« Matrone et Domina : Tullia, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » (26) : La Bona

- Par l'auteur HDS Olga T -
Récit érotique écrit par Olga T [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
  • • 380 récits publiés.
  • • Cote moyenne attribuée par les lecteurs : 9.4 • Cote moyenne attribuée par HDS : 10.0
  • • L'ensemble des récits érotiques de Olga T ont reçu un total de 1 109 575 visites.
Récit libertin : « Matrone et Domina : Tullia, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » (26) : La Bona Histoire érotique Publiée sur HDS le 04-07-2022 dans la catégorie Dans la zone rouge
Cette histoire de sexe a été affichée 1 978 fois depuis sa publication.
Note attribuée à cette histoire érotique par les lecteurs :
(10.0 / 10)
Note attribuée à cette histoire érotique par HDS :
(10.0 / 10)

Couleur du fond :
« Matrone et Domina : Tullia, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » (26) : La Bona
*** RECIT FICTIF POUR LECTEURS AVERTIS
AVERTISSEMENTS
Cette histoire, construite autour de l’hypersexualité de Tullia, contient forcément des scènes de sexe, quelquefois très « hard », voir brutales et qui correspondent à la psychologie des personnages et aux mœurs de l’époque. Au fur et à mesure de la rédaction des chapitres, j’ai voulu également situer ces personnages dans le contexte et les mœurs de la Rome impériale. Je remercie donc les lecteurs et lectrices qui ne viennent pas ici que pour les passages de sexe, mais qui partagent ce besoin de connaissance.

***
RESUME DES CHAPITRES PRECEDENTS
La mort de Messaline a fait perdre à la jeune patricienne Tullia à la fois son mari, Lurco et son amant et grand amour Vettius Valens. Obligée de quitter Rome, mais riche et libre, elle gagne Baïes, la cité des plaisirs, où elle compte bien donner libre cours à son hypersexualité. Tullia a gagné la protection d’Agrippine, nièce et nouvelle épouse de l’empereur Claude, qui va l’aider à devenir la « reine de Baïes ».

Tullia est heureuse dans sa luxueuse villa, où elle vit en harmonie entre son compagnon, l’eunuque Parsam et ses amantes, Lucia, proche d’elle depuis l’enfance et Epicharis, jeune prostituée qui lui avait sauvé la vie lors de son escapade avec Messaline dans un lupanar de Suburre. En même temps, elle collectionne les amants, tels Lucius Agermus, intendant de la villa d’Agrippine à Baules, à proximité de Baïes ou encore l’ambitieux Tigellin, futur âme damnée de Néron.

À l’initiative de la redoutable Agrippine, Tullia a assuré l’éducation sexuelle du jeune Néron, celui-ci venant de prendre la toge virile. À cette occasion, Tullia a rencontré Othon, compagnon de débauche du futur empereur.

En échange de « ce service », Agrippine fait lever l’interdiction de séjour de Tullia à Rome. Tullia et Epicharis profitent de leur présence à Rome pour assister aux Aphrodisies, fête annuelle en l’honneur de Vénus Erycine, jour où les prostituées et femmes légères de Rome viennent célébrer leur protectrice. À cette occasion, Tullia retrouve Sabinus, ancien gladiateur, qui avait été l’amant de Messaline et de la jeune patricienne. À l’incitation de Sabinus, devenu laniste, Tullia, qui reprend à cette occasion le pseudonyme de Danaé, se rend au ludus de Pompéi, où, lors d’une véritable orgie, elle va s’offrir aux gladiateurs, amants particulièrement appréciés par les matrones romaines.

***
Après son escapade à Rome, pour initier Néron, et à Pompéi, pour sa soirée orgiaque avec des gladiateurs, Tullia reste désormais à Baïes, même si son interdiction de séjour à Rome est officiellement levée. C’est là qu’elle se sent bien, qu’elle peut donner libre cours à son hypersexualité et qu’elle s’épanouit, entourée de ses amours, Parsam, Lucia et Epicharis.

Baïes respire pour Tullia le bonheur de vivre sous son chaud soleil, le sel, la mer et les falaises verdoyantes. La haute société romaine possède dans ce lieu privilégié des maisons luxueuses, entourées de jardins remplis de cyprès. Les hauts promontoires dominent une mer transparente et turquoise, ruisselante de soleil, où dominent les villas pavées de porphyre et de mosaïques, décorées de fresques, ornées de statues en marbre, sous de vastes colonnades et des jardins luxurieux. Tout n’est que luxe et volupté, les journées de Tullia s’y écoulent dans les langueurs des siestes amoureuses et les délices de la table, dans les bains et les promenades à l’ombre des portiques favorables aux rencontres.

Tullia, grâce à l’immense fortune héritée de son mari Lurco, est devenue l’évergète des thermes de Mercure et contribuant à la construction des nouveaux thermes, à proximité du temple d'Aphrodite Sosandra. Cette générosité vaut à Tullia de disposer, quand elle se rend aux thermes, de pièces annexes, confortablement meublées, pour y rencontrer ses amants. Tullia va aux thermes pour utiliser les installations thermales, sportives (la palestre) et culturelles (la bibliothèque), profiter des sources thermales, ces eaux chaudes, sulfureuses ou salines, vantées comme les plus curatives et les plus abondantes d'Italie. Mais elle y va aussi pour des rencontres. En clair, elle va à la chasse, elle va aux thermes pour baiser et ne s’en prive pas, dans ces thermes qui sont mixtes et où les baigneurs sont nus. Tullia peut immédiatement constater l’effet qu’elle fait aux hommes. Il suffit alors d’un sourire, d’un échange de regard, pour que, quelquefois sans qu’il soit besoin de parler, un homme la suive. La jolie patricienne se met en position et invite l’homme à la prendre. Il lui arrive aussi bien souvent d’entrainer vers ces lieux réservés plusieurs hommes en même temps, car Tullia, insatiable, aime être en même temps, baisée, sodomisée et pratiquer un coït buccal.

Pour Tullia, les thermes de Baïes sont ce que le lupanar de Suburre était pour Messaline. Quelques notables sont choqués, mais se taisent car ils savent d’une part que Tullia est sous la protection d’Agrippine et d’autre part qu’elle est l’évergète des thermes. La réputation de la veuve de Lurco est vite faite et beaucoup d’hommes viennent aux thermes pour leurs ablutions mais aussi d’autres plaisirs.

Comme ce jour où, en sortant nue et ruisselante de la « natatio », Tullia remarque deux patriciens, d’une quarantaine d’années, qui sont aussi en villégiature à Baïes. Tullia les reconnait, car Fausta lui a parlé d’eux et les lui a montré discrètement, lui confiant qu’ils avaient été ses amants : Publius Barbatus Opilius et Sextus Folius Tuscus. Ils sont assis sur un banc, observant les baigneurs :
• Sextus, tu as vu cette femme qui sort de l’eau. Elle est magnifique !

• C’est Tullia, la fille de Marcus Tullius Longus. Elle est à Baïes depuis la mort de Messaline. Une proche de notre amie Fausta !

• C’est une débauchée, pire encore que la défunte impératrice. Elle vient ici pour trouvez des amants.

• J’ai entendu parler d’elle comme d’une véritable Meretrix !

• Si ce qu’on dit est vrai, c’est le cas. Mais elle a un avantage, c’est qu’elle est gratuite !

• Et surtout il parait qu’elle est exceptionnelle dans la science de l’amour.

Tullia a l’oreille fine et se dirige alors droit vers les deux hommes.

• Opilius, Tuscus, Fausta m’a beaucoup parlé de vous. Je vois que je vous intéresse. Je suis à votre disposition si ça vous fait envie !

Et sans leur laisser beaucoup de temps pour réfléchir, Tullia prend Opilius et Tuscus par la main, les conduisant vers la vaste pièce mise à sa disposition pour ses plaisirs. Les deux hommes vont s’ajouter au tableau de chasse de Tullia.

Fausta n’était pas au départ ravie que l’insatiable Tullia vienne lui « prendre » ses amants. Tullia cependant se rattrape en aidant Fausta à trouver des partenaires, les deux femmes étant de plus complices dans leurs débauches, en particulier au cours des banquets qui se tiennent alternativement chez Tullia et chez Fausta. Fausta préfère cette formule, plus discrète que la méthode de Tullia, qui a transformé les thermes de Baïes en véritable lupanar. Les thermes et les banquets ne sont pas la seule occasion de plaisir de Tullia. Elle aime aussi rechercher les aventures au bord du lac Lucrin ou sur les plages de Baïes.

Lucia, traumatisée par son dernier séjour à Rome, ne suit plus systématiquement Tullia. Quant à Epicharis, elle accompagne souvent Tullia, aux thermes principalement. Elle aime être témoin des plaisirs de son amante, mais se refuse à l’imiter pour le moment, toujours douloureusement marquée par son passage à Suburre.

***
Si Tullia, pendant cette période de la fin du règne de Claude, séjourne à Baïes et ne va jamais à Rome, c’est aussi parce qu’Agrippine lui a fait clairement savoir que sa présence n’y est pas souhaitable. L’Augusta interdit que Néron revoit Tullia, contrairement à ce que celui-ci voudrait tant, après la séance où elle a initié le futur empereur aux plaisirs de l’amour (voir « (25) : Les Aphrodisies»). Néron n’ose pas désobéir à sa terrible mère, mais sa haine contre Agrippine en sort renforcée.

En 53, Néron se voit contraint d’épouser Octavie, la fille de Claude. Tout le monde reconnait la douceur de la jeune Octavie, mais on s’accorde aussi à souligner qu’elle n’a hérité, ni de la beauté, ni de la sensualité de sa mère Messaline. Son mariage avec Néron est politique et, dès le départ, leurs relations sont exécrables et inexistantes. C’est peu après ce mariage que Néron, obsédé par Tullia depuis leur rencontre deux ans auparavant, ulcéré qu’elle ne donne pas suite à ses demandes de rencontres, se manifeste à nouveau. Il charge son confident, Anicetus, de remettre une lettre comminatoire à Tullia:
« Tullia, il s’est écoulé deux ans depuis ce jour merveilleux où tu as fait de moi un homme. Depuis ce moment, tu m’obsèdes et tu me rends fou, car tu ne réponds pas à mes sollicitations.
Je sais que ma mère t’a interdit de me revoir et que tu lui obéis. Or c’est seulement à moi, le futur maître de Rome, que tu dois obéir. Tu es à moi, je t’aime, je te veux et je t’aurai. Je suis d’autant plus furieux que je sais que tu couches avec Agermus, avec Tigellin, avec Anicetus et tant d’autres. Ma mère m’a dit que tu es une putain, pire que ma tante Messaline. Et alors ? Je te laisserai avoir tous les amants que tu souhaites, du moment que je peux te baiser !
Je suis ton maitre et je t’ordonne de t’offrir à moi. Accepte mon amour ou prends garde à ma colère !
Nero Claudius Caesar Augustus Germanicus »
Tullia se contente de dire à Anicetus, qui est effectivement un de ses amants, qu’en effet c’est Agrippine qui lui interdit de revoir son fils mais qu’elle lui fera parvenir sa réponse.

Comme du temps de Messaline, Tullia est dans une situation impossible. Dire oui à Néron, c’est défier Agrippine, pour le moment encore toute puissante. C’est donc jouer sa tête. Dire non à Néron, c’est s’exposer à sa colère quand il aura tous les pouvoirs. Tullia pressent la rupture entre Néron et la « meilleure des mères », mais aussi la véritable nature de Néron. Elle a alors l’idée d’en appeler à Sénèque, lui faisant savoir, par un message que lui porte Parsam, que cette rencontre est importante pour l’avenir de l’empire et que, pour des raisons de discrétion, elle ne peut se dérouler à Rome, où sa présence n’est pas souhaitée.

Pour Sénèque, précepteur de Néron sur lequel il a une grande influence, cette sollicitation rallume une plaie béante. Il avait rencontré Tullia quatre ans auparavant, en 49, lors d’une soirée organisée par Agrippine dans sa villa de Baules et où elle avait en quelque sorte adoubé la jeune patricienne (voir (24) : La reine de Baïes»). Depuis ce soir-là, Sénèque a des sentiments contradictoires envers Tullia. La vie qu’elle mène lui fait horreur. Il est un ami du père de Tullia, Marcus, stoïcien comme lui et qui n’a pas de mots assez durs pour sa fille, « cette putain ». Sénèque n’ignore pas que Tullia a une immense culture philosophique, artistique et historique. Et puis surtout, il sait la fascination physique qu’elle lui inspire. Sénèque a des principes et il prône une vie austère. En même temps, il y a la vie qu’il mène et qui fera de lui une des plus grandes fortunes de Rome. Il recommande la tempérance et la fidélité, mais il a été l’amant d’Agrippine et on dit qu’il pourrait être le père de Néron. Il a aussi été l’amant de Livilla, l’autre nièce de Claude, ce qui lui valut, à l’instigation de Messaline ( !) d’être accusé d’adultère et exilé. Sénèque est, bien avant le personnage de Molière, une sorte de tartuffe qui, bien qu’il se dise « vadre retro, satanas », sait bien que la chair est faible. Donc, depuis cette soirée, Sénèque fuit la tentation et évite soigneusement Baïes, cette cité qu’il avait qualifiée, dans une lettre à son ami Lucilius, de « lieu de plaisance de tous les vices ».

Le message de Tullia ne lui laisse guère le choix, il doit rencontrer celle qui est pour lui le diable. Sénèque, pour ne pas attirer les soupçons des espions d’Agrippine, prend prétexte d’un voyage à destination de l’une de ses villas, située à Stabiae, sur le golfe de Sorrente, à proximité de Pompéi. Il est officiellement invité à diner par Fausta, dont il a bien connu le défunt mari, le glorieux général Caius Hosidius Geta. Fausta a convié Tullia à ce diner, qui, dans un premier temps, porte sur la philosophie de Sénèque et ses œuvres, que Tullia connait parfaitement.

Le repas se poursuit entre les trois convives. Sénèque, habituellement adepte de la tempérance, se laisse servir bien plus que d’habitude l’excellent vin de Falerne qu’a choisi d’offrir Fausta. Bien que coupé avec de l’eau et aromatisé, servi très frais, ce nectar trouble Sénèque autant que la vision de la belle Tullia, dont la robe de soie translucide ne cache guère les atours, en particulier son opulente poitrine et ses jolies jambes. La tentation devient insupportable pour Sénèque, qui bande comme jamais dans sa vie. Au diable ses principes moralistes et ses serments de fidélité envers son épouse Pompeia Paulina, fille du Préfet de l’annone, qu’il a épousée il y a déjà 15 ans. Il est vrai que Sénèque n’en n’est pas à son premier adultère.

Tullia perçoit le trouble de Sénèque et prend alors l’initiative. Sénèque avait écrit beaucoup d’épigrammes pendant son exil en Corse. Tullia va stupéfier Sénèque en lui déclamant une de ses épigrammes, intitulée « le vin et la joie » :
« Puisse-t-elle être tienne, la jeune femme que tu veux pour toi, Et puisse-t-elle être dévorée par le feu du même amour ; Puisse ton cœur n’être ainsi jamais privé de cette douce flamme Et demeurer toujours libre de l’amour qui doit un jour meurtrir.
Triomphe des soucis par le vin pur et si par hasard tu es rongé par le remords, Réprime-le et chasse le trouble de ton esprit.
La nuit, si elle s’empare de lui, alimente le souci : il est dangereux pour lui De se confier à elle, à moins d’avoir été engourdi sous l’action du vin pur. »
Fausta comprend que c’est le moment de laisser le philosophe et la patricienne seuls. Elle se retire discrètement de la pièce où se déroule le diner. Sénèque se lève et se dirige vers Tullia. Comme si le père de la jeune patricienne pouvait être le témoin de l’abandon de ses résolutions, il s’exclame :
• Ignosce, Marcus Tullius, sed tentatio est fortissimum. Eo ad irrumabo filia tua (« Pardonne-moi, Marcus Tullius, mais la tentation est la plus forte. Je vais baiser ta fille »). Volo te, filia mea (« Je te veux, ma fille »)
• Ego tibi, pater mi. Accipe me ! (« Je suis à toi, mon père. Prends-moi !)
Sénèque s’approche de la jeune femme et la prend dans ses bras. Ses lèvres prennent possession de celles de Tullia, qui répond avec fougue à ce baiser. Les mains de l’homme caressent ce corps tant désiré.

Tullia, elle aussi, a envie de Sénèque depuis leur première rencontre. Il lui rappelle ce père qui l’a rejetée et qu’elle adore depuis sa plus tendre enfance. Avec le philosophe, qui a près de trente ans de plus qu’elle, Tullia assume en quelque sorte son complexe d’Electre, qu’elle n’a jamais avoué à personne. Elle est parcourue d’un long frisson, en sentant ces mains la caresser. Sénèque tombe à genoux et rejette le voile de sa robe pour découvrir ses jambes. Il pose ses lèvres sur la chair palpitante, fait descendre ses baisers jusque sur les pieds et les ongles recouverts de carmin. Elle le laisse faire, toute à sa surprise des désirs inavoués du philosophe.

Alors qu’en toute autre circonstance elle aurait pris des initiatives, aurait aidé l’amant à la dépouiller de ses vêtements, l’aurait comblé de ses caresses, elle reste immobile, attentive aux émotions que ces caresses éveillent dans les replis de son corps et de son âme.

Sénèque se redresse et, se penchant sur elle, dénoue sa ceinture puis rejette de côté les pans de sa robe en découvrant son corps. Il porte vers elle ses baisers et ses caresses, l’assaillant avec méthode et lenteur, prenant un évident plaisir à prolonger l’attente, à porter le désir jusqu’à son paroxysme. Dominée par l’insinuante volupté qu’il suscite en elle, elle l’attire contre elle avec autorité, unit sa bouche à la sienne, presse son corps contre le sien. Elle éprouve sa pénétration, soudaine, violente, totale, comme un soulagement à son attente et elle agite les reins en gémissant doucement, se laissant emportée dans le ciel éclatant de l’ultime volupté.

Les amants se sont aimés toute la nuit, Fausta prenant soin de ne pas les déranger et seuls les cris de plaisir de Tullia troublent le silence de la Domus.

Au petit matin, c’est au tour de Sénèque de déclamer pour Tullia une autre de ses épigrammes, si justement intitulée « une nuit de plaisirs ininterrompus » :
« Puisses-tu ainsi, ma lumière, aimer et être toujours aimée en retour, De telle façon que jamais ne cesse l’amour que nous avons l’un pour l’autre.
Au coucher du soleil et de la même façon toujours à son lever, Puisse l’étoile du soir être le témoin de ce spectacle, puisse l’étoile du matin l’être à son tour »Sénèque n’ose pas l’avouer autrement que par un poème, mais il est amoureux. Il aimerait avoir Tullia pour lui seul mais sait bien que l’hypersexualité de celle-ci ne le permet pas. De son côté, Tullia se sent bien avec le philosophe, pas uniquement comme avec un amant, mais parce qu’il est ce père qui lui manque tant et à qui elle n’a jamais avoué ses sentiments les plus secrets. Sénèque promet à Tullia de calmer les ardeurs de Néron et surtout de revenir souvent à Baïes. Lui qui détestait « ce lieu de perdition », va désormais y faire des séjours réguliers.

***
Ce n’était pas son objectif initial, mais Tullia a trouvé en Sénèque un nouveau protecteur, et, ainsi, ne dépend plus uniquement d’Agrippine, dont elle sait qu’elle peut être très dangereuse.

Et pourtant, à l’automne 54, Agrippine est au sommet de sa puissance. Peu avant le décès de Claude, Agrippine a réussi à éliminer Domitia Lepida Minor, sœur d’Ahenobarbus, le premier mari d’Agrippine et mère de Messaline. Agrippine accusa Lepida d’avoir essayé de la tuer avec de la magie et de perturber la paix en Italie en ne contrôlant ses troupes d’esclaves dans ses grandes propriétés en Calabre. Agrippine craignait surtout que Lépida n’utilise, contre l’Augusta, son influence sur son neveu Néron, dont elle était très proche pour l’avoir recueilli et élevé lors de l’exil de sa mère sous le règne de Caligula.

Claude faisait toujours confiance à l’Affranchi Narcisse, qu’il avait fait préteur. À ce titre, Narcisse était chargé de surveiller la construction d'un canal pour drainer le lac Fucin, dans les Abruzzes. Agrippine l'accusa de détourner les fonds du projet, probablement pour se venger de son appui à Britannicus. Narcisse espérait discréditer Agrippine en révélant sa liaison avec un autre affranchi Pallas, ce qui aurait par la même occasion compromis son fils. L’empereur semblait peu à peu se libérer de l’emprise d’Agrippine et se rapprocher de son fils, Britannicus, regrettant d’avoir favorisé son fils adoptif, Néron. Narcisse projetait d’abattre Agrippine, comme il avait abattu Messaline (voir notamment « (20) : mariage fatal pour Messaline »).

Agrippine décide de prendre les devants. Il lui faut d’abord éloigner Narcisse, pour l'empêcher d'être un obstacle à l'assassinat de Claude et l'accession de Néron au pouvoir. En octobre 54, elle encourage Narcisse à se rendre à Baïes pour profiter des bains chauds et soulager sa goutte. Agrippine ajoute malicieusement :
• Et puis, à Baïes, Tiberius Claudius, tu pourras revoir la petite Tullia. Il me semble que tu l’apprécies bien ! Sénèque en dit d’ailleurs le plus grand bien.

Narcisse se laisse convaincre, succombant à la tentation, lui qui n’a pas revu Tullia depuis qu’il lui a, plus de cinq auparavant, en vain proposé d’être sa candidate pour épouser Claude. Narcisse est obsédé par Tullia. Il a appris que la jeune patricienne est la maîtresse de Sénèque, ce qui provoque chez lui jalousie et désir.

Agrippine fait savoir à Tullia, par le canal d’Agermus, qu’elle devra se montrer très « gentille » avec Narcisse et le retenir à Baïes jusqu’aux prochaines instructions d’Agrippine. Une nouvelle fois, à son corps défendant, Tullia sera l’instrument qui va provoquer la chute d’un des puissants affranchis de Claude, comme elle l’avait déjà fait 7 ans auparavant, à la demande de Messaline (« voir (13) : Claude et Polybe », paru le 18 janvier 2022)
Narcisse, qui a toujours donné la priorité à ses ambitions, se laisse aller à dix jours de plaisir avec la voluptueuse Tullia. Cela lui sera fatal.

Le 13 octobre, Claude est empoisonné avec l’aide de la célèbre Locuste et la complicité du médecin Xenophon de Cos (voir « (22) : Carpe Diem ». Avec l’appui de Sénèque et de Burrus, le Préfet du prétoire, ce fut naturellement Néron qui fut proclamé empereur, tant par le sénat que par la puissante garde prétorienne.

En apprenant la mort de Claude et les circonstances de son décès, Tullia ne peut cacher sa profonde tristesse, même si Claude est au final responsable de la mort de Vettius Valens. Elle était enfant quand elle avait rencontré le futur empereur lors de soirées chez son père, où la culture de Claude l’avait fascinée. Plus tard, elle était devenue brièvement sa maîtresse, accomplissant avec lui, comme elle le fera plus tard avec Sénèque, ce complexe d’Electre qu’elle n’a jamais avoué à quiconque.

Aussitôt après l'annonce de la mort de son protecteur, Narcisse décide de retourner à Rome. Il comprend qu’il est tombé dans le même piège que jadis son ami Polybe. Tullia, à qui il le reproche, lui assure qu’elle ignorait les intentions d’Agrippine, mais elle n’est pas mécontente du rôle qu’on lui a fait jouer :
• Et toi, Narcisse, qu’as-tu fait, lors de cette nuit funeste du mariage de Messaline et Silius, pour sauver Vettius Valens, mon amour, le père que ne connaitra jamais ma fille Tertullia ? Et qu’as-tu fait, à ma douce Lucia, il y a trois ans, affreusement torturée dans les caves du palais ? (Voir (25) : Les Aphrodisies»)
Narcisse comprend qu’en se prêtant à ce rôle, Tullia, bien au courant des intrigues de Rome grâce à son amie Fausta, s’est vengé. Narcisse ne répond pas, sachant que ses heures sont comptées. Dès son retour à Rome, Agrippine le fait jeter en prison et commandera son exécution peu après.

Agrippine fera aussi éliminer immédiatement, toujours par empoisonnement, Marcus Junius Silanus, Proconsul d’Asie, frère de Lucius, victime d’Agrippine dès 49 (voir « (24) : La reine de Baïes»), mais aussi de Junia Calvina, exilée également en 49 et Junia Silana, l’ex-épouse de Silius.

Agrippine semble au sommet de son influence, exerçant le pouvoir au nom de son fils. Cela se traduit notamment dans les nominations à des postes clés de trois personnages qui sont des fidèles d’Agrippine, mais aussi des amants de Tullia :
• Tigellin, qui a été un amant d’Agrippine, remplace Annaeus Serenus comme Préfet des vigiles, chargés de la lutte contre les incendies et du maintien de l’ordre à Rome.

• Lucius Faenius Rufus devient quant à lui Préfet de l’annone, chargé de l’approvisionnement de Rome.

• L’affranchi Anicetus, ancien précepteur de Néron, devient Préfet de la flotte basée à Misène, à proximité de Baïes.

Tigellin et Faenius Rufus, de par leurs fonctions à Rome, sont désormais moins présents à Baïes, ce qui est un déchirement pour Tigellin, amoureux de Tullia. Par contre, Anicetus bénéficie d’une localisation qui lui permet de fréquenter assidument les thermes de Baïes ainsi que les banquets de Tullia et de Fausta. Très rapidement, Tigellin et Anicetus se mettent au service exclusif de Néron et oublient ce qu’ils doivent à Agrippine. Mais ce sont surtout Sénèque et Burrus qui travaillent à marginaliser l’Augusta, afin que Néron puisse régner, sous leurs conseils avisés. Pour Agrippine, le capitole est proche de la Roche tarpéienne, selon l’expression des anciens Romains.

C’est dans ce contexte que Tullia va provoquer, en décembre 54, un nouveau scandale de la Bona Dea, qui va dépasser en gravité celui provoqué jadis par l’agitateur Clodius, en -62, lorsqu’il avait été surpris dans la maison du Grand Pontife Jules César, en plein milieu de cette fête, réservée aux femmes, occasion pour ce débauché notoire de rencontrer Pomponia, l’épouse du Grand Pontife. César avait été amené à divorcer de son épouse, affirmant que « la femme de César ne saurait être soupçonnée ».

***
La « Bona Dea » était la déesse protégeant les femmes. Le culte, qui célébrait Damia, la déesse de la fécondité, consistait en une cérémonie nocturne, dans la nuit du 3 au 4 décembre, organisées dans sa demeure par une matrone, qui y invitait d’autres matrones. La cérémonie était strictement réservée aux femmes et la présence d’hommes était proscrite. C’est ce tabou que Tullia et ses invitées vont violer en décembre 54.

Les mystères de la Bona Dea se situent en marge de toutes les pratiques de la religion officielle : ils se déroulent dans une maison privée et non dans un espace public, ils sont nocturnes alors que toutes les autres manifestations cultuelles de déroulent de jour, ils excluent les hommes, seuls détenteurs du pouvoir religieux. Les femmes y pratiquent des activités qui leur sont interdites, le sacrifice d’animaux et la consommation de vin. C’est une nuit exceptionnelle, un véritable monde à l’envers.

A Rome, cela se passe dans la maison d’un magistrat disposant d’un « imperium ». Hors de Rome, une riche patricienne pouvait prendre l’initiative. Tullia ne se retrouve absolument pas dans les valeurs et les rites de la religion et la morale traditionnelles de la société romaine. Elle le prouve par sa totale liberté de mœurs et ce sentiment est chez elle particulièrement fort depuis que les Dieux ont rappelé à eux Vettius Valens, le grand amour de sa vie (voir « (20) : mariage fatal pour Messaline »). Le scandale et le blasphème ne lui font pas peur, malgré les mises en garde de ses proches. Elle a rompu avec cette morale stoïcienne qu’incarne son père Marcus.

Tullia va soigneusement organiser cette soirée. Elle commence par convaincre Fausta de transformer cette fête de la Bona Dea en bacchanale. Fausta est au départ horrifiée par le blasphème, elle dont le défunt mari, Hosidius Geta, était très pieux et avait exercé divers sacerdoces, d’abord en tant que « rex sacrorum » puis comme flamine. Mais Fausta ne sait pas dire non à Tullia et finit par se laisser tenter. Après tout, se dit-elle, ce ne sera pas le premier banquet chez elle ou chez Tullia qui tourne en orgie.

Tullia choisit d’inviter des matrones qui vivent à Baïes ou qui s’y rendent souvent en villégiature et qui sont réputées pour leur libertinage. Trois de ces femmes sont citées dans les épigrammes de Martial, puis dans les satires du poète Juvénal, qui parle de Tullia dans sa satire VI. Ces matrones, rencontrées lors des banquets chez Fausta, ont toutes un point commun : leurs Domus regorgent d’esclaves dont elles font leurs délices. C’est ainsi que Chloé satisfait toutes les requêtes de son petit Lupercus. Il y a aussi Marulla, l’épouse du patricien Cinna. Contrairement aux pratiques des matrones romaines, qu’on pourrait qualifier de « malthusiennes », pour limiter les naissances, Marulla a donné naissance à sept enfants, pour lesquels, s’adressant au mari trompé, Martial dira : « aucun d'eux n'est de toi, ni d'un ami, ni d'un voisin ; tous conçus ou sur des grabats, ou sur des nattes, trahissent par leur physionomie, les infidélités de leur mère. »
Arrêtons-nous un instant sur Galla, l’épouse du sénateur Titus Atius Crassus, à qui elle a donné un fils, Lucius, personnage que nous retrouverons dans l’entourage de Tullia et de Fausta. Galla trompe son mari avec son bel esclave Philéros, pour qui elle dépense toute sa dot. Crassus n’attend qu’une occasion de se venger.

Tullia a récemment retrouvé à Baïes Maura, une patricienne de son âge, amie d’enfance, et qui a eu la même nourrice qu’elle, faisant ainsi d’elle sa sœur de lait. Le père de Maura, Aulus Maurus Rufus, était ce qu’on appelait un « homme nouveau », un plébéien dont la famille faisait partie des « clients », des proches, de la gens Tullia, ce qui explique que Maura et Tullia ont été longtemps élevées ensemble, jusqu’à ce que Maurus Rufus, haut fonctionnaire de l’empire, ne soit affecté à Misène, la grande base de la flotte. Rufus avait réussi à trouver un beau mariage pour sa fille Maura, qui a épousé Appius Sextilius Felix, de la prestigieuse gens plébéienne Sextillia. Felix a entamé une brillante carrière militaire qui le conduira sur les frontières de l’empire, loin de sa jeune épouse, qui, elle, a choisi de vivre à Baïes. Contrairement à Chloé, Marulla et Galla, on ne connait pas d’amants à Maura. Il se dit par contre qu’elle apprécie les jeunes et jolies servantes, ce qui lui a fait une réputation de tribade. Quand Tullia l’invite, Maura accepte avec enthousiasme, ayant eu vent de la bisexualité de sa sœur de lait.

Tullia invite aussi Domitia Lepida Major, tante de Néron, qui, bien qu’ayant dépassée la soixantaine, reste une belle femme et une libertine assumée, propriétaire d’une magnifique Domus à Baïes. Tullia, qui commence à s’émanciper d’Agrippine connait l’inimitié profonde entre Domitia et l’Augusta, laquelle lui avait « volé » son mari Passienus en 41 et était responsable de la mort de sa sœur, elle aussi nommée Lepida, la mère de Messaline. Tullia prend également soin d’inviter deux proches de Messaline, Aceronia Polla et Calvia Crispillina (voir « (24) : La reine de Baïes»). Elle convie également son amie Nymphidia, la fille du puissant affranchi impérial Calliste (voir « (17) : Tullia et Silius. »)
Mise au courant des intentions sacrilèges de Tullia et désormais complice, Fausta va également inviter des matrones à cette fête. Fausta va choisir des femmes connues pour leur beauté et leur libertinage :
• Statilia Messalina, alors âgée de 19 ans. Issue de la haute aristocratie romaine, elle est l’épouse du sénateur Marcus Julius Vestinus Atticus. Elle sera plus tard maitresse et épouse de Néron.

• Junia Silana, ex-épouse du célèbre CaIus Silius, le « second mari » de Messaline (voir chapitres 17 à 20) et qui était célèbre pour sa beauté et la licence de ses mœurs, toujours à la recherche d’amants et de maris. Après avoir été l’amie d’Agrippine, elle en est devenue une ennemie mortelle, Agrippine ayant provoqué la mort de ses frères Lucius, fiancé d’Octavie (la fille de Claude), suicidé en 49 et Marcus, proconsul d’Asie, éliminé dès l’avènement de Néron, sans oublier l’exil de sa sœur Calvina. Silana ayant voulu épouser Titus Sextius Africanus, jeune homme appartenant à la haute aristocratie de Rome, Agrippine réussit le dégoûter de cette « impudica », cette femme débauchée.

• Poppée, qui a le même âge que Tullia et qui sera elle aussi maîtresse et épouse de Néron. Poppée est la fille du questeur Titus Ollius et de Poppée Sabina, une des victimes de Messaline. Elle a épousé en 44, Rufrius Crispinus, ancien chef de la garde prétorienne, disgracié en 51 sous l’influence d’Agrippine. Poppée a hérité de la grâce, de la renommée et de l’exceptionnelle beauté de sa mère. Sa chevelure blonde a des reflets fauves somptueux. Elle est ambitieuse, sans scrupules et a beaucoup d’esprit. Poppée possède une belle propriété à Oplontis, à proximité de Pompéi. Belle et coquette à l’extrême, Poppée à la morgue d’une aristocrate qui estime que tout lui est permis. Elle collectionne les aventures, ne fait aucune distinction entre maris et amants et porte ses caprices là où elle voit son intérêt. D’emblée, elle détestera Tullia, la considérant comme une rivale en beauté, en intelligence et en culture.

Au total, sans compter Epicharis et Lucia, les compagnes de Tullia, une quinzaine de femmes participent à cette cérémonie de la Bona Dea de décembre 54 à Baïes.

Pour le choix des hommes, dont la présence est absolument prohibée, Tullia fait venir ses amants, tous des proches d’Agrippine, Lucius Agermus, Faenius Rufus, Anicetus et Petrone. Tullia en profite aussi pour revoir Marcus Salvius Otho. Othon (voir (25) : Les Aphrodisies»), le compagnon de débauche de Néron, qui a été l’amant de Tullia le jour où elle a déniaisé le fils d’Agrippine. A la demande de Nymphidia, qui partage avec Tullia la passion des gladiateurs, Tullia invite son ami Sabinus et deux de ses hommes du ludus de Pompéi, le rétiaire Crescens et le thrace Celadius.

Marulla se propose de venir avec ses amants, le Maure et cuisinier Santra, le lutteur Pannicus, le boulanger Damas, le bouffon Cyrrha, le joueur de flûteCrotis, le fermier Carpus et même le jeune Lygdus, le mignon de son mari Cinna. Généreuse, Marulla est prête à partager ses amours ancillaires avec ses amies. Elle a seulement demandé à Tullia la présence d’Adherbal, son affranchi africain et de Decimus, qui est son intendant après avoir été le garde du corps de Messaline.

Fausta prévoit, quant à elle, de venir avec son jeune amant du moment, Marcus Valerius Martialis, qui sera plus connu comme poète élégiaque, sous le nom de Martial. Le défunt mari de Fausta, le général Caius Hosidius Geta, commandant de la Legio IX Hispana, qui fut l’un des conquérants de la Bretagne en 43 avec Aulus Plautius, avait été propréteur en Hispanie. C’est dans le cadre de ces fonctions qu’il fit connaissance de la famille de Martial.

Martial est né en 38 dans une famille plutôt aisée de Bilbilis, une petite ville de Tarraconaise, une province du nord de l’Hispanie. Le jeune Marcus est le protégé de Geta et de son épouse Fausta. Ayant revêtu la toge virile, c’est à l’occasion d’un séjour à Baïes chez Fausta que celle-ci fait de Martial un homme. Martial sera acteur et témoin de ce scandale de la Bona Dea et transmettra plus tard ses souvenirs à son ami le poète Juvenal.

Pour parfaire l’organisation de cette soirée, Fausta va conseiller à Tullia de faire appel à Saufeia, célèbre à Rome comme Prêtresse de Bona Dea et qui appartient à une famille plébéienne. Elle était la sœur du sénateur Sauffelius Trogus, ancien amant de Messaline, qui dut se suicider après le complot de Silus (voir « (20) : mariage fatal pour Messaline ») Fausta invita enfin Livia Medullina, fille de Scribonianus, légat de Dalmatie, qui s’était révolté contre Claude en 42.

Tout était en place pour une cérémonie de la Bona Dea organisée pour tourner en orgie. Ce que n’avait pas prévu Fausta était la venue chez elle de sa sœur Paulla. Fausta fut contrainte d’accepter sa présence, ce qui aura de lourdes conséquences.

***
Les mystères de la Bona Dea sont célébrés par les matrones avec leurs servantes, dont Sylvia, sous la supervision de Marcia. Tullia, maîtresse de maison, suit les directives de Saufeia. Les hommes qu’elle a sélectionnés pour la deuxième partie de la soirée attendent avec impatience dans une autre partie de l’immense Domus. Tullia et ses invitées portent dans leurs cheveux des bandelettes de pourpre. Au début tout se passe bien, autour d’un banquet et alors que jouent des musiciennes vêtues de longues robes safranées et tenant une harpe à la main. Des tonnelles de divers feuillages, à l’exception du myrte, décorent la maison. Sous la conduite de Saufeia, prêtresse de la soirée, les participantes sacrifient une truie et offrent une libation de vin. C’est un autre interdit, puisque les femmes ne consomment habituellement pas de vin. Il est donc appelé lait et servi dans une jarre appelé « pot à miel ». Les chants et les danses tiennent une grande place dans cette nuit singulière.

Livrées à elles-mêmes, n’étant plus placées sous le contrôle des hommes, les matrones vont braver tous les interdits sociaux et moraux. S’appuyant sur le témoignage de Martial, Juvenal va décrire ainsi cette soirée dans sa satire VI :
« Quelle réserve attendre de la passion sensuelle, quand le vin s'y ajoute ? Elle est capable, dans ses caresses, d'étranges confusions, celle qui, jusqu'au milieu des nuits, mord dans d'énormes huîtres, tandis qu'écument les parfums versés dans le Falerne pur et que, buvant à un vase en forme de coquille, elle croit voir le plafond tournoyer et le nombre des flambeaux doubler sur la table.

On sait ce qui se passe aux mystères de la bonne déesse, lorsque la flûte aiguillonne les reins et que, sous la double influence de la trompette et du vin, hors d'elles-mêmes, les Ménades de Priape tordent leurs cheveux et poussent des ululements. Quel ardent besoin de l'étreinte se déchaîne alors en elles ! Quels cris dans le bondissement du désir ! Quel torrent de vieux vin le long de leurs jambes toutes trempées ! »
Saufeia donne alors un premier signal, celui des amours saphiques. Les matrones ne sont pas là pour ça, mais pour les hommes qu’elles attendent avec impatience. Quatre seulement vont répondre à cet appel et offrir un spectacle érotique qui fait encore monter la tension. Il y a Saufeia et Medullina, qui chacune expriment leurs envies sur de jeunes servantes de la maison de Tullia. Et surtout les deux sœurs de lait, Maura et Tullia, avec Maura à l’initiative.

Maura n’est venue que pour Tullia et la présence des autres matrones ne la dérange pas, bien au contraire. Depuis qu’elle a revu Tullia, il y a quelques semaines, au bord du lac Lucrin, elle ne cesse de penser à elle. Elle la veut et cette soirée de la Bona Dea est l’occasion rêvée, d’autant que Tullia ne cache pas sa bisexualité et la nature de ses relations avec Lucia et Epicharis. Tullia est totalement désinhibée, ayant abusé du vin de Falerne. Maura, installée à ses côtés, la lève de son triclinium, la prend dans ses bras et fait tomber la robe légère sous laquelle la jeune patricienne est nue. Le baiser qu’échangent les anciennes sœurs de lait est fougueux, interrompu seulement par le besoin de reprendre sa respiration.

Avec Lucia et Epicharis, c’est Tullia qui maîtrise leurs ébats. Dans les bras de Maura, elle retrouve ce qu’elle avait connu quand elle était l’amante de Messaline (voir « (11) : Vénus et Volupia », paru le 24 décembre 2021). Comme avec Messaline, Tullia s’abandonne totalement à Maura, devient sa femme. La tribade se comporte en « fututor ». Ses doigts fouillent la chatte de Tullia, ouverte et trempée. Maura branle le clito de Tullia et la doigte sans ménagement. Maura se couche sur Tullia et les deux chattes se frottent l’une contre l’autre. Les seins tressautent et les lèvres sont les unes contre les autres, et dans ce mouvement, l’envie monte, les autres matrones profitant du spectacle, à part Paulla qui ne cache pas son indignation.

Juvenal écrira : « Va-t-en douter, maintenant, de l’attitude de Tullia et des propos que tient Maura, sa sœur de lait, près de l'autel de la Pudeur. Elles se chevauchent réciproquement et se trémoussent sous les regards de la lune. Saufeia remporte le prix de la hanche pendante. Elle doit elle-même rendre hommage aux oscillations tumultueuses de Medullina. La palme est partagée entre ces deux dames : une virtuosité de ce genre va de pair avec la naissance. Et ici rien n'est feint, ce n'est pas un jeu. Mais la démangeaison voluptueuse n'admet plus de délais ; c'est la femelle dans sa vérité ; un cri retentit et se prolonge sous les voûtes : « C'est maintenant permis, laissez entrer les hommes ! »
C’est Tullia, qui après voir joui sous les assauts de Maura, a donné ce nouveau signal. Maura voudrait bien continuer, mais Tullia, comme les autres matrones, recherche les étreintes des mâles. Elle fait signe à Sylvia de prendre le relais, accroissant le ressentiment de celle-ci, car Tullia ne lui accorde pas ce qu’elle donne à d’autres, ignorant ainsi les sentiments que lui porte l’ancienne confidente de Messaline.

Le reste de la nuit est une longue bacchanale. Certains couples s’isolent, tels Epicharis avec l’ancien gladiateur Sabinus, ou encore Poppée qui, cette nuit-là, devient la maîtresse d’Othon, lequel aura le tort de la présenter plus tard à Néron. Les autres matrones passent de bras en bras. Les gladiateurs, comme les esclaves de Tullia et de Marulla ont beaucoup de succès. Lucia, très assagie, qui n’approuve pas tout cela, va discrètement rejoindre Parsam. Fausta a oublié tous ses scrupules, d’autant que le jeune Martial s’en donne à cœur joie, s’intéressant plus particulièrement à Galla, à qui il déclame cette épigramme de Sénèque, intitulée « Silence d’amour » :
« Tu m’obliges, Galla, à promettre sous serment De ne rien raconter. Toi aussi, jure-moi à ton tour, de ne rien dire à personne ;est-ce un marché trop difficile ? Je peux t’accorder une exception : si tu le veux, Galla, tu peux en parler à ton mari. »
Quant à Paulla, la sœur de Fausta, indignée, elle quitte les lieux, en proférant des menaces. Sylvia, en la raccompagnant comme Tullia le lui a demandé, encourage Paulla à dénoncer cette soirée sacrilège, trahissant pour la première fois Tullia qui lui a pourtant donné asile et protection lors de la chute de Messaline. La transgression a été bien plus loin que ce qui s’était passé, un siècle auparavant, dans la demeure de Jules César. Il y a sacrilège et profanation, un outrage qui met en péril la cité et les Dieux. Les participants encourent des poursuites pour impiété, risquant la mort ou l’exil. Quel sera leur sort ?

***
(A suivre 27 : « les amants de Baïes »

Les avis des lecteurs

@ Didier, je prends en effet comme base de départ à ce chapitre le scandale qui toucha la maison de celui qui était alors "Grand Pontife", Jules César. Mais c'est aussi pour moi l'occasion d'introduire d'autres personnages historiques,que nous aurons l'occasion de retrouver dans les épisodes suivants, sans oublier en effet de parler du début du règne de Néron

Histoire Erotique
Olga,
quel plaisir ce fut de lire ce nouveau chapitre très instructif car complet historiquement et culturellement parlant.
Tu as parfaitement réussi, comme à l'accoutumée à adapter ton récit à la grande histoire.
En effet, tu donnes bien les grands faits marquants de la conquête du pouvoir par Agrippine, l'élimination de Domitia lépida, le complot de Narcisse, l'empoisonnement de Claude, puis la mort de Narcisse.
A ce sujet, je trouve que c'est bien imaginé d'avoir fait de Tullia le prétexte de l'absence de Narcisse lors de l'assassinat de l'empereur.
Au final la belle, de par ses charmes, et complice malgré elle, a participé à faire tomber deux des puissants affranchis de Claude, Polybe puis Narcisse
Concernant Néron, tu nous donne aussi de informations intéressantes sur son mariage avec Octavie, sur son avènement sur le trone, mais aussi sur la mise en place de sa "garde rapprochée" avec tes précisions sur les nouvelles fonctions de Tigellin, Anicetus et Rufus.
En fin je trouve que tu nous fait une très bonne présentation du personnage de Sénèque, de sa philosophie de la vie et donc bien sûr du dilemme qu'il subit face à une Tullia si tentante....
Félicitation une fois de plus pour ce très bon travail de recherche que tu as réalisé aussi bien pour nous fournir cette complète description du culte de la Bona Déa et de son cérémonial, que pour nous présenter tous ces personnages, ayant réellement existés, que tu cites comme invités, comme Poppée future impératrice, le poète Martial, Statilia Messalina, Junia Silana, Domitia Lepida, etc..
Concernant la cérémonie de la Bona Déa, je te confirme que c'est très bien pensé d'avoir fait en introduction cette allusion concernant le scandale lié à cette commémoration, qui à son époque éclaboussa Jules César.
Je voudrais finir mon écrit en te disant combien j'ai apprécié tous ces poèmes si bien adaptés à ton récit et dont toi seul à le secret.
Didier

@ Didier, je me suis inspirée du scandale de la Bona Déa qui s'était produit, lors du siècle précédent, dans la maison de César.
Même sous Néron, dans une période où les mœurs s'étaient relâchés, cela restait un sacrilège. Et donc oui, Tullia a pris, en principe, un risque considérable.

@ cher lecteur anonyme qui n'osait pas ( c'est courageux) signer vos commentaires, si vous n'aimez pas, ne lisez pas! Ca vous évitera de manquer du plus élémentaire respect pour le travail que représente ce récit. Je le fais parce que je suis passionnée d'histoire et d'érotisme et à partir de nombreuses lectures, même si l'imagination est importante également. Des historiens autorisés, que je cite en biographie, ont longuement écrit sur la sexualité et les mœurs à Rome, sur les femmes , dont la liberté de mœurs, du moins dans les milieux aristocratiques, était surprenante. Il a fallu attendre la période récente pour que les femmes retrouvent la même liberté.
Bref, mes écrits tiennent compte de ces travaux, la description des scènes de sexe relevant elle de mon imagination

Histoire Erotique
Pauvre Olga on va finir pas croire qu elle y était a Rome elle ne doit pas être toute jeune et doit s aparenter a une momie égyptienne.Quelle imagination seulement après deux joints et trois verres de whiskies .

Histoire Erotique
La Bona Déa, est un chapitre où se mêlent dilemmes, tiraillements mais aussi plaisirs et jouissances
Se tenant très loin de Rome, et, si possible, des intrigues, Tullia a définitivement atteint son but, son rêve d'être la « Reine de Baïes ».
Notre belle héroïne, de par tout ce que la belle cité de Baïes peut lui apporter, profite donc de chaque instant, de chaque occasion donnée.
Tullia, s'épanouie auprès de ses amours, et se consacre désormais à prendre un maximum de plaisir de la vie, en un mot, à jouir…
Se sentant néanmoins "piégée" entre les désirs sexuels d’un Néron toujours épris d'elle et les interdictions de la « meilleure des mères », notre belle matrone trouve en Sénèque un nouveau protecteur mais aussi un nouvel amant.
En effet, le vieux stoïcien, subissant là un vrai dilemme, fait fi de ses propres principes, et succombe aux chants et aux charmes de Tullia
Assumant son complexe d'Electre, La belle retrouve ainsi à travers ce philosophe âgé cet amour que son père tant aimé, ne peut lui donner, l’ayant reniée.
Dans le même temps, Agrippine poursuit inexorablement son travail de sape vers son objectif final, le pouvoir absolu pour son fils Néron et elle, de surcroît.
N'ayant aucuns scrupules, tout lui étant bon pour se débarrasser de tous les obstacles sur son chemin, et à l'instar de Messaline, la perfide impératrice n'hésite à aucun instant à manipuler Tullia pour accomplir ses funestes desseins.
En effet, se sentant redevable envers l’Augusta, notre belle héroïne, en acceptant de faire demeurer Narcisse quelques temps à Baïes, se rend complice malgré elle dans un premier temps de l'assassinat de l'empereur puis dans un second de la chute de son puissant affranchi.
Cependant l'annonce de la mort de Claude provoque chez notre intrépide matrone un étrange sentiment de tiraillement.
Tullia est effectivement partagée entre une certaine tristesse par la perte de cet empereur qu'elle connaissait et aimait tant depuis si longtemps et une certaine satisfaction car d'une certaine manière la mort de son grand amour Valens est vengée...
En tant que Reine de Baïes, notre belle héroïne, assistée de son amie Fausta, organise alors une grande soirée à l'occasion de la fête réservée exclusivement aux femmes, la Bona Déa.
Dans une quête perpétuelle du plaisir, elles y invitent une quinzaine de femmes réputées pour leur libertinage.
Cette soirée se transformant rapidement en orgie, car en sus d'ébats saphiques et afin d'assouvir les envies, les désirs les plus fous de leurs invitées, les deux complices, insouciantes de possibles conséquences, ont pris le soin de faire venir et participer tous leurs amants du moment, certains esclaves, ainsi que des gladiateurs...
S'étant invitée d'elle-même à la cérémonie, Paulla, la chaste et pieuse soeur de Fausta, outrée par une telle débauche s'en offusque rapidement.
Quittant aussitôt les lieux, Paulla crie au scandale, étant incitée de plus à le faire par une Sylvia de plus en plus haineuse et jalouse.
Tullia ne vient-elle pas là de jouer son devenir?
En effet, quelles vont être les conséquences de cette fête pour notre intrépide matrone?
Ne risque-t-elle pas de subir les foudres du nouvel empereur Néron?
Quelle attitude Agrippine adoptera t'elle envers Tullia, la protection? ou la sanction?
Sénèque pourra t'il aider sa protégée?
Et enfin qui sont les amants de Baïes? titre du prochain chapitre...
Didier



Texte coquin : « Matrone et Domina : Tullia, une patricienne hypersexuelle dans la Rome impériale » (26) : La Bona
Histoire sexe : Une rose rouge
Vous êtes :
Indiquez votre adresse mail si vous souhaitez la communiquer à l'auteur de l'histoire.

Dernières histoires érotiques publiées par Olga T

Histoire des libertines (116) : Marie Duplessis, la dame aux camélias. - Récit érotique publié le 10-12-2024
Collection Textes en commun : « Aude se lâche » (5 : une nuit de noces très spéciale) - Récit érotique publié le 25-11-2024
Récits érotiques de la mythologie (32) : Lady Godiva - Récit érotique publié le 06-11-2024
Collection Textes en commun : « Aude se lâche » (4 : le mariage) - Récit érotique publié le 27-10-2024
Histoire des libertines (115) : Alice Ozy, comédienne et courtisane. - Récit érotique publié le 09-10-2024
Collection Textes en commun : « Aude se lâche » (3 : la mainmise) - Récit érotique publié le 02-10-2024
Érotisme et poésie (15) : « Eros », par Pierre de Ronsard - Récit érotique publié le 09-09-2024
Collection Textes en commun : « Aude se lâche » (2 : la soumise) - Récit érotique publié le 29-08-2024
Histoire des libertines (114) : La Paiva - Récit érotique publié le 17-08-2024
Collection Textes en commun : « Aude se lâche » (1 : la rencontre) - Récit érotique publié le 04-08-2024