongée nue sur son lit, la gorge broyée, les seins affreusement mutilés.
Qui est cet homme ? Ce pervers que Sarah recherche. Trois prostituées assassinées en moins de deux mois ça fait réfléchir.
Elle a aussi été alertée par ses collègues allemands et italiens, et après vérification deux meurtres ont également été commis en Belgique. Le mode opératoire parait toujours le même, une véritable signature. C’est un sadique, les pauvres filles, toujours des prostituées, sont retrouvées nues, allongées sur leur lit, étranglées par un foulard blanc, le bout des seins coupés post mortem.
Aucune trace permettant de l’identifier, il doit porter des gants. Cet individu se joue des polices, il a été baptisé « le tueur de prostituées » par les médias.
Un mois après, Sarah reçoit un message de Bruxelles, cette fois la jeune Kalyna une ukrainienne originaire de l’est, vient d’échapper à la mort, des traces de strangulation sur le cou. Elle a été étonnée par ce client qui portait des gants, il n’a pas voulu se déshabiller. Elle était sur ses gardes, une bombe de gaz lacrymogène à portée de main, il y a tellement de clients bizarres. Allongée nue comme il le lui a demandé, il lui a sauté dessus un foulard blanc à la main, elle a crié, s’est défendue alors qu’elle avait du mal à respirer. C’était son jour de chance, l’homme a pris peur, il s’est enfui.
Enfin une piste. Kalyna fait une description précise de son agresseur, brun, la cinquantaine, pas très grand, trapu. La police peut enfin établir un portrait-robot. Celui-ci est affiché dans tous les commissariats et tous les aéroports en Europe.
Son signalement est envoyé à Interpol. Une véritable chasse à l’homme commence, avant qu’il ne fasse une nouvelle victime. Mais dans quelle direction chercher ?
Les polices européennes décident d’unir leurs forces. Sarah se rend en Italie à la rencontre de ses homologues européens.
A l’aéroport de Florence, elle est accueillie par son collègue Giuseppe Fizzi capitaine des Carabinieri. Ils échangent depuis quelques mois par interne, mais c’est la première fois qu’ils se rencontrent.
Bel homme, l’Italien type, il fait la bise à Sarah sans rien demander, et il parle sans s’arrêter, il parle avec les mains comme tous les italiens. Vu la circulation, cramponnée à son siège, Sarah a envie de lui crier « les mains sur le volant ». Enfin ils atteignent le commissariat sans encombre.
Giuseppe fait la présentation de son équipe, de son adjointe, une jeune femme aussi discrète que son patron est volubile. Les deux femmes se serrent la main. Son regard trouble Sarah.
Les collègues allemands et belges sont déjà là. Journée de travail bien rempli, juste un sandwich à midi sur le bord du bureau.
Échange de dossiers, chaque agression est décrite par les enquêteurs de chaque pays, il n’y a aucun doute, c’est bien le même homme. Autre particularité, aucune trace d’agression sexuelle, même si à l’autopsie il est difficile de savoir avec exactitude pour une prostituée. Huit affaires portent sa signature, Kalyna aurait été la neuvième.
Lors de chaque meurtre, la police scientifique a passé la chambre au peigne fin, aucun indice ne permet de l’identifier avec certitude. Pourtant une centaine d’empreintes digitales et génétiques sont relevées, dans une chambre de passe rien de bien étonnant.
Il est décidé de stocker toutes ces traces dans une base de données commune, sous l’égide d’Europol. Cela fait au moins 2000 empreintes.
La recherche dans les fichiers français le FAED (Fichier automatisé des Empreintes Digitales) et avec le FNAEG (Fichier Nationale automatisé des empreintes génétiques) n’avaient jusque-là rien donné, on peut espérer un meilleur résultat en comparant les traces entre elles.
Sarah est confiante, elle sait que Jérôme saura faire tous les rapprochements possibles. Avec un peu de chance …
---oOo---
La réunion est terminée. Sarah se repose un café à la main :
Ouf ! Je suis crevée, ce matin je me suis levée tôt, je dormirais dans l’avion. Une voiture emmène rapidement nos collègues allemands et belges à l’aéroport, ils ne veulent pas rater le dernier vol.
J’ai plus de chance, mon avion pour Paris est dans deux heures, j’ai un peu de temps devant moi.
Charmeur, Giuseppe ne m’a pas quitté de la journée, toujours un compliment à la bouche. Est-ce une illusion ? Ces mains étaient baladeuses, pourtant rien dans son regard, ni ses paroles ne traduisent la moindre ambiguïté. Je ne m’en suis pas offusqué, il est pareil avec toutes les femmes, sauf avec son adjointe qui je crois l’impressionne.
Avant de me raccompagner à l’aéroport, Giuseppe me propose un tour de ville :
- Impossible de quitter Florence sans en voir les joyaux, me dit-il en faisant de grands gestes.
Je découvre ainsi le Duomo, le fameux David de Michel Ange sur la piazza della Signoria, le Ponte Vecchio sur l’Arno, pour terminer par les incontournables jardins Giardino Bardini typique de la Renaissance, afin de profiter du coucher de soleil sur Florence :
- Le jardin des amoureux, murmure Giuseppe avec un large sourire.
En descendant de voiture, galant, il m’ouvre la porte et me tend la main, un frisson me parcourt.
En cette période de l’année et à cette heure, le jardin est presque désert. Nous sommes à priori les seuls à nous aventurer en haut de l’escalier central, afin de profiter de la vue panoramique sur la ville. Le ciel rosi à l’horizon.
Sous une tonnelle fleurie, dans le parfum enivrant des premières roses de l’année, Giuseppe me montre sa ville, son bras négligemment posé sur mon épaule. Mon guide me désigne les différents bâtiments, les églises, les places, il susurre plus qu’il ne parle. Je sens son souffle dans le cou, troublée de cette promiscuité que je n’ai pas vu venir. Il y a si longtemps que je n’ai pas…
Je pense à Nicolas, j’aimerais être dans ses bras, me serrer contre lui, sentir ses lèvres sur mon cou, blottie contre lui regardant dans la même direction, vers notre avenir, … Mais Giuseppe parle, parle, détaillant chaque recoin de Florence.
Je ferme les yeux. Nicolas où es-tu ? Où es-tu mon amour, reviens-moi, c’est avec toi que j’aimerais visiter cette ville magique.
A ce moment, une voix forte s’élève nous faisant sursauter :
- Che … scandalo !
Deux mamas italiennes crient à pleins poumons. Je ne saisis que quelques bribes de mots :
- …luto !
- Perverso !
- Esibizionista !
- … la guardia !
Je ne comprends pas tout, mais le son de leurs voix ne trompe pas. Giuseppe s’arrête de parler, il me traduit en deux mots les cris que nous entendons. Nous éclatons de rire en voyant un jeune couple partir en courant en se réajustant tant bien que mal, ne laissant aucun doute sur l’activité qui a déclenché le courroux de ces matrones.
En tendant l’oreille, nous entendons encore le rire de la jeune femme dans le lointain.
« Ah ces italiens !»
Hilare, Giuseppe me prend par le bras. L’heure tourne, direction l’aéroport, direction Paris.
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Dans l’avion qui la ramène en France, Sarah oublie un temps son enquête. Elle pense avec tristesse à Nicolas. Un voyage en Italie, leur rêve, Venise, Vérone, Florence, elle s’imagine avec lui à la place de ce couple qu’elle a vu s’enfuir dans les jardins à l’approche des mégères.
Sarah ferme les yeux, elle a posé une couverture sur ses genoux. Sa main glisse sous sa robe. Sa main ou celle de Nicolas ? Son esprit s’évade :
« Blottie dans les bras de Nicolas, elle flâne dans ce jardin rempli de fleurs pour profiter du coucher de soleil sur Florence. Ils sont assis sur un banc en pierre sous une tonnelle couverte de glycine et de rosiers. Le jardin est désert. Quelques rares promeneurs visibles au loin. Ils sont seuls au monde pour profiter de la vue exceptionnelle sur la ville.
Un bras autour de son épaule, Nicolas la serre contre lui, pose ses lèvres sur les siennes. Elle a envie de faire l’amour, maintenant, dans ce jardin, face à la ville témoin de leur amour.
Nicolas passe sa main sous la robe de Sarah, elle écarte légèrement les jambes pour faciliter la caresse qu’elle attend, qu’elle espère. Leurs bouches se rencontrent, leurs langues se mêlent. Sarah déboutonne le pantalon de Nicolas, et extrait sa queue qui se dresse fièrement devant ses yeux. Elle en a envie depuis tout ce temps. Elle se penche, le prend entre ses lèvres. Elle retrouve les sensations qu’elle croyait perdues. C’est elle qui mène la cadence, tantôt rapide, tantôt lentement, sa main en dessous lui caresse les bourses, tendrement. Elle le sent gonfler dans sa bouche, elle joue avec lui s’arrêtant un instant chaque fois que Nicolas est prêt à jouir. Mais elle veut plus, sentant un grand vide entre ses cuisses.
Quelques coups de langue sur le gland qu’elle est fière de voir pointer vers elle, elle se lève, soulève sa robe, ôte sa culotte et se place à califourchon sur les genoux de Nicolas. Les bras autour de son cou, elle s’empale lentement sur le sexe bien dressé. Elle s’agite sur lui, elle le veut tout entier en elle. Nicolas a du mal à se retenir, le moment est magique. Il lui pétrit les seins qu’il a fait jaillir de sa robe en défaisant quelques boutons, prend ses tétons entre ses lèvres gourmandes. Elle frisonne, une onde de plaisir irradie tout son corps.
Sarah sent l’orgasme monter en elle, elle devine que Nicolas est prêt. Elle veut jouir avec lui, en même temps que lui. Elle accélère le mouvement. Elle ouvre la bouche comme si elle manquait d’air quand Nicolas se répand en elle, elle sait que les jets puissants de son chéri vont déclencher sa jouissance dans ce jardin, au milieu des fleurs, face à cette ville magique, leur ville. Lorsqu’une voix retentit … »
Le commandant de bord vient d’annoncer la descente sur Paris tirant Sarah de sa rêverie.
Les mains entre ses cuisses, cachées par la couverture, Sarah ouvre les yeux. Ouf ! Son voisin ne s’est aperçu de rien.
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L’analyse du fichier européen n’a rien donné. Pourtant Jérôme, comme ses collègues, ont mis tous les moyens pour faire parler les empreintes recueillies sur les scènes de crimes.
Le travail ne manque pas, les affaires s’enchaînent, pas le temps de souffler. Le tueur n’a pas recommencé, l’expérience de Bruxelles a dû lui faire peur.
Sarah rentre de mission, son avion en provenance de Séoul en Corée a atterri ce matin. Juste le temps de passer chez elle pour se changer. Elle arrive à temps pour la réunion du briefing quotidien avec ses coéquipiers.
Elle a préparé un compte-rendu complet de sa mission. En Corée, elle avait rendez-vous avec la police locale, pour une enquête concernant des ressortissants français ayant séjourné dans le pays quelques années auparavant. Le couple venait d’être arrêté en France. Cette affaire avait fait grand bruit dans la presse, tous les médias en avaient parlé sous le nom de l’affaire des bébés congelés. En effet, suite à un signalement de leurs voisins, découverte macabre, le corps gelé d’un bébé dans le congélateur de leur garage.
Le déplacement de Sarah n’a pas été inutile. La police coréenne a ressorti une affaire close depuis quelques années, n’ayant jamais trouvé l’auteur d’un double homicide, celui de deux nouveau-nés, retrouvés congelés dans une maison dont les occupants étaient rentrés en France. Pas trop zélés, les policiers avaient rapidement classé l’affaire. Ils s’étaient réveillés suite à la médiatisation de l’arrestation du couple, intéressant tout particulièrement les journaux people et la presse à scandales.
Pas question de répondre à la demande d’extradition demandée par la Corée, le couple sera jugé en France. Sarah espère que ces amants diaboliques passeront le reste de leur vie en prison, à moins qu’un psychiatre conciliant ne les déclare irresponsables, leur évitant d’être jugés. Internés dans un hôpital psychiatrique, ils pourraient ressortir au bout de quelques années, étant déclarés guéris… à moins que ce ne soit par manque de place… mais Sarah a encore bon espoir de les voir passer devant une cour d’assises.
La journée se termine. Un peu fatiguée par son voyage, et le décalage horaire, Sarah prévoit une soirée tranquille, et vite au lit.
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Au même moment, à environ 7231 km, sur l’aéroport international d’Orlando en Floride, atterrissait le vol TS 604 d’Air Transat en provenance de Montréal. Parmi les familles québécoises venues visiter les parcs d’attractions, Disneyland, Epcot, Animal Kingdom ou Universal, José-Maria Vargas, citoyen américain d’origine hispanique, rentre chez lui.
Les procédures d’entrée aux États-Unis sont longues, il faut prendre son mal en patience, attendre derrière la ligne jaune. José-Maria le sait, il n’est pas pressé. Au milieu des familles dont certaines portent déjà des oreilles de Mickey, souvenir d’un précédent séjour, chacun attend son tour dans la longue file qui s’allonge devant le poste de police.
José-Maria a l’habitude, il voyage souvent. Après le contrôle du passeport, la prise d’une photo et des empreintes digitales, il sait ce que les autres passagers ignorent certainement, les policiers interrogent les fichiers de police pour vérifier si par hasard ils n’ont pas affaire à un délinquant ou à un criminel connu de leur service. José-Maria est tranquille, il n’a rien à se reprocher, même pas anxieux quand arrive son tour.
Enfin c’est à lui, plus d’une heure après l’atterrissage il est déclaré apte à fouler le territoire américain. Il va rejoindre son véhicule dans le parking Nord de l’aéroport, là où il l’a laissé il y a trois jours. Et direction sa maison dans les Keys, à Key Largo exactement, une belle villa face à la mer.
Dernière formalité, les étrangers doivent donner à l’agent de service le formulaire rempli dans l’avion, celui où on leur demande s’ils sont allés dans une ferme il y a moins de 15 jours, s’ils sont anciens nazis ou s’ils envisagent de tuer le Président des États-Unis. Gare à celui qui répond « oui » à une seule question, même si c’est pour s’amuser.
Citoyen américain, José-Maria est dispensé de ce document. Il emprunte la sortie « US Citizen » et passe devant le Sergent Jack Spillane chargé de la collecte.
Après 40 ans de bons et loyaux services, Jack est à quelques mois de la retraite, ce job ne correspond pas à ses années de service, plutôt une voie de garage. Originaire de Pennsylvanie, il a fait toute sa carrière dans la police en Floride. Il a été affecté à l’aéroport d’Orlando, il y a quelques d’années pour des travaux subalternes. Pourtant ses états de service sont élogieux, mais il n’a pas su évoluer. Tous ces ordinateurs, ces codes, ces fichiers, ne lui ont jamais servi quand il était à la criminelle à Miami. Il s’est toujours fié à son flair et à sa mémoire dont il a plus confiance qu’en celle de toutes les machines.
Il en avait résolu des affaires en 40 ans, mais il est de la vieille école, sans ordinateur, sans tous ces fichiers qui évitent de penser. Il finissait donc sa carrière en collectant un bout de papier à l’arrivée des vols internationaux.
Comme tous les jours, il fait son travail machinalement sans faire attention à qui passe devant lui. De temps à autre il réclame un passeport, c’est aussi dans ses attributions, « contrôle inopiné ». Le passager choisi doit attendre que Jack feuillette le document présenté, tout en ramassant les formulaires des autres passagers de l’autre main afin de ne pas les retarder. Enfin libéré sur un « vous pouvez passer », le passager se demande encore le pourquoi de ce contrôle, pourquoi lui. Seul Jack le sait, mais il ne saurait pas expliquer pourquoi celui-là plutôt qu’un autre, son instinct est seul juge.
Au passage de José-Maria Vargas, sans lever la tête, Jack lance « contrôle passeport please ! ». José-Maria lui tend son passeport, un peu énervé de ce nouveau contretemps.
Nonchalamment, Jack regarde José-Maria pour comparer la photo, feuillette les pages sans vraiment les regarder.
Appelant un de ses collègues pour le remplacer, Jack fait signe à José-Maria de le suivre sans plus d’explication. En bougonnant, mais ne voulant pas faire d’histoires à cet employé zélé, José-Maria le suit sous le regard intrigué des autres passagers.
Après quelques questions d’usage, Jack suit la procédure, il envoie un message à son service central, qui fera parvenir l’information à Interpol.
Il sait que les ordinateurs vont se mettre à mouliner dans tous les sens avant de recevoir une réponse. Il devra attendre une heure avant d’avoir la confirmation qu’il vient d’appréhender celui que tout le monde recherche, son ordinateur interne ne se trompe jamais. Il est sûr de lui.
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Sarah est fatiguée, la journée se termine, un dernier coup d’œil à sa messagerie avant de fermer son ordinateur. Un message arrive en provenance du Canada, de Jacques, un gendarme de la Police Montée, la Gendarmerie Royale d’Ottawa, avec qui elle a déjà échangé à plusieurs reprises. Le message signale le meurtre d’une prostituée dans le quartier chaud de Montréal. Sarah sursaute, le mode opératoire l’interpelle. La jeune femme a été retrouvée nue allongé sur son lit, une écharpe blanche nouée autour du cou, les seins mutilés, aucune trace de violences sexuelles n’a été détectée. Pas un crime ordinaire.
Au même moment, à Rome, Berlin et Bruxelles, les collègues de Sarah reçoivent la même information. Jérôme n’est pas le seul à consulter la base de données européenne. Il consulte, compare, envoie des messages. Les échanges fusent, pas de doute, le « tueur de prostituées » a fait une nouvelle victime.
Sarah est songeuse. Tiens, il refait parler de lui, il se tenait tranquille depuis plus de deux mois, le voilà maintenant au Canada. Elle pense à Jacques son collègue québécois, « bienvenu au club » se dit-elle en souriant.
L’heure tourne, pour l’instant il n’y a plus rien à faire. Mais Sarah ne peut s’empêcher, avant de partir, de lire les messages de ses collègues européens, encore des déplacements à prévoir. Avec un peu de chance, Jacques l’invitera à Montréal, songe-t-elle avec l’espoir de revoir Nicolas.
Un nouveau message arrive, envoyé cette fois par Interpol, sûrement pour confirmer le meurtre commis à Montréal, « je verrais ça demain » se dit-elle. Mais la curiosité est plus forte, l’office international basé à Lyon relai un message en provenance de Floride, de la police de l’aéroport d’Orlando, « C’est quoi encore ce truc ? ».
La dépêche est brève :
« Un individu a été appréhendé à sa descente d’avion par un agent de sécurité. Celui-ci a cru reconnaître le portrait-robot affiché dans tous les aéroports européens, celui du tueur de prostituées qui fait l’objet d’une fiche coin jaune. Attendons confirmation ». Suit un autre message contenant une photo de l’individu, ses empreintes digitales et génétiques.
Sans attendre, Sarah compare la photo avec le portrait-robot, possible mais pas flagrant. Encore un message qui va faire perdre du temps. Enfin, la procédure est la procédure, il faut vérifier et répondre, ensuite elle pourra rentrer se coucher. Elle transmet le message à Jérôme, il saura quoi faire.
Une demi-heure plus tard, un message de Giuseppe Fizzi confirme les soupçons canadiens. Une empreinte relevée sur la scène de crime à Rome prouve que cet individu a rencontré une prostituée en Italie il y a moins d’un an. Sarah ne croit pas aux coïncidences, pour elle, aucun doute possible. Elle est persuadée que son tueur est bien l’homme arrêté à l’aéroport d’Orlando. Mais il faut être certain avant de crier victoire.
Sa soirée est foutue, ce n’est pas ce soir qu’elle pourra se coucher tôt.
Au journal de 20 heures, suite à une indiscrétion, toutes les télés annoncent déjà l’arrestation du tueur en Floride.
La police ne peut rester muette. C’est Michel, enfin Serge Strogoff qui improvise un petit communiqué qu’il lit Place Beauvau, sur les marches du Ministère de l’Intérieur, face aux caméras de toutes les télés. Sarah est à côté de lui, mais ne dit rien.
Avec toutes les précautions d’usage et au conditionnel, Michel indique qu’il y a de fortes présomptions pour que le tueur de prostituées soit un individu appréhendé dans l’après-midi à l’aéroport d’Orlando en provenance de Montréal, où justement un nouveau crime venait d’être perpétré. Il insiste tout particulièrement sur la coopération internationale des polices et remercie son équipe, même si cette fois, tout le mérite revient à ce sergent anonyme à quelques jours de la retraite.
C’est court, demain Michel pourra certainement en dire un peu plus.
Il est tard, en quittant enfin son bureau, Sarah repense à Nicolas. Il l’a peut-être vue à la télévision. Elle aimerait le revoir, lui parler, lui expliquer, lui dire combien elle regrette, combien elle l’aime. Lui aussi doit encore l’aimer, mais il ne doit pas oser faire le premier pas. Sarah tente de s’en persuader.
Si Nicolas est encore à Paris, une chance à ne pas manquer. Elle se dirige vers sa maison, le cœur plein d’espoir.
Dans la voiture, elle rêve, comme toujours. Elle imagine lui tomber dans les bras, qu’il va l’embrasser, qu’ils passeront la nuit ensemble, tout sera oublié… mais au fil de la route, le doute s’installe à nouveau, « et s’il me repoussait », « non je ne pourrais pas le supporter ».
Devant la maison, elle voit de la lumière par la fenêtre. Nicolas est là. Son cœur cogne fort dans sa poitrine, elle rougit en imaginant ce qu’elle aimerait faire avec son amour pendant toute la nuit.
Mais elle ne bouge pas, elle attend. Elle attend quoi ? Elle ne sait pas, elle attend un signe « Nicolas mon amour appelle moi, je suis là, fait un geste, je t’attends, je t’aime » … mais rien.
Sarah hésite, le doute, la peur d’être rejetée. En tremblant, elle redémarre, « demain, juré demain je reviendrais ».
Ce soir encore elle dormira seule, elle avait tant espéré, elle n’a pas eu le courage nécessaire, cette peur que Nicolas la repousse la paralyse.
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Paris Match envoie un journaliste à Orlando à la rencontre du sergent Jack Spillane qui fera la couverture du magazine mercredi prochain.
L’article détaille la carrière du policier qui a fait arrêter le criminel qui défit toutes les polices depuis tant d’années. Suis, sur une double page, un rappel des différents crimes, avec la photo de Suzie Young sa dernière victime parisienne, à moins que ce ne soit la photo d’une jeune asiatique inconnue, personne n’ira vérifier, le journal n’est pas à ce détail prêt, il suffit que le lecteur y croit.
Dans l’interview exclusive accordée au journal, Jack explique avoir passé ces dernières vacances en France. A l’aéroport Charles de Gaulle, au moment de s’envoler pour rentrer chez lui, il a été attiré par une affiche exposant une douzaine d’enfants disparus d’une association qui aide les parents à les rechercher. Un réflexe, il regarde ces portraits qui se gravent dans sa mémoire. A côté le portrait-robot d’un criminel recherché, machinalement il le détaille, il n’oubliera jamais ce visage.
A l’aéroport d’Orlando, en ramassant machinalement les formulaires des passagers étrangers, on dirait qu’il dort, mais ses yeux aux aguets scrutent chaque visage, chaque attitude. Combien a-t-il fait arrêter de passeurs de drogue juste pour un regard, une hésitation, ou un simple geste. En voyant José-Maria, en une fraction de seconde, il a revu le portrait-robot affiché en France. Il était sûr que c’était lui.
Pour le cueillir en douceur, il ne fallait pas l’effrayer. Contrôle de routine. Le nombre de visas de pays européens confirmait son intuition. L’individu une fois enfermé dans son bureau, Jack était certain qu’il n’en sortirait que pour connaître les geôles fédérales.
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Plus aucun doute, Sarah en a la confirmation, les fichiers ont parlé, José-Maria est bien l’homme recherché. Il n’est pas bavard, mais les policiers américains ont bon espoir d’obtenir des aveux complets.
Comme tous les pays européens et comme le Canada, la France demande l’extradition de José-Maria Vargas pour être jugé pour les crimes commis à Paris et à Lyon. La procédure sera longue, les américains n’ayant pas l’habitude d’extrader ses ressortissants, même ayant commis les crimes les plus atroces.
Sarah n’y peut rien, il faut laisser la justice faire son travail. Mais elle sait que ce sadique ne recommencera plus, il n’est pas prêt de sortir des prisons américaines. Il risque une peine de plus de 100 ou 200 ans d’incarcération, les peines étant cumulatives outre-Atlantique.
Le soir même, bien décidée cette fois, Sarah retourne en banlieue pour voir Nicolas. Elle osera frapper à sa porte, elle osera lui parler, lui dire tout ce qu’elle veut lui dire depuis qu’il est parti. Il comprendra, il l’embrassera, Sarah s’en persuade. Elle veut surtout savoir s’il pense toujours à elle, il ne peut pas l’avoir oubliée.
Aucune lumière, le cœur battant, elle frappe, une fois, deux fois, pas de réponse. Un voisin entrouvre sa porte :
- Il est parti ce matin ma petite dame, vous n’avez pas de chance.
- Il est reparti au Canada ?
- Non, son contrat est terminé. Il est venu se reposer quelques jours avant d’aller au Maroc cette fois, à Casablanca je crois. C’est un grand voyageur.
Déçue, Sarah décide de passer quelques jours de vacances chez sa sœur Rachel à Avignon. C’est sa seule confidente, même si elle a encore honte de sa conduite quand elle était fiancée.
Sarah se traîne à longueur de journée, elle n’a de goût pour rien, elle pense à son amour perdu. L’inaction lui pèse. Elle, une femme d’action ne peut attendre sans rien faire.
Un coup de tête. Un soir elle annonce à sa sœur « Demain matin, je pars au Maroc, j’ai acheté un billet cet après-midi…. Demain à cette heure, je serais dans les bras de mon chéri. ».
- Allô Jérôme, tu pourrais retrouver l’adresse d’un expat au Maroc ?
- …
- Oui j’attends.
Rachel croise les doigts. Elle sourit, pleine d’espoir pour sa sœur.
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6 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Vivement la suite.
La chipie
La chipie
Le retour de PP06 pour la suite d'une histoire prenante telle qu'il sait si bien nous les
faire partager.
On attends la suite avec impatience.
faire partager.
On attends la suite avec impatience.
Excellent, Patrick!
Un subtil mélange d’enquête policière et de démêlés sentimentaux pour Sarah. Le cocktail
est parfaitement dosé.
Le tout mené de main de l’autre par le maestro Patrick.
Les clins d’œil qui parsèment cette histoire sont amusants (Jacques toujours dans la
police montée ?)
JA, oui Sarah croise Sophie et Vincent, mais aussi Stéphanie. Patrick me rend un peu la
monnaie de ma pièce à cette occasion.
est parfaitement dosé.
Le tout mené de main de l’autre par le maestro Patrick.
Les clins d’œil qui parsèment cette histoire sont amusants (Jacques toujours dans la
police montée ?)
JA, oui Sarah croise Sophie et Vincent, mais aussi Stéphanie. Patrick me rend un peu la
monnaie de ma pièce à cette occasion.
C'est une excellente histoire, j'adore le personnage de Sarah.
Néanmoins je trouve cruel qu'elle ne soit pas encore en couple avec Niciolas.
J'y ai cru à la fin du récit précédent.
J'adore que Sarah croise Sophie et Vincent en plein "road trip".
Néanmoins je trouve cruel qu'elle ne soit pas encore en couple avec Niciolas.
J'y ai cru à la fin du récit précédent.
J'adore que Sarah croise Sophie et Vincent en plein "road trip".
Ouf! Un récit à longue haleine et très bien écrit!
Il s’en passe des choses dans la vie de Sarah. Nicolas lui manque toujours. On ne peut
empêcher un cœur d’aimer.
Nicolas un grand voyageur, il est difficile de le suivre.
Pourquoi José-Maria a t’il atterri à Orlando? Orlando est loin des Keys. Il doit avoir
des choses a faire en chemin.
Jacques ……du Canada sera certainement d’un grand aide à Sarah, il est tellement
serviable!
Sarah au Maroc quel beau voyage elle fera.
J’attends la suite avec impatience
Félicitation Patrick
Il s’en passe des choses dans la vie de Sarah. Nicolas lui manque toujours. On ne peut
empêcher un cœur d’aimer.
Nicolas un grand voyageur, il est difficile de le suivre.
Pourquoi José-Maria a t’il atterri à Orlando? Orlando est loin des Keys. Il doit avoir
des choses a faire en chemin.
Jacques ……du Canada sera certainement d’un grand aide à Sarah, il est tellement
serviable!
Sarah au Maroc quel beau voyage elle fera.
J’attends la suite avec impatience
Félicitation Patrick