RETOUR A KIEV

Récit érotique écrit par Miss_Sexcret [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
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RETOUR A KIEV
RETOUR A KIEV
Kiev, fin février – L’appartement
Kiev, sous la neige, est une carte postale fanée. Belle et sale à la fois. Des coupoles dorées émergent de la brume comme des promesses qu’on n’a jamais tenues. Dans le quartier de Podil, les rues pavées glissent sous les pas. Les façades décrépies conservent la trace d’un faste ancien, à peine dissimulée derrière les graffitis et les enseignes criardes des nouvelles boutiques. Les fils électriques pendent comme des lianes entre les immeubles, les tuyaux rouillés longent les murs, et les corbeaux croassent sur les cheminées.
L’appartement de Mamina m’accueille comme un mausolée figé. Tout est resté à sa place : les napperons brodés posés avec minutie sur les accoudoirs du canapé, la lampe au pied bancal qu’elle refusait de jeter, les portraits jaunis qui nous regardent comme s’ils attendaient qu’on reprenne la conversation. L’odeur est toujours là — cire, naphtaline, thé noir et poussière d’un autre siècle. Même son lit, trop grand, trop vide, garde les plis d’un dernier sommeil. Elle n’est plus là. Mais elle est partout.
Sasha m’attendait sur le palier. Seize ans. Déjà. Il a grandi trop vite, comme si le deuil l’avait étiré de l’intérieur. Un mètre quatre-vingts, déjà des épaules larges, le torse tendu sous un vieux sweat trop court. Le visage encore juvénile, mais les traits plus durs, marqués. Il a ce silence dans le regard, ce genre de silence qui vient quand on comprend trop tôt que personne ne viendra nous sauver.
Il m’a serrée fort. Trop fort. Comme si j’étais une bouée, pas une sœur. Comme si mes bras pouvaient encore faire rempart contre tout.
Je suis devenue sa mère ce jour-là. Sans le dire. Sans qu’il le demande. Il n’est plus un enfant. Pas encore un homme. Et moi… je suis censée être celle qui veille.
Je cuisine. Je nettoie. Je m’accroche à une routine de survie. Le matin, je réveille Sasha, je prépare son petit-déjeuner, je le pousse à réviser. Ensuite, je descends travailler à l’épicerie du coin, rue Illinska — un commerce minuscule tenu par une femme aigrie mais gentille, au cœur caché sous les couches de sarcasmes. Le soir, après le dîner et les devoirs, j’enchaîne avec le nettoyage de bureaux. Heureusement, la société qui m’emploie ne m’envoie pas trop loin.
Je suis épuisée. Mais cette ville, même si elle me broie parfois, je l’aime.
Dans le froid, elle devient magique. Les réverbères allument une lueur dorée dans les congères, les tramways grincent comme des bêtes anciennes, les fenêtres s’illuminent une à une, laissant deviner des fragments d’intimité. C’est une ville qui garde ses secrets, une ville qui ne pardonne pas facilement, mais qui sait, parfois, vous serrer doucement contre son cœur gelé.
Et moi, je suis là. À Kiev. Chez Mamina. Avec Sasha. Et cette étrange impression, certains soirs, dans le silence tiède de la cuisine : je suis une intruse dans ma propre vie.
Cette routine dans laquelle nous nous sommes installés — ou plutôt enterrés — m’étouffe.
Les jours se répètent comme des chapelets vides. Les gestes sont mécaniques, les pensées rongées par l’attente, l’absence, le manque.
Je n’ai plus de vie. Plus de désir tourné vers l’extérieur. Juste des souvenirs, des envies qui rampent sous la peau, et cette frustration lancinante qui me serre entre les cuisses.
Ma vie sexuelle ? Un désert. Un néant. Une succession de nuits blêmes, peuplées seulement par ma main, mes soupirs, et les images floues que je convoque les yeux fermés.
J’ai bien un copain — enfin, un sexfriend — Yuri. Un ami d’enfance devenu amant occasionnel. Mais il vit à Moscou maintenant. Il revient parfois, entre deux contrats, le temps d’une nuit volée dans un hôtel minable. C’est un corps connu, rassurant, une manière de ne pas sombrer complètement.
Mais cela fait des semaines. Des mois. Et mon corps, lui, réclame plus qu’un souvenir. Il veut une peau chaude. Des doigts imprévus. Des morsures douces. De la sueur. De l’abandon.
Et voilà que notre quotidien morose se voit bousculé par une menace encore plus sourde : une maladie, un virus nouveau, invisible et redouté.
Le COVID-19.
Les infos en parlent comme d’un fléau moderne. D’abord lointain, puis soudain aux portes de chez nous.
Les rues se vident. Les magasins sont pris d’assaut. Les pâtes, le papier toilette, le sucre, tout disparaît des rayons. L’épicerie où je travaillais a été vidée en quarante-huit heures. Fermée. Et les bureaux, aussi, ont cessé de vibrer de la vie des autres. Le télétravail a avalé les open spaces.
Sasha traîne de plus en plus souvent avec ses copains et copines de l’immeuble. Ils ne vont pas plus loin que le square en bas, mais je ne le vois presque plus.
Il revient tard. Parfumé. Silencieux.
Moi, je m’enfonce dans une solitude épaisse, collante, dont je ne peux m’extirper qu’en écrivant ou en discutant en ligne, tard le soir, avec d’inconnus qui, eux aussi, cherchent à exister quelque part (voir Comment je suis passée de l’ombre à la lumière).
Sasha
Sasha a grandi. Trop vite.
Son corps d’adolescent s’est transformé, tendu, sculpté. Il est beau. Fort. Troublant. Et ça me fait peur parfois — pas à cause de lui, mais à cause de moi.
Il a ce regard, parfois, qui glisse un peu trop bas, un peu trop longtemps, sur mes jambes quand je passe en nuisette. Il détourne les yeux. Il rougit.
Moi aussi.
Mais je fais semblant de ne rien voir.
Et puis, un soir… elle est venue.
Une fille. La voisine du sixième étage. Je me souvenais d’elle, avec ses couettes et ses genoux écorchés.
Elle a bien changé.
Menue, nerveuse, une beauté encore floue, mais déjà affûtée. Des ongles rongés, une bouche pleine, souple, qu’on devine habile. Le genre de fille qui rit sans prévenir et embrasse sans réfléchir.
Sasha l’a fait entrer pendant que je rangeais la cuisine. Ils ont grimpé dans sa chambre. Rien de nouveau — il a l’âge, après tout. J’ai pris un livre. Fait semblant de lire.
Mais les murs ici sont minces comme du papier.
Et ce que j’ai entendu m’a prise de court.
Au début, des rires. Des murmures. Puis le lit a grincé.
Et ensuite… le reste.
Le frottement des corps. Le souffle de Sasha, irrégulier, excité. Les halètements de la fille, d’abord hésitants, puis de plus en plus nets. Les petits coups de reins maladroits, précipités.
Et ce gémissement…
Sa voix à elle. Douce. Tremblante. Étouffée.
La voix d’une fille qui découvre, vraiment, ce que ça veut dire de jouir.
Et mon ventre s’est serré.
Ça faisait trop longtemps.
Trop longtemps sans une bouche sur mes seins. Sans un homme à genoux devant moi. Sans une main étrangère sur ma nuque, pour m’ancrer à ce monde autrement que par les factures et les repas à préparer.
Dans cette pièce minuscule où Mamina priait, moi je suis redevenue femme. Chair. Manque.
J’ai fermé les yeux. Lentement.
Ma main a glissé sous le pantalon.
Mes doigts ont effleuré mes lèvres. J’étais déjà trempée.
J’ai calé ma tête contre le mur, tout contre la cloison d’où vibrait encore la cadence de leurs corps. Le souffle de Sasha. La voix de la fille. Le rythme.
Je me suis caressée doucement. Puis plus fort. En rythme. En secret.
Mon sexe avalait mes doigts comme un vide trop longtemps ignoré.
Mes hanches ont bougé toutes seules. Mon souffle s’est fait court.
J’ai joui.
Fort.
Mais sans bruit.
Juste un spasme. Brutal. Une onde.
Un cri muet dans le ventre.
Un orgasme d’ombre.
Je suis restée là, un moment. Essoufflée. Le cœur battant.
Je me suis essuyée. Lentement.
Silencieuse. Nue.
Et j’ai ri.
Pas un rire joyeux. Un rire triste. Doux-amer.
Parce que c’était ça, maintenant.
Ma vie.
Des repas. Des lessives. Un frère qui n’est plus un enfant. Et moi… une femme qui jouit seule, dans le silence, en écoutant une autre découvrir ce que j’ai oublié.
Depuis cette nuit-là, quelque chose a changé.
Pas entre lui et moi. Mais en moi.
Sasha grandit. Il s’émancipe. Il vit. Et il baise.
Je ne suis pas jalouse. Pas de lui. Mais de cette liberté qu’il a, ce droit de céder à ses pulsions sans honte. Ce que moi je m’interdis depuis des mois.
Il laisse sa porte entrouverte. Volontairement ? Je ne sais pas.
Peut-être qu’il ne se rend pas compte. Peut-être qu’il le fait exprès.
Mais ce n’est pas un hasard.
Un soir, je suis passée dans le couloir. Il faisait chaud, j’étais en nuisette, une de celles que j’aime porter quand je suis seule, usée mais douce.
La lumière de sa chambre dessinait une fente sur le sol.
Et là, sans prévenir, un bruit. Régulier. Humide.
Je me suis arrêtée.
Le battement dans mes tempes s’est accéléré.
Il était allongé sur son lit, les jambes écartées.
Pantalon aux chevilles, torse nu.
Et sa main…
Sa main allait et venait sur sa queue, longue, dure, brillante.
Il haletait, le regard fixé sur l’écran de son téléphone.
Je n’ai pas bougé.
Pas pour le mater. Mais parce que quelque chose en moi s’est noué.
Une chaleur. Un vide. Une jalousie trouble.
Je suis repartie sur la pointe des pieds.
J’ai fermé la porte de ma chambre.
Je me suis couchée sur le ventre, et j’ai pleuré.
Pas à cause de lui. À cause de moi.
Quelques jours plus tard, en rangeant le linge, j’ai trouvé un petit tas de magazines roulés derrière une pile de sweats.
Des revues porno à l’ancienne, papier jauni, couverture glacée.
Des filles écartées, maquillées à outrance, la bouche pleine ou les jambes ouvertes.
Rien de romantique. Du cru. Du direct. Du sexe pour soulager une tension.
Je les ai feuilletés. Sans honte. Sans précaution.
J’ai senti mon sexe se gonfler rien qu’en tournant les pages.
Une blonde nue, en talons, en train de se faire prendre sur un plan de travail.
Une rousse à genoux, avalant un sexe énorme avec les yeux pleins de larmes.
Je me suis assise sur le lit, jambes croisées.
J’ai ouvert ma nuisette.
Et j’ai laissé mes doigts explorer.
Je ne pensais plus à Sasha.
Je pensais à ces corps. À ces poses. À ce que moi je n’avais plus.
J’ai joui, vite, fort, les jambes crispées, les lèvres serrées.
Le lendemain, j’ai reposé les magazines à leur place.
Bien repliés. Comme si de rien n’était.
Mais je savais.
Je savais qu’ici, dans cet appartement trop petit, la sexualité flottait comme une odeur.
Pas sale. Pas honteuse.
Juste là.
Dans les draps froissés.
Les murs trop minces.
Les soupirs qu’on fait semblant d’ignorer.
Et puis il y a eu cette nuit.
Je lisais, dans le salon, lumière tamisée, une tasse de thé refroidie entre les mains.
Elle est arrivée peu avant minuit, la voisine du sixième, cheveux en bataille, bonnet mal mis, sourire trop pressé.
Mais cette fois, elle n’était pas seule.
Une autre fille l’accompagnait.
Plus grande. Brune. Le genre un peu garçonne, jean taille basse, regard insolent.
Elles m’ont saluée poliment. Un peu gênées.
Sasha est sorti de sa chambre, torse nu.
Pas un mot. Juste ce sourire qu’il ne fait qu’à elles.
Il les a regardées, tour à tour. Puis il a pris la main de la plus jeune. Un baiser sur la joue de l’autre.
Et ils sont entrés tous les trois.
La porte s’est refermée doucement… mais pas entièrement.
Un battement dans ma poitrine.
Un silence dans l’air.
Et puis les premiers éclats de rire.
Je suis restée là, une minute, figée, les yeux sur la cloison.
Les bruits m’ont atteinte comme une onde chaude : froissements, soupirs, gloussements étouffés.
J’ai posé la tasse, debout, incapable de me concentrer.
J’ai voulu aller me coucher.
Mais mes pas m’ont conduite dans le couloir.
La porte de sa chambre n’était qu’à moitié fermée.
Une ligne de lumière découpait le parquet.
Je n’ai pas réfléchi.
J’ai avancé.
Un pas, puis un autre.
Jusqu’à la fente.
J’ai regardé.
Et là, le temps s’est arrêté.
Ils étaient déjà nus, tous les trois.
Sasha était assis au bord du lit, torse droit, jambes écartées.
La blonde — la voisine — était à genoux devant lui, entre ses cuisses, la bouche grande ouverte sur son sexe.
L’autre était derrière elle, les doigts glissés sous sa culotte baissée, en train de la caresser doucement, un sourire en coin.
La scène était brute. Sensuelle. Vivante.
Sasha avait la tête renversée en arrière, les mains dans les cheveux de la fille.
Sa queue disparaissait entre ses lèvres, humide, épaisse.
La brune, elle, s’occupait de l’autre, la main agile, précise, comme si elle savait exactement ce qu’elle faisait.
Leurs souffles se mêlaient.
La chambre était moite, douce, pleine de gémissements légers.
Je n’ai pas bougé.
Mon ventre s’est noué.
Ma culotte était déjà humide.
Sasha s’est levé. Il a pris la brune par la taille.
Il l’a fait basculer sur le lit, sur le ventre, ses fesses hautes, offertes.
La blonde, elle, s’est allongée à côté, les jambes écartées, se caressant doucement en les regardant.
Et quand il l’a pénétrée, d’un coup ferme, précis, la brune a gémi fort, la tête dans les draps.
Ses hanches ont roulé, cherchant le rythme.
Sasha a poussé plus fort, plus profond.
Son dos tendu, ses muscles contractés, sa main sur la hanche de la fille.
Il la baisait lentement, puis plus vite, la faisait crier, haleter.
Je regardais.
Rouge.
Silencieuse.
Mes jambes tremblaient.
Et puis la blonde a tendu la main vers lui.
Il s’est retiré, sa queue brillante, palpitante.
Elle l’a prise dans sa bouche comme une récompense.
Il s’est laissé faire.
Pendant ce temps, la brune s’était redressée, elle embrassait la blonde à pleine bouche, mélangeant salive, plaisir et rires.
Et à nouveau, Sasha est revenu vers elle, a écarté ses cuisses, l’a prise sur le dos cette fois.
Je n’étais plus spectatrice.
J’étais actrice, dans ma tête.
Mon sexe palpitait.
J’ai glissé la main entre mes jambes.
Ma peau brûlait.
Je me suis caressée en silence, les yeux grands ouverts sur eux.
Je sentais tout : leur chaleur, leur souffle, leur excitation.
Et j’ai joui.
Encore.
Fort.
Un orgasme épais, qui m’a sciée de l’intérieur.
Je me suis appuyée contre le mur. Essoufflée.
Et eux… continuaient.
Indifférents.
Beaux.
Libres.
Je suis retournée dans ma chambre.
Nue. Humide. Vibrante.
Et cette nuit-là, pour la première fois depuis longtemps, j’ai dormi nue, le corps lourd et apaisé.
Pas honteuse. Pas coupable.
Juste vivante.
(à suivre)
Pas là juste pour les jolies photos...
Tu l'as lue ? alors lâche un mot, un avis, un claque ou un frisson. Merci
Kiev, fin février – L’appartement
Kiev, sous la neige, est une carte postale fanée. Belle et sale à la fois. Des coupoles dorées émergent de la brume comme des promesses qu’on n’a jamais tenues. Dans le quartier de Podil, les rues pavées glissent sous les pas. Les façades décrépies conservent la trace d’un faste ancien, à peine dissimulée derrière les graffitis et les enseignes criardes des nouvelles boutiques. Les fils électriques pendent comme des lianes entre les immeubles, les tuyaux rouillés longent les murs, et les corbeaux croassent sur les cheminées.
L’appartement de Mamina m’accueille comme un mausolée figé. Tout est resté à sa place : les napperons brodés posés avec minutie sur les accoudoirs du canapé, la lampe au pied bancal qu’elle refusait de jeter, les portraits jaunis qui nous regardent comme s’ils attendaient qu’on reprenne la conversation. L’odeur est toujours là — cire, naphtaline, thé noir et poussière d’un autre siècle. Même son lit, trop grand, trop vide, garde les plis d’un dernier sommeil. Elle n’est plus là. Mais elle est partout.
Sasha m’attendait sur le palier. Seize ans. Déjà. Il a grandi trop vite, comme si le deuil l’avait étiré de l’intérieur. Un mètre quatre-vingts, déjà des épaules larges, le torse tendu sous un vieux sweat trop court. Le visage encore juvénile, mais les traits plus durs, marqués. Il a ce silence dans le regard, ce genre de silence qui vient quand on comprend trop tôt que personne ne viendra nous sauver.
Il m’a serrée fort. Trop fort. Comme si j’étais une bouée, pas une sœur. Comme si mes bras pouvaient encore faire rempart contre tout.
Je suis devenue sa mère ce jour-là. Sans le dire. Sans qu’il le demande. Il n’est plus un enfant. Pas encore un homme. Et moi… je suis censée être celle qui veille.
Je cuisine. Je nettoie. Je m’accroche à une routine de survie. Le matin, je réveille Sasha, je prépare son petit-déjeuner, je le pousse à réviser. Ensuite, je descends travailler à l’épicerie du coin, rue Illinska — un commerce minuscule tenu par une femme aigrie mais gentille, au cœur caché sous les couches de sarcasmes. Le soir, après le dîner et les devoirs, j’enchaîne avec le nettoyage de bureaux. Heureusement, la société qui m’emploie ne m’envoie pas trop loin.
Je suis épuisée. Mais cette ville, même si elle me broie parfois, je l’aime.
Dans le froid, elle devient magique. Les réverbères allument une lueur dorée dans les congères, les tramways grincent comme des bêtes anciennes, les fenêtres s’illuminent une à une, laissant deviner des fragments d’intimité. C’est une ville qui garde ses secrets, une ville qui ne pardonne pas facilement, mais qui sait, parfois, vous serrer doucement contre son cœur gelé.
Et moi, je suis là. À Kiev. Chez Mamina. Avec Sasha. Et cette étrange impression, certains soirs, dans le silence tiède de la cuisine : je suis une intruse dans ma propre vie.
Cette routine dans laquelle nous nous sommes installés — ou plutôt enterrés — m’étouffe.
Les jours se répètent comme des chapelets vides. Les gestes sont mécaniques, les pensées rongées par l’attente, l’absence, le manque.
Je n’ai plus de vie. Plus de désir tourné vers l’extérieur. Juste des souvenirs, des envies qui rampent sous la peau, et cette frustration lancinante qui me serre entre les cuisses.
Ma vie sexuelle ? Un désert. Un néant. Une succession de nuits blêmes, peuplées seulement par ma main, mes soupirs, et les images floues que je convoque les yeux fermés.
J’ai bien un copain — enfin, un sexfriend — Yuri. Un ami d’enfance devenu amant occasionnel. Mais il vit à Moscou maintenant. Il revient parfois, entre deux contrats, le temps d’une nuit volée dans un hôtel minable. C’est un corps connu, rassurant, une manière de ne pas sombrer complètement.
Mais cela fait des semaines. Des mois. Et mon corps, lui, réclame plus qu’un souvenir. Il veut une peau chaude. Des doigts imprévus. Des morsures douces. De la sueur. De l’abandon.
Et voilà que notre quotidien morose se voit bousculé par une menace encore plus sourde : une maladie, un virus nouveau, invisible et redouté.
Le COVID-19.
Les infos en parlent comme d’un fléau moderne. D’abord lointain, puis soudain aux portes de chez nous.
Les rues se vident. Les magasins sont pris d’assaut. Les pâtes, le papier toilette, le sucre, tout disparaît des rayons. L’épicerie où je travaillais a été vidée en quarante-huit heures. Fermée. Et les bureaux, aussi, ont cessé de vibrer de la vie des autres. Le télétravail a avalé les open spaces.
Sasha traîne de plus en plus souvent avec ses copains et copines de l’immeuble. Ils ne vont pas plus loin que le square en bas, mais je ne le vois presque plus.
Il revient tard. Parfumé. Silencieux.
Moi, je m’enfonce dans une solitude épaisse, collante, dont je ne peux m’extirper qu’en écrivant ou en discutant en ligne, tard le soir, avec d’inconnus qui, eux aussi, cherchent à exister quelque part (voir Comment je suis passée de l’ombre à la lumière).
Sasha
Sasha a grandi. Trop vite.
Son corps d’adolescent s’est transformé, tendu, sculpté. Il est beau. Fort. Troublant. Et ça me fait peur parfois — pas à cause de lui, mais à cause de moi.
Il a ce regard, parfois, qui glisse un peu trop bas, un peu trop longtemps, sur mes jambes quand je passe en nuisette. Il détourne les yeux. Il rougit.
Moi aussi.
Mais je fais semblant de ne rien voir.
Et puis, un soir… elle est venue.
Une fille. La voisine du sixième étage. Je me souvenais d’elle, avec ses couettes et ses genoux écorchés.
Elle a bien changé.
Menue, nerveuse, une beauté encore floue, mais déjà affûtée. Des ongles rongés, une bouche pleine, souple, qu’on devine habile. Le genre de fille qui rit sans prévenir et embrasse sans réfléchir.
Sasha l’a fait entrer pendant que je rangeais la cuisine. Ils ont grimpé dans sa chambre. Rien de nouveau — il a l’âge, après tout. J’ai pris un livre. Fait semblant de lire.
Mais les murs ici sont minces comme du papier.
Et ce que j’ai entendu m’a prise de court.
Au début, des rires. Des murmures. Puis le lit a grincé.
Et ensuite… le reste.
Le frottement des corps. Le souffle de Sasha, irrégulier, excité. Les halètements de la fille, d’abord hésitants, puis de plus en plus nets. Les petits coups de reins maladroits, précipités.
Et ce gémissement…
Sa voix à elle. Douce. Tremblante. Étouffée.
La voix d’une fille qui découvre, vraiment, ce que ça veut dire de jouir.
Et mon ventre s’est serré.
Ça faisait trop longtemps.
Trop longtemps sans une bouche sur mes seins. Sans un homme à genoux devant moi. Sans une main étrangère sur ma nuque, pour m’ancrer à ce monde autrement que par les factures et les repas à préparer.
Dans cette pièce minuscule où Mamina priait, moi je suis redevenue femme. Chair. Manque.
J’ai fermé les yeux. Lentement.
Ma main a glissé sous le pantalon.
Mes doigts ont effleuré mes lèvres. J’étais déjà trempée.
J’ai calé ma tête contre le mur, tout contre la cloison d’où vibrait encore la cadence de leurs corps. Le souffle de Sasha. La voix de la fille. Le rythme.
Je me suis caressée doucement. Puis plus fort. En rythme. En secret.
Mon sexe avalait mes doigts comme un vide trop longtemps ignoré.
Mes hanches ont bougé toutes seules. Mon souffle s’est fait court.
J’ai joui.
Fort.
Mais sans bruit.
Juste un spasme. Brutal. Une onde.
Un cri muet dans le ventre.
Un orgasme d’ombre.
Je suis restée là, un moment. Essoufflée. Le cœur battant.
Je me suis essuyée. Lentement.
Silencieuse. Nue.
Et j’ai ri.
Pas un rire joyeux. Un rire triste. Doux-amer.
Parce que c’était ça, maintenant.
Ma vie.
Des repas. Des lessives. Un frère qui n’est plus un enfant. Et moi… une femme qui jouit seule, dans le silence, en écoutant une autre découvrir ce que j’ai oublié.
Depuis cette nuit-là, quelque chose a changé.
Pas entre lui et moi. Mais en moi.
Sasha grandit. Il s’émancipe. Il vit. Et il baise.
Je ne suis pas jalouse. Pas de lui. Mais de cette liberté qu’il a, ce droit de céder à ses pulsions sans honte. Ce que moi je m’interdis depuis des mois.
Il laisse sa porte entrouverte. Volontairement ? Je ne sais pas.
Peut-être qu’il ne se rend pas compte. Peut-être qu’il le fait exprès.
Mais ce n’est pas un hasard.
Un soir, je suis passée dans le couloir. Il faisait chaud, j’étais en nuisette, une de celles que j’aime porter quand je suis seule, usée mais douce.
La lumière de sa chambre dessinait une fente sur le sol.
Et là, sans prévenir, un bruit. Régulier. Humide.
Je me suis arrêtée.
Le battement dans mes tempes s’est accéléré.
Il était allongé sur son lit, les jambes écartées.
Pantalon aux chevilles, torse nu.
Et sa main…
Sa main allait et venait sur sa queue, longue, dure, brillante.
Il haletait, le regard fixé sur l’écran de son téléphone.
Je n’ai pas bougé.
Pas pour le mater. Mais parce que quelque chose en moi s’est noué.
Une chaleur. Un vide. Une jalousie trouble.
Je suis repartie sur la pointe des pieds.
J’ai fermé la porte de ma chambre.
Je me suis couchée sur le ventre, et j’ai pleuré.
Pas à cause de lui. À cause de moi.
Quelques jours plus tard, en rangeant le linge, j’ai trouvé un petit tas de magazines roulés derrière une pile de sweats.
Des revues porno à l’ancienne, papier jauni, couverture glacée.
Des filles écartées, maquillées à outrance, la bouche pleine ou les jambes ouvertes.
Rien de romantique. Du cru. Du direct. Du sexe pour soulager une tension.
Je les ai feuilletés. Sans honte. Sans précaution.
J’ai senti mon sexe se gonfler rien qu’en tournant les pages.
Une blonde nue, en talons, en train de se faire prendre sur un plan de travail.
Une rousse à genoux, avalant un sexe énorme avec les yeux pleins de larmes.
Je me suis assise sur le lit, jambes croisées.
J’ai ouvert ma nuisette.
Et j’ai laissé mes doigts explorer.
Je ne pensais plus à Sasha.
Je pensais à ces corps. À ces poses. À ce que moi je n’avais plus.
J’ai joui, vite, fort, les jambes crispées, les lèvres serrées.
Le lendemain, j’ai reposé les magazines à leur place.
Bien repliés. Comme si de rien n’était.
Mais je savais.
Je savais qu’ici, dans cet appartement trop petit, la sexualité flottait comme une odeur.
Pas sale. Pas honteuse.
Juste là.
Dans les draps froissés.
Les murs trop minces.
Les soupirs qu’on fait semblant d’ignorer.
Et puis il y a eu cette nuit.
Je lisais, dans le salon, lumière tamisée, une tasse de thé refroidie entre les mains.
Elle est arrivée peu avant minuit, la voisine du sixième, cheveux en bataille, bonnet mal mis, sourire trop pressé.
Mais cette fois, elle n’était pas seule.
Une autre fille l’accompagnait.
Plus grande. Brune. Le genre un peu garçonne, jean taille basse, regard insolent.
Elles m’ont saluée poliment. Un peu gênées.
Sasha est sorti de sa chambre, torse nu.
Pas un mot. Juste ce sourire qu’il ne fait qu’à elles.
Il les a regardées, tour à tour. Puis il a pris la main de la plus jeune. Un baiser sur la joue de l’autre.
Et ils sont entrés tous les trois.
La porte s’est refermée doucement… mais pas entièrement.
Un battement dans ma poitrine.
Un silence dans l’air.
Et puis les premiers éclats de rire.
Je suis restée là, une minute, figée, les yeux sur la cloison.
Les bruits m’ont atteinte comme une onde chaude : froissements, soupirs, gloussements étouffés.
J’ai posé la tasse, debout, incapable de me concentrer.
J’ai voulu aller me coucher.
Mais mes pas m’ont conduite dans le couloir.
La porte de sa chambre n’était qu’à moitié fermée.
Une ligne de lumière découpait le parquet.
Je n’ai pas réfléchi.
J’ai avancé.
Un pas, puis un autre.
Jusqu’à la fente.
J’ai regardé.
Et là, le temps s’est arrêté.
Ils étaient déjà nus, tous les trois.
Sasha était assis au bord du lit, torse droit, jambes écartées.
La blonde — la voisine — était à genoux devant lui, entre ses cuisses, la bouche grande ouverte sur son sexe.
L’autre était derrière elle, les doigts glissés sous sa culotte baissée, en train de la caresser doucement, un sourire en coin.
La scène était brute. Sensuelle. Vivante.
Sasha avait la tête renversée en arrière, les mains dans les cheveux de la fille.
Sa queue disparaissait entre ses lèvres, humide, épaisse.
La brune, elle, s’occupait de l’autre, la main agile, précise, comme si elle savait exactement ce qu’elle faisait.
Leurs souffles se mêlaient.
La chambre était moite, douce, pleine de gémissements légers.
Je n’ai pas bougé.
Mon ventre s’est noué.
Ma culotte était déjà humide.
Sasha s’est levé. Il a pris la brune par la taille.
Il l’a fait basculer sur le lit, sur le ventre, ses fesses hautes, offertes.
La blonde, elle, s’est allongée à côté, les jambes écartées, se caressant doucement en les regardant.
Et quand il l’a pénétrée, d’un coup ferme, précis, la brune a gémi fort, la tête dans les draps.
Ses hanches ont roulé, cherchant le rythme.
Sasha a poussé plus fort, plus profond.
Son dos tendu, ses muscles contractés, sa main sur la hanche de la fille.
Il la baisait lentement, puis plus vite, la faisait crier, haleter.
Je regardais.
Rouge.
Silencieuse.
Mes jambes tremblaient.
Et puis la blonde a tendu la main vers lui.
Il s’est retiré, sa queue brillante, palpitante.
Elle l’a prise dans sa bouche comme une récompense.
Il s’est laissé faire.
Pendant ce temps, la brune s’était redressée, elle embrassait la blonde à pleine bouche, mélangeant salive, plaisir et rires.
Et à nouveau, Sasha est revenu vers elle, a écarté ses cuisses, l’a prise sur le dos cette fois.
Je n’étais plus spectatrice.
J’étais actrice, dans ma tête.
Mon sexe palpitait.
J’ai glissé la main entre mes jambes.
Ma peau brûlait.
Je me suis caressée en silence, les yeux grands ouverts sur eux.
Je sentais tout : leur chaleur, leur souffle, leur excitation.
Et j’ai joui.
Encore.
Fort.
Un orgasme épais, qui m’a sciée de l’intérieur.
Je me suis appuyée contre le mur. Essoufflée.
Et eux… continuaient.
Indifférents.
Beaux.
Libres.
Je suis retournée dans ma chambre.
Nue. Humide. Vibrante.
Et cette nuit-là, pour la première fois depuis longtemps, j’ai dormi nue, le corps lourd et apaisé.
Pas honteuse. Pas coupable.
Juste vivante.
(à suivre)
Pas là juste pour les jolies photos...
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1 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Force et courage à toi, Guerrière de l'ombre!
Magnifique! Encore!
Arnorn
Magnifique! Encore!
Arnorn

