Le Contrat - Chapitre 7: Le fil

Récit érotique écrit par Pelec [→ Accès à sa fiche auteur]
Auteur homme.
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Le Contrat - Chapitre 7: Le fil
Le message tomba le jeudi, sans salut ni ponctuation superflue :
Collants dès demain. 20 deniers noirs ou chair. Et tu iras t’habiller. Seul.
Je restai quelques secondes à regarder l’écran, le téléphone lourd dans la main. La cage réagit la première, d’un petit tressaillement sec, comme si mon bas-ventre avait compris avant ma tête que la semaine se tendait d’un cran. J’avais appris à lire ces ordres comme des aiguillages : ils ne demandent pas d’avis, ils déplacent la voie.
Le soir, chez elle, le salon avait retrouvé sa netteté glacée. Je me tins debout, mains croisées dans le dos, regard bas, attendant. Madame Stella entra sans un bruit. Tailleur sombre, chemisier fermé haut, la coupe rousse impeccable qui dessinait sa nuque et une frange asymétrique jetée en pointe. Elle s’arrêta à deux pas, m’emprisonna d’un seul regard, puis désigna du menton la commode où dormaient mes ensembles.
— À partir de demain, tu porteras des collants. Tous les jours. En plus du reste.
— Oui, Madame.
— Tu iras acheter jupe, chemisier, robe simple. Lignes droites. Rien de vulgaire. Et tu diras que c’est pour toi. Tu regarderas la personne en face quand tu le diras. Je peux contrôler quand je veux.
La phrase entra dans ma poitrine comme une clé dans une serrure. J’aquiesçai. Ma gorge, sèche depuis des jours, laissa pourtant sortir une question qui n’aurait jamais dû naître.
— Madame… est-ce qu’il serait possible… parfois… de retirer la cage ? Ne serait-ce que—
La gifle coupa net le verbe. Chaleur, lumière blanche dans la tempe, puis ce silence qui suit l’éclair. Elle ne bougea pas d’un millimètre.
— Non.
Un pas de plus, son talon trouva la cage, appuya juste assez pour m’arracher un souffle. Son regard ne cligna pas.
— Tu cesses d’y penser à voix haute.
— Oui, Madame.
— Va.
La boutique sentait le carton neuf et la climatisation trop précise. J’y entrais avec la sensation d’avoir une consigne écrite au feutre sur le front. Portants espacés, coupes sobres, collants en boîtes rigides alignés au mur. Une vendeuse approcha, tailleur crème, chignon net, sourire professionnel.
— Je peux vous aider ?
Je retrouvai la phrase. Elle avait le poids d’une pierre.
— C’est pour moi.
Je la regardai droit. À ma surprise, son sourire se simplifia, sans ironie.
— Bien sûr. Quels types de pièces ? Jupe droite ? Chemisier uni ? Robe tube ? Et pour les collants, vous partez sur du 20 deniers ?
— Vingt deniers. Noirs… et chair. Une jupe noire. Un chemisier. Une robe simple.
— Très bien. Si vous permettez, quelques mesures.
Le mètre ruban courut sur mes hanches d’une caresse froide et neutre. Pendant qu’elle notait mentalement, j’eus la sensation d’un regard posé ailleurs, au fond de la boutique. Une femme s’était arrêtée près d’un portant, la trentaine élégante, tailleur gris perle, chignon lâche, bouche rouge exacte. Elle ne fixait rien, et pourtant sa présence me touchait. Quand la vendeuse m’indiqua les cabines, la femme s’approcha d’un pas mesuré, la voix tenue.
— Excusez-moi… J’ai un faible pour les métamorphoses. Je pourrais… regarder ? De l’entrée. Sans toucher.
Elle m’adressa le regard, pas la vendeuse. Il n’y avait ni moquerie ni pitié : une curiosité franche, presque clinique. La règle de Madame Stella résonna dans ma tête : assumer, ne pas mentir.
— D’accord, dis-je. Vous pouvez regarder. Mais pas de contact.
— Promis, répondit-elle, la bouche frémissante. Je veux juste voir le moment où ça bascule.
La cabine reflétait une lumière honnête. Sous la chemise, j’avais déjà un ensemble : guêpière, porte-jarretelles, culotte haute, bas à couture. J’enfilai le collant chair par-dessus, pour la semaine ; le nylon monta avec un frisson particulier sur ma peau lisse. La vendeuse me tendit une jupe droite taille haute, puis une robe tube anthracite, un chemisier blanc cassé. Je respirai, tirai le rideau d’un demi-pan.
— Ah… fit la femme, sans appuyer, comme on salue une évidence. C’est très beau. Tournez-vous. Lentement.
Je pivotai. La guêpière me forçait à tenir l’axe, le collant gommant les reliefs, la jupe se posant net sur mes hanches. Le tissu chanta contre ma peau. La vendeuse ajusta une ligne d’un geste sûr, puis se retira de deux pas, gardienne discrète. La femme inclina la tête, laissa traîner son regard jusqu’à la courbe bombée de l’entrejambe, ce petit relief absurde sous nylon et soie.
— Évidemment, souffla-t-elle, amusée. Tu es cadenassé.
Le mot eut la douceur d’une lame polie. Mes oreilles chauffèrent. Elle n’en resta pas là ; son sourire s’étira, ouvertement narquois, sans méchanceté brutale mais sans pitié, non plus.
— C’est mignon, cette petite bosse. On dirait un paquet-cadeau qu’on n’ouvrira jamais. Tu tiens droit… très droit. J’imagine que ça serre ? Oui, ça serre. Magnifique et inutile : exactement ce qu’il fallait.
Je baissai les yeux. Sa voix ne criait pas ; elle appuyait là où ça mord. Elle fit mine d’avancer une main, s’arrêta net au bord de l’air.
— Je n’ai pas dit que je toucherais, reprit-elle à mi-voix, presque rieuse. Promesse tenue. De toute façon, on ne caresse pas un cadenas. On le montre.
— L’ensemble vous va très bien, glissa la vendeuse, neutre. On garde. Essayez la robe.
Je rentrai, changeai, ressortis en anthracite sur collant noir ; la femme eut un petit sifflement.
— Ce tube te prend bien. On dirait que ton corps savait déjà. Regarde-toi. Non, plus longtemps. Voilà. Tu vois ? Tu es superbe… et tu n’as pas le droit d’en profiter. C’est délicieux.
Je me sentis rougir jusqu’aux clavicules. Chaque phrase vibrait dans la cage comme un coup de doigt sur métal. Nous enchaînâmes chemisier, variations de jupes, collants 20 deniers noirs. À chaque sortie, la femme ne donnait que quelques syllabes, des diagnostics cruels et justes.
— La chair te fait disparaître… parfait pour obéir.
— Le noir dessine… parfait pour que tu marches droit.
— Tu seras très silencieux, je le vois d’ici.
Aucun geste au-delà du rideau. Juste ce regard, précis comme une main. À la fin, elle redressa son chignon, son sourire s’éteignit net.
— Merci, dit-elle simplement. Tu es très obéissant. On le voit de loin.
Elle salua d’un souffle la vendeuse, puis s’éloigna sans se retourner. Le silence reprit sa place dans la cabine. Je me rhabillai, plus lourd qu’en entrant. À la caisse, le terminal bipa comme s’il encaissait ma honte. Je sortis avec un sac qui tirait le bras et l’impression d’avoir été retourné comme un gant sans qu’aucun doigt ne m’ait touché.
La semaine s’installa autour du nylon. Le lundi, collant chair sous jupe et chemisier : chaque pas faisait murmurer la matière contre ma peau rase. Le mardi, 20 deniers noirs sous la robe tube : la cage imprima ses petites protestations sèches à chaque assise. Le mercredi, pantalon autorisé mais collant obligatoire : ligne de basse sourde sous la journée. Je marchais plus droit, plus petit, plus tenu. Par moments, en croisant mon reflet dans une vitre, j’avais l’illusion d’une couture droite qui montait à l’arrière de mon mollet ; j’en avais le vertige.
Le soir, chez moi, je regardai des pages que je n’aurais jamais ouvertes un mois plus tôt. Orgasmes prostatiques. Sans éjaculation. Des hommes anonymes s’y parlaient de respiration, de pression, d’angles et d’abandon. Des schémas, des mots médicaux, des promesses. Un panier virtuel apparut, se remplit d’un objet lisse et silencieux, se vida. Je restai immobile, téléphone dans la main, honteux d’avoir cherché, honteux d’avoir reculé. Sous la douche, j’essayai une respiration basse, quelques pressions vagues à travers la peau. Rien ne vint, sinon la sensation idiote d’être surveillé par la clé invisible qui dormait au creux de la clavicule de Madame Stella. Je séchai mes collants avec une précaution ridicule, comme si je m’excusais auprès d’eux.
Le vendredi, la berline noire coupa mon trottoir avec la douceur des habitudes. Je montai. Elle ne me regarda pas.
— Inspection, dit-elle en démarrant.
Dans l’ascenseur, le collant chair semblait plus tendu que d’ordinaire, comme si le miroir avait baissé la température. Dans le salon, elle s’assit, jambes croisées, me fit signe d’approcher. Je me postai, mains derrière le dos. Son regard descendit vers mes hanches.
— Jupe. Collant. Montre.
Je levai l’ourlet jusqu’à la mi-cuisse. La ceinture du collant marquait mon ventre d’un trait propre. Elle se pencha très légèrement, rectifia un pli d’un ongle, puis posa l’index au-dessus de la bosse sous nylon. Il n’y eut qu’une pression. Courte. Précise. La douleur remonta en ligne droite.
— Bien, dit-elle.
Je sentis cette fierté honteuse qui n’a pas de place ailleurs que dans la poitrine.
— Demain, tu reprendras deux paires en 40 deniers. Et une jupe marine, droite. Tu diras encore que c’est pour toi.
— Oui, Madame.
Elle allait se détourner, s’arrêta, ajouta de cette voix blanche qui tranche plus que n’importe quel cri :
— Quant à ta question de l’autre jour : non. La réponse reste non. Tu finiras par comprendre que c’est non même quand tu n’oses plus demander.
Les mots tombèrent, lourds, comme des poids qu’on accroche à l’intérieur. Je baissai la tête.
— Oui, Madame.
Ce week-end-là, elle ne me toucha pas. Elle me fit plier et rincer les ensembles du samedi et du dimanche jusqu’à ce que l’eau soit claire, étendre chaque pièce à plat, lisser du plat de la main, recommencer. À genoux, mains croisées dans le dos, collant noir sous la guêpière verte, je tenais des postures pendant que l’eau gouttait dans la salle de bains, comptant des respirations qui me coupaient le bas-ventre. Quand mes cuisses tremblaient, elle se contentait de dire : redresse. Quand mon souffle montait, elle disait : abaisse. Parfois, son talon retrouvait la cage, l’effleurait à peine. Le nylon faisait un bruit d’aile.
Je dormis sur le canapé, sous la couverture mince, le collant encore tiède sur les jambes. Dans la pénombre, je revis la femme de la boutique, sa bouche rouge qui avait dit sans toucher : « Magnifique et inutile. » Je me surpris à me redresser, à respirer plus bas, comme si l’on me regardait encore. La cage donna deux coups sourds contre le nylon, puis se calma. Au plafond, un rectangle pâle s’éteignit lentement. Je fermai les yeux sur cette couture imaginaire qui montait dans la nuit le long de ma jambe, et sur ce mot qui battait comme un cœur sous mes vêtements : appartenir.
Collants dès demain. 20 deniers noirs ou chair. Et tu iras t’habiller. Seul.
Je restai quelques secondes à regarder l’écran, le téléphone lourd dans la main. La cage réagit la première, d’un petit tressaillement sec, comme si mon bas-ventre avait compris avant ma tête que la semaine se tendait d’un cran. J’avais appris à lire ces ordres comme des aiguillages : ils ne demandent pas d’avis, ils déplacent la voie.
Le soir, chez elle, le salon avait retrouvé sa netteté glacée. Je me tins debout, mains croisées dans le dos, regard bas, attendant. Madame Stella entra sans un bruit. Tailleur sombre, chemisier fermé haut, la coupe rousse impeccable qui dessinait sa nuque et une frange asymétrique jetée en pointe. Elle s’arrêta à deux pas, m’emprisonna d’un seul regard, puis désigna du menton la commode où dormaient mes ensembles.
— À partir de demain, tu porteras des collants. Tous les jours. En plus du reste.
— Oui, Madame.
— Tu iras acheter jupe, chemisier, robe simple. Lignes droites. Rien de vulgaire. Et tu diras que c’est pour toi. Tu regarderas la personne en face quand tu le diras. Je peux contrôler quand je veux.
La phrase entra dans ma poitrine comme une clé dans une serrure. J’aquiesçai. Ma gorge, sèche depuis des jours, laissa pourtant sortir une question qui n’aurait jamais dû naître.
— Madame… est-ce qu’il serait possible… parfois… de retirer la cage ? Ne serait-ce que—
La gifle coupa net le verbe. Chaleur, lumière blanche dans la tempe, puis ce silence qui suit l’éclair. Elle ne bougea pas d’un millimètre.
— Non.
Un pas de plus, son talon trouva la cage, appuya juste assez pour m’arracher un souffle. Son regard ne cligna pas.
— Tu cesses d’y penser à voix haute.
— Oui, Madame.
— Va.
La boutique sentait le carton neuf et la climatisation trop précise. J’y entrais avec la sensation d’avoir une consigne écrite au feutre sur le front. Portants espacés, coupes sobres, collants en boîtes rigides alignés au mur. Une vendeuse approcha, tailleur crème, chignon net, sourire professionnel.
— Je peux vous aider ?
Je retrouvai la phrase. Elle avait le poids d’une pierre.
— C’est pour moi.
Je la regardai droit. À ma surprise, son sourire se simplifia, sans ironie.
— Bien sûr. Quels types de pièces ? Jupe droite ? Chemisier uni ? Robe tube ? Et pour les collants, vous partez sur du 20 deniers ?
— Vingt deniers. Noirs… et chair. Une jupe noire. Un chemisier. Une robe simple.
— Très bien. Si vous permettez, quelques mesures.
Le mètre ruban courut sur mes hanches d’une caresse froide et neutre. Pendant qu’elle notait mentalement, j’eus la sensation d’un regard posé ailleurs, au fond de la boutique. Une femme s’était arrêtée près d’un portant, la trentaine élégante, tailleur gris perle, chignon lâche, bouche rouge exacte. Elle ne fixait rien, et pourtant sa présence me touchait. Quand la vendeuse m’indiqua les cabines, la femme s’approcha d’un pas mesuré, la voix tenue.
— Excusez-moi… J’ai un faible pour les métamorphoses. Je pourrais… regarder ? De l’entrée. Sans toucher.
Elle m’adressa le regard, pas la vendeuse. Il n’y avait ni moquerie ni pitié : une curiosité franche, presque clinique. La règle de Madame Stella résonna dans ma tête : assumer, ne pas mentir.
— D’accord, dis-je. Vous pouvez regarder. Mais pas de contact.
— Promis, répondit-elle, la bouche frémissante. Je veux juste voir le moment où ça bascule.
La cabine reflétait une lumière honnête. Sous la chemise, j’avais déjà un ensemble : guêpière, porte-jarretelles, culotte haute, bas à couture. J’enfilai le collant chair par-dessus, pour la semaine ; le nylon monta avec un frisson particulier sur ma peau lisse. La vendeuse me tendit une jupe droite taille haute, puis une robe tube anthracite, un chemisier blanc cassé. Je respirai, tirai le rideau d’un demi-pan.
— Ah… fit la femme, sans appuyer, comme on salue une évidence. C’est très beau. Tournez-vous. Lentement.
Je pivotai. La guêpière me forçait à tenir l’axe, le collant gommant les reliefs, la jupe se posant net sur mes hanches. Le tissu chanta contre ma peau. La vendeuse ajusta une ligne d’un geste sûr, puis se retira de deux pas, gardienne discrète. La femme inclina la tête, laissa traîner son regard jusqu’à la courbe bombée de l’entrejambe, ce petit relief absurde sous nylon et soie.
— Évidemment, souffla-t-elle, amusée. Tu es cadenassé.
Le mot eut la douceur d’une lame polie. Mes oreilles chauffèrent. Elle n’en resta pas là ; son sourire s’étira, ouvertement narquois, sans méchanceté brutale mais sans pitié, non plus.
— C’est mignon, cette petite bosse. On dirait un paquet-cadeau qu’on n’ouvrira jamais. Tu tiens droit… très droit. J’imagine que ça serre ? Oui, ça serre. Magnifique et inutile : exactement ce qu’il fallait.
Je baissai les yeux. Sa voix ne criait pas ; elle appuyait là où ça mord. Elle fit mine d’avancer une main, s’arrêta net au bord de l’air.
— Je n’ai pas dit que je toucherais, reprit-elle à mi-voix, presque rieuse. Promesse tenue. De toute façon, on ne caresse pas un cadenas. On le montre.
— L’ensemble vous va très bien, glissa la vendeuse, neutre. On garde. Essayez la robe.
Je rentrai, changeai, ressortis en anthracite sur collant noir ; la femme eut un petit sifflement.
— Ce tube te prend bien. On dirait que ton corps savait déjà. Regarde-toi. Non, plus longtemps. Voilà. Tu vois ? Tu es superbe… et tu n’as pas le droit d’en profiter. C’est délicieux.
Je me sentis rougir jusqu’aux clavicules. Chaque phrase vibrait dans la cage comme un coup de doigt sur métal. Nous enchaînâmes chemisier, variations de jupes, collants 20 deniers noirs. À chaque sortie, la femme ne donnait que quelques syllabes, des diagnostics cruels et justes.
— La chair te fait disparaître… parfait pour obéir.
— Le noir dessine… parfait pour que tu marches droit.
— Tu seras très silencieux, je le vois d’ici.
Aucun geste au-delà du rideau. Juste ce regard, précis comme une main. À la fin, elle redressa son chignon, son sourire s’éteignit net.
— Merci, dit-elle simplement. Tu es très obéissant. On le voit de loin.
Elle salua d’un souffle la vendeuse, puis s’éloigna sans se retourner. Le silence reprit sa place dans la cabine. Je me rhabillai, plus lourd qu’en entrant. À la caisse, le terminal bipa comme s’il encaissait ma honte. Je sortis avec un sac qui tirait le bras et l’impression d’avoir été retourné comme un gant sans qu’aucun doigt ne m’ait touché.
La semaine s’installa autour du nylon. Le lundi, collant chair sous jupe et chemisier : chaque pas faisait murmurer la matière contre ma peau rase. Le mardi, 20 deniers noirs sous la robe tube : la cage imprima ses petites protestations sèches à chaque assise. Le mercredi, pantalon autorisé mais collant obligatoire : ligne de basse sourde sous la journée. Je marchais plus droit, plus petit, plus tenu. Par moments, en croisant mon reflet dans une vitre, j’avais l’illusion d’une couture droite qui montait à l’arrière de mon mollet ; j’en avais le vertige.
Le soir, chez moi, je regardai des pages que je n’aurais jamais ouvertes un mois plus tôt. Orgasmes prostatiques. Sans éjaculation. Des hommes anonymes s’y parlaient de respiration, de pression, d’angles et d’abandon. Des schémas, des mots médicaux, des promesses. Un panier virtuel apparut, se remplit d’un objet lisse et silencieux, se vida. Je restai immobile, téléphone dans la main, honteux d’avoir cherché, honteux d’avoir reculé. Sous la douche, j’essayai une respiration basse, quelques pressions vagues à travers la peau. Rien ne vint, sinon la sensation idiote d’être surveillé par la clé invisible qui dormait au creux de la clavicule de Madame Stella. Je séchai mes collants avec une précaution ridicule, comme si je m’excusais auprès d’eux.
Le vendredi, la berline noire coupa mon trottoir avec la douceur des habitudes. Je montai. Elle ne me regarda pas.
— Inspection, dit-elle en démarrant.
Dans l’ascenseur, le collant chair semblait plus tendu que d’ordinaire, comme si le miroir avait baissé la température. Dans le salon, elle s’assit, jambes croisées, me fit signe d’approcher. Je me postai, mains derrière le dos. Son regard descendit vers mes hanches.
— Jupe. Collant. Montre.
Je levai l’ourlet jusqu’à la mi-cuisse. La ceinture du collant marquait mon ventre d’un trait propre. Elle se pencha très légèrement, rectifia un pli d’un ongle, puis posa l’index au-dessus de la bosse sous nylon. Il n’y eut qu’une pression. Courte. Précise. La douleur remonta en ligne droite.
— Bien, dit-elle.
Je sentis cette fierté honteuse qui n’a pas de place ailleurs que dans la poitrine.
— Demain, tu reprendras deux paires en 40 deniers. Et une jupe marine, droite. Tu diras encore que c’est pour toi.
— Oui, Madame.
Elle allait se détourner, s’arrêta, ajouta de cette voix blanche qui tranche plus que n’importe quel cri :
— Quant à ta question de l’autre jour : non. La réponse reste non. Tu finiras par comprendre que c’est non même quand tu n’oses plus demander.
Les mots tombèrent, lourds, comme des poids qu’on accroche à l’intérieur. Je baissai la tête.
— Oui, Madame.
Ce week-end-là, elle ne me toucha pas. Elle me fit plier et rincer les ensembles du samedi et du dimanche jusqu’à ce que l’eau soit claire, étendre chaque pièce à plat, lisser du plat de la main, recommencer. À genoux, mains croisées dans le dos, collant noir sous la guêpière verte, je tenais des postures pendant que l’eau gouttait dans la salle de bains, comptant des respirations qui me coupaient le bas-ventre. Quand mes cuisses tremblaient, elle se contentait de dire : redresse. Quand mon souffle montait, elle disait : abaisse. Parfois, son talon retrouvait la cage, l’effleurait à peine. Le nylon faisait un bruit d’aile.
Je dormis sur le canapé, sous la couverture mince, le collant encore tiède sur les jambes. Dans la pénombre, je revis la femme de la boutique, sa bouche rouge qui avait dit sans toucher : « Magnifique et inutile. » Je me surpris à me redresser, à respirer plus bas, comme si l’on me regardait encore. La cage donna deux coups sourds contre le nylon, puis se calma. Au plafond, un rectangle pâle s’éteignit lentement. Je fermai les yeux sur cette couture imaginaire qui montait dans la nuit le long de ma jambe, et sur ce mot qui battait comme un cœur sous mes vêtements : appartenir.
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1 avis des lecteurs et lectrices après lecture : Les auteurs apprécient les commentaires de leurs lecteurs
Les avis des lecteurs
Oui oui
Je dois dire que je ne comprends pas
C'est quoi ces collants 20 deniers, puis 40 deniers ?
Et puis cette idée de porter des collants au dessus des bas et jarretelles ?
Enfin le titre sur le fil ?
Ceci étant j'attends la suite du rôle de cette voyeuse
Alors à bientôt
Je dois dire que je ne comprends pas
C'est quoi ces collants 20 deniers, puis 40 deniers ?
Et puis cette idée de porter des collants au dessus des bas et jarretelles ?
Enfin le titre sur le fil ?
Ceci étant j'attends la suite du rôle de cette voyeuse
Alors à bientôt

