Histoire des libertines (119) : Cora Pearl, l’extravagante.

Récit érotique écrit par Olga T [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
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Histoire des libertines (119) : Cora Pearl, l’extravagante.
AVERTISSEMENT :
J’ai déjà évoqué, dans cette rubrique, de célèbres courtisanes du Second Empire. Sur ce sujet, je renvoie à la lecture de « Histoire des libertines (50) : femmes d’influence à l’époque du Second Empire », paru le 23 décembre 2019 ».
Le Second Empire fut sans nul doute l'âge d'or des courtisanes françaises, devenues idoles de leur époque, femmes légendaires, dont la richesse et le pouvoir étaient stupéfiants, dont la beauté, la force de séduction ont vaincu la raison des hommes. Cora Pearl (1836-1886) fut, elle aussi, l’une de ces « grandes horizontales », qui marquèrent la « Fête impériale ».
***
L’UNE DES PLUS CELEBRES COURTISANES DU SECOND EMPIRE
Célèbre demi-mondaine, elle séduisit la plus haute aristocratie au cours de la période du Second Empire, notamment le prince Napoléon et le duc de Morny.
Cora Pearl était d’origine britannique. De son vrai nom Éliza Emma Crouch, elle naquit à Plymouth le 17 décembre 1836, quelques mois seulement avant l'introduction de l'état civil en Angleterre et au Pays de Galles.
Cora Pearl prétendit être née en 1842 et utilisa, pour le justifier, l'acte de naissance de sa sœur Louisa Élizabeth, en le falsifiant. Le certificat original de Louisa Élizabeth Crouch est daté du 23 février 1841. Cora Pearl réalisa un faux grossier, en remplaçant le premier prénom de Louisa en Emma, puis modifia l'année 1841 en celle de 1842.
Son père était le violoncelliste et compositeur Frederick Nicholls Crouch (1808-1896). Il épousa, en 1832, Lydia Pearson, professeure de chant. En 1841, Crouch retourna à Londres, laissant sa femme et ses filles à Plymouth. En 1843, il se remaria, puis, pour échapper à ses créanciers, il partit en 1849 aux États-Unis pour exercer sa profession de musicien.
Afin de subvenir aux besoins de ses enfants, Lydia vécut maritalement avec un nouveau compagnon, Richard William Littley, et décida d'envoyer Emma dans une école religieuse en France.
Elle fut placée dans un pensionnat à Boulogne-sur-Mer pendant deux ans puis dans une autre institution à Calais, où elle resta sept ans. Par la suite, Emma séjourna deux ans chez sa grand-mère à Jersey, qui la plaça chez un modiste réputé à Londres. Dans cette maison, elle fit la connaissance du baron Oelsen et vécut un an avec lui, avant de devenir la maîtresse d'un propriétaire de cabaret londonien, Robert Bignell, de dix ans son aîné.
En mars 1858, Robert Bignell emmena Emma à Paris. Après un séjour d'un mois, Robert voulut rentrer en Angleterre, mais Emma décida de rester en France.
LES DÉBUTS D’UNE FEMME GALANTE
Emma aimait les plaisirs charnels. Elle devint une femme entretenue, au service d'un proxénète du nom de Roubise, qui lui procura de nombreuses relations. Elle prit l'habitude de tenir un registre de ses clients avec leurs noms, des détails intimes au sujet de leur vie privée et même des commentaires assez crus sur leurs performances !
En 1864, à la mort de Roubise, Emma, devenue libre, s'installa Rue de Ponthieu, dans un appartement qu'elle partagea avec une amie, Carole Hassé.
EMMA DEVINT CORA PEARL
Ayant pris le pseudonyme de Cora Pearl, elle rencontra le duc de Rivoli, Victor Masséna (1836-1910), petit-fils du Maréchal d’empire. Celui-ci lui présenta, au cours d'une soirée à l'Opéra, le prince Achille Murat (1847-1895), petit-fils de l’ancien Roi de Naples.
Le prince Murat était très épris de Cora Pearl. Il lui aurait promis un acte de donation de deux cent mille francs pour le jour de leur mariage
Cora entretint une liaison simultanée avec Masséna et Murat jusqu’en 1865, lorsque le prince dut partir pour l'Afrique, sur l'ordre de l'empereur, pour rejoindre son nouveau régiment. Cora, bien que lassée du duc, poursuivit néanmoins leur relation.
Si on ne saurait énumérer les amants de Cora, la famille et les proches de l’empereur furent son terrain de prédilection. Il y en eut d’autres, comme le Marquis de Galliffet (1831-1909), le futur « fusilleur de la Commune », ou encore le Prince d’Orange, héritier du trône des Pays-Bas, que Cora appelle, dans ses Mémoires, « le Prince Citron »
LES EXTRAVAGANCES DE LA DAME DE BEAUSEJOUR
Elle fit la connaissance du duc Charles de Morny (1811-1865), le demi-frère de Napoléon III, en décembre 1864. Elle devint sa maîtresse, mais aussi son amie ainsi que celle de son épouse, la princesse Sophie.
Grâce aux générosités de Morny, Cora devint locataire, fin 1864, du château de Beauséjour à Olivet, dans le Loiret. Elle en sera propriétaire de 1875 à 1885. Elle organisa dans son nouveau domaine des fêtes somptueuses et dépensa des sommes astronomiques dans les travaux.
Les extravagances de Cora ne se comptaient plus. Tout lui était bon pour se faire remarquer. Elle prit, par exemple, un bain de champagne, ou elle fit teindre son caniche en bleu, pour qu'il soit assorti à sa robe.
Elle introduisit également la mode du maquillage. Cora Pearl fut surnommée « le plat du jour ». Elle fréquentait les restaurants à la mode, dont le Café Anglais, qui offrait à sa clientèle des cabinets particuliers. Cora Pearl était connue pour surprendre ses invités. Au cours d'une soirée, au célèbre cabinet numéro seize, dit le Grand Seize, au Café Anglais, elle s'absenta quelques instants et revint, étendue sur un immense plateau d’argent, porté par quatre domestiques, complètement nue et entourée d'une garniture de persil. Elle aurait également dévoilé ses seins, lors d'un dîner entre femmes, ce qui laisse entendre qu'elle aimait s’exhiber.
L’APOGÉE DE CORA
Au retour des obsèques du duc de Morny, Cora rencontra le duc Emmanuel de Gramont-Caderousse (1835-1865), qui « la prit à la hussarde ». Il fut son amant, ou plutôt son client, jusqu’au 25 septembre 1865, date de son décès.
Cette même année 1865, Cora fit une rencontre décisive, celle du prince Napoléon (1822-1891), cousin germain de l’empereur. L’extravagant « Plon Plon », surnommé également « le Bonaparte rouge », sera son amant plusieurs années durant. Le prince, en tant que bienfaiteur et protecteur, n'hésita pas à lui offrir deux splendides hôtels particuliers, l'un, rue de Chaillot (16e arrondissement) et l'autre, rue des Bassins (actuelle rue Copernic).
Quand « Plon Plon » entra dans sa vie, les tarifs de Cora, déjà élevés, grimpèrent encore, pour atteindre 12.000 francs la nuit. Le prince n’exigeait pas l’exclusivité. Il lui demandait seulement de ne pas s’afficher avec ses autres amants.
Cora ne se privait pas pourtant, ajoutant alors à son tableau de chasse des diplomates, les princes Anatole Demidoff (1812-1870), Alexandre Gortschakoff (1798-1883), ministre russe des affaires étrangères ou encore le richissime Khalil Bey (1831-1879), avec qui elle découvre « l’amour à l’oriental », lent, savant et raffiné, tout le contraire de la « rapidité » de Napoléon III ou de la vulgarité de « Plon Plon ». Le peintre Gustave Doré (1832-1883), fou amoureux de Cora, lui offrit en vain le mariage.
Elle plaisait à l'empereur et on l'avait vue à ses côtés au bois, dans sa calèche. Cora reconnut, dans ses Mémoires, qu’il « l’aurait essayé, une fois » !
La fin du Second Empire fut la période faste et l'apogée de Cora Pearl. Sa fortune s’accroissait considérablement et comme la plupart des demi-mondaines, elle dilapidait des sommes folles. Au cours de cette période, elle acheta plus de soixante chevaux et dépensa même pour l'un d'entre eux la somme de 90.000 francs.
Elle justifiait son appât du gain uniquement pour assurer le train de vie imposé par la fréquentation des hommes les plus riches et les plus influents de l'Empire. La réussite des puissants se voyait dans la magnificence de leurs maîtresses.
Cora Pearl eut même une carrière artistique, se produisant en 1867 au théâtre des Bouffes-Parisiens, dans « Orphée aux Enfers », de Jacques Offenbach. Elle avait assez de talent musical pour interpréter le rôle de Cupidon et apparut sur scène seulement vêtue de ses diamants ! Chaque soir, un diamant tombait et roulait, jamais elle ne le ramassait : c'était le pourboire des machinistes.
La chute de l’empire amorça le déclin de Cora Pearl. Pendant le siège de Paris, elle transforma son hôtel particulier, rue de Chaillot, en hôpital et s'improvisa infirmière.
Elle finit par quitter Paris en ballon, avec deux de ses amants, proches du prince Napoléon, qu’elle rejoignit en Angleterre et qu’elle accompagna à Brighton, puis en Suisse.
À son retour en France, elle se retrouva dans une situation précaire. Ce qui restait de sa fortune avait financé la transformation de son hôtel particulier en hôpital et, désormais, elle n’avait plus de protecteur.
L’AFFAIRE DUVAL
En 1872, Cora Pearl rencontra Alexandre Duval (1847-1922), un riche entrepreneur. Son père, Adolphe-Baptiste Duval, avait fait fortune, en ouvrant à Paris, les Bouillons Duval, une chaîne de restaurants à bon marché. À la mort de son père en 1870, Alexandre Duval est à la tête de douze restaurants dans la capitale.
Alexandre, qui est âgé de vingt-cinq ans, devint l'amant de Cora qui en a alors trente-sept. Alexandre Duval possédait une fortune personnelle, en plus de son héritage familial. Cora Pearl ne mit cependant pas longtemps à ruiner le jeune restaurateur.
Duval payait l'entretien de son hôtel rue de Chaillot et d'une maison de campagne à Maisons-Laffitte. Il lui offrit également des cadeaux : voitures, attelages et même un livre composé de cent billets de mille francs reliés ! Il contracta pour elle des dettes exorbitantes. Inexorablement, les finances virent à manquer et la famille d'Alexandre décida de lui couper les vivres.
Cora, sans le moindre remords, mit alors un terme à leur liaison et refusa de revoir Alexandre. Désespéré, Alexandre réussit à forcer la porte de Cora le 19 décembre 1872, malgré l'opposition des domestiques. Armé d'un révolver, il se dirigea vers la chambre de Cora. Il était convaincu qu'elle se trouvait avec un autre homme.
Alexandre fit feu une première fois et ne blessa personne. Face à son échec, il retourna alors l'arme contre lui, devant sa maîtresse. La tentative de suicide échoua, la blessure n'étant pas mortelle. Cette histoire inspira à Émile Zola, dans son roman, Nana.la tentative de suicide de Georges Hugon.
L'affaire fit d'autant plus scandale que certains gazetiers avides de sensationnel avaient exagéré la gravité des faits, en insinuant que Duval s'était tué, alors, qu'en réalité, sa blessure était superficielle.
Les conséquences de ce tragique fait divers ne se firent pas attendre. Les autorités ordonnèrent l'expulsion du territoire de Cora Pearl., la courtisane britannique Deux jours après le drame, elle reçut la visite d'un commissaire de police qui lui intima l'ordre de quitter la France sans délai. Cora logea d'abord chez une amie à Monte-Carlo, puis partit pour Nice et enfin, Milan.
SPLENDEURS ET MISÈRES D’UNE COURTISANE
Son expatriation fut de courte durée mais sa réputation ne se remit pas de ce scandale. Ses meubles et effets mobiliers de son hôtel rue de Chaillot furent saisis à la demande de ses créanciers. Cora Pearl porta plainte et reprit possession de ses biens dès 1873. Elle vendit néanmoins sa propriété de Maisons-Laffitte, dont le dernier visiteur ne fut autre que le prince Napoléon, qui passa la nuit avec elle.
Cora Pearl revint à Paris, après son exil forcé et reprit les activités de ses débuts, la prostitution. Elle ne retrouva jamais plus sa position dans la haute société et son existence de luxe. Cora mit en vente, à Drouot, toute son argenterie, en 1877, afin de s'acquitter de ses dettes. Elle se sépara également de son château de Beauséjour en 1885, déjà fortement hypothéqué.
La publication de ses « mémoires » intervint peu avant sa mort. Des rumeurs coururent, selon lesquelles elle aurait été payée pour ne pas tout dire. Le livre aurait été rédigé, sous sa dictée, par un de ses amis, le comte Maurice d’Hérisson (1839-1898), à partir d’une version plus « sulfureuse », écrite lors de son séjour à Monaco, en 1873. Peu de temps après la publication de ses mémoires, en 1886, Cora Pearl tomba gravement malade d'un cancer à l'estomac.
Trois mois après son décès, le reste de ses biens, lingerie, draps de lit, son dernier collier de perles, son portrait à cheval peint par François-Émile de Lansac (1803-1890), une cravache, une tenue d'amazone, sa bibliothèque de quatre-vingts livres et plusieurs perruques blondes, furent mis aux enchères.
UNE DES REINES DU SECOND EMPIRE
Cora Pearl, beauté anglaise flamboyante, avait le don de « faire rire les hommes qui s'ennuyaient », selon les mots de Virginia Rounding.
Cora Pearl était particulièrement réputée pour avoir été innovante en matière d’esthétique, véritable découvreuse dans ce domaine. Elle faisait des apparitions toujours plus étonnantes et servit de modèles pour les autres femmes de son temps. Elle aurait notamment révolutionné la manière de se maquiller en lançant la mode d’ombrer les yeux, cils et paupières ainsi que l’usage d’une nouvelle poudre de fond de teint qu’elle aurait créée elle-même en y ajoutant des substances nouvelles qui donnaient un effet particulier.
C’est également elle qui lança la mode chez les femmes de se teindre les cheveux, apparaissant parfois en rousse, sa couleur naturelle qui lui valut l’appellation de Lune Rousse parfois en blonde, ce que tout le monde remarquait.
Dotée d’une personnalité originale et irrévérencieuse, célébrée dans la presse pour ses frasques et ses amours dissolues, elle maîtrisait parfaitement l’art de faire parler d’elle. Entretenant une allure sensuelle et féminine avec une silhouette mince et tonique elle fut incontestablement l’une des icônes féminines du Second Empire.
Le journaliste Philibert Audebrand (1815-1906) la qualifia de « Phryné britannique », ajoutant qu’elle fut « une des plus brillantes étoiles dans le firmament du Second Empire. »
Comme l’écrit Marc Lemonier, toute sa vie, Cora Pearl fit preuve d’absence de scrupules. Il faut toutefois se souvenir de ses origines, de son parcours et de ce qu’elle raconta au sujet de sa première expérience, qui s’apparenteait à un viol.
Il faut aussi souligner son courage et sa générosité, lors du siège de Paris. La personnalité de Cora se résume bien à travers cet extrait de ses Mémoires : « Je n'ai jamais trompé personne, car je n'ai jamais été à personne. Mon indépendance fut toute ma fortune : je n'ai pas connu d'autre bonheur.
***
REFERENCES
Je renvoie aux chapitres consacrés à Cora Pearl dans les trois ouvrages suivants :
- Joëlle Chevé, « Les grandes courtisanes » (First, 2012)
- Marc Lemonier « La petite histoire des courtisanes » (Editions Jourdan, 2022)
- Catherine Authier : Femmes d'exception, femmes d'influence - Une histoire des courtisanes au XIXe siècle (Armand Colin, 2015)
On peut aussi mentionner en bibliographie :
- Joanna Richardson : « Les Courtisanes : Le demi-monde au XIXe siècle en France » (Stock, 1968)
- Virginia Rounding : « Les Grandes Horizontales : Vies et Légendes de quatre courtisanes du XIXe siècle. » (Editions du rocher 2005)
Sur le net, outre l’article Wikipedia, qui a inspiré cette chronique, je signale également les liens suivants :
- https://histoire-image.org/etudes/cora-pearl-celebre-courtisane-second-empire
- http://autourduperetanguy.blogspirit.com/archive/2010/11/15/cora-pearl-la-scandaleuse.html
- https://www.factinate.com/people/facts-cora-pearl
J’ai déjà évoqué, dans cette rubrique, de célèbres courtisanes du Second Empire. Sur ce sujet, je renvoie à la lecture de « Histoire des libertines (50) : femmes d’influence à l’époque du Second Empire », paru le 23 décembre 2019 ».
Le Second Empire fut sans nul doute l'âge d'or des courtisanes françaises, devenues idoles de leur époque, femmes légendaires, dont la richesse et le pouvoir étaient stupéfiants, dont la beauté, la force de séduction ont vaincu la raison des hommes. Cora Pearl (1836-1886) fut, elle aussi, l’une de ces « grandes horizontales », qui marquèrent la « Fête impériale ».
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L’UNE DES PLUS CELEBRES COURTISANES DU SECOND EMPIRE
Célèbre demi-mondaine, elle séduisit la plus haute aristocratie au cours de la période du Second Empire, notamment le prince Napoléon et le duc de Morny.
Cora Pearl était d’origine britannique. De son vrai nom Éliza Emma Crouch, elle naquit à Plymouth le 17 décembre 1836, quelques mois seulement avant l'introduction de l'état civil en Angleterre et au Pays de Galles.
Cora Pearl prétendit être née en 1842 et utilisa, pour le justifier, l'acte de naissance de sa sœur Louisa Élizabeth, en le falsifiant. Le certificat original de Louisa Élizabeth Crouch est daté du 23 février 1841. Cora Pearl réalisa un faux grossier, en remplaçant le premier prénom de Louisa en Emma, puis modifia l'année 1841 en celle de 1842.
Son père était le violoncelliste et compositeur Frederick Nicholls Crouch (1808-1896). Il épousa, en 1832, Lydia Pearson, professeure de chant. En 1841, Crouch retourna à Londres, laissant sa femme et ses filles à Plymouth. En 1843, il se remaria, puis, pour échapper à ses créanciers, il partit en 1849 aux États-Unis pour exercer sa profession de musicien.
Afin de subvenir aux besoins de ses enfants, Lydia vécut maritalement avec un nouveau compagnon, Richard William Littley, et décida d'envoyer Emma dans une école religieuse en France.
Elle fut placée dans un pensionnat à Boulogne-sur-Mer pendant deux ans puis dans une autre institution à Calais, où elle resta sept ans. Par la suite, Emma séjourna deux ans chez sa grand-mère à Jersey, qui la plaça chez un modiste réputé à Londres. Dans cette maison, elle fit la connaissance du baron Oelsen et vécut un an avec lui, avant de devenir la maîtresse d'un propriétaire de cabaret londonien, Robert Bignell, de dix ans son aîné.
En mars 1858, Robert Bignell emmena Emma à Paris. Après un séjour d'un mois, Robert voulut rentrer en Angleterre, mais Emma décida de rester en France.
LES DÉBUTS D’UNE FEMME GALANTE
Emma aimait les plaisirs charnels. Elle devint une femme entretenue, au service d'un proxénète du nom de Roubise, qui lui procura de nombreuses relations. Elle prit l'habitude de tenir un registre de ses clients avec leurs noms, des détails intimes au sujet de leur vie privée et même des commentaires assez crus sur leurs performances !
En 1864, à la mort de Roubise, Emma, devenue libre, s'installa Rue de Ponthieu, dans un appartement qu'elle partagea avec une amie, Carole Hassé.
EMMA DEVINT CORA PEARL
Ayant pris le pseudonyme de Cora Pearl, elle rencontra le duc de Rivoli, Victor Masséna (1836-1910), petit-fils du Maréchal d’empire. Celui-ci lui présenta, au cours d'une soirée à l'Opéra, le prince Achille Murat (1847-1895), petit-fils de l’ancien Roi de Naples.
Le prince Murat était très épris de Cora Pearl. Il lui aurait promis un acte de donation de deux cent mille francs pour le jour de leur mariage
Cora entretint une liaison simultanée avec Masséna et Murat jusqu’en 1865, lorsque le prince dut partir pour l'Afrique, sur l'ordre de l'empereur, pour rejoindre son nouveau régiment. Cora, bien que lassée du duc, poursuivit néanmoins leur relation.
Si on ne saurait énumérer les amants de Cora, la famille et les proches de l’empereur furent son terrain de prédilection. Il y en eut d’autres, comme le Marquis de Galliffet (1831-1909), le futur « fusilleur de la Commune », ou encore le Prince d’Orange, héritier du trône des Pays-Bas, que Cora appelle, dans ses Mémoires, « le Prince Citron »
LES EXTRAVAGANCES DE LA DAME DE BEAUSEJOUR
Elle fit la connaissance du duc Charles de Morny (1811-1865), le demi-frère de Napoléon III, en décembre 1864. Elle devint sa maîtresse, mais aussi son amie ainsi que celle de son épouse, la princesse Sophie.
Grâce aux générosités de Morny, Cora devint locataire, fin 1864, du château de Beauséjour à Olivet, dans le Loiret. Elle en sera propriétaire de 1875 à 1885. Elle organisa dans son nouveau domaine des fêtes somptueuses et dépensa des sommes astronomiques dans les travaux.
Les extravagances de Cora ne se comptaient plus. Tout lui était bon pour se faire remarquer. Elle prit, par exemple, un bain de champagne, ou elle fit teindre son caniche en bleu, pour qu'il soit assorti à sa robe.
Elle introduisit également la mode du maquillage. Cora Pearl fut surnommée « le plat du jour ». Elle fréquentait les restaurants à la mode, dont le Café Anglais, qui offrait à sa clientèle des cabinets particuliers. Cora Pearl était connue pour surprendre ses invités. Au cours d'une soirée, au célèbre cabinet numéro seize, dit le Grand Seize, au Café Anglais, elle s'absenta quelques instants et revint, étendue sur un immense plateau d’argent, porté par quatre domestiques, complètement nue et entourée d'une garniture de persil. Elle aurait également dévoilé ses seins, lors d'un dîner entre femmes, ce qui laisse entendre qu'elle aimait s’exhiber.
L’APOGÉE DE CORA
Au retour des obsèques du duc de Morny, Cora rencontra le duc Emmanuel de Gramont-Caderousse (1835-1865), qui « la prit à la hussarde ». Il fut son amant, ou plutôt son client, jusqu’au 25 septembre 1865, date de son décès.
Cette même année 1865, Cora fit une rencontre décisive, celle du prince Napoléon (1822-1891), cousin germain de l’empereur. L’extravagant « Plon Plon », surnommé également « le Bonaparte rouge », sera son amant plusieurs années durant. Le prince, en tant que bienfaiteur et protecteur, n'hésita pas à lui offrir deux splendides hôtels particuliers, l'un, rue de Chaillot (16e arrondissement) et l'autre, rue des Bassins (actuelle rue Copernic).
Quand « Plon Plon » entra dans sa vie, les tarifs de Cora, déjà élevés, grimpèrent encore, pour atteindre 12.000 francs la nuit. Le prince n’exigeait pas l’exclusivité. Il lui demandait seulement de ne pas s’afficher avec ses autres amants.
Cora ne se privait pas pourtant, ajoutant alors à son tableau de chasse des diplomates, les princes Anatole Demidoff (1812-1870), Alexandre Gortschakoff (1798-1883), ministre russe des affaires étrangères ou encore le richissime Khalil Bey (1831-1879), avec qui elle découvre « l’amour à l’oriental », lent, savant et raffiné, tout le contraire de la « rapidité » de Napoléon III ou de la vulgarité de « Plon Plon ». Le peintre Gustave Doré (1832-1883), fou amoureux de Cora, lui offrit en vain le mariage.
Elle plaisait à l'empereur et on l'avait vue à ses côtés au bois, dans sa calèche. Cora reconnut, dans ses Mémoires, qu’il « l’aurait essayé, une fois » !
La fin du Second Empire fut la période faste et l'apogée de Cora Pearl. Sa fortune s’accroissait considérablement et comme la plupart des demi-mondaines, elle dilapidait des sommes folles. Au cours de cette période, elle acheta plus de soixante chevaux et dépensa même pour l'un d'entre eux la somme de 90.000 francs.
Elle justifiait son appât du gain uniquement pour assurer le train de vie imposé par la fréquentation des hommes les plus riches et les plus influents de l'Empire. La réussite des puissants se voyait dans la magnificence de leurs maîtresses.
Cora Pearl eut même une carrière artistique, se produisant en 1867 au théâtre des Bouffes-Parisiens, dans « Orphée aux Enfers », de Jacques Offenbach. Elle avait assez de talent musical pour interpréter le rôle de Cupidon et apparut sur scène seulement vêtue de ses diamants ! Chaque soir, un diamant tombait et roulait, jamais elle ne le ramassait : c'était le pourboire des machinistes.
La chute de l’empire amorça le déclin de Cora Pearl. Pendant le siège de Paris, elle transforma son hôtel particulier, rue de Chaillot, en hôpital et s'improvisa infirmière.
Elle finit par quitter Paris en ballon, avec deux de ses amants, proches du prince Napoléon, qu’elle rejoignit en Angleterre et qu’elle accompagna à Brighton, puis en Suisse.
À son retour en France, elle se retrouva dans une situation précaire. Ce qui restait de sa fortune avait financé la transformation de son hôtel particulier en hôpital et, désormais, elle n’avait plus de protecteur.
L’AFFAIRE DUVAL
En 1872, Cora Pearl rencontra Alexandre Duval (1847-1922), un riche entrepreneur. Son père, Adolphe-Baptiste Duval, avait fait fortune, en ouvrant à Paris, les Bouillons Duval, une chaîne de restaurants à bon marché. À la mort de son père en 1870, Alexandre Duval est à la tête de douze restaurants dans la capitale.
Alexandre, qui est âgé de vingt-cinq ans, devint l'amant de Cora qui en a alors trente-sept. Alexandre Duval possédait une fortune personnelle, en plus de son héritage familial. Cora Pearl ne mit cependant pas longtemps à ruiner le jeune restaurateur.
Duval payait l'entretien de son hôtel rue de Chaillot et d'une maison de campagne à Maisons-Laffitte. Il lui offrit également des cadeaux : voitures, attelages et même un livre composé de cent billets de mille francs reliés ! Il contracta pour elle des dettes exorbitantes. Inexorablement, les finances virent à manquer et la famille d'Alexandre décida de lui couper les vivres.
Cora, sans le moindre remords, mit alors un terme à leur liaison et refusa de revoir Alexandre. Désespéré, Alexandre réussit à forcer la porte de Cora le 19 décembre 1872, malgré l'opposition des domestiques. Armé d'un révolver, il se dirigea vers la chambre de Cora. Il était convaincu qu'elle se trouvait avec un autre homme.
Alexandre fit feu une première fois et ne blessa personne. Face à son échec, il retourna alors l'arme contre lui, devant sa maîtresse. La tentative de suicide échoua, la blessure n'étant pas mortelle. Cette histoire inspira à Émile Zola, dans son roman, Nana.la tentative de suicide de Georges Hugon.
L'affaire fit d'autant plus scandale que certains gazetiers avides de sensationnel avaient exagéré la gravité des faits, en insinuant que Duval s'était tué, alors, qu'en réalité, sa blessure était superficielle.
Les conséquences de ce tragique fait divers ne se firent pas attendre. Les autorités ordonnèrent l'expulsion du territoire de Cora Pearl., la courtisane britannique Deux jours après le drame, elle reçut la visite d'un commissaire de police qui lui intima l'ordre de quitter la France sans délai. Cora logea d'abord chez une amie à Monte-Carlo, puis partit pour Nice et enfin, Milan.
SPLENDEURS ET MISÈRES D’UNE COURTISANE
Son expatriation fut de courte durée mais sa réputation ne se remit pas de ce scandale. Ses meubles et effets mobiliers de son hôtel rue de Chaillot furent saisis à la demande de ses créanciers. Cora Pearl porta plainte et reprit possession de ses biens dès 1873. Elle vendit néanmoins sa propriété de Maisons-Laffitte, dont le dernier visiteur ne fut autre que le prince Napoléon, qui passa la nuit avec elle.
Cora Pearl revint à Paris, après son exil forcé et reprit les activités de ses débuts, la prostitution. Elle ne retrouva jamais plus sa position dans la haute société et son existence de luxe. Cora mit en vente, à Drouot, toute son argenterie, en 1877, afin de s'acquitter de ses dettes. Elle se sépara également de son château de Beauséjour en 1885, déjà fortement hypothéqué.
La publication de ses « mémoires » intervint peu avant sa mort. Des rumeurs coururent, selon lesquelles elle aurait été payée pour ne pas tout dire. Le livre aurait été rédigé, sous sa dictée, par un de ses amis, le comte Maurice d’Hérisson (1839-1898), à partir d’une version plus « sulfureuse », écrite lors de son séjour à Monaco, en 1873. Peu de temps après la publication de ses mémoires, en 1886, Cora Pearl tomba gravement malade d'un cancer à l'estomac.
Trois mois après son décès, le reste de ses biens, lingerie, draps de lit, son dernier collier de perles, son portrait à cheval peint par François-Émile de Lansac (1803-1890), une cravache, une tenue d'amazone, sa bibliothèque de quatre-vingts livres et plusieurs perruques blondes, furent mis aux enchères.
UNE DES REINES DU SECOND EMPIRE
Cora Pearl, beauté anglaise flamboyante, avait le don de « faire rire les hommes qui s'ennuyaient », selon les mots de Virginia Rounding.
Cora Pearl était particulièrement réputée pour avoir été innovante en matière d’esthétique, véritable découvreuse dans ce domaine. Elle faisait des apparitions toujours plus étonnantes et servit de modèles pour les autres femmes de son temps. Elle aurait notamment révolutionné la manière de se maquiller en lançant la mode d’ombrer les yeux, cils et paupières ainsi que l’usage d’une nouvelle poudre de fond de teint qu’elle aurait créée elle-même en y ajoutant des substances nouvelles qui donnaient un effet particulier.
C’est également elle qui lança la mode chez les femmes de se teindre les cheveux, apparaissant parfois en rousse, sa couleur naturelle qui lui valut l’appellation de Lune Rousse parfois en blonde, ce que tout le monde remarquait.
Dotée d’une personnalité originale et irrévérencieuse, célébrée dans la presse pour ses frasques et ses amours dissolues, elle maîtrisait parfaitement l’art de faire parler d’elle. Entretenant une allure sensuelle et féminine avec une silhouette mince et tonique elle fut incontestablement l’une des icônes féminines du Second Empire.
Le journaliste Philibert Audebrand (1815-1906) la qualifia de « Phryné britannique », ajoutant qu’elle fut « une des plus brillantes étoiles dans le firmament du Second Empire. »
Comme l’écrit Marc Lemonier, toute sa vie, Cora Pearl fit preuve d’absence de scrupules. Il faut toutefois se souvenir de ses origines, de son parcours et de ce qu’elle raconta au sujet de sa première expérience, qui s’apparenteait à un viol.
Il faut aussi souligner son courage et sa générosité, lors du siège de Paris. La personnalité de Cora se résume bien à travers cet extrait de ses Mémoires : « Je n'ai jamais trompé personne, car je n'ai jamais été à personne. Mon indépendance fut toute ma fortune : je n'ai pas connu d'autre bonheur.
***
REFERENCES
Je renvoie aux chapitres consacrés à Cora Pearl dans les trois ouvrages suivants :
- Joëlle Chevé, « Les grandes courtisanes » (First, 2012)
- Marc Lemonier « La petite histoire des courtisanes » (Editions Jourdan, 2022)
- Catherine Authier : Femmes d'exception, femmes d'influence - Une histoire des courtisanes au XIXe siècle (Armand Colin, 2015)
On peut aussi mentionner en bibliographie :
- Joanna Richardson : « Les Courtisanes : Le demi-monde au XIXe siècle en France » (Stock, 1968)
- Virginia Rounding : « Les Grandes Horizontales : Vies et Légendes de quatre courtisanes du XIXe siècle. » (Editions du rocher 2005)
Sur le net, outre l’article Wikipedia, qui a inspiré cette chronique, je signale également les liens suivants :
- https://histoire-image.org/etudes/cora-pearl-celebre-courtisane-second-empire
- http://autourduperetanguy.blogspirit.com/archive/2010/11/15/cora-pearl-la-scandaleuse.html
- https://www.factinate.com/people/facts-cora-pearl
→ Qu'avez-vous pensé de cette histoire ??? Donnez votre avis...
→ Autres histoires érotiques publiées par Olga T
6 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
@ Linsee @ Philippe, un grand merci!
J'adore, tu es géniale ;
Linsee
Linsee
Je suis toujours impressionné de ton immense culture historique, de ta prose impeccable qui scotche le lecteur fidèle (et moi bien sûr...).
Et de tes histoires très très érotiques, tellement bien écrites et décrites, souvent originales et si excitantes !
Bravo, et surtout continue ta belle et intelligente écriture !
Philippe
Et de tes histoires très très érotiques, tellement bien écrites et décrites, souvent originales et si excitantes !
Bravo, et surtout continue ta belle et intelligente écriture !
Philippe
@ Julie @ Maurice, merci.
Merci aussi à tous les les lecteurs pour cette bonne audience (pour un texte qui n'est pas dans les "habitudes" de ce site). Il semblerait cependant qu'il y ait un problème avec la publication des commentaires, plusieurs m'ayant été signalés par des lecteurs avec qui je suis en contact, mais ils n'apparaissent pas en ligne. Au gestionnaire du site, pouvez-vous vérifier et résoudre ce problème s'il vous plait?
Merci aussi à tous les les lecteurs pour cette bonne audience (pour un texte qui n'est pas dans les "habitudes" de ce site). Il semblerait cependant qu'il y ait un problème avec la publication des commentaires, plusieurs m'ayant été signalés par des lecteurs avec qui je suis en contact, mais ils n'apparaissent pas en ligne. Au gestionnaire du site, pouvez-vous vérifier et résoudre ce problème s'il vous plait?
C'est un texte qui fera certainement moins d'audience que la série "Clémence", mais c'est bien de respecter cette alternance entre textes "instructifs" et textes plus "hard"
Maurice
Maurice
Ces récits sont toujours aussi intéressants
Julie
Julie

