La proposition suite et fin
Récit érotique écrit par Philus [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 13-12-2023 dans la catégorie Entre-nous, hommes et femmes
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La proposition suite et fin
(Lire auparavant « La proposition »)
Quel hasard a fait passer Romain V. derrière la gare de Logebelle, le long du canal de la Marne ? Nul ne pourrait le dire avec certitude, mais ce jour-là, en apercevant Chloé dans la brume matinale, Romain se sentit investi d’une mission quasi divine. Il gara sa voiture, une simple Peugeot 208 blanche, et en descendit doucement sans claquer la portière. Il s’approcha du banc public et s’assit à une extrémité. Chloé, assise à l’autre bout et qui ne l’avait pas entendu arriver, considéra à peine cet homme brun aux yeux clairs, grand et mince. Puis elle détourna le regard vers les eaux boueuses du canal.
— Vous êtes sadique au point de vous délecter de mon désespoir ? s’enquit-elle.
Romain regarda face à lui.
— Vous connaissez bien l’histoire et j’admets être en partie responsable de tout ce gâchis, mais personne ne peut se réjouir de quoi que ce soit. Vous avez perdu Alex, Alex a perdu la liberté, Pierre-Charles a perdu la vie et moi, j’ai perdu un ami. Ce serait une bataille, on l’appellerait « bataille des quatre vaincus ». Les seuls qui ont gagné sont les héritiers de Pierre-Charles qui n’espéraient pas voir disparaître ce richissime quadragénaire en pleine santé si tôt.
Il tourna la tête vers Chloé, silencieuse.
— Je n’aurais jamais dû le provoquer et accepter de parier avec Pierre-Charles. Rien de tout cela ne serait arrivé.
Chloé, les traits tirés par la fatigue des récents évènements, se décida à regarder son interlocuteur.
— Et moi, je n’aurais jamais dû accepter le marché qu’il m’a proposé. Qu’est-ce qui m’a donc pris ?
Romain écarta les mains comme pour symboliser une certaine fatalité.
— Vous avez accepté pour l’argent, quant à moi-même je vous ai fait chanter pour récupérer le mien. Si je n’avais pas agi ainsi, Alex et vous vivriez heureux. D’autant plus qu’un million, pour moi, ce n’est pas tant que ça. J’étais finalement plus en colère contre moi-même, d’avoir perdu ce pari que désespéré de m’être fait délester de cette somme. J’ai une part de responsabilité bien plus importante que la vôtre et j’aimerais essayer de réparer ce que je peux.
Chloé fixa Romain d’un regard perçant.
— Tiens donc ! Et pourquoi moi ?
— Je ne peux, hélas, plus rien faire pour Pierre-Charles. Alex, je peux envisager quelque chose avec l’aide de mes avocats, mais il me faut votre accord puisque vous êtes son épouse. Quant à vous, vous avez été chassée de chez vous, vous avez perdu votre travail et, je pense, toutes vos relations. Quand je vois la façon dont vous fixez ce canal du regard, j’ai peur pour vous. Je me trompe ?
Chloé baissa la tête.
— J’avoue y avoir pensé…
Romain glissa vers le milieu du banc, se rapprochant ainsi de la jeune femme.
— J’ai une proposition à vous faire.
Chloé le fusilla du regard.
— Tout a commencé comme ça, fit-elle en élevant la voix.
Romain se rendit compte de sa bévue. Il mit les deux paumes en avant et répondit :
— Oh ! Que je suis maladroit ! Veuillez m’excuser, mais ma proposition est cette fois-ci tout à fait honnête. J’habite à Aÿ dans une immense maison que m’ont laissée mes parents. Une aile de cette maison a une entrée séparée et dessert un logement qu’occupait ma grand-mère paternelle. Je vous propose d’y habiter le temps que vous voudrez. Bien sûr, c’est sans contrepartie aucune ni pécuniaire ni autre.
— Et j’y ferais quoi ? La bonniche ?
— Bien sûr que non. Vous ne savez peut-être pas, mais je suis propriétaire de la maison de champagne Cerana. J’ai besoin de personnel pour le service export qui prend de plus en plus d’importance. Les employés de Cerana sont très bien payés.
Chloé réfléchissait à cent à l’heure.
« Aÿ, ce n’est pas loin de Logebelle ni de Reims. Je pourrais aller voir Alex au parloir de la prison. Un logement, pas de loyer et une paye décente avec un boulot digne de ce nom, c’est inespéré. De plus, là-bas personne ne me connait et habiter chez Romain, ça doit en mettre plein la vue. Mais, ne te fais pas avoir ma fille, il suffit d’une fois. »
— Admettons que j’accepte, je n’ai plus rien en banque et il me reste à peine cinquante euros dans mon portefeuille.
Chloé frappa du plat de la main la poignée de son bagage.
— Dans ma valise, mes affaires datent de cinq ans au moins. Elles sont usées et démodées. À la maison de retraite, je n’avais pas besoin de plus, j’étais simplement en sous-vêtements sous ma blouse. Je ne peux décemment pas travailler dans une entreprise de renom au milieu d’autres femmes, sans être habillée correctement.
Romain balaya l’objection d’un geste.
— Ne vous inquiétez donc pas de ça. Dès que vous aurez emménagé, je vous ferai un virement de dix mille euros. Vous les dépenserez comme bon vous semble. Nous sommes le quinze septembre, vous ne commencerez pas avant le premier octobre.
Chloé ouvrit la bouche d’étonnement.
— Dix… mille…
— … Et plus, si vous en éprouvez le besoin. Mais je vous en prie, acceptez mon offre.
— C’est pour votre bonne conscience ? lança-t-elle en dernier ressort.
— Ma conscience ?... Je suis indirectement responsable de la mort de mon meilleur ami. Je porterai ça comme un fardeau le restant de ma vie. Mais il y a des choses que je peux réparer, alors je veux le faire.
L’émotion était trop forte et Chloé fondit en larmes. Penaud, Romain ne disait plus rien. Une minute plus tard, Chloé s’essuya les yeux à l’aide d’un mouchoir en papier, renifla un peu et répondit d’une petite voix.
— J’accepte, merci.
Un sourire radieux et sincère illumina le visage de Romain.
— J’en suis tellement heureux. Venez maintenant.
— Là, tout de suite ?
Romain sourit.
— Oui, tout de suite. Vous voulez passer la journée et la nuit là ?
Chloé sourit à son tour, se leva et empoigna sa valise. Romain l’observa, immobile. Il désigna le bagage.
— C’est votre passé, vous feriez mieux de le laisser ici, il va vous encombrer.
La jeune femme lâcha la poignée.
— Vous avez raison, répondit-elle avec une fermeté inattendue.
— Prenez le volant, vous avez aussi besoin d’une voiture.
Chloé regarda béatement Romain qui lui tendait un porte-clés à tête de lion.
— J’ai l’impression de vivre un rêve éveillé, soupira-t-elle.
-*-
Le boulevard Robespierre à Reims était désert ce matin-là. Les hauts murs de pierres de la maison d’arrêt étaient violemment éclairés par le soleil levant. Les barbelés couronnant l’enceinte renvoyaient parfois de petits éclats de lumière. Le grand portail vert sale, surmonté des drapeaux français et européen, semblait délimiter le territoire du « bien » et celui du « mal ». Un monde dantesque se cachait derrière. Vous qui entrez, laissez toute espérance…
Une sonnerie stridente dans les couloirs retentit et toutes les portes de la zone C s’ouvrirent en même temps. Alex et les deux co-détenus avec qui il partageait sa cellule, serviette et savon à la main, s’apprêtaient à sortir. Ils restaient immobiles au seuil de la pièce, guettant le feu vert des surveillants de la prison.
— J’aime bien tirer un coup avant le petit-déj’, fit Roland, un homme brun, frisé, pas très grand, mais tout en muscle, à l’attention d’Alex.
— Tu l’encules ou tu te fais sucer ? questionna Jessie, un noir costaud frisant les deux mètres.
— Foutez-moi la paix ! se rebiffa Alex.
— Mais elle fait sa mijaurée, la petite Alex, se moqua Jessie.
— Tu sais quoi ? reprit Roland s’adressant au jeune homme. On va t’enculer tous les deux et ce soir, dans la cellule, tu nous feras une gâterie. Comme t’auras la bouche pleine, ça t’évitera de gueuler et d’ameuter les matons.
La file des prisonniers longea le mur du corridor et se dispersa dans les douches communes. Sitôt entré, Roland fit un signe à un détenu chauve en lui désignant la porte. Celui-ci s’installa à son niveau, le regard tourné vers le couloir.
— Vous pouvez y aller, c’est clair.
Tout le monde se déshabilla, l’eau coula ici et là.
— Tu préfères la manière douce ou la manière forte, demanda Roland méchamment.
Alex, résigné, ne répondit pas, posa sa serviette, prit son savon et le mouilla. Il étala la mousse dans son sillon fessier et se mit à quatre pattes.
— À la bonne heure ! Mais t’oublieras pas notre petite pipe de ce soir ! Pas vrai, Alex ? cria Roland en s’esclaffant et en se positionnant à genoux derrière sa victime.
Tout le monde rit à l’unisson, sauf Alex…
-*-
Dix-huit mois s’étaient écoulés depuis l’incarcération d’Alex. Après avoir jusque là refusé la visite de sa femme au parloir, ce dernier finit par accepter. En le voyant, Chloé eut un sursaut, mais n’en fit rien paraître. Son mari, du beau gaillard qu’il était le jour de leurs noces, était pâle et décharné. Ses joues étaient creuses, mal rasées et ses mains tremblaient. Ses cheveux, coupés ultra-courts, laissaient deviner une mèche blanche au-dessus du front. Un cocard jaunissant sous l’œil gauche indiquait qu’il s’était pris un coup quelque temps auparavant. Il n’avait que vingt-trois ans, mais en paraissait dix de plus.
Le parloir n’était qu’une sorte de long guichet surmonté d’un plexiglas épais. Cinq détenus, et par conséquent cinq visiteurs, pouvaient converser en même temps par le biais d’un interphone. Le bruit ambiant était tel que chaque interlocuteur était obligé de crier dans l’appareil sous la surveillance constante du personnel pénitentiaire. Alex, sans donner de détails, fit brièvement part de son désespoir à son épouse et la supplia d’essayer d’interférer en sa faveur. Chloé acquiesça et posa sa main à plat sur la vitre, sans être pour autant imitée par Alex qui se détourna.
Chloé, qui voulait lui parler de sa nouvelle situation, n’en eut pas le cran et comme les entretiens étaient chronométrés, elle ne put dire que :
— Courage ! Je vais tout essayer.
Elle quitta le parloir les larmes aux yeux. Retrouvant sa voiture sur le parking, elle attendit cinq bonnes minutes, assise au volant et la gorge serrée, avant de démarrer.
*-*
Chloé avait retrouvé le goût de vivre avec ce que Romain avait fait pour elle. Elle ne le remercierait jamais assez. Elle ne pouvait compter que sur lui pour aider Alex qu’elle aimait toujours. Aussi, Romain fit intervenir ses avocats auprès de la juridiction concernée afin d’obtenir une visite de Chloé à son mari dans un salon-parloir familial. Ces parloirs ne sont pas surveillés et ils y seraient seuls. Souvent, même si ce n’était pas vraiment prévu, les détenus avaient ici des relations sexuelles et tout le monde fermait les yeux. Les hommes de loi avaient prévenu la jeune femme, elle se tenait prête à tout.
Deux semaines après son précédent entretien, Chloé se présenta à la prison. On la dirigea vers une pièce relativement bien meublée et à l’atmosphère plus conviviale que ces sempiternelles murailles vert clair et ces grilles en fer forgé. Une table ronde et quatre chaises trônaient au milieu de la salle et, contre une paroi, était adossé un canapé gris et confortable qui s’avéra être convertible. Aux murs bleu pastel s’étalaient quelques photos de plages paradisiaques au sable blanc et bordées de cocotiers. D’autres affichaient des voiliers lumineux sur des mers turquoise magnifiant le ciel d’un éternel été. La porte se referma, Chloé était seule. Alex entra par une autre issue quelques minutes plus tard, accompagné d’un surveillant de prison.
— Vous avez trois heures. Profitez-en bien, déclara-t-il un sourire non équivoque aux lèvres.
Puis il sortit et le bruit d’un verrou que l’on ferme à double tour retentit.
Alex et Chloé se regardèrent mutuellement sans rien dire, puis se rapprochèrent doucement pour se jeter dans les bras l’un de l’autre. Le baiser passionné qu’ils échangèrent dura plusieurs minutes. Chloé laissa tomber son sac et se déshabilla en totalité. Elle fit face à son mari, nue, puis elle prit sa main pour la poser sur son sexe.
— J’ai envie de toi…, murmura-t-elle. Ça fait si longtemps.
Alex quitta ses vêtements de prisonniers et embrassa à nouveau sa femme. Ensemble, ils se dirigèrent vers le canapé et l’ouvrirent pour former une couche à leurs ébats. Chloé s’allongea sur le dos, les jambes écartées, la vulve suintante.
— Ta bouche, vite ! supplia-t-elle.
Alex monta sur le lit à quatre pattes et fourra son nez dans l’entrejambe de Chloé. Il lécha l’anus, le périnée puis les petites lèvres. Durcissant sa langue, il pénétra le vagin de sa femme qui gémissait. Chloé n’en pouvait plus. Elle tira du bout des doigts sur la peau de son mont de Vénus, ce qui fit ressortir son bouton rose et gonflé. Alex arrondit ses lèvres autour du clitoris pour le titiller du bout de la langue. Chloé lui agrippa l’arrière du crâne de sa main libre.
— Oui… expira-t-elle, oui…, encore, encore…
Alex ouvrit la bouche en grand et semblait vouloir avaler en entier le sexe de sa femme. En fait, il se préparait à recevoir le lubrifiant que le spasme final imminent allait expulser. Il continua à lécher avidement le clitoris et ce fut l’explosion.
— Oui… ! Je jouiiiisss… cria-t-elle.
Alex laissa aller les contractions vaginales jusqu’à la dernière et but toute la cyprine comme un nectar.
— Encore, supplia-t-elle.
Alex savait qu’elle ne parlait pas de son clitoris devenu trop sensible pour un nouvel orgasme. Il approcha son membre épais qu’il ne rasait plus et enfonça son pieu décalotté dans la fournaise trempée. Chloé crut défaillir, elle ne pensait plus qu’à son sexe en feu. Elle planta ses ongles dans le dos de son mari et le griffa des omoplates aux fesses. Alex retint un cri de douleur et entama de son glaive une série de va-et-vient à l’intérieur de son fourreau de chair. Chloé passa ses bras et ses jambes tout autour du corps de son époux et lui hurla dans l’oreille.
— Aaaahhh ! Enfonce-toi, enfonce-toi, enfonce-toi loin ! Ouiiiii… !
Alex gémit une seconde plus tard et se répandit en elle. Il crut que son éjaculation ne s’arrêterait jamais.
Les deux amants, sexe dans sexe, reprenaient leur souffle doucement. Ils s’embrassaient, se caressaient, se murmuraient des choses tendres. Puis, Alex jeta un regard sur la pendule et dit :
— Il ne reste qu’une heure. Rhabillons-nous, j’ai à te parler.
Le lit retourna sous sa forme de canapé et les époux s’étaient rhabillés. Seuls témoins de leur bonheur, leurs yeux fatigués cernés d’un bleu sombre.
— Je ne sais pas ce que tu as fait de tes fesses pendant tous ces mois passés… commença Alex.
Chloé l’interrompit.
— Il ne s’est rien passé chéri, sauf la visite régulière de mon petit doigt, assura-t-elle en tendant le médius à la manière d’un doigt d’honneur.
Alex sourit un instant à cette image puis redevint sérieux immédiatement.
— Il a bien de la chance, lui, mais je dois t’avouer quelque chose. Il y a ici un caïd nommé Roland, une sorte de chef des prisonniers. Ce type-là, il faut soit le payer, soit lui rendre des services sous peine d’être brutalisé. Comme je n’ai pas d’argent et qu’il m’a trouvé à son goût, il m’utilise comme une femme. Son second, Jessie, fait pareil avec moi et pour couronner le tout, ils sont dans la même cellule que moi.
Chloé n’en crut pas ses oreilles.
— Ils t’utilisent comme une femme, tu veux dire que…
Elle laissa sa phrase en suspens, Alex se morfondit.
— Oui, Chloé. Je les suce quand ils le veulent et où ils veulent. Ils me sodomisent aussi à volonté, quand ils ne me « prêtent » pas à un autre prisonnier à qui ils doivent un service. Tu sais ce qu’est un vide-couilles ? Non ? Eh bien ! C’est ce que je suis devenu.
Chloé avala sa salive bruyamment.
— Mais… et les surveillants ? Ils ne disent rien ?
— Ils s’en foutent. Ce qui compte pour eux, c’est qu’il n’y ait pas de problème avec les détenus et Roland sait faire régner l’ordre. Alors, ils ferment les yeux. Le médecin de la prison m’a déjà recousu l’anus, sans anesthésie et en me faisant la morale en plus !
Chloé demeura muette une quinzaine de secondes. Elle se releva de sa chaise et vint enlacer son mari, resté assis.
— Je vais tout faire pour te faire avoir une cellule individuelle, assura-t-elle.
Alex prit un air étonné.
— Mais ma chérie, comment pourrais-tu, toi seule, faire une chose pareille ?
— Il faut que je t’explique ma nouvelle situation, répondit-elle.
Chloé entama alors le récit de sa vie depuis l’intervention de Romain lorsqu’elle cafardait sur un banc public près du canal. Elle demeurait chez Romain, avait un travail, de l’argent, pas un million d’euros non, mais assez pour vivre décemment. Elle précisa également que Romain travaillait avec un cabinet d’avocats très réputé et que c’est déjà par leur intermédiaire qu’elle avait décroché cette visite dans ce parloir familial. Ils obtiendront une cellule individuelle, c’était certain.
— Sois confiant, ajouta-t-elle. Ton calvaire va bientôt se terminer.
Comme le jour où elle avait expliqué comment elle avait gagné la somme d’un million d’euros, son explication tomba à plat, à son grand désespoir. Alex se leva, repoussant sa femme brutalement.
— Mon calvaire ? Tu oublies que j’ai été condamné à quinze ans de taule et que ça ne fait que deux ans que je suis ici. Mon calvaire, comme tu dis, n’est pas prêt de se terminer. Par contre, je vois que tu n’as pas perdu de temps. Après Pierre-Charles, tu t’envoies Romain et tu viens ici me faire l’amour, me dire que tu m’aimes et me parler de ton petit doigt ? Décidément, tu m’auras tout fait.
Chloé se rebella.
— Mais il n’y a rien entre Romain et moi ! s’écria-t-elle. Il s’estime en grande partie responsable de ce qui est arrivé et il essaie de réparer les pots cassés comme il peut. C’est un homme bien, tu sais.
Alex répondit, déterminé.
— Puisque c’est ça, reste donc auprès de ton homme bien. Pour les visites, tu pourras m’envoyer n’importe quelle pute, je veux dire autre que toi. Pour me vider les couilles, ça suffira.
Chloé restait bouche bée, incapable de prononcer un mot. Alex se dirigea vers la porte par laquelle il était arrivé et frappa.
— Gardien ! Ramenez-moi en cellule, cria-t-il à travers.
Chloé, interdite, se rassit. Elle regarda Alex partir puis une sonnerie retentit. Elle pleura. Les trois heures s’étaient écoulées. La porte s’ouvrit et le surveillant qui l’avait fait entrer se contenta d’un :
— C’est l’heure Madame.
-*-
Un an après cet entretien funeste, Chloé était malgré tout satisfaite d’elle. Elle n’allait plus voir Alex qui l’avait rejetée sur un malentendu, mais elle avait œuvré pour lui. Les avocats de Romain avaient réussi à lui obtenir une cellule individuelle, il n’était ainsi plus importuné par personne. Même les gardiens de prison le respectaient dorénavant, car pour être embastillé dans le quartier VIP, un détenu devait avoir des relations haut placées. C’étaient les matons qui craignaient le prisonnier et non plus l’inverse. Alex pensait bien qu’il devait cette faveur au petit ami supposé de Chloé, mais pour cela il laissa sa fierté de côté. Ne plus subir la tyrannie de Roland et Jessie lui ôtait un poids considérable. Il était presque heureux au fond de sa cellule.
Malgré son amour pour Alex, Chloé finit par se rapprocher de Romain. Il avait été tellement bon pour elle depuis leur discussion près du canal qu’il lui était maintenant difficile de lui en vouloir d’être en partie à l’origine de toute cette histoire. Les responsabilités étaient partagées sur ce point. Romain en était, mais aussi Pierre-Charles et elle-même. Pour le remercier de son dévouement désintéressé, elle l’invita à dîner dans son logement. Romain accepta volontiers et ils choisirent une date, car c’était un homme d’affaires très occupé.
Le soir venu, Chloé avait mis les petits plats dans les grands. La table était élégamment dressée avec la vaisselle et les couverts de la grand-mère et décorée de fleurs fraiches dans un vase en cristal. Il serait sans doute nécessaire de déplacer ce dernier pour que les convives puissent se parler, mais pour l’instant c’était du plus bel effet. Chloé sortit un autre vase pour les fleurs qu’apportait Romain et posa le bouquet sur une desserte basse.
— Merci pour ces fleurs, elles sont très belles, convint Chloé sincèrement.
La fin de l’été était douce, Chloé avait revêtu une robe bleue simple et légère et ses cheveux étaient noués en chignon. Romain, qui avait conservé sa silhouette de jeune homme, même s’il se tenait légèrement voûté, était vêtu d’un ensemble en tergal beige. Ils se firent la bise comme deux vieux camarades.
Assis à table face à face, la conversation alterna entre les différents problèmes de l’entreprise à régler et la situation de Chloé et d’Alex. Le cabinet d’avocats était confiant quant à l’obtention d’une réduction de peine. Alex était incarcéré depuis un peu plus de trois ans et Romain tenta d’afficher un optimisme mesuré.
— Maître Guérand, mon avocat, m’a confirmé qu’une réduction de peine était à l’étude pour Alex. Si on ajoute cette remise dont j’ignore l’étendue, mais qui n’est jamais inférieure à deux ans pour les peines longues, aux réductions automatiques pour bonne conduite, on arriverait à une peine totale de dix ans, voire moins. Comme il a déjà tiré trois ans, il ne lui resterait qu’un maximum de sept ans.
— Autant dire une éternité, souffla Chloé affligée.
Romain effleura la main de la jeune femme.
— Il aura un peu plus de trente ans à sa sortie. Encore toute la vie devant lui…
Chloé écrasa une larme au coin de son œil et serra doucement la main de Romain. Un court moment de silence s’invita entre eux. Romain posa sa serviette de table, se leva et attira Chloé à lui. Elle ne résista pas plus longtemps et le prit par le cou pour lui offrir un baiser passionné.
Les évènements s’accélérèrent soudain. Romain souleva la robe de Chloé jusqu’à ses épaules et l’ôta en la passant par la tête. En une fraction de seconde, Chloé se retrouva en culotte et soutien-gorge. Elle s’attaqua à la chemisette de Romain qui fut torse nu dans le même laps de temps. Ils riaient. Elle courut jusqu’à sa chambre et se jeta sur le lit, Romain fit de même et l’embrassa. Glissant sa main dans la ficelle du string, il caressa avec douceur les nymphes de la vulve qui mouillaient de plus en plus. Chloé se débarrassa de ses sous-vêtements d’un geste vif et renversa Romain sur le dos pour dégrafer sa ceinture. Quand elle ôta le pantalon, elle lorgna le boxer distendu en son milieu. Slip et pantalon se retrouvèrent à terre. Chloé amena son entrejambe à hauteur des lèvres de son partenaire et goba le gland rose et gonflé que lui tendait le phallus rigide. Les deux amants, en soixante-neuf, produisaient un superbe bruit de succion, gland dans la bouche ou langue dans le vagin. Romain, comme beaucoup d’hommes, était plus rapide à l’orgasme. Il délaissa momentanément sa fontaine à cyprine et, le visage trempé, cria :
— Je vais jouir Chloé, je vais jouir !
Joignant le geste à la parole, si on peut s’exprimer ainsi, son pénis cracha plusieurs giclées de sperme que Chloé recueillit avidement dans sa bouche et qu’elle avala ensuite. Elle nettoya tout le gland et le méat de ce qui exsudait encore de l’urètre et embrassa tendrement les deux testicules.
— Ne m’oublie pas, chéri.
À ces mots, Romain reprit sa succion. Il souleva délicatement le petit capuchon de peau et libéra le bouton rose gorgé de sang. De la pointe de la langue, il le titilla jusqu’au moment où Chloé, les deux mains lui enserrant la tête, se mit à hurler.
— Ouiiiiii… !
Romain, à son tour, buvait à la source, à l’origine du monde comme le tableau sulfureux. Les lèvres, le menton et les joues trempées, il embrassa sa compagne puis lui fit lécher son visage. Chloé était aux anges, mais savoir ce qu’elle pensait à ce moment précis était une gageure.
Ils se reposèrent quelques minutes en silence, côte à côte. Puis la main de Chloé s’avança vers le sexe flaccide de Romain et le masturba doucement. En peu de temps, l’érection revint et Chloé se mit à quatre pattes sur le lit.
— Prends-moi la chatte ! Remplis-moi le con !
Son excitation sexuelle lui faisait vociférer des mots crus. Romain ne s’en offusqua pas, tellement il était excité lui-même. Le phallus à nouveau gonflé, il se positionna à genoux derrière ces fesses si joliment offertes et pénétra brutalement l’antre rose et mouillé situé entre les cuisses.
— Arrrgghh ! Plus loin ! Encore plus loin !
Romain poussa sa verge dans le vagin jusqu’à s’en écraser les testicules. Il la retira ensuite pour apercevoir la base de son gland puis la replongea d’un seul coup dans la fournaise.
— Arrrgghh !
…
— Arrrgghh !
…
— Arrrgghh !
…
— T’arrête pas ! cria-t-elle soudain. Je jouiiiisss… !
Romain pilonnait les fesses de Chloé à grands coups de bas-ventre. Vous lecteurs, si vous aviez été présents, vous auriez pu entendre le bruit de claquement sec que produit une fessée, mais ça n’en était pas une. On aurait dit le son de quelqu’un qui court avec des tongs aux pieds. Enfin, le sperme jaillit à nouveau au fond de la cavité mystérieuse, arrachant un gémissement à Romain.
— Aaaahhh !
Il s’affala sur Chloé qui se tenait toujours à quatre pattes.
— Je t’aime, Chloé. Je t’aime depuis le premier jour, confessa-t-il dans l’oreille de sa maîtresse.
Il sortit son sexe de la vulve rougie et gonflée et s’allongea sur le dos. Chloé l’imita, elle ne disait rien. Ils s’embrassèrent et se caressèrent ; le phallus de Romain se dressa à nouveau. La jeune femme enjamba son partenaire, se saisit de la verge en semi-érection, la branla quelques instants et, quand elle fut bien raide, la posa sur son sphincter. Le gland pénétra doucement puis, elle s’assit d’un seul coup et la bite de Romain lui dilata le rectum. Elle ferma les yeux et se masturba le clitoris. Elle allait et venait le long du pénis qui lui glissait dans les entrailles. Quelques minutes s’écoulèrent à peine lorsque Romain, excité par le spectacle de Chloé qui avait accéléré sa branlette, jouit en même temps qu’elle. Le spasme voluptueux fut intense pour l’un comme pour l’autre, bien que Romain n’éjaculât pas beaucoup de sperme en raison de ses orgasmes précédents. Quand il se retira, il souleva les cuisses de Chloé et lui lécha l’anus duquel perlaient des traînées blanchâtres. Il se redressa et déposa un petit baiser sur ses lèvres.
— Je n’en peux plus chérie. Je n’ai plus vingt ans ! souffla-t-il.
Chloé rit et caressa le visage de Romain.
— Nous n’avons pas encore dîné, on verra ça après !
-*-
Neuf ans et cent soixante-quinze jours s’étaient écoulés depuis l’incarcération d’Alex. Depuis le rejet de son mari, Chloé a vécu avec Romain, mais sans jamais lui donner d’espoir, Romain le savait. Ce soir-là, à l’heure de l’apéritif, on réglait les comptes. Les deux amants se trouvaient face à face, tenant à la main qui un verre de whisky, qui un verre de porto. Chloé but une gorgée de vin.
— Tu sais qu’Alex sort demain matin à six heures précises ? questionna-t-elle prudemment.
— Oh ! Je ne le sais que trop. Tu comptes les jours depuis le début de l’année. C’est heureux qu’il ait eu sa remise de peine.
Voyant que Romain ne prenait pas mal cette entrée en matière, elle s’enhardit.
— J’irai le chercher et, s’il veut toujours bien de moi, nous vivrons la vie qu’on nous a volée il y a dix ans.
— Tu sais tout de même que maître Guérand a fourni Alex en escort-girls à raison d’une nouvelle tous les quinze jours ?
— Oui, je sais. La dernière fois que j’ai vu Alex, il m’avait demandé de lui fournir d’autres putes que moi ! Heureusement que je ne suis pas susceptible. Alors j’en ai parlé à l’avocat. Bah ! Disons que c’était par hygiène.
Romain était sidéré d’un tel flegme.
— Et ça ne te refroidit pas ? Il en a bien baisé une centaine depuis…
— Et nous, combien de fois avons-nous baisé ?
Romain accusa la remarque et se plongea dans son whisky.
— Je lui pardonne ses prostiputes à l’avance, ajouta-t-elle en s’adossant au canapé.
— Qu’est-ce qui te fait croire qu’il voudra encore de toi ?
— Je n’ai jamais demandé le divorce, or j’aurais pu, même unilatéralement compte tenu de la situation. Si je l’avais fait, il aurait su que je le laissais tomber définitivement. À ce jour, je suis encore sa femme et il le sait.
— Et tu lui diras pour nous ?
— Bien sûr. Il m’a pardonné pour Pierre-Charles, il me pardonnera pour toi. De plus, tes raisons sont bien plus nobles que celles qu’avait ton ami. J’ai joué le jeu, car tu m’as sauvé la mise il y a dix ans, j’avais une dette envers toi.
— Et le fait que je t’aime, ça ne compte pas ?
— Si tu ne m’avais pas aimée, je n’aurais pas vécu avec toi toutes ces années.
Romain vida son verre d’un trait et se resservit immédiatement. Il prit un air solennel.
— Je vois que je n’ai plus aucune chance. Tu comprendras aisément que nous ne pouvons plus nous côtoyer comme nous le faisions jusqu’à présent. Je souffrirais trop, ton mari et toi aussi.
Chloé se redressa, indignée.
— Bref, tu me fiches à la porte et bonjour Pôle Emploi, c’est ça ? C’est un coup bas qui m’étonne de toi.
Romain interposa sa paume entre Chloé et lui.
— Finalement, tu me connais bien mal. Je t’aime et il n’est pas question de te virer. Je ne t’ai pas virtuellement sortie du canal pour t’y replonger. En revanche, j’ai besoin d’un couple pour un déplacement professionnel à Osaka. Je compte investir le marché nippon et j’ai besoin pour cela de ton aide et de celle de ton mari qui serait, si tu acceptes, également salarié de Cerana. La mission est de cinq ans minimum et reconductible si tu le souhaites et si tes résultats sont bons.
Chloé observa Romain tendrement.
— Je suis désolée d’avoir douté de toi. Tu me sauves la mise encore une fois…
— Il faut encore qu’Alex accepte !
Chloé éclata de rire.
— Ça, je m’en charge ! J’ai des arguments massue !
Romain rit à son tour, mais le fond de son regard était triste à pleurer.
Il se servit un troisième whisky.
-*-
Le lendemain, six heures du matin. Le boulevard Robespierre était dépeuplé et fantomatique en raison d’un épais brouillard. Une seule voiture était garée en face de la porte toujours vert sale de la maison d’arrêt de Reims. L’un des vantaux s’entrouvrit en grinçant, Alex sortit de l’enfer. Il n’y avait pas laissé son espérance. Quand il aperçut sa femme, il traversa la rue et ouvrit la portière côté passager. Il passa son maigre bagage à l’arrière par-dessus le dossier et s’installa à côté de la conductrice. Chloé lui sourit.
— Viens, je t’emmène prendre une douche chez moi. Il y a du café et des croissants.
Alex, peu bavard, déposa un baiser sur les lèvres de Chloé.
— Pardonne-moi pour toutes ces années. J’ai été très con. Je te remercie pour toutes les filles que j’ai baisées ici, mais je l’ai toujours fait en pensant à toi. C’est toi que j’aime, ça n’a pas changé.
— Tu as payé ta dette envers la société, moi j’ai payé ma dette envers Roland. Sans lui, je serais au fond du canal. À midi, je t’invite au restaurant du « Café de la place » à Logebelle. Nous n’avons pas eu le temps de goûter à la pièce montée, tu te souviens ? ajouta-t-elle.
À ces mots, Alex eut un sourire en coin, puis les deux époux s’embrassèrent longuement.
— Nous sommes en retard de dix ans, remarqua Alex. Tu crois qu’elle sera encore bonne ?
— T’inquiète, j’en ai commandé une autre pour notre nouveau départ.
— Notre nouveau départ ?
— Oui. Le Japon, ça te dit ? demanda Chloé en enclenchant la première.
***
Quel hasard a fait passer Romain V. derrière la gare de Logebelle, le long du canal de la Marne ? Nul ne pourrait le dire avec certitude, mais ce jour-là, en apercevant Chloé dans la brume matinale, Romain se sentit investi d’une mission quasi divine. Il gara sa voiture, une simple Peugeot 208 blanche, et en descendit doucement sans claquer la portière. Il s’approcha du banc public et s’assit à une extrémité. Chloé, assise à l’autre bout et qui ne l’avait pas entendu arriver, considéra à peine cet homme brun aux yeux clairs, grand et mince. Puis elle détourna le regard vers les eaux boueuses du canal.
— Vous êtes sadique au point de vous délecter de mon désespoir ? s’enquit-elle.
Romain regarda face à lui.
— Vous connaissez bien l’histoire et j’admets être en partie responsable de tout ce gâchis, mais personne ne peut se réjouir de quoi que ce soit. Vous avez perdu Alex, Alex a perdu la liberté, Pierre-Charles a perdu la vie et moi, j’ai perdu un ami. Ce serait une bataille, on l’appellerait « bataille des quatre vaincus ». Les seuls qui ont gagné sont les héritiers de Pierre-Charles qui n’espéraient pas voir disparaître ce richissime quadragénaire en pleine santé si tôt.
Il tourna la tête vers Chloé, silencieuse.
— Je n’aurais jamais dû le provoquer et accepter de parier avec Pierre-Charles. Rien de tout cela ne serait arrivé.
Chloé, les traits tirés par la fatigue des récents évènements, se décida à regarder son interlocuteur.
— Et moi, je n’aurais jamais dû accepter le marché qu’il m’a proposé. Qu’est-ce qui m’a donc pris ?
Romain écarta les mains comme pour symboliser une certaine fatalité.
— Vous avez accepté pour l’argent, quant à moi-même je vous ai fait chanter pour récupérer le mien. Si je n’avais pas agi ainsi, Alex et vous vivriez heureux. D’autant plus qu’un million, pour moi, ce n’est pas tant que ça. J’étais finalement plus en colère contre moi-même, d’avoir perdu ce pari que désespéré de m’être fait délester de cette somme. J’ai une part de responsabilité bien plus importante que la vôtre et j’aimerais essayer de réparer ce que je peux.
Chloé fixa Romain d’un regard perçant.
— Tiens donc ! Et pourquoi moi ?
— Je ne peux, hélas, plus rien faire pour Pierre-Charles. Alex, je peux envisager quelque chose avec l’aide de mes avocats, mais il me faut votre accord puisque vous êtes son épouse. Quant à vous, vous avez été chassée de chez vous, vous avez perdu votre travail et, je pense, toutes vos relations. Quand je vois la façon dont vous fixez ce canal du regard, j’ai peur pour vous. Je me trompe ?
Chloé baissa la tête.
— J’avoue y avoir pensé…
Romain glissa vers le milieu du banc, se rapprochant ainsi de la jeune femme.
— J’ai une proposition à vous faire.
Chloé le fusilla du regard.
— Tout a commencé comme ça, fit-elle en élevant la voix.
Romain se rendit compte de sa bévue. Il mit les deux paumes en avant et répondit :
— Oh ! Que je suis maladroit ! Veuillez m’excuser, mais ma proposition est cette fois-ci tout à fait honnête. J’habite à Aÿ dans une immense maison que m’ont laissée mes parents. Une aile de cette maison a une entrée séparée et dessert un logement qu’occupait ma grand-mère paternelle. Je vous propose d’y habiter le temps que vous voudrez. Bien sûr, c’est sans contrepartie aucune ni pécuniaire ni autre.
— Et j’y ferais quoi ? La bonniche ?
— Bien sûr que non. Vous ne savez peut-être pas, mais je suis propriétaire de la maison de champagne Cerana. J’ai besoin de personnel pour le service export qui prend de plus en plus d’importance. Les employés de Cerana sont très bien payés.
Chloé réfléchissait à cent à l’heure.
« Aÿ, ce n’est pas loin de Logebelle ni de Reims. Je pourrais aller voir Alex au parloir de la prison. Un logement, pas de loyer et une paye décente avec un boulot digne de ce nom, c’est inespéré. De plus, là-bas personne ne me connait et habiter chez Romain, ça doit en mettre plein la vue. Mais, ne te fais pas avoir ma fille, il suffit d’une fois. »
— Admettons que j’accepte, je n’ai plus rien en banque et il me reste à peine cinquante euros dans mon portefeuille.
Chloé frappa du plat de la main la poignée de son bagage.
— Dans ma valise, mes affaires datent de cinq ans au moins. Elles sont usées et démodées. À la maison de retraite, je n’avais pas besoin de plus, j’étais simplement en sous-vêtements sous ma blouse. Je ne peux décemment pas travailler dans une entreprise de renom au milieu d’autres femmes, sans être habillée correctement.
Romain balaya l’objection d’un geste.
— Ne vous inquiétez donc pas de ça. Dès que vous aurez emménagé, je vous ferai un virement de dix mille euros. Vous les dépenserez comme bon vous semble. Nous sommes le quinze septembre, vous ne commencerez pas avant le premier octobre.
Chloé ouvrit la bouche d’étonnement.
— Dix… mille…
— … Et plus, si vous en éprouvez le besoin. Mais je vous en prie, acceptez mon offre.
— C’est pour votre bonne conscience ? lança-t-elle en dernier ressort.
— Ma conscience ?... Je suis indirectement responsable de la mort de mon meilleur ami. Je porterai ça comme un fardeau le restant de ma vie. Mais il y a des choses que je peux réparer, alors je veux le faire.
L’émotion était trop forte et Chloé fondit en larmes. Penaud, Romain ne disait plus rien. Une minute plus tard, Chloé s’essuya les yeux à l’aide d’un mouchoir en papier, renifla un peu et répondit d’une petite voix.
— J’accepte, merci.
Un sourire radieux et sincère illumina le visage de Romain.
— J’en suis tellement heureux. Venez maintenant.
— Là, tout de suite ?
Romain sourit.
— Oui, tout de suite. Vous voulez passer la journée et la nuit là ?
Chloé sourit à son tour, se leva et empoigna sa valise. Romain l’observa, immobile. Il désigna le bagage.
— C’est votre passé, vous feriez mieux de le laisser ici, il va vous encombrer.
La jeune femme lâcha la poignée.
— Vous avez raison, répondit-elle avec une fermeté inattendue.
— Prenez le volant, vous avez aussi besoin d’une voiture.
Chloé regarda béatement Romain qui lui tendait un porte-clés à tête de lion.
— J’ai l’impression de vivre un rêve éveillé, soupira-t-elle.
-*-
Le boulevard Robespierre à Reims était désert ce matin-là. Les hauts murs de pierres de la maison d’arrêt étaient violemment éclairés par le soleil levant. Les barbelés couronnant l’enceinte renvoyaient parfois de petits éclats de lumière. Le grand portail vert sale, surmonté des drapeaux français et européen, semblait délimiter le territoire du « bien » et celui du « mal ». Un monde dantesque se cachait derrière. Vous qui entrez, laissez toute espérance…
Une sonnerie stridente dans les couloirs retentit et toutes les portes de la zone C s’ouvrirent en même temps. Alex et les deux co-détenus avec qui il partageait sa cellule, serviette et savon à la main, s’apprêtaient à sortir. Ils restaient immobiles au seuil de la pièce, guettant le feu vert des surveillants de la prison.
— J’aime bien tirer un coup avant le petit-déj’, fit Roland, un homme brun, frisé, pas très grand, mais tout en muscle, à l’attention d’Alex.
— Tu l’encules ou tu te fais sucer ? questionna Jessie, un noir costaud frisant les deux mètres.
— Foutez-moi la paix ! se rebiffa Alex.
— Mais elle fait sa mijaurée, la petite Alex, se moqua Jessie.
— Tu sais quoi ? reprit Roland s’adressant au jeune homme. On va t’enculer tous les deux et ce soir, dans la cellule, tu nous feras une gâterie. Comme t’auras la bouche pleine, ça t’évitera de gueuler et d’ameuter les matons.
La file des prisonniers longea le mur du corridor et se dispersa dans les douches communes. Sitôt entré, Roland fit un signe à un détenu chauve en lui désignant la porte. Celui-ci s’installa à son niveau, le regard tourné vers le couloir.
— Vous pouvez y aller, c’est clair.
Tout le monde se déshabilla, l’eau coula ici et là.
— Tu préfères la manière douce ou la manière forte, demanda Roland méchamment.
Alex, résigné, ne répondit pas, posa sa serviette, prit son savon et le mouilla. Il étala la mousse dans son sillon fessier et se mit à quatre pattes.
— À la bonne heure ! Mais t’oublieras pas notre petite pipe de ce soir ! Pas vrai, Alex ? cria Roland en s’esclaffant et en se positionnant à genoux derrière sa victime.
Tout le monde rit à l’unisson, sauf Alex…
-*-
Dix-huit mois s’étaient écoulés depuis l’incarcération d’Alex. Après avoir jusque là refusé la visite de sa femme au parloir, ce dernier finit par accepter. En le voyant, Chloé eut un sursaut, mais n’en fit rien paraître. Son mari, du beau gaillard qu’il était le jour de leurs noces, était pâle et décharné. Ses joues étaient creuses, mal rasées et ses mains tremblaient. Ses cheveux, coupés ultra-courts, laissaient deviner une mèche blanche au-dessus du front. Un cocard jaunissant sous l’œil gauche indiquait qu’il s’était pris un coup quelque temps auparavant. Il n’avait que vingt-trois ans, mais en paraissait dix de plus.
Le parloir n’était qu’une sorte de long guichet surmonté d’un plexiglas épais. Cinq détenus, et par conséquent cinq visiteurs, pouvaient converser en même temps par le biais d’un interphone. Le bruit ambiant était tel que chaque interlocuteur était obligé de crier dans l’appareil sous la surveillance constante du personnel pénitentiaire. Alex, sans donner de détails, fit brièvement part de son désespoir à son épouse et la supplia d’essayer d’interférer en sa faveur. Chloé acquiesça et posa sa main à plat sur la vitre, sans être pour autant imitée par Alex qui se détourna.
Chloé, qui voulait lui parler de sa nouvelle situation, n’en eut pas le cran et comme les entretiens étaient chronométrés, elle ne put dire que :
— Courage ! Je vais tout essayer.
Elle quitta le parloir les larmes aux yeux. Retrouvant sa voiture sur le parking, elle attendit cinq bonnes minutes, assise au volant et la gorge serrée, avant de démarrer.
*-*
Chloé avait retrouvé le goût de vivre avec ce que Romain avait fait pour elle. Elle ne le remercierait jamais assez. Elle ne pouvait compter que sur lui pour aider Alex qu’elle aimait toujours. Aussi, Romain fit intervenir ses avocats auprès de la juridiction concernée afin d’obtenir une visite de Chloé à son mari dans un salon-parloir familial. Ces parloirs ne sont pas surveillés et ils y seraient seuls. Souvent, même si ce n’était pas vraiment prévu, les détenus avaient ici des relations sexuelles et tout le monde fermait les yeux. Les hommes de loi avaient prévenu la jeune femme, elle se tenait prête à tout.
Deux semaines après son précédent entretien, Chloé se présenta à la prison. On la dirigea vers une pièce relativement bien meublée et à l’atmosphère plus conviviale que ces sempiternelles murailles vert clair et ces grilles en fer forgé. Une table ronde et quatre chaises trônaient au milieu de la salle et, contre une paroi, était adossé un canapé gris et confortable qui s’avéra être convertible. Aux murs bleu pastel s’étalaient quelques photos de plages paradisiaques au sable blanc et bordées de cocotiers. D’autres affichaient des voiliers lumineux sur des mers turquoise magnifiant le ciel d’un éternel été. La porte se referma, Chloé était seule. Alex entra par une autre issue quelques minutes plus tard, accompagné d’un surveillant de prison.
— Vous avez trois heures. Profitez-en bien, déclara-t-il un sourire non équivoque aux lèvres.
Puis il sortit et le bruit d’un verrou que l’on ferme à double tour retentit.
Alex et Chloé se regardèrent mutuellement sans rien dire, puis se rapprochèrent doucement pour se jeter dans les bras l’un de l’autre. Le baiser passionné qu’ils échangèrent dura plusieurs minutes. Chloé laissa tomber son sac et se déshabilla en totalité. Elle fit face à son mari, nue, puis elle prit sa main pour la poser sur son sexe.
— J’ai envie de toi…, murmura-t-elle. Ça fait si longtemps.
Alex quitta ses vêtements de prisonniers et embrassa à nouveau sa femme. Ensemble, ils se dirigèrent vers le canapé et l’ouvrirent pour former une couche à leurs ébats. Chloé s’allongea sur le dos, les jambes écartées, la vulve suintante.
— Ta bouche, vite ! supplia-t-elle.
Alex monta sur le lit à quatre pattes et fourra son nez dans l’entrejambe de Chloé. Il lécha l’anus, le périnée puis les petites lèvres. Durcissant sa langue, il pénétra le vagin de sa femme qui gémissait. Chloé n’en pouvait plus. Elle tira du bout des doigts sur la peau de son mont de Vénus, ce qui fit ressortir son bouton rose et gonflé. Alex arrondit ses lèvres autour du clitoris pour le titiller du bout de la langue. Chloé lui agrippa l’arrière du crâne de sa main libre.
— Oui… expira-t-elle, oui…, encore, encore…
Alex ouvrit la bouche en grand et semblait vouloir avaler en entier le sexe de sa femme. En fait, il se préparait à recevoir le lubrifiant que le spasme final imminent allait expulser. Il continua à lécher avidement le clitoris et ce fut l’explosion.
— Oui… ! Je jouiiiisss… cria-t-elle.
Alex laissa aller les contractions vaginales jusqu’à la dernière et but toute la cyprine comme un nectar.
— Encore, supplia-t-elle.
Alex savait qu’elle ne parlait pas de son clitoris devenu trop sensible pour un nouvel orgasme. Il approcha son membre épais qu’il ne rasait plus et enfonça son pieu décalotté dans la fournaise trempée. Chloé crut défaillir, elle ne pensait plus qu’à son sexe en feu. Elle planta ses ongles dans le dos de son mari et le griffa des omoplates aux fesses. Alex retint un cri de douleur et entama de son glaive une série de va-et-vient à l’intérieur de son fourreau de chair. Chloé passa ses bras et ses jambes tout autour du corps de son époux et lui hurla dans l’oreille.
— Aaaahhh ! Enfonce-toi, enfonce-toi, enfonce-toi loin ! Ouiiiii… !
Alex gémit une seconde plus tard et se répandit en elle. Il crut que son éjaculation ne s’arrêterait jamais.
Les deux amants, sexe dans sexe, reprenaient leur souffle doucement. Ils s’embrassaient, se caressaient, se murmuraient des choses tendres. Puis, Alex jeta un regard sur la pendule et dit :
— Il ne reste qu’une heure. Rhabillons-nous, j’ai à te parler.
Le lit retourna sous sa forme de canapé et les époux s’étaient rhabillés. Seuls témoins de leur bonheur, leurs yeux fatigués cernés d’un bleu sombre.
— Je ne sais pas ce que tu as fait de tes fesses pendant tous ces mois passés… commença Alex.
Chloé l’interrompit.
— Il ne s’est rien passé chéri, sauf la visite régulière de mon petit doigt, assura-t-elle en tendant le médius à la manière d’un doigt d’honneur.
Alex sourit un instant à cette image puis redevint sérieux immédiatement.
— Il a bien de la chance, lui, mais je dois t’avouer quelque chose. Il y a ici un caïd nommé Roland, une sorte de chef des prisonniers. Ce type-là, il faut soit le payer, soit lui rendre des services sous peine d’être brutalisé. Comme je n’ai pas d’argent et qu’il m’a trouvé à son goût, il m’utilise comme une femme. Son second, Jessie, fait pareil avec moi et pour couronner le tout, ils sont dans la même cellule que moi.
Chloé n’en crut pas ses oreilles.
— Ils t’utilisent comme une femme, tu veux dire que…
Elle laissa sa phrase en suspens, Alex se morfondit.
— Oui, Chloé. Je les suce quand ils le veulent et où ils veulent. Ils me sodomisent aussi à volonté, quand ils ne me « prêtent » pas à un autre prisonnier à qui ils doivent un service. Tu sais ce qu’est un vide-couilles ? Non ? Eh bien ! C’est ce que je suis devenu.
Chloé avala sa salive bruyamment.
— Mais… et les surveillants ? Ils ne disent rien ?
— Ils s’en foutent. Ce qui compte pour eux, c’est qu’il n’y ait pas de problème avec les détenus et Roland sait faire régner l’ordre. Alors, ils ferment les yeux. Le médecin de la prison m’a déjà recousu l’anus, sans anesthésie et en me faisant la morale en plus !
Chloé demeura muette une quinzaine de secondes. Elle se releva de sa chaise et vint enlacer son mari, resté assis.
— Je vais tout faire pour te faire avoir une cellule individuelle, assura-t-elle.
Alex prit un air étonné.
— Mais ma chérie, comment pourrais-tu, toi seule, faire une chose pareille ?
— Il faut que je t’explique ma nouvelle situation, répondit-elle.
Chloé entama alors le récit de sa vie depuis l’intervention de Romain lorsqu’elle cafardait sur un banc public près du canal. Elle demeurait chez Romain, avait un travail, de l’argent, pas un million d’euros non, mais assez pour vivre décemment. Elle précisa également que Romain travaillait avec un cabinet d’avocats très réputé et que c’est déjà par leur intermédiaire qu’elle avait décroché cette visite dans ce parloir familial. Ils obtiendront une cellule individuelle, c’était certain.
— Sois confiant, ajouta-t-elle. Ton calvaire va bientôt se terminer.
Comme le jour où elle avait expliqué comment elle avait gagné la somme d’un million d’euros, son explication tomba à plat, à son grand désespoir. Alex se leva, repoussant sa femme brutalement.
— Mon calvaire ? Tu oublies que j’ai été condamné à quinze ans de taule et que ça ne fait que deux ans que je suis ici. Mon calvaire, comme tu dis, n’est pas prêt de se terminer. Par contre, je vois que tu n’as pas perdu de temps. Après Pierre-Charles, tu t’envoies Romain et tu viens ici me faire l’amour, me dire que tu m’aimes et me parler de ton petit doigt ? Décidément, tu m’auras tout fait.
Chloé se rebella.
— Mais il n’y a rien entre Romain et moi ! s’écria-t-elle. Il s’estime en grande partie responsable de ce qui est arrivé et il essaie de réparer les pots cassés comme il peut. C’est un homme bien, tu sais.
Alex répondit, déterminé.
— Puisque c’est ça, reste donc auprès de ton homme bien. Pour les visites, tu pourras m’envoyer n’importe quelle pute, je veux dire autre que toi. Pour me vider les couilles, ça suffira.
Chloé restait bouche bée, incapable de prononcer un mot. Alex se dirigea vers la porte par laquelle il était arrivé et frappa.
— Gardien ! Ramenez-moi en cellule, cria-t-il à travers.
Chloé, interdite, se rassit. Elle regarda Alex partir puis une sonnerie retentit. Elle pleura. Les trois heures s’étaient écoulées. La porte s’ouvrit et le surveillant qui l’avait fait entrer se contenta d’un :
— C’est l’heure Madame.
-*-
Un an après cet entretien funeste, Chloé était malgré tout satisfaite d’elle. Elle n’allait plus voir Alex qui l’avait rejetée sur un malentendu, mais elle avait œuvré pour lui. Les avocats de Romain avaient réussi à lui obtenir une cellule individuelle, il n’était ainsi plus importuné par personne. Même les gardiens de prison le respectaient dorénavant, car pour être embastillé dans le quartier VIP, un détenu devait avoir des relations haut placées. C’étaient les matons qui craignaient le prisonnier et non plus l’inverse. Alex pensait bien qu’il devait cette faveur au petit ami supposé de Chloé, mais pour cela il laissa sa fierté de côté. Ne plus subir la tyrannie de Roland et Jessie lui ôtait un poids considérable. Il était presque heureux au fond de sa cellule.
Malgré son amour pour Alex, Chloé finit par se rapprocher de Romain. Il avait été tellement bon pour elle depuis leur discussion près du canal qu’il lui était maintenant difficile de lui en vouloir d’être en partie à l’origine de toute cette histoire. Les responsabilités étaient partagées sur ce point. Romain en était, mais aussi Pierre-Charles et elle-même. Pour le remercier de son dévouement désintéressé, elle l’invita à dîner dans son logement. Romain accepta volontiers et ils choisirent une date, car c’était un homme d’affaires très occupé.
Le soir venu, Chloé avait mis les petits plats dans les grands. La table était élégamment dressée avec la vaisselle et les couverts de la grand-mère et décorée de fleurs fraiches dans un vase en cristal. Il serait sans doute nécessaire de déplacer ce dernier pour que les convives puissent se parler, mais pour l’instant c’était du plus bel effet. Chloé sortit un autre vase pour les fleurs qu’apportait Romain et posa le bouquet sur une desserte basse.
— Merci pour ces fleurs, elles sont très belles, convint Chloé sincèrement.
La fin de l’été était douce, Chloé avait revêtu une robe bleue simple et légère et ses cheveux étaient noués en chignon. Romain, qui avait conservé sa silhouette de jeune homme, même s’il se tenait légèrement voûté, était vêtu d’un ensemble en tergal beige. Ils se firent la bise comme deux vieux camarades.
Assis à table face à face, la conversation alterna entre les différents problèmes de l’entreprise à régler et la situation de Chloé et d’Alex. Le cabinet d’avocats était confiant quant à l’obtention d’une réduction de peine. Alex était incarcéré depuis un peu plus de trois ans et Romain tenta d’afficher un optimisme mesuré.
— Maître Guérand, mon avocat, m’a confirmé qu’une réduction de peine était à l’étude pour Alex. Si on ajoute cette remise dont j’ignore l’étendue, mais qui n’est jamais inférieure à deux ans pour les peines longues, aux réductions automatiques pour bonne conduite, on arriverait à une peine totale de dix ans, voire moins. Comme il a déjà tiré trois ans, il ne lui resterait qu’un maximum de sept ans.
— Autant dire une éternité, souffla Chloé affligée.
Romain effleura la main de la jeune femme.
— Il aura un peu plus de trente ans à sa sortie. Encore toute la vie devant lui…
Chloé écrasa une larme au coin de son œil et serra doucement la main de Romain. Un court moment de silence s’invita entre eux. Romain posa sa serviette de table, se leva et attira Chloé à lui. Elle ne résista pas plus longtemps et le prit par le cou pour lui offrir un baiser passionné.
Les évènements s’accélérèrent soudain. Romain souleva la robe de Chloé jusqu’à ses épaules et l’ôta en la passant par la tête. En une fraction de seconde, Chloé se retrouva en culotte et soutien-gorge. Elle s’attaqua à la chemisette de Romain qui fut torse nu dans le même laps de temps. Ils riaient. Elle courut jusqu’à sa chambre et se jeta sur le lit, Romain fit de même et l’embrassa. Glissant sa main dans la ficelle du string, il caressa avec douceur les nymphes de la vulve qui mouillaient de plus en plus. Chloé se débarrassa de ses sous-vêtements d’un geste vif et renversa Romain sur le dos pour dégrafer sa ceinture. Quand elle ôta le pantalon, elle lorgna le boxer distendu en son milieu. Slip et pantalon se retrouvèrent à terre. Chloé amena son entrejambe à hauteur des lèvres de son partenaire et goba le gland rose et gonflé que lui tendait le phallus rigide. Les deux amants, en soixante-neuf, produisaient un superbe bruit de succion, gland dans la bouche ou langue dans le vagin. Romain, comme beaucoup d’hommes, était plus rapide à l’orgasme. Il délaissa momentanément sa fontaine à cyprine et, le visage trempé, cria :
— Je vais jouir Chloé, je vais jouir !
Joignant le geste à la parole, si on peut s’exprimer ainsi, son pénis cracha plusieurs giclées de sperme que Chloé recueillit avidement dans sa bouche et qu’elle avala ensuite. Elle nettoya tout le gland et le méat de ce qui exsudait encore de l’urètre et embrassa tendrement les deux testicules.
— Ne m’oublie pas, chéri.
À ces mots, Romain reprit sa succion. Il souleva délicatement le petit capuchon de peau et libéra le bouton rose gorgé de sang. De la pointe de la langue, il le titilla jusqu’au moment où Chloé, les deux mains lui enserrant la tête, se mit à hurler.
— Ouiiiiii… !
Romain, à son tour, buvait à la source, à l’origine du monde comme le tableau sulfureux. Les lèvres, le menton et les joues trempées, il embrassa sa compagne puis lui fit lécher son visage. Chloé était aux anges, mais savoir ce qu’elle pensait à ce moment précis était une gageure.
Ils se reposèrent quelques minutes en silence, côte à côte. Puis la main de Chloé s’avança vers le sexe flaccide de Romain et le masturba doucement. En peu de temps, l’érection revint et Chloé se mit à quatre pattes sur le lit.
— Prends-moi la chatte ! Remplis-moi le con !
Son excitation sexuelle lui faisait vociférer des mots crus. Romain ne s’en offusqua pas, tellement il était excité lui-même. Le phallus à nouveau gonflé, il se positionna à genoux derrière ces fesses si joliment offertes et pénétra brutalement l’antre rose et mouillé situé entre les cuisses.
— Arrrgghh ! Plus loin ! Encore plus loin !
Romain poussa sa verge dans le vagin jusqu’à s’en écraser les testicules. Il la retira ensuite pour apercevoir la base de son gland puis la replongea d’un seul coup dans la fournaise.
— Arrrgghh !
…
— Arrrgghh !
…
— Arrrgghh !
…
— T’arrête pas ! cria-t-elle soudain. Je jouiiiisss… !
Romain pilonnait les fesses de Chloé à grands coups de bas-ventre. Vous lecteurs, si vous aviez été présents, vous auriez pu entendre le bruit de claquement sec que produit une fessée, mais ça n’en était pas une. On aurait dit le son de quelqu’un qui court avec des tongs aux pieds. Enfin, le sperme jaillit à nouveau au fond de la cavité mystérieuse, arrachant un gémissement à Romain.
— Aaaahhh !
Il s’affala sur Chloé qui se tenait toujours à quatre pattes.
— Je t’aime, Chloé. Je t’aime depuis le premier jour, confessa-t-il dans l’oreille de sa maîtresse.
Il sortit son sexe de la vulve rougie et gonflée et s’allongea sur le dos. Chloé l’imita, elle ne disait rien. Ils s’embrassèrent et se caressèrent ; le phallus de Romain se dressa à nouveau. La jeune femme enjamba son partenaire, se saisit de la verge en semi-érection, la branla quelques instants et, quand elle fut bien raide, la posa sur son sphincter. Le gland pénétra doucement puis, elle s’assit d’un seul coup et la bite de Romain lui dilata le rectum. Elle ferma les yeux et se masturba le clitoris. Elle allait et venait le long du pénis qui lui glissait dans les entrailles. Quelques minutes s’écoulèrent à peine lorsque Romain, excité par le spectacle de Chloé qui avait accéléré sa branlette, jouit en même temps qu’elle. Le spasme voluptueux fut intense pour l’un comme pour l’autre, bien que Romain n’éjaculât pas beaucoup de sperme en raison de ses orgasmes précédents. Quand il se retira, il souleva les cuisses de Chloé et lui lécha l’anus duquel perlaient des traînées blanchâtres. Il se redressa et déposa un petit baiser sur ses lèvres.
— Je n’en peux plus chérie. Je n’ai plus vingt ans ! souffla-t-il.
Chloé rit et caressa le visage de Romain.
— Nous n’avons pas encore dîné, on verra ça après !
-*-
Neuf ans et cent soixante-quinze jours s’étaient écoulés depuis l’incarcération d’Alex. Depuis le rejet de son mari, Chloé a vécu avec Romain, mais sans jamais lui donner d’espoir, Romain le savait. Ce soir-là, à l’heure de l’apéritif, on réglait les comptes. Les deux amants se trouvaient face à face, tenant à la main qui un verre de whisky, qui un verre de porto. Chloé but une gorgée de vin.
— Tu sais qu’Alex sort demain matin à six heures précises ? questionna-t-elle prudemment.
— Oh ! Je ne le sais que trop. Tu comptes les jours depuis le début de l’année. C’est heureux qu’il ait eu sa remise de peine.
Voyant que Romain ne prenait pas mal cette entrée en matière, elle s’enhardit.
— J’irai le chercher et, s’il veut toujours bien de moi, nous vivrons la vie qu’on nous a volée il y a dix ans.
— Tu sais tout de même que maître Guérand a fourni Alex en escort-girls à raison d’une nouvelle tous les quinze jours ?
— Oui, je sais. La dernière fois que j’ai vu Alex, il m’avait demandé de lui fournir d’autres putes que moi ! Heureusement que je ne suis pas susceptible. Alors j’en ai parlé à l’avocat. Bah ! Disons que c’était par hygiène.
Romain était sidéré d’un tel flegme.
— Et ça ne te refroidit pas ? Il en a bien baisé une centaine depuis…
— Et nous, combien de fois avons-nous baisé ?
Romain accusa la remarque et se plongea dans son whisky.
— Je lui pardonne ses prostiputes à l’avance, ajouta-t-elle en s’adossant au canapé.
— Qu’est-ce qui te fait croire qu’il voudra encore de toi ?
— Je n’ai jamais demandé le divorce, or j’aurais pu, même unilatéralement compte tenu de la situation. Si je l’avais fait, il aurait su que je le laissais tomber définitivement. À ce jour, je suis encore sa femme et il le sait.
— Et tu lui diras pour nous ?
— Bien sûr. Il m’a pardonné pour Pierre-Charles, il me pardonnera pour toi. De plus, tes raisons sont bien plus nobles que celles qu’avait ton ami. J’ai joué le jeu, car tu m’as sauvé la mise il y a dix ans, j’avais une dette envers toi.
— Et le fait que je t’aime, ça ne compte pas ?
— Si tu ne m’avais pas aimée, je n’aurais pas vécu avec toi toutes ces années.
Romain vida son verre d’un trait et se resservit immédiatement. Il prit un air solennel.
— Je vois que je n’ai plus aucune chance. Tu comprendras aisément que nous ne pouvons plus nous côtoyer comme nous le faisions jusqu’à présent. Je souffrirais trop, ton mari et toi aussi.
Chloé se redressa, indignée.
— Bref, tu me fiches à la porte et bonjour Pôle Emploi, c’est ça ? C’est un coup bas qui m’étonne de toi.
Romain interposa sa paume entre Chloé et lui.
— Finalement, tu me connais bien mal. Je t’aime et il n’est pas question de te virer. Je ne t’ai pas virtuellement sortie du canal pour t’y replonger. En revanche, j’ai besoin d’un couple pour un déplacement professionnel à Osaka. Je compte investir le marché nippon et j’ai besoin pour cela de ton aide et de celle de ton mari qui serait, si tu acceptes, également salarié de Cerana. La mission est de cinq ans minimum et reconductible si tu le souhaites et si tes résultats sont bons.
Chloé observa Romain tendrement.
— Je suis désolée d’avoir douté de toi. Tu me sauves la mise encore une fois…
— Il faut encore qu’Alex accepte !
Chloé éclata de rire.
— Ça, je m’en charge ! J’ai des arguments massue !
Romain rit à son tour, mais le fond de son regard était triste à pleurer.
Il se servit un troisième whisky.
-*-
Le lendemain, six heures du matin. Le boulevard Robespierre était dépeuplé et fantomatique en raison d’un épais brouillard. Une seule voiture était garée en face de la porte toujours vert sale de la maison d’arrêt de Reims. L’un des vantaux s’entrouvrit en grinçant, Alex sortit de l’enfer. Il n’y avait pas laissé son espérance. Quand il aperçut sa femme, il traversa la rue et ouvrit la portière côté passager. Il passa son maigre bagage à l’arrière par-dessus le dossier et s’installa à côté de la conductrice. Chloé lui sourit.
— Viens, je t’emmène prendre une douche chez moi. Il y a du café et des croissants.
Alex, peu bavard, déposa un baiser sur les lèvres de Chloé.
— Pardonne-moi pour toutes ces années. J’ai été très con. Je te remercie pour toutes les filles que j’ai baisées ici, mais je l’ai toujours fait en pensant à toi. C’est toi que j’aime, ça n’a pas changé.
— Tu as payé ta dette envers la société, moi j’ai payé ma dette envers Roland. Sans lui, je serais au fond du canal. À midi, je t’invite au restaurant du « Café de la place » à Logebelle. Nous n’avons pas eu le temps de goûter à la pièce montée, tu te souviens ? ajouta-t-elle.
À ces mots, Alex eut un sourire en coin, puis les deux époux s’embrassèrent longuement.
— Nous sommes en retard de dix ans, remarqua Alex. Tu crois qu’elle sera encore bonne ?
— T’inquiète, j’en ai commandé une autre pour notre nouveau départ.
— Notre nouveau départ ?
— Oui. Le Japon, ça te dit ? demanda Chloé en enclenchant la première.
***
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14 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Merci Nico. J'avoue que la première partie était destinée à être une histoire complète en elle-même. Puis, je me suis souvenu que les lecteurs d'HDS n'aimaient pas les fins tragiques, alors j'ai écrit cette suite pour les éternels optimistes.
Cher Philus
Si le premier épisode était autoporteur avec une fin tragique, je me demandais ce qu allait être la suite. Tout simplement humaine, avec beaucoup d amour et un peu de coquineries comme dans les autres récits de HDS. J' en retiendrai la profonde humanité de Romain, certainement un lointain cousin de Julien dans l accident ?
Bien à vous
Nico
Si le premier épisode était autoporteur avec une fin tragique, je me demandais ce qu allait être la suite. Tout simplement humaine, avec beaucoup d amour et un peu de coquineries comme dans les autres récits de HDS. J' en retiendrai la profonde humanité de Romain, certainement un lointain cousin de Julien dans l accident ?
Bien à vous
Nico
Merci cher Tamis, mais encore une fois, ce récit, bien que parlant du même sujet, n'a aucun lien avec le film du même nom. Ce n'est pas parce que le titre est identique que le développement l'est aussi.
Bravo, bravo,bravo !
Je me croyais entrain de visionner un film de années 80 !
Excellent
Je me croyais entrain de visionner un film de années 80 !
Excellent
Merci Arnojan pour votre appréciation. Cela fait énormément plaisir de savoir que mes modestes récits sont appréciés des lecteur d'HDS.
Superbe série, bravo à l'auteur. Pour répondre à La chipie, si Alex se tape des putes, sa Chloé en est une belle!!! vu son "cursus"... ;) & je ne fis pas un jugement de valeur...
arnojan
arnojan
Ah non je ne parle pas pognon , je ne suis pas vénale mais terre à terre oui.
La chipie
La chipie
On voit bien que la chipie préfère les hommes friqués l amour connaît pas cul oui.
Une suite qui tient la route, même si personnellement, j’en serais resté au premier épisode avec sa fin tragique.
L’amour triomphe finalement.
L’amour triomphe finalement.
Merci mimi68. Je vais lire votre prose également.
L'amour a bon dos, remarque vu ce que moi je supporte c'est pas mieux.
La chipie
La chipie
très belle histoire
Oui ma chère Chipie, mais l'Amour qu'en fais-tu ?
Par ailleurs, le dernier "Romain" s'est inexplicablement transformé en "Roland". Les lecteurs auront corrigé d'eux-mêmes.
Par ailleurs, le dernier "Romain" s'est inexplicablement transformé en "Roland". Les lecteurs auront corrigé d'eux-mêmes.
Je serai rester avec Romain, Alex porte 1 jugement de valeur et se tape des putes , il n'a qu'à rester tout seul à sa sortie de taule et basta.
La chipie
La chipie