Histoire des libertines (33) : Sophie-Dorothée de Hanovre, reine d’Angleterre.
Récit érotique écrit par Olga T [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur femme.
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Histoire érotique Publiée sur HDS le 11-07-2019 dans la catégorie A dormir debout
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Histoire des libertines (33) : Sophie-Dorothée de Hanovre, reine d’Angleterre.
AVERTISSEMENT
J’ai longuement hésité avant de publier ce texte, histoire d’un adultère tragique et qui ne contient aucun passage croustillant, principale motivation des lecteurs et lectrices de HdS. Pour me faire pardonner, je promets de publier très vite un autre texte qui devrait mieux répondre à vos attentes.
Si j’ai finalement décidé de publier, c’est parce que le destin que je vais évoquer confirme, après tant d’autres, le long cheminement de la femme pour acquérir un minimum d’égalité, d’équité sexuelle.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire sur d’autres textes, je ne fais pas la promotion de l’adultère, qui est synonyme de tromperie et qui constitue l’échec d’un couple.
En reconstituant ces tragiques destins, je mesure encore davantage la chance d’avoir un mari candauliste, non seulement complaisant, mais qui incite son épouse à la liberté sexuelle et qui y prend plaisir.
Ce n’est évidemment pas le cas pour Sophie-Dorothée de Brunswick-Lunebourg (1666-1726), princesse de Hanovre et reine d’Angleterre.
Sophie-Dorothée est la fille et héritière de Georges-Guillaume de Brunswick-Lunebourg, une petite principauté du Nord de l’Allemagne.
UN MARIAGE DESASTREUX
Elle épouse en 1682 son cousin le Prince Georges de Hanovre (1660-1727), qui deviendra en 1714, roi d’Angleterre, le premier de la dynastie régnante actuelle. Sophie-Dorothée est donc l’ancêtre des Windsor.
Il s’agissait d’un mariage arrangé pour répondre aux intérêts des deux principautés. La mère de Georges était initialement opposée au mariage car elle méprisait la mère de Sophie-Dorothée qui n'était pas d'ascendance royale, et parce qu'elle s'inquiétait de la légitimité de Sophie-Dorothée.
De cette union naitront deux enfants, le futur Georges II d’Angleterre et Sophie-Dorothée, qui deviendra reine de Prusse.
Sophie-Dorothée s’ennuie ferme à l’austère Cour de Hanovre. Pour distraction, elle n’a que les promenades dans un carrosse tiré par six chevaux blancs. Elle s’adapte donc difficilement à cette atmosphère étouffante.
Les relations dans le couple se détériorèrent très vite.
Georges préférait la compagnie de sa maîtresse, pauvre et belle, Mélusine von der Schulenburg, avec laquelle il eut deux filles en 1692 et 1693 et qu'il fit plus tard duchesse non héréditaire de Munster puis de Kendal.
UNE ENNEMIE : UNE NYMPHOMANE, LA PLATTEN
Sophie-Dorothée a eu très vite une ennemie à la Cour de Hanovre en la personne de Clara-Elisabeth de Platten (1648-1700) ;
La Platten est une belle femme mure et surtout « ardente ». Epouse du maréchal du Palais, elle est la maîtresse du duc Ernest-Auguste, père de Georges. Juliette Benzoni qualifie la Platten de nymphomane, qui jettera son dévolu sur tous les officiers de la garde, jusqu’à certains soldats.
C’est elle qui mit Mélusine dans les bras de Georges pour atteindre Sophie, qu’elle déteste.
UN AMOUR D’ENFANCE : LE BEAU KOENIGSMARK
Depuis l'enfance, Sophie connait Philippe-Christophe de Kœnigsmark (1664-1694). Elle est éprise du beau colonel de dragons. Une fois mariée, elle poursuit une correspondance enflammée avec lui.
Or le voilà à la Cour de Hanovre, Ernest-Auguste cherchant à recruter un colonel pour sa garde.
Comme les autres officiers de la garde, Philippe se laisse aller à avoir une liaison avec la comtesse de Platten.
Juliette Benzoni écrit que, chez la comtesse, le caprice d’un soir devient « passion furieuse. Elle aime le beau colonel avec l’emportement qu’elle met dans le moindre de ses actes et avec un déchainement sensuel digne d’une bacchante bien entrainée ».
Sophie-Dorothée vit très mal cette liaison tapageuse. Elle aime toujours Kœnigsmark.
Jalouse, la comtesse de Platten comprend que sa rivale est Sophie-Dorothée. Elle réussit à éloigner Philippe-Christophe de la cour de Hanovre. Aventurier, il s'engage avec le grade de colonel général sous les ordres d'Auguste de Saxe commandant l'armée impériale, et se couvre de gloire en Hongrie contre les Turcs.
LA VENGEANCE D’UNE FEMME
Koenigsmarck est de retour au château le 11 mars 1688, soir de bal. Il y danse avec Sophie-Dorothée un menuet, vêtu de brocard rose et argent.
Ils se revirent et s’aimèrent : « c’est ma destinée d’être à vous » écrira Sophie-Dorothée et « je suis née pour vous aimer ». Il répond « le papillon qui brûle à la chandelle sera mon sort et je ne puis oublier ma destinée ».
Sophie-Dorothée fit des avances à Philippe Christophe et ne nia que mollement qu’il était devenu son amant. Tous deux ont en tout cas échangé 660 lettres amoureuses, en partie conservées. Celles de Sophie, dit-on, sont "encore brûlantes sur le papier".
Devenu l’amant de Sophie-Dorothée, le comte commet l’erreur de refuser de partager à nouveau la couche de la comtesse de Platten. Il ira même jusqu’à se chercher un remplaçant auprès de la Platen : lors d’une soirée arrosée avec d’autres officiers, il vante les « qualités » de la maîtresse du prince-électeur, décrivant ses charmes et vantant, en connaisseur ses « transports de bacchante »
La comtesse est vexée et sa vengeance sera terrible.
Des scènes violentes ont lieu dans le palais électoral, le prince Georges tente même d'étrangler Sophie-Dorothée. Elle prend la fuite, et demande asile à sa famille, qui la reçoit fort mal, et la renvoie à Hanovre.
L'aventure des amants est de notoriété publique. Ils décident de partir ensemble le 1° juillet 1694. La Platten, qui prépare dans l’ombre son ignoble piège, donne alors le coup de pouce qui bousculera le destin et précipitera Sophie-Dorothée dans le malheur et Koenigsmarck dans la mort.
Le matin précédant le jour du départ, Philippe-Christophe reçoit un billet de Sophie-Dorothée lui donnant rendez-vous le soir même, au palais entre onze heures et minuit. Sans méfiance et sans hésitation, il obéit au tendre appel, traverse les jardins du château vers les appartements de la princesse, par un couloir muni d’une porte à chaque extrémité. L’une a été empruntée par les conspirateurs, l’autre s’ouvrant sur un salon d’apparat, la Salle des Chevaliers.
Pendant ce temps, la comtesse de Platten se rend au chevet du Duc Ernest-Auguste qui dormait et lui explique que le comte de Kœnigsmark commettait chez sa bru le délit d'adultère. Elle lui fait signer un ordre de mort, et donne l'ordre à quatre soldats de la suivre.
Lorsque Koenigsmarck veut emprunter le couloir par lequel il est venu, la porte est fermée; la seule issue est la Salle des Chevaliers où veillent les tueurs embusqués. Sur un signe de la Platten, ils se jettent sur lui. Son dernier cri sera le cri d’un chevalier : « la princesse est innocente, sauvez la princesse ».
LE SCANDALE
Le corps de Philippe-Christophe disparut. Plusieurs versions de son assassinat sont rapportées : assassinat sur ordre de l'électeur de Hanovre, du prince George, meurtre par des courtisans, corps jeté dans la Leine, dans un four ou caché sous le parquet d'un cabinet de toilette...
Sophie-Dorothée attend son bien aimé, impatiente de monter avec lui dans le carrosse qui se dirigera vers Wolfenbuttel, après un départ simulé dans la direction de Dresde. A midi, n’ayant pas donné signe de vie, ses gens le cherchent, effrayés des rumeurs qui, déjà circulent : « on a entendu le bruit d’une courte lutte, on a trouvé du sang dans la galerie du Palais ». Affolée, la jeune princesse répète inlassablement sa plainte « Koenigsmarck »…
Le temps passe. Toutes les cours d’Europe répètent la même question. Quotidiennement, Louis XIV interroge la Palatine. « A-t-on trouvé Koenigsmarck? » Consignée dans son appartement, Sophie-Dorothée apprend la mort de Philippe-Christophe de la bouche du comte Platten : « il aurait été tué en duel par un certain Lippe ».
Cependant l’émotion croissait au Hanovre, l’envoyé de l’Électeur de Saxe, Bonner, exigeant, sur un ton menaçant, que fut rendu à la Saxe, le général de cavalerie saxonne, Comte de Koenigsmarck.
LE PIEGE SE REFERME SUR SOPHIE-DOROTHEE
La Platten ordonne une perquisition au domicile du comte, saisissant une partie de la correspondance entre Philippe-Christophe et Sophie-Dorothée, le reste ayant été emporté par un domestique et confié à Aurore la sœur du malheureux colonel. Ces lettres, déchiffrées par le duc de Hanovre, perdirent la malheureuse Sophie-Dorothée.
Au bout d’un long procès, présidé par le comte de Platten, l’époux cocu de la meurtrière de Philippe, puis une tentative de conciliation demandée par les ducs de Hanovre, père et fils et refusée avec horreur par Sophie-Dorothée, une séparation fut prononcée.
Le verdict rendu le 28 décembre 1694 déclara bien que tous les liens du mariage étaient dissous, mais spécifia que tout nouveau mariage était interdit, mariage qui eût fait sortir du Hanovre l’énorme héritage de Sophie-Dorothée.
L’année suivante, Sophie-Dorothée est consignée au château d’Ahlden pour le restant de ses jours, entourée par quarante soldats, un grand nombre de domestiques et d’espions cachés par la Platen. Toute visite, toute correspondance lui sont défendues. On lui refuse le droit de voir sa mère et ses enfants. L’Électeur de Hanovre lui verse une pension annuelle de 800 thalers, portée à 18 livres au décès du duc de Zell. Cette richesse inutile, dérisoire viendra trop tard. Elle n’est plus qu’une mort vivante, dont le nom est effacé des registres du Hanovre et de tous les actes civils.
Si l’Europe ne parle plus de la prisonnière, elle continue à s’interroger sur la disparition mystérieuse de Koenigsmarck. La belle Aurore, sa sœur, remue ciel et terre pour retrouver sa trace. Partout c’est le mur, au nom des impératifs de la politique.
THE UNCROWNED QUEEN
Sophie-Dorothée est toujours dans sa forteresse entourée de ses pages, de ses femmes et de médecins. Par une faiblesse commune aux violents, Georges-Louis est superstitieux, hanté par la prédiction d’une voyante : « il mourra dans l’année qui suivra la mort de sa femme ». Si le bonheur de la réprouvée lui importe peu, sa santé l’inquiète et il lui enverra des savants à bonnets pointus…
En 1698, Georges-Louis devient électeur de Hanovre et, en 1714, roi d’Angleterre. Les Anglais, qui se sont apitoyés sur le sort de Sophie Dorothée, l’ont appelée "The uncrowned queen", la reine non couronnée.
Sophie-Dorothée meurt en 1726, ne cessant au cours d’une longue agonie de maudire ses bourreaux et d’appeler sur leur tête les rigueurs de la justice divine (elle avait été enfermée pendant 32 ans). Georges-Louis ordonna de l’effacer d’entre les morts comme elle l’avait été d’entre les vivants. Il défendit à la cour de Hanovre de prendre le deuil et la fit enterrer dans le jardin d’Ahlden.
Mais la disparue hantait ses cauchemars. Une de ses maîtresses, la duchesse de Kendal, le persuada qu’il ne connaîtrait pas le repos tant que Sophie-Dorothée ne serait pas dans l’église de Zell, parmi les siens. Dévoré de peur, le roi consentit au transfert qui eut lieu de nuit, sans le moindre service religieux. Ce geste mettra-t-il fin à ses tourments ? Non.
Avant de mourir, Sophie-Dorothée avait écrit une lettre, confiée à des mains sûres. Elle sera remise à son destinataire à l’heure et au jour choisis par le destin, le 11 juin 1727. Georges Ier était parti pour le Hanovre à sa sortie d’Osnabruck : un inconnu arrêta la voiture et lui tendit un message. Sophie-Dorothée donnait rendez-vous au cruel mari devant le Tribunal de Dieu, après sa mort. Le Roi d’Angleterre tomba foudroyé.
PRINCIPALES SOURCES SUR LE WEB
https://www.cgcp.asso.fr/leblog/2016/01/eleonore-desmiers-dolbreuse-et-les-malheurs-de-sa-fille-sophie-dorothee/
https://www.ljallamion.fr/spip.php?article6465
https://histoiresroyales.fr/george-ier-grande-bretagne-emprisonne-sa-femme/
https://www.vice.com/fr/article/qk3b4v/l-analyse-adn-permet-de-resoudre-une-affaire-de-meurtre-et-d-adultere-du-xviie
Je recommande aussi le chapitre que lui consacre Juliette Benzoni dans son ouvrage « Dans le lit des reines » (Editions Perrin, 2011)
J’ai longuement hésité avant de publier ce texte, histoire d’un adultère tragique et qui ne contient aucun passage croustillant, principale motivation des lecteurs et lectrices de HdS. Pour me faire pardonner, je promets de publier très vite un autre texte qui devrait mieux répondre à vos attentes.
Si j’ai finalement décidé de publier, c’est parce que le destin que je vais évoquer confirme, après tant d’autres, le long cheminement de la femme pour acquérir un minimum d’égalité, d’équité sexuelle.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire sur d’autres textes, je ne fais pas la promotion de l’adultère, qui est synonyme de tromperie et qui constitue l’échec d’un couple.
En reconstituant ces tragiques destins, je mesure encore davantage la chance d’avoir un mari candauliste, non seulement complaisant, mais qui incite son épouse à la liberté sexuelle et qui y prend plaisir.
Ce n’est évidemment pas le cas pour Sophie-Dorothée de Brunswick-Lunebourg (1666-1726), princesse de Hanovre et reine d’Angleterre.
Sophie-Dorothée est la fille et héritière de Georges-Guillaume de Brunswick-Lunebourg, une petite principauté du Nord de l’Allemagne.
UN MARIAGE DESASTREUX
Elle épouse en 1682 son cousin le Prince Georges de Hanovre (1660-1727), qui deviendra en 1714, roi d’Angleterre, le premier de la dynastie régnante actuelle. Sophie-Dorothée est donc l’ancêtre des Windsor.
Il s’agissait d’un mariage arrangé pour répondre aux intérêts des deux principautés. La mère de Georges était initialement opposée au mariage car elle méprisait la mère de Sophie-Dorothée qui n'était pas d'ascendance royale, et parce qu'elle s'inquiétait de la légitimité de Sophie-Dorothée.
De cette union naitront deux enfants, le futur Georges II d’Angleterre et Sophie-Dorothée, qui deviendra reine de Prusse.
Sophie-Dorothée s’ennuie ferme à l’austère Cour de Hanovre. Pour distraction, elle n’a que les promenades dans un carrosse tiré par six chevaux blancs. Elle s’adapte donc difficilement à cette atmosphère étouffante.
Les relations dans le couple se détériorèrent très vite.
Georges préférait la compagnie de sa maîtresse, pauvre et belle, Mélusine von der Schulenburg, avec laquelle il eut deux filles en 1692 et 1693 et qu'il fit plus tard duchesse non héréditaire de Munster puis de Kendal.
UNE ENNEMIE : UNE NYMPHOMANE, LA PLATTEN
Sophie-Dorothée a eu très vite une ennemie à la Cour de Hanovre en la personne de Clara-Elisabeth de Platten (1648-1700) ;
La Platten est une belle femme mure et surtout « ardente ». Epouse du maréchal du Palais, elle est la maîtresse du duc Ernest-Auguste, père de Georges. Juliette Benzoni qualifie la Platten de nymphomane, qui jettera son dévolu sur tous les officiers de la garde, jusqu’à certains soldats.
C’est elle qui mit Mélusine dans les bras de Georges pour atteindre Sophie, qu’elle déteste.
UN AMOUR D’ENFANCE : LE BEAU KOENIGSMARK
Depuis l'enfance, Sophie connait Philippe-Christophe de Kœnigsmark (1664-1694). Elle est éprise du beau colonel de dragons. Une fois mariée, elle poursuit une correspondance enflammée avec lui.
Or le voilà à la Cour de Hanovre, Ernest-Auguste cherchant à recruter un colonel pour sa garde.
Comme les autres officiers de la garde, Philippe se laisse aller à avoir une liaison avec la comtesse de Platten.
Juliette Benzoni écrit que, chez la comtesse, le caprice d’un soir devient « passion furieuse. Elle aime le beau colonel avec l’emportement qu’elle met dans le moindre de ses actes et avec un déchainement sensuel digne d’une bacchante bien entrainée ».
Sophie-Dorothée vit très mal cette liaison tapageuse. Elle aime toujours Kœnigsmark.
Jalouse, la comtesse de Platten comprend que sa rivale est Sophie-Dorothée. Elle réussit à éloigner Philippe-Christophe de la cour de Hanovre. Aventurier, il s'engage avec le grade de colonel général sous les ordres d'Auguste de Saxe commandant l'armée impériale, et se couvre de gloire en Hongrie contre les Turcs.
LA VENGEANCE D’UNE FEMME
Koenigsmarck est de retour au château le 11 mars 1688, soir de bal. Il y danse avec Sophie-Dorothée un menuet, vêtu de brocard rose et argent.
Ils se revirent et s’aimèrent : « c’est ma destinée d’être à vous » écrira Sophie-Dorothée et « je suis née pour vous aimer ». Il répond « le papillon qui brûle à la chandelle sera mon sort et je ne puis oublier ma destinée ».
Sophie-Dorothée fit des avances à Philippe Christophe et ne nia que mollement qu’il était devenu son amant. Tous deux ont en tout cas échangé 660 lettres amoureuses, en partie conservées. Celles de Sophie, dit-on, sont "encore brûlantes sur le papier".
Devenu l’amant de Sophie-Dorothée, le comte commet l’erreur de refuser de partager à nouveau la couche de la comtesse de Platten. Il ira même jusqu’à se chercher un remplaçant auprès de la Platen : lors d’une soirée arrosée avec d’autres officiers, il vante les « qualités » de la maîtresse du prince-électeur, décrivant ses charmes et vantant, en connaisseur ses « transports de bacchante »
La comtesse est vexée et sa vengeance sera terrible.
Des scènes violentes ont lieu dans le palais électoral, le prince Georges tente même d'étrangler Sophie-Dorothée. Elle prend la fuite, et demande asile à sa famille, qui la reçoit fort mal, et la renvoie à Hanovre.
L'aventure des amants est de notoriété publique. Ils décident de partir ensemble le 1° juillet 1694. La Platten, qui prépare dans l’ombre son ignoble piège, donne alors le coup de pouce qui bousculera le destin et précipitera Sophie-Dorothée dans le malheur et Koenigsmarck dans la mort.
Le matin précédant le jour du départ, Philippe-Christophe reçoit un billet de Sophie-Dorothée lui donnant rendez-vous le soir même, au palais entre onze heures et minuit. Sans méfiance et sans hésitation, il obéit au tendre appel, traverse les jardins du château vers les appartements de la princesse, par un couloir muni d’une porte à chaque extrémité. L’une a été empruntée par les conspirateurs, l’autre s’ouvrant sur un salon d’apparat, la Salle des Chevaliers.
Pendant ce temps, la comtesse de Platten se rend au chevet du Duc Ernest-Auguste qui dormait et lui explique que le comte de Kœnigsmark commettait chez sa bru le délit d'adultère. Elle lui fait signer un ordre de mort, et donne l'ordre à quatre soldats de la suivre.
Lorsque Koenigsmarck veut emprunter le couloir par lequel il est venu, la porte est fermée; la seule issue est la Salle des Chevaliers où veillent les tueurs embusqués. Sur un signe de la Platten, ils se jettent sur lui. Son dernier cri sera le cri d’un chevalier : « la princesse est innocente, sauvez la princesse ».
LE SCANDALE
Le corps de Philippe-Christophe disparut. Plusieurs versions de son assassinat sont rapportées : assassinat sur ordre de l'électeur de Hanovre, du prince George, meurtre par des courtisans, corps jeté dans la Leine, dans un four ou caché sous le parquet d'un cabinet de toilette...
Sophie-Dorothée attend son bien aimé, impatiente de monter avec lui dans le carrosse qui se dirigera vers Wolfenbuttel, après un départ simulé dans la direction de Dresde. A midi, n’ayant pas donné signe de vie, ses gens le cherchent, effrayés des rumeurs qui, déjà circulent : « on a entendu le bruit d’une courte lutte, on a trouvé du sang dans la galerie du Palais ». Affolée, la jeune princesse répète inlassablement sa plainte « Koenigsmarck »…
Le temps passe. Toutes les cours d’Europe répètent la même question. Quotidiennement, Louis XIV interroge la Palatine. « A-t-on trouvé Koenigsmarck? » Consignée dans son appartement, Sophie-Dorothée apprend la mort de Philippe-Christophe de la bouche du comte Platten : « il aurait été tué en duel par un certain Lippe ».
Cependant l’émotion croissait au Hanovre, l’envoyé de l’Électeur de Saxe, Bonner, exigeant, sur un ton menaçant, que fut rendu à la Saxe, le général de cavalerie saxonne, Comte de Koenigsmarck.
LE PIEGE SE REFERME SUR SOPHIE-DOROTHEE
La Platten ordonne une perquisition au domicile du comte, saisissant une partie de la correspondance entre Philippe-Christophe et Sophie-Dorothée, le reste ayant été emporté par un domestique et confié à Aurore la sœur du malheureux colonel. Ces lettres, déchiffrées par le duc de Hanovre, perdirent la malheureuse Sophie-Dorothée.
Au bout d’un long procès, présidé par le comte de Platten, l’époux cocu de la meurtrière de Philippe, puis une tentative de conciliation demandée par les ducs de Hanovre, père et fils et refusée avec horreur par Sophie-Dorothée, une séparation fut prononcée.
Le verdict rendu le 28 décembre 1694 déclara bien que tous les liens du mariage étaient dissous, mais spécifia que tout nouveau mariage était interdit, mariage qui eût fait sortir du Hanovre l’énorme héritage de Sophie-Dorothée.
L’année suivante, Sophie-Dorothée est consignée au château d’Ahlden pour le restant de ses jours, entourée par quarante soldats, un grand nombre de domestiques et d’espions cachés par la Platen. Toute visite, toute correspondance lui sont défendues. On lui refuse le droit de voir sa mère et ses enfants. L’Électeur de Hanovre lui verse une pension annuelle de 800 thalers, portée à 18 livres au décès du duc de Zell. Cette richesse inutile, dérisoire viendra trop tard. Elle n’est plus qu’une mort vivante, dont le nom est effacé des registres du Hanovre et de tous les actes civils.
Si l’Europe ne parle plus de la prisonnière, elle continue à s’interroger sur la disparition mystérieuse de Koenigsmarck. La belle Aurore, sa sœur, remue ciel et terre pour retrouver sa trace. Partout c’est le mur, au nom des impératifs de la politique.
THE UNCROWNED QUEEN
Sophie-Dorothée est toujours dans sa forteresse entourée de ses pages, de ses femmes et de médecins. Par une faiblesse commune aux violents, Georges-Louis est superstitieux, hanté par la prédiction d’une voyante : « il mourra dans l’année qui suivra la mort de sa femme ». Si le bonheur de la réprouvée lui importe peu, sa santé l’inquiète et il lui enverra des savants à bonnets pointus…
En 1698, Georges-Louis devient électeur de Hanovre et, en 1714, roi d’Angleterre. Les Anglais, qui se sont apitoyés sur le sort de Sophie Dorothée, l’ont appelée "The uncrowned queen", la reine non couronnée.
Sophie-Dorothée meurt en 1726, ne cessant au cours d’une longue agonie de maudire ses bourreaux et d’appeler sur leur tête les rigueurs de la justice divine (elle avait été enfermée pendant 32 ans). Georges-Louis ordonna de l’effacer d’entre les morts comme elle l’avait été d’entre les vivants. Il défendit à la cour de Hanovre de prendre le deuil et la fit enterrer dans le jardin d’Ahlden.
Mais la disparue hantait ses cauchemars. Une de ses maîtresses, la duchesse de Kendal, le persuada qu’il ne connaîtrait pas le repos tant que Sophie-Dorothée ne serait pas dans l’église de Zell, parmi les siens. Dévoré de peur, le roi consentit au transfert qui eut lieu de nuit, sans le moindre service religieux. Ce geste mettra-t-il fin à ses tourments ? Non.
Avant de mourir, Sophie-Dorothée avait écrit une lettre, confiée à des mains sûres. Elle sera remise à son destinataire à l’heure et au jour choisis par le destin, le 11 juin 1727. Georges Ier était parti pour le Hanovre à sa sortie d’Osnabruck : un inconnu arrêta la voiture et lui tendit un message. Sophie-Dorothée donnait rendez-vous au cruel mari devant le Tribunal de Dieu, après sa mort. Le Roi d’Angleterre tomba foudroyé.
PRINCIPALES SOURCES SUR LE WEB
https://www.cgcp.asso.fr/leblog/2016/01/eleonore-desmiers-dolbreuse-et-les-malheurs-de-sa-fille-sophie-dorothee/
https://www.ljallamion.fr/spip.php?article6465
https://histoiresroyales.fr/george-ier-grande-bretagne-emprisonne-sa-femme/
https://www.vice.com/fr/article/qk3b4v/l-analyse-adn-permet-de-resoudre-une-affaire-de-meurtre-et-d-adultere-du-xviie
Je recommande aussi le chapitre que lui consacre Juliette Benzoni dans son ouvrage « Dans le lit des reines » (Editions Perrin, 2011)
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